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Général Diego Brosset

« La 1re DFL ? Elle est comme ma fille, une fille susceptible, bien douée, capricieuse, difficile et, quand elle veut, charmante. (…) Elle a des excuses à ne pas être comme tout le monde. Elle s’est formée en courant le monde… C’est une grande unité qui a de la chance. Elle est un peu flirt et les succès l’ont grisée ; elle flirte avec la mort, un peu trop. » Voici de quoi résumer la personnalité de Diego Brosset, général de la France Libre à la personnalité digne d’un roman : fantasque et complexe, chef de guerre mais aussi philosophe à ses heures et romancier, autant méditatif que plein d’allant et très cultivé. Cette personnalité reste aujourd’hui quelque peu occultée de nos jours par Leclerc.

Général Diego-Charles Brosset commandant de la 1re DFL

Général Diego-Charles Brosset commandant de la 1re DFL

– Diego Charles Brosset voit le jour le 3 octobre 1898 à Buenos Aires mais revient en France en 1900. D’abord élève chez les Jésuites, il en gardera un mauvais souvenir. Ce grand sportif suit alors l’exemple de son frère aîné et s’engage dans l’Armée à dix-huit ans en 1916. Soldat au 28e Bataillon de Chasseurs Alpins, Diego Brosset connaît son premier combat à la Malmaison en octobre 1917 et y fait preuve d’une belle attitude au combat. Promu Caporal en février 1918, il fait encore preuve de courage dans la Somme, puis dans le Soissonnais. Nommé Sergent à seulement vingt-ans, il est aussi distingué par une citation à l’Ordre de son Bataillon, avant d’intégrer l’Ecole des Aspirants d’Issoudun juste avant l’armistice. C’est à ce grade obtenu en avril 1919 que Brosset participe au défilé de la Victoire du 14 juillet.

– Décidant de rester dans l’Active, il signe un nouvel engagement de deux ans et intègre l’Ecole d’Infanterie de Saint-Maixent, démarche qui permet aux sous-officiers d’accéder au grade d’officier. Très travailleur et toujours très sportif, il devient champion de France militaire du 800 et du 1 500 mètres et accomplit un séjour à l’école de gymnastique et d’escrime de Joinville. Sous-Lieutenant en 1922, il part pour le Soudan Français (le Mali) et le Sud-Algérien comme chef de peloton de méharistes. Il mène alors une vie partagée entre les longues patrouilles, la méditation et la lecture, notamment Henri Bergson, Jacques Maritain et Henry de Monfreid. Il s’imprègne aussi de la vie et de la culture des habitants du désert, aprend différents dialectes – dont l’azer –  ainsi que l’arabe. En 1925, Brosset se trouve en Mauritanie où il reste jusqu’en 1930. De ses expériences, il en tire plusieurs carnets mais aussi son récit « Sahara. Un homme sans l’Occident » que les éditions Plon refuseront de publier pour cause d’usage trop lourd de la langue berbère. L’ouvrage sera néanmoins édité aux éditions du Moghreb en 1935.

– De retrour en France avec le grade de Capitaine, Diego Brosset intègre la section « Etudes » du Ministère de la Guerre et épouse la fille du Général Charles Mangin, Jacqueline. Son beau-frère Stanislas, proche des milieux de la droite nationaliste, se distinguera dans la Résistance.  Entre vie de famille et vie de bureau, Brosset fréquente l’Ecole des Langues Orientales dont il sort diplomé et rédige plusieurs articles pour « Le Bulletin du Comité de l’Afrique française » et pour « L’Illustration ». En même temps, il prépare le concours de l’Ecole de Guerre pour être reçu à la seizième place sur quatre-vingt-une en 1937. Mais il déchante assez vite, considérant que « le milieu de l’Ecole de Guerre est un milieu sans âme » et n’y trouve aucun épanouissement intellectuel. Il est toutefois breveté d’Etat-major en 1939.

– Promu alors Chef de Bataillon, Brosset est d’abord affecté au Ministère des Colonies en raison de ses connaissances sur l’Afrique. Envoyé ensuite au sein de la Mission Militaire française en Colombie, il est à Bogota lorsqu’il apprend la défaite de la France. Il quitte alors son poste et rejoint France Libre en Grande-Bretagne, après un périple de six mois. Il rencontre Charles de Gaulle à Londres le 14 janvier 1941. Le chef proclamé de la France Libre accepte les services du Chef de Bataillon Brosset, d’autant plus que Brosset est l’un des rares officiers brevetés dont il peut disposer et qui plus est, un officier parlant couramment anglais et arabe. Le premier poste occupé par Brosset à Londres, est celui de membre du 2e Bureau avec le grade de Lieutenant-Colonel. Il suit ensuite de Gaulle en Afrique de l’Est au Soudan, en Ethiopie et au Caire. Là, il participe à relancer divers contacts avec la Côte des Somalis restée jusque-là fidèle au Gouvernement de Vichy. Brosset en profite aussi pour découvrir divers endroits décrits par Henry de Monfreid.

– Le 7 juin 1941, Brosset se trouve avec de Gaulle et Paul Legentilhomme au Caire et participe à la préparation de la campagne des FFL en Syrie. Il accompagne ensuite de Gaulle à Jérusalem avant d’être nommé chef d’état-major du Général Catroux, poste auquel il reste cantonné pendant plus d’un an, avec une bonne dose d’ennui et de lassitude. Brosset, ancien jeune poilu gradé pour bravoure au feu et ancien méhariste, veut combattre en première ligne. Sans se démonter, en novembre 1943, Brosset écrit à son supérieur Catroux alors en déplacement pour lui demander une affectation de combat « même sans grade ». En attendant, il disserte sur Baudelaire et Rimbaud afin de préparer une conférence à Alep. Le 23 décembre 1942, il remplace le Colonel Alessandri à la tête de la 2nde Brigade de la 1re Division Française Libre alors commandé par le Général Edgar de Larminat. En dépit d’une estime réciproque, les rapports entre les deux hommes resteront tendus jusqu’en 1943. Pour l’heure, Brosset a sous ses ordres une brigade épuisée par les combats épisodiques de Libye et d’Egypte et mal dotée (une partie du ravitaillement, des équipements et des munitions partant à la 1re Brigade de Koenig qui s’est illustrée à Bir Hakeim). Cependant, Brosset prend à cœur la reformation de son unité au camp de Gambut-Bardia. Il se lève tôt et passe toute sa journée auprès de ses hommes. Mais il s’impatiente, car au même moment des unités de l’Armée d’Afrique – restée fidèle au Gouvernement de Vichy jusqu’en novembre – et la 2e DB se distingent en Tunisie contre l’Afrikakorps de Rommel. Néanmoins, en avril 1943 reçoit l’ordre de quitter ses bases en Libye et fonce en Tunisie après une course de 2 400 km. En mai, la 1re BFL qui compte 3 Bataillons de Marche se distingue dans les combats de Takrouna contre les Germano-Italiens.

– En juin 1943, Diego Brosset quitte temporairement son commandement qu’il laisse au Colonel Pierre Garbay, pour accompagner de Gaulle à Alger pour plusieurs entretiens avec Giraud. Bien que respectant Giraud, Brosset penche toujours pour de Gaulle, tout en étant témoin du difficile amalgame entre anciens de l’Armée d’Afrique et FFL, considérés encore comme des déserteurs et des aventuriers par les premiers. Pour l’heure, Brosset aprend que son supérieur Pierre Koenig a obtenu l’autorisation de transformer la DFL en unité pleinement opérationnelle. Après une mission à Alexandrie auprès des Britanniques, Brosset est nommé commandant de la 1re Division de la France Libre avec le grade de Général en remplacement d’Edgar de Larminat. Mais très vite, les problèmes apparaissent avec l’Armée d’Afrique – dépendante des Américains – pour la founiture d’armes et d’équipements.
Brosset commande alors aux premiers combattants de la France Libre. Il a pour subordonnés, les premiers officiers ralliés à de Gaulle, qui ont connu les combats d’Afrique de l’Est, de Libye et d’Egypte, qui n’ont pas de grande estime pour leurs collègues de l’Armée d’Afrique et qui vont veiller jalousement sur le « sénacle » FFL qu’est la DFL, comme le dit Jean-Christophe Notin. Leurs noms : Pierre Garbay, Henry Magny (Bataillon du Pacifique), Gabriel Brunet de Seraigné (successeur de Dimitri Amilakvari à la tête de la 13e DBLE), Edmond Magendie, Lequesne, Prunet-Foch (le neveu du Maréchal), Xavier Langlois, Raymond Delange, Hubert Amyot d’Inville, Roger Gardet, Jean-Claude Laurent-Champrosay et Bernard Saint-Hillier. Ce dernier devient alors son chef d’Etat-Major. Toujours selon Notin, les deux hommes s’apprécient très vite et vont se compléter. A Brosset le commandement de l’avant et l’action, à Saint-Hillier la rédaction et l’envoi des ordres et la coordination. Saint-Hillier raconte au sujet des premires jours de commandement de Brosset :  « Il se constitue un état-major, réarme la division et l’entraîne au combat dans les exercices en vraie grandeur qui durent une semaine. Il impose une discipline rigoureuse. Il mène sa vie comme sa voiture, à cent à l’heure. Il dort peu ; à 4 heures, il est debout, sortant de son camion PC sans faire de bruit pour ne pas réveiller son aide de camp. Un peu plus tard, il fera sa culture physique, galopera à cheval. Il parle, ordonne, écrit, enseigne. Il accorde tout juste vingt minutes de tranquillité à son état-major pour faire une sieste, qu’il pratique n’importe où – à l’occasion allongé en slip sur la pierre tombale d’un cimetière malodorant bouleversé par les obus. Pour son anniversaire [il a 45 ans], il saute à pieds joints sur une table devant son état-major rassemblé pour cette démonstration. »

– Le DFL/DMI est rassemblée au camp de Nabeul pour entraînement poussé, en attendant d’être incorporée au Corps Expéditionnaire Français du Général Alphonse Juin qui doit débarquer en Italie. Brosset note dans ses carnets qu’il vient de passer une année immobile, « passée dans les camps avec huit jours de combats […] pendant six mois de désert ».
La 1re DFL – dénommée aussi 1re Division Motorisée d’Infanterie (DMI) – comprend 3 Brigades à trois bataillons chacun, sur le modèle britannique ; 1re du Colonel Delange (13e DBLE scindée en 1er et 2nd Bataillons LE et 22e Bataillon de Marche Nord-Africain), 2nde du Colonel Garbay (BM 4,5 et 11) et 4e du Colonel Raynal (BM 21 et 24, Bataillon de Marche d’Infanterie de Marine et du Pacifique). Elle compte aussi le 1er Régiment de Fusiliers Marins (Amyot d’Inville) qui sert d’unité de reconnaissance blindée, le 1er Régiment d’Artillerie (J-C. Laurent-Champrosay), le 21e Groupe Antillais de DCA, le 1er Bataillon du Génie et la 4e Compagnie Antichar.

– Le 11 avril 1944, la 1re DFL embarque pour Naples avant de rejoindre le dispositif allié. Juin, qui a eu l’idée de percer les défenses de la Gustav Linie par les Monti Auruncci sur la flanc ouest de la ligne de front, a décidé d’engager la Division de Brosset en exploitatation dans le secteur du Monte Girofano. Le 12 mai, un premier assaut butte au pied du Girofano sur une bonne défense allemande, avec des pertes. Juin annonce alors à Brosset son attention de relancer l’attaque le lendemain. Brosset argue que ses soldats sont fatigués mais Juin lui rétorque que « les Allemands le sont plus encore ». Brosset s’exécute, fonçant follement en jeep de PC à PC pour donner ses ordres. Il dit lui-même :  « Je grimpe sur les chars en marche, j’engueule Pierre et Paul, je dis merde aux obus et ça avance. Je ne serai jamais un vrai général, mais ma division est une vraie division. » Et à Saint Hillier d’ajouter : « On le voit partout, en première ligne, toujours avec les unités de tête qu’il lance dans la bagarre, toujours en liaison par radio avec son chef d’état-major, modifiant les emplacements et les ordres en fonction du terrain, redressant les situations. Il sait communiquer son enthousiasme à ses troupes, qui connaissent ses réparties tantôt brutales, tantôt pleines de fantaisie… » C’est aussi en Italie apprend que sa femme et sa belle-famille sont à l’abri en Suisse grâce Pierre de Bénouville.

– Finalement, les Tirailleurs Marocains de la 2e Division Marocaine de Montagne du Général Dody enfoncent les positions du Girofano. Le 1er RFM d’Amyot d’Inville et le 22e Bataillon de Marche Nord-Africain s’engouffre dans les vallons à la poursuite des Allemands, suivis par le reste de la Division. Diego Brosset va même donner l’accolade au Colonel Galbert, commandant du 3e Régiment de Spahis Marocains (unité de l’ancienne armée d’Afrique) La 1re DFL/DMI arrive plus tard sur la Vallée du Liri défendue par la Dora Linie. Les combats sont encore durs. Brosset perd le commandant du Bataillon d’Infanterie de Marine (BIM) ; Henry Magny. Mais finalement, la ligne Dora tombe, permettant aux Français de foncer sur la Ligne Hitler et de s’emparer du village de Pontecorvo par un assaut du Bataillon de Marche 11, puis du village de San Giovanni. Ils n’y entreront que le 5 juin, au lendemain de la libération de la ville, meme si Brosset y envoie plusieurs détachement dès la veille. Des accrochages ont néanmoins lieu à la Villa Hadriana. Les Français prennent alors possession de Villas Borghèse (sur laquelle un drapeau est accroché par un soldat du Bataillon du Pacifique), Farnèse et Médicis, ainsi que de l’église Saint-Louis des Français.

– Le 10 juin, Brosset et sa Division passent sous les ordres d’un Corps de poursuite pour conquérir la Toscane, commandé par Edgar de Larminat qui comprend aussi la 3e Division d’Infanterie Algérienne de Monsabert, dont Brosset se moque assez souvent.  Les combats reprennent durement à 120 km au nord de Rome, autour du Lac Bolsena face à une défense allemande très bien établie et tenace. Brosset perd Hubert Amyot d’Inville à Montefiascone. Après 3 jours de combats, Bolsena est prise mais les conditions de combat viennent à empire, en raison de la privation de moyens de transports imposée par l’état-major de Juin. Les Légionnaires de Brunet de Séraigné peinent à prendre Radicofani. Mais le coup dur pour la Division intervient avec la mort de Jean-Claude Laurent-Champrosay, patron du 1er RA et l’un des premiers soldats ralliés aux FFL en Afrique. Finalement, le 20 juin, Juin décide de placer la DFL au repos. Brosset et ses hommes sont alors envoyés dans la région d’Albanova. Les blessés sont envoyés en Afrique du Nord. Mais Brosset accepte très mal que les Légionnaires de la « 13 » soient potentiellement remplacés par une unité algérienne et que leurs blessés soient rayés des tableaux de contrôle pour aller grossir les rangs du Régiment de Marche de la Légion Etrangère (RMLE) qui a fait le coup de feu contre les Britanniques et les FFL en Syrie. Finalement, la « 13 » restera au sein de la DFL.
Mais comme l’explique bien J-Ch. Notin, ces problèmes concernant les remplaçants montrent à quel point les « vieux » FFL –Saint-Hillier, Brunet de Seraigné, Morel, Gardet, Garbay, Delange et consorts – ,  ne souhaitent pas qu’on leur impose la venue d’officiers de l’Armée d’Afrique. Brosset qui n’a pas combattu avec eux dès le début, dénonçant parfois leurs méthodes de « trotskistes », doit cependant refuser les injonctions des responsables d’Alger, surtout quand il est question de nommer un giraudiste au remplacement d’Amyot d’Inville et de Laurent-Champrosay. L’arrivée du Capitaine de Vaisseau Jubelin provoque une véritable levée de boucliers menée par le Commandant Barberot. Les officiers FFL réussissent à imposer à Brosset la nomination de Pierre de Morsier à la tête du 1er RFM. Il en est de même pour les artilleurs qui adoubent le Colonel Bert, commandant en second du 1er RA.

– Mais les opérations reprennent bientôt pour les FFL, bien que l’ordre soit à rétablir au sein du 1er RFM. En effet, la division de Brosset est intégrée à la nouvelle Armée B (future Ire Armée) du Général Jean de Lattre de Tassigny. Très vite, les rapports entre les deux officiers supérieurs s’avèrent être mauvais. Le 9 juillet 1944, alors en visite sur la base de la DFL, de Lattre reproche à Brosset sa conduite des opérations. En retour, Brosset surnommera son supérieur le « Bellâtre de Tassigny ». Mais entre les Etats-Major, la relation tourne très vite au vinaigre ; Saint-Hillier et ses seconds entrant très vite en conflit avec l’Etat-major de l’Armée B que pilote Jean Valluy. On arrivera très vite à une guerre de clochers entre FFL et Armée d’Afrique, au sujet du ravitaillement et des fournitures.

– La 1re DFL doit participer au débarquement de Provence (Opération « Anvil Dragoon ») et Brosset veut que ces hommes soient dans les premiers, honneur que lui refuse de Lattre qui doit aussi composer avec le commandement américain qui a prévu de faire débarquer les trois divisions du VIth US Corps du Lt.General Lucian K. Truscott sur trois plages du Var. Les premiers français qui débarqueront seront les Commandos de la Marine et les Commandos d’Afrique, puis un Combat Command de la 1re Division Blindée dans le sillage de la 36th Infantry Division. La 1re DFL ses regroupe alors à Tarente autour du 10 août, afin d’embarquer vers les côtes du Midi de la France.

– Brosset et ses hommes débarquent donc en seconde vague sous le commandement du Ier Corps du Général de Larminat. Véritable trompe-la-mort, Brosset se fait remarquer en ordonnant à son chauffeur, l’acteur Jean-Pierre Aumont, de foncer sur les routes varoises pour doner ses ordres, ce qui donne des sueurs froides à Saint-Hillier. Brosset reçoit l’ordre de diriger l’assaut contre Hyères, qui ouvre la voie sur Toulon. Les combats sont âpres, notamment autour du Gold Hôtel qui est pris par les « Pacifiens » d’Edmond Magendie et la ville est libérée le 20 août. Cela n’empêchera pas Brosset de foncer sur Toulon, même si la ville est prise par la 9e Division d’Infanterie Coloniale de Magnan et des éléments de la 3e Algérienne.

– Le 2 septembre 1944, de Lattre ordonne à Brosset de foncer sur Lyon depuis la région de Montélimar car une insurrection de la résistance y a été déclenchée dans l’improvisation. Brosset s’exécute, toujours dans sa jeep ou son Command Car, couvrant « cent kilomètres dans l’inconnu », pousse en avant les Fusiliers Marins de du Morsier qui restent bloqués à la Muletière, en leur faisant croire qu’il est allé au-devant d’eux pour « boire une bière ». Finalement, épaulée par les Maquisards du Colonel Marcel Descour, dont le Bataillon Chambaran et le 11e Régiment de Cuirassiers du Capitaine Thivollet (reconstitué dans la clandestinité depuis 1941), les Français Libres entrent dans Lyon le 3 septembre, acclamés par la population. Aux dires du Commissaire de la République Yves Farge, Brosset n’hésite pas à se dresser au milieu des coups de feu tirés par les insurgés et fait cesser la pétarade par un tonitruant « Bande de cons, est-ce que ça va finir ? ».

– Nommé commandant d’Armes de la Place de Lyon avant de céder la place à Marcel Descour nommé Gouverneur Militaire, Brosset relance sa 1er DFL (renforcée par les Chambaran et le 11e Cuir.) vers la Bourgogne (Dijon), puis par la trouée de la Doller, avant de relever la 45th US Infantry Division de William W. Eagle dans le Jura. Mais à Montbard, l’Escadron Savary du 1er RFM fait sa jonction avec le Régiment de Marche des Spahis du Maroc de la 2e DB du Général Leclerc. La DFL poursuite alors sa route vers Villersexel mais tombe très vite à cours de carburant, d’autant que le temps se dégrade fortement. C’est alors qu’Edgar de Larminat intervient auprès de Brosset et de Saint-Hillier pour leur annoncer que la DFL pourrait être dissoute pour que ses hommes servent de cadre aux nouvelles divisions formées à partir des unités de FFI.

– Fin septembre, s’engage la bataille des Vosges. La 1re DFL est d’abord en première ligne mais subit très vite des problèmes de ravitaillement et de logistique, accentués par l’étirement des lignes jusqu’à Marseille mais aussi par Jean Valluy qui réduit ses vivres. Pire encore, les services d’intendance de la DFL sont expulsés des dépôts de Châlons-s/-Saône et d’Autun. Preuve de ses problèmes, les paquetages des tirailleurs africains sont encore en Italie (J-Ch.Notin). Vient aussi le temps de l’amalgame des FFI dont se charge le Colonel Garbay ; ce qui ne se fait alors pas sans facilité car ils forment des recrues à instruire.  Et aux yeux des anciens d’Afrique du Nord et d’Italie, beaucoup de Français de l’Intérieur passent pour des amateurs.

-. Après une visite du Général de Gaulle au camp de Remiremont au pied des Vosges, Brosset relance sa division à l’assaut dans des conditions particulièrement difficile. Si la 2nd BFL s’empare de Lyoffans, Andonay, Clairegoutte et de Frédéric-Fontaine (Vosges Saônoises), la 1re BFL butte au pied du Col de la Chevestraye. Mais le 3 octobre, Ronchamp tombe. Mais les Sénégalais font l’apprentissage difficile du mauvais temps vosgien.
La 1re DFL est placée au repos pendant environ un mois avant de reprendre l’offensive pour la bataille de la trouée de Belfort avec Champagney et Giromagny comme objectifs. Ce sont les Légionnaires de Brunet de Seraigné qui ouvrent le bal, avec des pertes. Diego Brosset est toujours là, houspillant ses officiers debout dans sa jeep. Les BM 4 et 5 finissent par s’emparer du Col de la Chevestraye, forçant l’ennemi à se replier sur Giromagny. Brosset manque d’être tué au volant de sa Buick qu’il emboutit dans un camion de ravitaillement.

– Mais le 20 novembre, alors qu’il inspecte ses lignes sous un temps excécrable et vient féliciter le Chef d’Escadron Barberot qui a percé à Plancher-le-Bas, le Général Brosset est victime d’un premier accident sans gravité. Sa jeep s’étend prise dans les fils d’un pylône électrique qui s’est écroulé. Brosset monte alors dans une nouvelle jeep avec Jean-Pierre Aumont et le chauffeur Picot lorsqu’un sergent lui crie « Méfiez-vous mon Général, la jeep déporte à gauche quand on freine ». Conduisant pied au plancher, Brosset arrive à l’entrée d’un pont enjambant l’Ambiez sur lequel sont affairés des sapeurs. Brosset freine alors brutalement et la jeep dérape sur la gauche. Aumont et Picot sont éjectés et s’en sortiront avec un choc mais Brosset ne peut se dégager et plonge dans l’Ambiez au volant de son véhicule. Il meurt sur le coup et son corps sera repêché.

– La DFL perd alors bien plus que son chef, elle perd celui qui l’incarnait dans son esprit selon les mots de Notin. Son chef d’Etat-major s’est dit alors « effondré » et beaucoup d’officiers de la DFL ont été affectés par la nouvelle. Le Général Brosset est inhumé après une cérémonie dans le cimetière de Villersexel au milieu de 311 de ses soldats. De Gaulle lui décerne l’Ordre des Compagnons de la Libération à titre posthume. Après tractations entre Koenig et les officiers de la DFL, c’est le Colonel Pierre Garbay qui prend le commandement de la Division.

Lire :
– NOTIN Jean-Christophe : Le Général Saint-Hillier. De Bir Hakeim au putsch d’Alger, Perrin