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Albert Hilaire : « Nous sommes inondés de formulaires à remplir »

Salon cité 39. La fonction de maire a évolué. Entre l’administratif et les textes de loi, pas facile de s’y retrouver. Entretien course-contre-la-montre avec Albert Hilaire, maire de Censeau
Nelly Markovic - 20 mai 2011 à 00:00 - Temps de lecture :
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« On essaie de réunir trois villages pour payer notre carte communale moins chère. Avec l’agence locale de la DDT (ex DDE) de Champagnole, tout se passe bien. C’est quand les projets remontent au niveau départemental que ça coince », vitupère Albert Hilaire (au centre)  / Photo Nelly Markovic
« On essaie de réunir trois villages pour payer notre carte communale moins chère. Avec l’agence locale de la DDT (ex DDE) de Champagnole, tout se passe bien. C’est quand les projets remontent au niveau départemental que ça coince », vitupère Albert Hilaire (au centre) / Photo Nelly Markovic

Être maire d’une petite commune de 320 habitants, c’est du sport ! Et ce n’est pas Albert Hilaire, le maire de Censeau, qui dira le contraire.

Levé tôt, il enchaîne réunion sur réunion et s’assure de bien répondre aux exigences de ses administrés. Ainsi, à la première heure, il s’inquiète auprès de son agent communal de savoir si l’eau produite par sa régie municipale est conforme. Il passe ensuite à la maison du temps libre et au théâtre vérifier qu’au lendemain des locations de salle il n’y ait pas de casse et que tout se soit bien passé. « Puis je fais un tour du village, je passe signer des délibérations à la mairie, j’en profite pour effectuer les démarches nécessaires pour la prochaine formation des communes forestières de Moirans… », détaille le maire déjà préoccupé de savoir s’il arrivera à l’heure à Champagnole pour sa réunion avec les agents de la DDT (ex-DDE, appelée aujourd’hui direction départementale du territoire, ndlr). Il n’est pas encore 11 heures du matin, alors l’élu en profite pour se rendre au centre des impôts se procurer un timbre fiscal obligatoire pour les communes accueillant des étrangers. Il arrive avec un peu de retard à la DDT de Champagnole. Le maire va s’associer à deux autres villages pour payer moins chère sa carte communale (dont le coût est estimé entre 7 000 et 15 000 euros) et voir si les demandes d’urbanisme en cours s’insèrent dans cette future carte communale. Et c’est bien là que le bât blesse. Car fort d’un 3 e mandat de maire en poche et d’une casquette de vice-président de l’association des maires du Jura, Albert Hilaire s’insurge qu’on impose désormais aux élus l’extension future de leur village alors que jusqu’à présent, sans cette carte, tout se passait très bien. Il dénonce aussi la lourdeur administrative que subissent les maires des petites communes : « Aujourd’hui, tout le monde est atteint de réunionite ! Nous sommes inondés de circulaires, de nouveaux textes de lois et de formulaires à remplir. Pour un maire jeune qui a un emploi à côté, s’il veut remplir correctement ses impératifs, ça se fera au détriment de sa vie de famille ! ».

Et dans sa ligne de mire se trouve justement la DDT. Pour l’élu du canton de Nozeroy, il existe une grosse contradiction entre ce que souhaitent les élus, à savoir permettre à la population de s’installer sur la commune, et les directives imposées par le Grenelle de l’environnement : « Quand on présente un projet et que l’administration se réfugie derrière le Grenelle de l’environnement pour les refuser, je trouve ça fort de café ! Ce n’est pas le texte de loi qui m’embête, c’est l’application qu’on en fait. Aujourd’hui, si jamais une personne souhaite construire à la sortie du village pour gagner du temps pour aller au travail, la DDT ne voudra pas. Or les gens pensent que c’est le maire qui s’y oppose. » Et de rajouter sans aucun détour : « Si la DDT nous met des bâtons dans les roues, on se retirera de la commission ». Il aime rappeler que 42,8 % des communes du Jura sont classées rurales et ne comprend pas comment se battre pour conserver ses services de proximité si l’administration ne les laisse pas construire. Il se demande comment les maires pourraient attirer des jeunes couples et permettre de maintenir le nombre de classe sans obtenir de permis de construire. « J’ai fait un lotissement urbanisé. Nous vendons le mètre carré à un prix très abordable pour permettre aux jeunes de devenir propriétaires. C’est notre 3 e lotissement et on en fera un 4 e. Mais la difficulté pour nous élus, c’est de faire comprendre nos objectifs et nos contraintes aux services administratifs. Ça nous désole ! ».

Côté responsabilité, un maire n’est en aucun cas épargné en cas de litige. « Aujourd’hui, on va de plus en plus vers une société à l’américaine. Les gens n’ont plus de devoir mais que des droits. Ils se retournent systématiquement contre la mairie. Certaines affaires ne devraient jamais être instruites. Sans oublier que lorsque le maire passe au tribunal, il n’y a aucune clémence à son encontre. Au contraire ! »

Le maire de Censeau finira tardivement sa journée par une réunion de bureau à l’intercommunalité…

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