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"Nos si brèves années de gloire", de Charif Majdalani : incantation beyrouthine

L'écrivain ressuscite le vibrant Liban d'avant-guerre.

Par Christine Rousseau

Publié le 01 mars 2012 à 12h06, modifié le 01 mars 2012 à 12h06

Temps de Lecture 2 min.

Par son imaginaire chahuteur et flamboyant, comme par son style classique et élégant, Charif Majdalani appartient à la race des grands hakawati (entendez des "conteurs"). De ceux que l'on pourrait écouter des soirées entières autour d'un verre d'arak ou d'un café blanc vous narrer les mythes et légendes qui entourent l'histoire mirifique et douloureuse du Liban.

Un pays - il y est né en 1960 - auquel chacun de ses romans porte la marque d'un ineffable attachement. Comme l'illustre Nos si belles années de gloire, ultime volet d'un triptyque débuté avec L'Histoire de la grande maison (Seuil, 2005), où il dépeignait la grandeur et la décadence d'une famille - les Nassar - prise dans les bouleversements de la fin du XIXe siècle. Remontant le temps, le romancier nous entraînait ensuite, avec Caravansérail (Seuil, 2007), dans la folle aventure de Samuel Ayyad qui, d'Egypte au Liban, transportait, pièce par pièce, un palais.

Alliant un certain sens des affaires, comme les Nassar, ses proches voisins, et aussi un goût prononcé pour l'aventure, à l'instar du "Sultan blanc" Samuel Ayyad, Ghaleb Cassab, le narrateur de Nos si belles années de gloire, a hérité du tempérament turbulent de son père. C'est d'ailleurs le seul legs que ce filateur ruiné, mystérieusement assassiné en 1948, a laissé à son fils qui a grandi sur les "splendeurs flétries" d'une fortune dont n'ont subsisté qu'une maison et une usine abandonnées, faute de moyens. Contraint d'arrêter ses études pour subvenir aux besoins de sa mère et de ses soeurs, le jeune homme, autant épris de récits épiques et de grands espaces que de jolies filles, est placé chez Raymond Nassar, propriétaire d'une boutique de tissus à Souk Ayass. Très vite Ghaleb s'y distingue, moins comme vendeur d'étoffes que comme coureur de jupons. A cet égard, on savourera sa mésaventure avec une princesse saoudienne, épisode à travers lequel Majdalani revisite avec humour et glamour la "danse des sept voiles" de Salomé devant Hérode...

Un rêveur d'Orient

Tout séducteur qu'il soit, le narrateur va cependant tomber éperdument amoureux de la belle Mathilde-Raymonde, une jeune fille promise à un meilleur parti que lui. Dès lors, en digne héritier de son père, le jeune intrépide n'aura de cesse de rebâtir la fortune familiale pour (re)conquérir la belle "Monde", ainsi qu'il la surnomme affectueusement. Après divers commerces plus ou moins licites, l'entreprise amoureuse prend un tour rocambolesque, lorsque Ghaleb est approché par un homme d'affaires qui lui propose rien moins que de déménager au Liban une cinquantaine de machines à tisser de son usine, basée à Alep et fraîchement nationalisée par l'Etat syrien.

Fortune faite, grâce à cette délocalisation des plus singulières, Ghaleb peut enfin caresser son rêve : faire sienne Monde et assurer sa descendance. Mais voilà, trop occupé à faire tourner son "haras mécanique" et à courir les salons de la riche société libanaise, ce rêveur d'Orient n'a pas pris la mesure de la nouvelle crise politique qui, en 1973, secoue son pays et lui volera bientôt ses "brèves années de gloire" et d'opulence.

Des années d'insouciance sur lesquelles Charif Majdalani revient avec bonheur et piquant. Notamment lorsqu'il dépeint les paysages libanais ou quand il ressuscite d'une plume colorée le Beyrouth d'avant-guerre : celui des souks et des petits artisans, des cinémas à l'italienne et des cafés de la rue Hamra. Un Beyrouth dont il rend le lecteur à jamais nostalgique.

Couverture de l'ouvrage de Charif Majdalani,

NOS SI BRÈVES ANNÉES DE GLOIRE de Charif Majdalani. Seuil, 188 p., 16 €.

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