Les calamités
naturelles, comme les tornades, inondations et même tremblements
de terre sont courantes en Berry, ajoutons les calamités
moins naturelles que sont les épidémies, comme
la peste, les guerres, et les incendies, et nous aurons une bonne
idée de la vie de nos ancêtres berrichons. Pourtant
c'est la rubrique des incendies qui est souvent la plus importante
dans les chroniques berruyères.
Les incendies de grande ampleur à Bourges, il en a été
relevés près d'une cinquantaine dans le livre de
Roger Richer, "Bourges au fil des ans", entre le VI°
siècle et 1986, date du dernier incendie, celui de la
toiture du Palais du Duc Jean.
LES PREMIERS INCENDIES
CONNUS
Commençons avec l'année 588
: c'est le premier vrai incendie qui est rapporté d'une
manière cohérente par le célèbre
chroniqueur, Grégoire de Tours. Cet incendie ravage la
plus grande partie de la cité d'Avaricum, c'était
juste après la construction du premier Hôtel Dieu
en haut de ce qui sera la rue Bourbonnoux.
Quelques années plus tard, un second incendie se déroule,
il détruit la plus grande partie de la Ville, c'était
semble-il vers 612.
Pendant plusieurs siècles, il n'est pas fait mention d'incendies,
cela ne signifie pas qu'il n'y en ait pas eu, mais ils n'ont
pas laissé de grands souvenirs. Il faut atteindre le XIII°
pour que la série reprenne.
On a néanmoins retrouvé (Branner)
des traces d'incendie dans la cathédrale romane sans doute
entre 1190 et 1195. C'est ce qui aurait poussé les responsables
à construire une nouvelle cathédrale, celle que
l'on connaît aujourd'hui.
Ainsi, en 1252 un 23 juin, un important incendie se déclare
au centre de la Ville, entre la porte Gordaine, située
à l'Est, et la Cathédrale, laquelle n'était
pas terminée. Dans l'Histoire du Berry, de la Thaumassière,
il est écrit qu'il ne restait de la Ville de Bourges qu'une
seule maison ainsi que le chantier de la Cathédrale.
Un siècle plus tard, dans le
même quartier, alors que le Prince de Galles assiège
la ville de Bourges, l'Eglise Saint Jean des Champs fut en grande
partie détruite, ainsi que les maisons qui étaient
autour. Le vent soufflant de manière violente, l'incendie
gagna tout le centre de Bourges, la Cathédrale, essentiellement
formée de pierre, et qui étaient terminée
depuis peu échappa au sinistre, c'était en 1353.
La même année que la mise
en place de l'Université par Louis XI, c'était
le 8 mai, un vendredi, un incendie prit naissance dans le quartier
Saint Bonnet, il gagna de proche en proche une partie de la Ville.
Il s'arrêta au logis du Roi, lequel était situé
dans le Palais du duc Jean.
LE GRAND INCENDIE
DE BOURGES : 1487
C'était très exactement le
22 JUILLET 1487 que se déclara, LE grand incendie de Bourges,
celui dit de la Madeleine, ce fut une catastrophe pour la Ville
et la région. Pour beaucoup, Bourges ne s'est jamais remise
de ce fléau, ce fut le début de son déclin.
Les documents sur le sujet sont rares. Retenons, pour la description,
un texte de 1566 de Jean Chaumeau. Le feu a pris dans la maison
d'un pauvre menuisier de la rue Saint Sulpice, au lieu dit "des
trois pommes". Les habitants du quartier se précipitèrent,
mais le vent était alors très fort et les maisons,
aux alentours faites de bois s'enflammèrent en quelques
instants. On raconte qu'un berruyer qui était allé
aider un voisin, alors que des flammèches voletaient de
partout, retrouva sa propre maison en feu à son retour
!
Les chiffres sur l'ampleur des dégâts sont discutés
par les historiens. Monsieur Jongleux en 1933 affirme que cet
incendie brûla 3000 maisons, la cité abritant alors
100 000 personnes. C'est sans doute exagéré. La
dernière grande étude sérieuse "La
vieille Ville en flamme" donne des valeurs différentes.
une estimation de 1000 à 2000 "habitations"
est vraisemblable.
Le feu se développa sur tout l'est de la
Ville, et ce sont des quartiers populaires et très peuplés
qui furent touchés. Parti du quartier Saint Sulpice, tous
les quartiers comme Saint Ambroix, Saint Pierre, Saint Bonnet
et Saint Jean des champs sont la proie des flammes. Les rues
Mirebeaux et le début de Bourbonnoux sont en cendre. On
compte qu'un tiers de la Ville est totalement détruit.
Les flammes vont venir "lécher" les murs de
la cathédrale, mais elle ne flambera pas.
" Toutes bruslées,
qui fut chose grandement calamiteuse et ne peust la foire de
my-Aoust prochaine ensuyant y estre tenue, pour la désolation
et la perte du lieu".
L'incendie de Bourges en 1487, dessin
de Bernard CAPO
Dans cette catastrophe, la Ville et
les échevins vont perdre leurs archives, car la Mairie
située au Prieuré de la Comtale va brûler.
C'est ainsi qu'il faudra reconstruire un bâtiment : ce
sera l'Hôtel des Echevins. D'autres monuments vont suivre,
comme l'Hôtel Lallemand, ainsi que la plupart des maisons
situées rue Mirebeau ou rue Bourbonnoux. Une façon
commode de les dater.
A la suite de l'Incendie de la Madeleine, la municipalité
décide, en novembre 1502, de faire l'acquisition de trois
douzaines d'échelles, ça pouvait servir.... et
ça servira !
LES FEUX A REPETITION
Le XVI° siècle restera celui
des incendies de Bourges, avec une douzaine de grands sinistres.
En 1508, l'Eglise Saint Bonnet est détruite, un architecte,
Laboureau la fera reconstruire peu de temps après. Trente
ans plus tard, c'est le quartier d'Auron qui est touché
avec l'incendie du Moulin dit de Messire Jacques. Le jeudi 28
juin 1540, c'est un feu de joie qui est allumé pour la
fête du quartier d'Auron, et comme les mesures de sécurité
ne sont pas prises, le feu se propage à tout un pâté
de maisons qui furent anéanties.
Ensuite, les années se suivent et
se ressemblent, c'est presque chaque année qu'un incendie
se déclare. Ainsi en 1545, à la fin du mois de
juin, un gigantesque incendie se se propage place Gordaine. 25
maisons, parmi les plus belles de la cité sont détruites,
il avait commencé à la nuit, vers dix heures du
soir, il ne sera réellement stoppé que le lendemain
matin à huit heures, et encore, il va couver une dizaine
de jours dans les caves nombreuses de ce quartier. C'est Jean
Glumeau qui nous rapporte ces faits. Presque un an jour pour
jour, le 12 juin, le Moulin de Voiselle est à son tour
anéanti par un incendie.
A la Pentecôte de 1552, c'est rue Bourbonnoux que se déclare
un grand incendie, dans le grenier à foin de l'auberge
du Heaume d'Or. Le feu se développa, et bientôt,
pour la première fois dans l'histoire, la Cathédrale
de Bourges sera atteinte. Une partie des chapelles fut détruite,
le portail Nord endommagé ainsi que les orgues, lesquelles
fondirent. Les flammes étaient si hautes qu'elles passaient
par dessus la Cathédrale pour s'en aller lécher
le Palais de l'Archevêque. Bientôt, hâtée
par le vent, le feu se propagea à une partie de cet édifice,
et la salle dite de Saint Guillaume fut détruite.
La Cathédrale de Bourges va encore
une fois souffrir des flammes en 1559.
Le 18 mai, à proximité de l'édifice, à
l'angle de la rue des 3 maillets et de Bourbonnoux, le feu se
déclara ; Bientôt, les flammes entourèrent
la Cathédrale de tous côtés, les toitures
des chapelles furent détruites, ainsi que les orgues,
une fois encore, et même la façade fut touchée,
avec la destruction du lanternon du pignon. Ce sera un des grands
incendies de la Ville, il s'appellera l'incendie des Grandes
Ecoles, il avait commencé dans un immeuble jouxtant les
locaux de l'Université.
Cette même année tragique, une ordonnance municipale
fixe les tâches attribuées aux sapeurs pompiers.
Les incendies vont s'atténuer à
la fin de ce siècle, on note en octobre 1575, un sinistre
place Gordaine, où cinq maisons brûlèrent,
elles appartenaient à des bouchers. Et le siècle
se termine le 29 juillet 1599, par un grand incendie du côté
du faubourg de Bourbonnoux. Le feu prend dans plusieurs boutiques
à partir de celle dite "du Jeu de Montcours".
Ainsi, les boutiques au nom prestigieux, comme "l'hostellerie
du boeuf couronné", ou celles de la rue des rats,
plus communes, sont détruites.
Le XVII° siècle, sur le plan
des incendies est plus calme, on note essentiellement le 24 septembre
1668, un gros incendie à l'auberge "de la Madeleine",
située alors place des Marronniers. L'immeuble fut détruit,
ainsi que l'auberge du "plat d'argent". On appeler
cet incendie, celui de la Petite Madeleine, en opposition à
celui de 1487. A la fin de ce siècle, en 1693,
le vendredi 31 juillet, un incendie se déclara dans le
quartier de la rue Fernault, chez un boulanger. Le feu se propagea
vers d'autres boutiques, mais surtout il atteint le Palais du
Duc Jean de Berry. La Sainte Chapelle, et une partie du Palais
seront léchés par les flammes, dont la salle des
Cerfs. La conséquence directe, ce sera le déplacement
des foires de Noël du Palais du Duc Jean, au Palais Jacques
Coeur.
Voici sur ce sujet une excellente contribution
de M. Eric PIGEAT
- Bonjour,
- Je m'intéresse
à la généalogie et je dépouille pour
le plaisir les registres de Lapan. Il se trouve que j'ai trouvé
entre deux actes un petit texte qui relate la genèse de
la famine de 1694 et qu'il y est question de l'incendie de 1693
à Bourges.
- C'est sur votre excellent
site que j'ai trouvé la trace de cet incendie avec des
infos confirmant les écrits du curé de Lapan.
- Comme je ne suis pas adepte
de prendre des infos sans donner rien en échange, je vous
offre la transcription du texte en question (nous nous sommes
mis à plusieurs, je ne suis pas assez bon paléographe
pour cela)
-
- "Les pluyes sont
cessées du 2 juillet qui ont tellement corrompues les
eaux
des puits qu'elles en ont rendues malades la moytié du
monde car on ne
beuvoit point de vin encor. Le vin de cette année-là
étoit si petit que
jamais on ne l'a put boire plus médiocre ny plus cher.
Le vieux vaslloit
deux cent livres le tonneau et le commun 8 vingt livres (160)au
moins.Heureux ceux qui ne vécurent pas de ce tems là,
car dans cette
paroisse comme dans les autres je ne pouvois trouver 20 personnes
en
santé.Pour le comble des autres malheures,
le bled s'enchérit beaucoup, la moudure vaslloit 23 sols.Le
quart de la
ville de Bourges avec cette superbe église la Sainte-Chapelle
et le Palais
qui n'avait point d'égal en France, brûla le trentième
juillet à 9 heures du
matin. La moitié des bleds se sont perdues à cause
que pour de l'argent on
ne pouvait trouver d'ouvriers. Le faucheur gainuoit 45 sols par
jour,le
moissonneur 20."
On note aussi un incendie le 2 mars 1699
à côté du clocher de plomb.
Quelques incendies au XVIII° siècle,
dont celui de 1730, qui ravagea entièrement le quartier
d'Auron. Pour conjurer ce sinistre, les moines apportèrent
sur place, les reliques de Saint Fulgent. Le feu n'en tint pas
compte et passa au dessus de ces reliques pour continuer son
oeuvre destructrice.
C'est en 1732 que la municipalité de Bourges fait l'acquisition
de deux pompes à incendie pour remplacer les grosses seringues
en étain qui dataient de 1693. Ces pompes seront stationnées
à la Mairie de Bourges, et il était indiqué
que tous les deux mois, en présence du Maire lui-même,
une vérification et des essais de ces pompes seraient
réalisés.
La période révolutionnaire n'a pas engendré
d'importants incendies, à moins que les chroniqueurs aient
eu d'autres soucis....Il faut attendre le début du XIX°
siècle, le 8 septembre 1810 pour retrouver les traces
de feu et de fumée. Une trentaine de maisons sont détruites
dans le quartier Bourbonnoux, quelques années plus tard,
en 1818, dans les premiers jours de juillet, un gros incendie
se déclare Place des 4 piliers en plein centre de la Ville.
On passa très proche d'une grande catastrophe, car il
n'y avait plus d'eau pour lutter contre les flammes.
LES GRANDS INCENDIES
DU XIX ième SIECLE
Les incendies du XIX° siècle sont assez nombreux,
en 1824, c'est le collège Sainte Marie qui est partiellement
la proie des flammes, alors qu'en juillet 1833, c'est près
de l'abbaye Saint Sulpice que le feu prend, il est circonscrit
par des soldats polonais réfugiés en ce lieu.
Dans la nuit du 12 au 13 mars 1856, un grand incendie frappe
plus que les autres, la population berruyère : il s'agit
de la destruction par le feu du Théâtre Municipal,
situé rue Jacques Coeur il jouxtait le Palais du Grand
Argentier. Cet édifice sera reconstruit quelques années
plus tard en laissant un espace.... On devint prudent..
Autre incendie, assez catastrophique par
le patrimoine qui s'en envolé en fumée ce jour-là,
c'est le 13 avril que sont détruites une partie importante
des Archives Départementales du Cher. On connait avec
précision la cause du début de sinistre : un tuyau
de poële circulait derrière les rayonnages, et la
température augmentant, le feu fut mis aux liasses d'archives
qui ne demandaient qu'à se consumer. La valeur de ce qui
a été détruit est inestimable, certains
ont avancé le chiffre de 14 000 francs or.
Dans la série des grands incendies
des monuments de Bourges, celui de 1871 doit être mentionné
de manière toute particulière. Dans la nuit du
24 au 25 juillet , le feu prend dans le Palais Archiépiscopal
de Bourges, juste en face de la Cathédrale. Ce Palais,
qui est actuellement l'Hôtel de Ville, voit partir en fumée
sa toiture, et aussi des archives importantes, celles du diocèse.
Parmi les incendies du XIX° siècle, signalons encore
celui de la pointerie, située sur le canal du Berry, là
où se situe aujourd'hui le Palais des Congrès,
c'était en 1885.
Quelques années plus tard, un 31
juillet de 1897, c'est le Petit Séminaire de Bourges
qui est touché par un incendie, et les journaux locaux
racontent que l'alerte a été donnée par
un jeune Abbé, Théophile Moreux, il y était
professeur de mathématiques, il deviendra par la suite,
une gloire locale.
En 1898, à la fin du mois de janvier, un incendie du "Moulin
Saint Paul" situé sur l'Auron se déclara,
c'est au cours de la lutte contre le sinistre que le sapeur Gilbert
Bailly trouva la mort, pour honorer sa mémoire, la rue
dans laquelle il habitait porta son nom à partir de ce
moment.
LES INCENDIES DU
XX ° SIECLE
Le XX° siècle ne commença pas de belle manière
dans le domaine des incendies. Au mois d'octobre, c'est dans
une scierie que se produisit un gigantesque incendie, c'était
dans le quartier du Marché couvert. Plus de 20 familles
ont été sinistrées ce jour-là. Juste
avant guerre, la rue Mirebeau subit un incendie qui détruit
plusieurs maisons. La presse locale signale en cette occasion
la faiblesse des moyens dont dispose la Municipalité pour
lutter contre le feu.
INCENDIE DE SAINT
FULGENT
C'est madame Marie Jeanne
Parcy qui s'est souvenu de cet incendie dont il est rarement
question dans les grands incendies de l'époque.
C'était en 1923,
il y avait dans ce quartier d'Auron un asile de vieillards avec
environ 200 malades et employés.Sur une aile, il y avait
un dispensaire anti-tuberculeux de la ville. Ce sont des religieuses
qui assuraient l'encadrement.
Vers 16 heures, l'incendie
s'est déclaré, ce sont les malades qui ont crié
"au feu"... Et tout le monde a été évacué,
il n'y a pas eu de victime, le bâtiment qui avait un étage
a été entièrement détruit, seul le
dispensaire a été sauvé.
C'est après les
3 grands incendies des années 1920, Saint Fulgent, Saint
Sulpice et Les Nouvelles Galeries, que le servcie des pompiers
a été réorganisé. "Avant nous
dit madame Parcy, l'alerte était était donnée
par un pompier qui partait à vélo sonner du cor
dans tous les quartiers de la ville pour alerter ses collègues".
LES NOUVELLES GALERIES
FLAMBENT
Dans l'entre-deux guerres, peu d'incendies
sont à signaler. Un petit en 1924, détruit le Moulin
Saint Sulpice, sur la rivière de l'Yèvre. Mais
un des incendies les plus importants de Bourges, et dont les
Berruyers se souviennent encore, c'est celui des Nouvelles Galeries,
en 1928. C'est le premier dont tous les faits et détails
nous sont parfaitement connus.
Ce soir là, le vendredi 14 septembre 1928 à 20
heures et 20 minutes un terrible incendie va éclater.
Tout commence dans une rue Moyenne à l'heure où
celle ci commence à s'endormir, des passants aperçoivent
"un mince filet de fumée s'échapper
du second étage des Nouvelles Galeries le feu s'était
déclaré". Ces magasins, en plein centre
ville sont les plus modernes de la cité. Aussitôt
l'alerte est donnée. En contournant le magasin, le feu
apparaît avec beaucoup plus d'ampleur, il semble avoir
pris au-dessus de l'atelier d'emballage.
Les veilleurs de nuits n'étaient toujours pas intervenus,
lorsque Monsieur Chollet, le gérant des Nouvelles Galeries
arriva en automobile avec son fils et pénétra dans
son magasin. Le feu embrasait déjà le second étage
tout entier, où se trouvaient l'ameublement et les bureaux.
Un agent cycliste, Jarry, arriva lui aussi, il chercha les veilleurs
de nuit, l'un s'était enfui, l'autre gisait dans le magasin,
Jarry le sauvera.
Bientôt, une voix s'éleva du second étage,
c'était M. Chollet, il était prisonnier des flammes.
Il réclamait une corde ou une échelle pour se sauver.
Comme l'écrit la Dépêche du Berry en relatant
ces événements :
"... A ce moment là, des pompiers étaient
arrivés. Aidés des habitants et des ouvriers du
chantier Aubrun, sous les ordres de M. Henri Laudier, maire de
Bourges, on plaça une échelle sur la verrière
d'angle. Des hommes montèrent, qui mirent des planches
sur la verrière, puis se faisant comme l'on dit vulgairement
la courte échelle, parvinrent à atteindre le gérant
qui, s'accrochant aux corniches, essayait d'échapper au
feu. M. Chollet était sauvé".
En quelques minutes, le brasier va s'amplifier.
Les pompiers mettront beaucoup de temps à installer leur
matériel, les bouches d'incendie étaient mal réparties,
la pression de l'eau très faible, et l'affolement était
indescriptible. Ce n'était pas un incendie ordinaire,
mais "un véritable fléau". A 21 heures,
l'ensemble de l'immeuble était en flamme, et la panique
prenait tout le quartier Coursarlon.
Les grandes glaces du premier étage ont déjà
éclatées en mille éclats, et soudain c'est
la toiture qui s'effondre. "Le dôme avec sa forme
de campanile s'effondre ; on ne peut plus approcher du brasier
à moins de 20 mètres. A cet instant, les fils électriques
du tramway se brisent et ce sont des court-circuits tout au long
de la rue Moyenne. Les flammèches et autres escarbilles
sont projetées dans tout le quartier. C'est au tour du
Palais Jacques Coeur de recevoir des fumées et débris,
les mesures de protection sont immédiatement prises pour
le sauver. Vers 22 H 30, grâce à une seconde lance,
le danger est écarté de ce côté là.
Mais un second incendie en face se propage alors que les charpentes
métalliques sont tordues et fondues.
"Les étincelles jaillies tout à l'heure des
fils électriques ont communiqué le feu aux immeubles
d'en face. On a vu s'enflammer les stores des magasins Dressoir.
Que va-t-il advenir du quartier tout entier, 20 foyers sont abrités
dans cet immeuble."
Le vent actionne lui aussi l'incendie,
vers 23 heures, les autorités paniquent, elles craignent
que l'incendie ne s'étende à toute la rue Moyenne.
En effet, comme l'évoqua Paul André
Aubrun en 2016, lorsque les pompiers de Bourges sont arrivés,
ils ont ouvert les rideaux de fer, et cela a fait un appel d'air,
et embrasé l'intérieur du magasin avec beaucoup
de vigueur.
Il faut aussi ajouter que les lances d'incendie
des pompiers de Bourges ne pouvaient pas atteindre les flamme
au-delà du premier étage, d'autant plus que la
pompe mobile qui était place des 4 Piliers a, à
son tour, pris feu dans la panique.
Mais l'effort des pompiers venus de tout
le département, placés sous le commandement unique
du Capitaine Hémery commence à porter ses fruits,
et ce sont les pompes de la Société Française
de Vierzon, très puissantes qui vont entrer en marche.
Mais le feu est si puissant que le bâtiment
finit par s'effondrer.
"On voyait les lueurs de l'incendie
depuis Mehun sur Yèvre.
Vers 2 heures du matin, l'incendie était
enfin maîtrisé.
Cet incendie fut sans aucun doute le plus important à
Bourges dans cette période de l'entre-deux guerres. Autant
par le côté spectaculaire, il y aura une foule immense
que le commissaire de police M. Dagonet aura du mal à
canaliser, ces curieux, berruyers d'abord viendront ensuite des
environs, car les flammes se voyaient à plusieurs kilomètres
à la ronde.
La presse relate aussi la participation à l'organisations
des secours du Maire Henri Laudier qui venait de rentrer chez
lui au début de l'incendie, et fut un des premiers sur
les lieux "où il se dépensa sans compter".
Dans les jours qui suivirent, la foule
vint rue Moyenne, comme pour un pèlerinage, "les
curieux contemplent de loin le lieu de dévastation tandis
que de hardis travailleurs jettent bas les pans de murs qui menaçaient
ruine". tel fut le titre d'un journal local. Comme toujours
après une catastrophe, on s'interroge sur les causes du
sinistre, puis sur la mauvaise organisation des secours, même
si la presse reconnaît le courages des pompiers, ceux de
Bourges, de la Pyrotechnie, du 95° d'Infanterie ou encore
de Vierzon-Ville.
Dans cette période contemporaine, signalons simplement
en 1932, sur la place Séraucourt, le 22 juillet, sinistre
anniversaire, le feu du chapiteau "Le Carrousel-Salon",
qui était présent pour les foires Jacques Coeur.
Après guerre, le 10 mai 1960, c'est un dépôt
de matériel qui est détruit, route de la Charité,
en particulier en raison de la valeur des matériels qui
étaient entreposés.
Au mois de janvier 1965, un incendie assez limité va toucher
deux travées du fond de la nef.
Plus proche de nous, un soir de janvier
1986, la cathédrale de Bourges reçut la visite
"en urgence des pompiers". Le feu commençait
à prendre à l'intérieur, tout près
du portail central. En quelques instants, les lances vinrent
à bout de ce début de sinistre et il n'y eu que
quelques dégâts, dont tout de même l'horloge
astronomique.
L'enquête démontra que des gosses du quartier avaient
trouvé un nouveau jeu : faire exploser des "pétards"
à l'intérieur de l'édifice, le bruit étant
très fort.... c'était amusant. Mais lorsqu'un pétard
lancé un peu loin s'en alla dans la réserve des
cierges, ce fut l'embrassement. L'alerte fut donnée, de
la fumée commençant à s'échapper,
mais grâce à l'intervention du bedeau puis des pompiers
la cathédrale fut sauvée.
DERNIER GRAND INCENDIE
: LE PALAIS DU DUC JEAN
Le dernier grand incendie de Bourges date
de 1986, c'était un dimanche légèrement
pluvieux du mois d'avril. Le Printemps de Bourges fermait ses
portes, avec Higelin dans le stadium devant 10 000 personnes.
Mais les festivaliers regardaient avec curiosité la fumée
noire qui se dégageait du Palais de Duc Jean de Berry.
Ce Palais servait à la fois de Préfecture et de
lieu de réunion pour le Conseil Général
du Cher.
Il est certain que l'incendie devait "couver" depuis
pas mal de temps. Bientôt des témoins signalent
que de la fumée s'échappe de l'édifice.
Les pompiers arrivent sur les lieux avec deux grosses lances
et des engins élévateurs, mais les flammes commencent
à apparaître. Il est trop tard, toute la toiture
va partir en fumée, avec la destruction totale de la salle
de réunion du Conseil Général, laquelle
venait d'être refaite récemment. Sur le plan du
patrimoine et de l'architecture, c'est aussi très grave,
la cheminée aux ours datant du XV° siècle est
endommagée.
Les pompiers vont réussir à circonscrire le sinistre
après plusieurs heures de lutte. Ils combattent le feu
aussi bien de l'intérieur que de l'extérieur. La
toiture est noyée sous des tonnes d'eau et ce sont à
la fois la charpente et les ardoises de la toiture qui tombent
sur le sol.
La cause de l'incendie, malgré certaines "bonnes
âmes" mettant cela sur le compte des marginaux du
Printemps de Bourges, sera rapidement établie : un court-circuit
dans la salle de réunion, et dans cette ancienne bâtisse,
le feu s'est propagé.
Un dernier mot sur le tout dernier sinistre
par le feu dans Bourges, c'est la toiture cette fois de la Grande
Salle de l'Abbaye Saint Ambroix, laquelle devait être rénovée
pour construire un Hôtel. Les circonstances de cet incendie
ont beaucoup fait parler. Officiellement, le feu a été
mis par des "squatters" qui logeaient là durant
le Printemps de Bourges de cette année 1989. Dans la Ville,
il s'est murmuré que la destruction de cette toiture et
de la charpente, classée par les Monuments Historiques,
est beaucoup plus mystérieuse.....
L'incendie
du Grand Argentier