Bulletin d Analyses Géopolitiques pour l Afrique Centrale. Des Campagnes en Afrique Centrale

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1 Publication trimestrielle ENJEUX Bulletin d Analyses Géopolitiques pour l Afrique Centrale N 39 Avril - Juin 2009 N ISSN F cfa Des Campagnes en Afrique Centrale FPAE Fondation Paul ANGO ELA de géopolitique en Afrique Centrale B.P. 164 Yaoundé - Cameroun - Tél : (237) / fpae@globalnet.cm - site :

2 E N J E U X Bulletin Trimestriel d Analyses Géopolitiques pour l Afrique Centrale Récépissé n 00015/RDDJ/J06/BASC Publication de la Fondation Paul ANGO ELA de géopolitique en Afrique centrale Association régie par la loi n 90/053 du 19/12/1990 BP: 164 yaoundé - CAMEROUN Tél/Fax : (237) Tél : fpae@globalnet.cm Site Web: S O M M A I R E TRANSVERSALE L Afrique est-elle à l abri du terrorisme international? Par Jacques Joël ANDELA AGENDA Directrice de la publication : Kalliopi ANGO ELA Conseil scientifique David ABOUEM à TCHOYI, Consultant Sénior (Came roun) Dominique BANGOURA, Présidente de l Observatoire Politique et Stratégique de l Afrique (France) William ETEKI MBOUMOUA, Président de la Croix Rouge Camerounaise, Ancien SG OUA (Cameroun) Maurice KAMTO, Université de Yaoundé II (Came roun) en congés Marc Louis ROPIVIA, CERGEP, Université Omar Bongo (Gabon) Rédacteur-en-chef : Mathias Eric OWONA NGUINI, socio-politiste (Cameroun) Comité scientifique Stéphane AKOA, Politiste (Cameroun) Patrice BIGOMBE LOGO, Politiste (Cameroun) Fred EBOKO, Socio-politologue (France) Marie Josée ESSI, Anthropologue (Cameroun) Jean Lucien EWANGUE, Journaliste principal (Cameroun) en congés Séraphin Magloire FOUDA, Economiste (Cameroun) en congés Olivier IYEBI MANDJEK, Géographe (Cameroun) Narcisse Lambert MBARGA, Ingénieur des Eaux et Forêts (Cameroun) François Hervé MOUDOUROU, Internationaliste (Cameroun) en congés Samuel NDEMBOU, géographe (Cameroun) François Colin NKOA, Economiste (Cameroun) Joseph Vincent NTUDA EBODE,Politologue (Cameroun) Alain Didier OLINGA, Juriste (Cameroun) Joseph OWONA NTSAMA, Historien (Cameroun) Jean Bosco OYONO, Logisticien (Cameroun) Guy ROSSANTANGA-RIGNAULT, Juriste (Gabon) Muriel SAME EKOBO, géographe (Cameroun) Joseph TONDA, Socio-Anthropologue (Gabon) Abonnements : Adèle NGO MBOUA Photographies : Stéphane AKOA Cartographie Jean Claude EDJO O Edité par : DIFFUSION Yaoundé-Cameroun AVERTISSEMENT Les opinions exprimées dans les artiticles n engagent que leurs auteurs. Ces articles ne peuvent être reproduits sans l aurisation préalable de la FPAE OUVERTURE Des campagnes en Afrique centrale : Pistes exploratoires de la géographie du rural et du paysan Par Mathias Eric OWONA NGUINI DOSSIER Emergence du mouvement paysan camerounais : dynamiques et ambiguïtés des organisations paysannes des hautes terres de l Ouest Par Chrétien NGOUANET Les paysaneries montagnarde au Cameroun septentrional est-elle non capturée? Par ALAWADI ZELAO Revendications sociales ou revendications foncières dans le bassin sucrier Mbandjock-Nkoteng Par Joseph Yves ZOA ZOA Innovations paysannes en zone de contact forêtsavane. Le cas du pays Yambassa au Cameroun. Par Henri YAMBENE BOMONO Géopolitique des usages spatio-migratoires de territorialité des réfugiés dans les campagnes du Gabon Par Patrice MOUNDOUNGA MOUITY De la civilisation des normes à la spoliation des droits de propriété : le stress foncier des campagnes camerounaises Par ANTANG YAMO Les incohérences de l agriculture gabonaise : sous-peuplement rural, politique inadaptée et dynamisme limité Par Yawo Ganyo GALLEY TENDANCES Transition politique au Gabon : Vers un nouveau paradoxe gabonais? Par Rose NDO O BIBLIOGRAPHIE Comprendre les dysfonctionnements sanitaires au Cameroun Crise et réajustement du champ social rural au Cameroun Par Joseph OWONA NTSAMA PRISME Les catastrophes ferroviaires d Obobogorail et de Mballa II :Entre incivisme, lois des séries, laxisme des institutions et faiblesses de la protection civile Par Joseph OWONA NTSAMA 2 ENJEUX N 39 Avril - Juin 2009

3 TRANSVERSALE L Afrique est-elle à l abri du terrorisme international? Par Jacques Joël ANDELA, Internationaliste, DESS en relations internationales, option contentieux international, en Master/Diplomatie à l Institut des Relations Internationales du Cameroun (Cameroun) Le débat autour du terrorisme international a indéniablement pris des proportions considérables depuis les attentats tristement spectaculaires et sanglants du 11 septembre 2001 aux Etats-Unis 1 qu aujourd hui, aucun Etat ou organisme international, voire même des organisations privées, ne reste à la traîne quant aux mesures à adopter afin d en conjurer les méfaits. En effet, bien que la controverse doctrinale persiste sur la définition de la notion même de terrorisme 2, l unanimité est quasiuniverselle quant à son rejet comme mode d expression ou de revendication politique. C est dans ce sens que l Organisation des Nations Unies (ONU), embryon d un gouvernement à l échelle mondiale, a condamné cette pratique dans une succession de résolutions adoptées par le Conseil de Sécurité 3, mais également à travers la mise en place d une stratégie mondiale de lutte contre le phénomène 4. Cependant, il n en demeure pas moins que le terrorisme existe, qu il persiste et continue malheureusement à endeuiller de nombreuses familles innocentes. L Afrique, centre d intérêt de cette réflexion, pose évidemment le problème de son exposition vis-à-vis du phénomène. Et, contrairement à l imagerie populaire qui semble minimiser l étendue de la menace sur le continent, celle-ci ne devrait pas pour autant dissimuler le sens de la présente réflexion, dont la vocation est éminemment interpellative : l Afrique demeure un terreau socio-sécuritaire fertile au terrorisme international, d où l urgence de la mise en place d un système antiterroriste efficient sur le continent avant que celui-ci ne devienne une place forte de cette pratique peu recommandable. L Afrique, un terreau socio-sécuritaire fertile au terrorisme international Conduite sous le leadership des Etats-Unis après la tragédie du «mardi noir», «la guerre contre le terrorisme» 5 a été un échec cuisant ; en témoigne la prolifération des attentats meurtriers à l échelle planétaire, notamment à Bali et Djakarta (Indonésie), Madrid (Espagne), Istanbul (Turquie), Islamabad (Pakistan), Bombay (Inde), en Afghanistan et en Irak, mais également à Djerba (Tunisie), Casablanca (Maroc), Mombasa (Kenya), Charm el-cheikh (Egypte) et Mogadiscio (Somalie) pour ne citer que ces exemples. C est la preuve irréfutable que l Afrique n est pas véritablement en marge de ce phénomène de propagation de la terreur. Dans ce sens, il est loisible de relever que si certains de ces actes sont perpétrés par des africains eux-mêmes, expression d un ras-le-bol incoercible et d un tissu social en déliquescence, d autres, en fait, sont facilités par la fragilité des systèmes sécuritaires, poreux aux incursions extérieures déstabilisatrices. L Afrique, un moule de terroristes en puissance Le terrorisme, aujourd hui, est un phénomène planétaire 6. Pour Hamid Barrada, «le danger terroriste est réel, et il serait sage d en prendre toute la mesure» 7. Tel est le constat : il est implacable, mais relève d un pragmatisme éclairé. Qu est-ce qui peut donc autant motiver ces marchands de l apocalypse dans leur basse besogne? Le terrorisme apparaît aujourd hui comme le symptôme d une société internationale malade ; malade de ses injustices, de ses disparités et de ses exclusions. Dans des sociétés africaines marquées par des systèmes démocratiques dont la construction reste déficitaire, une inégale répartition des ressources économiques disponibles, l existence de bidonvilles géants, cimetières vivants de tant d espoirs déçus, réceptacles de générations entières frustrées et en mal d être, en mal de devenir, bref, en défaut d avenir, et en fin de compte, creuset idéal pour les sergents recruteurs de l internationale terroriste, le terrorisme ne peut que y faire son lit. C est d ailleurs l argument majeur qui a été mis en avant lors des attentats de Casablanca au Maroc le 16 mai 2003 où les quatorze terroristes étaient marocains, tous issus du bidonville de Sidi Moumen où la police ne pénétrait plus ; ou encore de la prise d otages au Nigeria le 31 juillet 2004 de cent soixante cinq travailleurs de la société américaine Mallard Bay, qui opère en sous-traitance avec SHELL, par une trentaine de ravisseurs autochtones qui réclamaient des emplois et une meilleure répartition des revenus issus du pétrole local. Ce qu il faut retenir des développements qui précèdent, c est que même si le terrorisme n est pas encore profondément ancré dans les pratiques africaines, le continent renferme les germes d un terrorisme en puissance. Le procédé risque de prendre de l ampleur et éclore véritablement avec le temps si la situation sociale demeure statique et que les marchands d illusions parviennent à récupérer les mécontentements populaires pour en faire une arme à leur disposition. L Afrique, une cible facile du terrorisme international «L Afrique a été et restera pour l avenir prévisible un continent mûr pour des actes terroristes», ainsi s exprimait ENJEUX N 39 Avril - Juin

4 TRANSVERSALE un responsable du Pentagone, soulignant que Washington s employait à renforcer sa coopération militaire avec les africains en vue de prévenir les attentats terroristes 8. Une telle affirmation, aussi pessimiste qu elle puisse paraître pour le continent noir, n a certainement pas été faite ex-nihilo. En effet, c est en s inspirant de l état de santé sécuritaire sur le continent africain que ce stratège américain a pu formuler sa théorie : porosité des frontières (avec ce que cela comporte comme circulation des personnes douteuses et des arsenaux de guerre), formation policière et matériels antiterroristes insuffisants ou inadaptés, systèmes de prévention dans les transports en commun approximatifs, et bien d autres lacunes encore qu il convient de combler. Sur la base de ce diagnostic lucide, on peut déduire que l Afrique présente des carences au plan stratégique et des insuffisances sécuritaires qui, éventuellement, peuvent attirer l attention des terroristes internationaux en vue de s attaquer aux intérêts occidentaux, ou autres, beaucoup moins protégés ici qu en Occident. Il n y a qu à s en référer aux attentats simultanés contre les ambassades américaines de Naïrobi au Kenya et Dar-Es-Salem en Tanzanie en août 1998, l attentat contre la synagogue israélite de Djerba en Tunisie le 16 avril 2001, ou encore le double attentat de Mombasa au Kenya, commis contre des intérêts israéliens, le 28 avril Ainsi, face au renforcement des mesures sécuritaires en Occident, il n est pas exclu que les terroristes internationaux se rabattent sur l Afrique, où la capacité de nuisance demeure plus importante; des mesures de prévention et de réaction doivent donc être prises en urgence. L urgence d un système antiterroriste efficient en Afrique Ainsi que nous l avons mentionné plus haut, l Afrique reste une cible relativement accessible au terrorisme international. Des mesures fortes, mais surtout diligentes doivent donc être adoptées. Celles-ci peuvent relever, soit d une stratégie directe de lutte contre le terrorisme, soit alors d une stratégie indirecte, destinée à contrecarrer le phénomène à sa base. Les méthodes directes de lutte contre le terrorisme en Afrique La lutte directe contre le terrorisme en Afrique se situe à l avant-garde des déficits sécuritaires évoqués dans le paragraphe précédent. Il s agit donc d un ensemble de mesures destinées à combattre de front les actes de terrorisme tels qu ils se manifestent dans l espace africain. Celles-ci consisteront concrètement à renforcer les mesures de sécurité et de contrôle aux frontières des Etats africains, à développer les moyens d appropriation des mécanismes juridiques et institutionnels de lutte contre le terrorisme établis sur le continent 10, à assurer l effectivité de la coopération policière et judiciaire, la lutte contre le financement du terrorisme, le trafic illicite des armes et matériels explosifs, mais également et surtout l acquisition d une technologie de pointe de nature à détecter les engins nocifs les plus discrets, notamment dans les lieux de transport en commun comme les aéroports. Toutefois, parce que le risque zéro n existe pas, il est nécessaire de réprimer avec la plus grande fermeté les actes terroristes perpétrés, en identifiant non seulement les auteurs et complices, mais aussi les commanditaires; d où la nécessité d une législation idoine permettant de délimiter le sens du concept 11 et son appropriation par les ordres juridiques nationaux, de même que l existence de forces de police et des autorités judiciaires spécialement sensibilisées aux questions d antiterrorisme. Les méthodes indirectes de lutte contre le terrorisme en Afrique Les manœuvres et stratégies de lutte contre le terrorisme ne peuvent véritablement se réaliser et être efficaces que si elles sont inscrites dans une démarche qui dépasse le traitement symptomatique du phénomène pour appréhender les causes profondes qui l animent. En ce sens, lors de son intervention à l occasion de la réunion intergouvernementale de l Union Africaine sur la prévention et la lutte contre le terrorisme à Alger du 11 au 14 septembre 2002, le Président de la République algérienne Abdel Aziz Bouteflika affirmait ceci : «le combat contre la pauvreté est peut-être l élément premier indispensable de la lutte contre le terrorisme, car si la pauvreté est humainement et moralement inacceptable, elle est un facteur destructeur des vertus humaines et des bases de la solidarité sociale». Il ressort de ces propos hautement significatifs que plus de justice sociale (accès à l eau potable, à l alimentation de base, à l éducation élémentaire et aux soins primaires) contribuerait, à n en point douter, à bâtir des piliers de stabilité pour tout le continent et, ipso facto, à réduire la sensibilité au discours terroriste. Il s agit donc là d une interpellation sans équivoque à l endroit de tous les leaders africains, mais également de la communauté internationale, qui doivent se hisser à la hauteur de leurs responsabilités et de leurs engagements pour faire prévaloir le droit à la justice des plus faibles 4 ENJEUX N 39 Avril - Juin 2009

5 TRANSVERSALE OUVERTURE et des plus démunis. L enjeu, à notre sens, est doublement salutaire : il est humanitaire d abord, car il préserve l Afrique de sinistres supplémentaires ; il est stratégique ensuite et s inscrit dans une vision à long terme de politique économique, tant il est vrai qu aucun développement n est envisageable sans la stabilité. Et en la matière, il va de soi que la prévention vaut toujours beaucoup mieux que toute forme de thérapie. Notes 1 Il s agit des attentats contre les tours jumelles du World Trade Center à New York, contre le Pentagone à Washington et du crash d un avion en Pennsylvanie, dont le point de chute, vraisemblablement, était la Maison Blanche, et dont le bilan s évalue à 2986 pertes en vies humaines, in 2 On peut lire à ce sujet John Brown, «Les périlleuses tentatives pour définir le terrorisme», Le Monde Diplomatique, N 579, février 2002, pp. 4-5 ou encore Jacques Derrida, «Qu est-ce que le terrorisme?», Le Monde Diplomatique, N 599, février 2004, p Résolution 1368 du 12 septembre 2001 suite aux attentats du WTC et du Pentagone ; Résolution 1450 du 13 décembre 2002 condamnant les attentats terroristes perpétrés à Mombasa au Kenya ; Résolution 1530 suite à l attaque à la bombe de Madrid du 11 mars 2004 ; Résolution 1618 du 4 août 2005 condamnant les attentats terroristes en Irak., etc. 4 La stratégie mondiale de lutte contre le terrorisme a été adoptée par l Assemblée Générale des Nations Unies le 8 septembre 2006, sous la forme d une résolution (A/RES/60/288) à laquelle est annexé un plan d action. Cette stratégie est fondée sur la condamnation systématique, sans équivoque et vigoureuse par les Etats membres du terrorisme sous toutes ses formes et dans toutes ses manifestations, quels qu en soient les auteurs, les lieux et les buts, ainsi que sur l adoption de mesures concrètes visant à éliminer les conditions propices à la propagation du terrorisme et à renforcer la capacité individuelle des Etats et de l ONU à prévenir et combattre le terrorisme, tout en veillant à la protection des droits de l homme et au respect de l Etat de droit. Elle vient appuyer l action de l équipe spéciale antiterroriste créée par le Secrétaire Général des Nations Unies en juillet 2005 pour assurer la coordination et la cohérence de l action menée à l échelle du système des Nations Unies et complète la résolution 1373 du 28 septembre 2001 adoptée par le Conseil de Sécurité. 5 Dixit le Président américain George W. Bush lors de son discours à l Académie militaire de West Point le 1er juin Pierre Conesa parle d un terrorisme «mondialisé», tant par ses auteurs que ses victimes : Pierre Conesa, «Aux origines des attentats suicides», Le Monde Diplomatique, N 603, juin 2004, pp Hamid Barrada, «Le Royaume à l épreuve», Afrique Magazine, juin Lire Marie Joannidis, «Corne de l Afrique : enjeux stratégiques et conflits» in 9 Ce double attentat était dirigé contre un hôtel où logeaient pour l essentiel des touristes israéliens et un avion transportant des voyageurs originaires de l Etat hébreu. 10 Il s agit précisément des normes dont la portée juridique est plus ou moins certaine, et qui sont développées dans des textes à vocation continentale tels que la convention de l OUA sur la prévention et la lutte contre le terrorisme adoptée en juillet 1999 et son protocole de juillet 2004, de la déclaration de Dakar contre le terrorisme d octobre 2001, du plan d action pour la prévention et la lutte contre le terrorisme de septembre 2002, mais également des organes d action comme le Centre africain d études et de recherche sur le terrorisme et le Conseil de paix et de sécurité de l Union Africaine, dont le mandat concerne tout aussi bien des aspects liés à la lutte contre le terrorisme. 11 En dépit des critiques plus ou moins fondées que l on pourrait lui faire, la convention OUA sur la prévention et la lutte contre le terrorisme propose une définition de l acte terroriste à l article 1er 3. Il s agit de : «(a) tout acte ou menace d acte en violation des lois pénales de l Etat Partie susceptible de mettre en danger la vie, l intégrité physique, les libertés d une personne ou d un groupe de personnes, qui occasionne ou peut occasionner des dommages aux biens privés ou publics, aux ressources naturelles, à l environnement ou au patrimoine culturel et commis dans l intention : (i) d intimider, provoquer une situation de terreur, forcer, exercer des pressions ou amener tout gouvernement, organisme, institution, population ou groupe de celle-ci, d engager toute initiative ou de s en abstenir, d adopter, de renoncer à une position particulière ou d agir selon certains principes ; ou (ii) de perturber le fonctionnement normal des services publics, la prestation de services essentiels aux populations ou de créer une situation de crise au sein des populations ; (iii) de créer une insurrection générale dans un Etat partie. (b) Toute promotion, financement, contribution, ordre, aide, incitation, encouragement, tentative, menace, conspiration, organisation ou équipement de toute personne avec l intention de commettre tout acte mentionné au paragraphe a (i) à (iii)». En outre, elle enjoint les Etats parties à incriminer en toute priorité dans leurs ordres juridiques nationaux les actes terroristes tels qu ils sont définis par l article 1er. FORMATION A LA METHODOLOGIE Mardi 8 décembre et mercredi 9 décembre 2009 LA FPAE ouvre une session de formation méthodologique à destination des étudiants. Inscriptions à la FPAE avant le 4 décembre 2009, Prix : Fcfa ENJEUX N 39 Avril - Juin

6 AGENDA Agenda Avril 2009 : publication d Enjeux n 38 dont le dossier est consacré à «Les Etats fragiles en Afrique centrale» Avril 2009 : Sommet des institutions culturelles d Afrique et de la diaspora africaine. Colloque CERDOTOLA à l Hôtel Mont-Febé sur la culture africaine dans le monde globalisé du 21ème siècle Mai 2009 : UICN Appui au secrétariat de la Conférence Internationale sur la Tenure Foncière, gouvernance et entreprise forestière. Juillet 2009 : publication de Conjoncturis, numéro double, N sur «De la réforme mobilisatrice et réparatrice d une société en alerte sortir du laconisme et du laxisme gouvernants» Août 2009 : publication de Conjoncturis N 21 sur «Gouverner l espérance, gérer les attentes : un état disponible, attentif et attentionné». Septembre 2009 : Publication de «Les armes légères et de petit calibre en Afrique centrale : Bases et ressources d une politique régionale (Cameroun, Tchad, RCA)». Lundi 26 Octobre 2009 : Séminaire d Alain Roger Edou Mvelle sur «Le pardon et la justice post conflits en Afrique», discutant Mathias Eric Owona Nguini, FPAE. 29 Octobre H-15H30: Conférence au Centre Culturel Français Stéphane Akoa sur «Entre théorie et pratique de la politique: la culture scientifique pour comprendre» Octobre 2009: FESTY 2009 «Festival des Sciences et Techniques de Yaoundé». Promotion de la culture scientifique et technique au Cameroun. Novembre 2009 : publication d Enjeux N 39 dont le dossier est consacré à «Géographie des campagnes» d Afrique centrale novembre 2009: Colloque des 10 ans d activités de la FPAE sur le thème «Stabilité et instabilité en Afrique centrale : logiques et dynamiques d une configuration régionale complexe», à l Hotel Franco. Novembre 2009 : Publication de Conjoncturis N 22. Samedi 05 Décembre 2009 : Prix du meilleur lecteur et Journée portes ouvertes de 10h à 14h. Mardi 08 et mercredi 09: Décembre 2009 : Formation à la méthodologie pour les étudiants à la FPAE. «méthodologie de la rédaction», M1S1. Inscription en cours. Janvier 2010 : publication d Enjeux n 40 «Spécial République centrafricaine». Immeuble de la FPAE Centre de documentation 26 octobre 2009 Salle du séminaire 26 octobre 2009 séminaire Edou Mvelle 6 ENJEUX N 39 Avril - Juin 2009

7 OUVERTURE Des campagnes en Afrique centrale : pistes exploratoires de la géographie du rural et du paysan Par Mathias Eric OWONA NGUINI, sociopolitiste, FPAE/UYII, Yaoundé (Cameroun) Ce numéro sur la géographie des campagnes a fourni une précieuse occasion d étudier la diversité et la variété d ancrage des acteurs sociaux paysans comme opérateurs privilégiés dans les espaces ruraux des sociétés d Afrique centrale. Par différents angles d attaque et perspectives de recherche, ce dossier a mis en relief la complexité de la vie des campagnes et dans les campagnes des sociétés d Afrique centrale avec une attention particulière et privilégiée aux conditions d existence et d activité des paysans et paysanneries. Ce faisant, les préoccupation agraires et agricoles ainsi que les préoccupations de développement rural et de gestion foncière dominent les différentes contributions à ce dossier sur la géographie des campagnes en Afrique centrale, soucieux de bien mettre en contexte la pluralité des dynamiques paysannes et des expériences rurales effectivement observées sur le terrain. Le dossier s ouvre par une contribution de Chrétien NGOUANET avec un article intitulé «Emergence du mouvement paysan camerounais : dynamiques et ambiguïtés des organisations paysannes des hautes terres de l Ouest». Dans cet article, il s agit de cerner les «efforts et les sacrifices des paysanneries» en tant qu initiatives travaillant à produire et à consolider l émergence d «organisations paysannes» dans un «contexte de libéralisation». L auteur s attache particulièrement à examiner comment «l ingéniosité et le dynamisme des populations des hautes terres de l Ouest-Cameroun» ont été des qualités déterminantes dans la production des «bases sociales» et des «bases économiques» de l émergence et de la mutation d organisation paysannes, lesquelles vont influencer les recompositions du développement rural ainsi que les jeux de pouvoir «avec les instances étatiques». Le deuxième article du dossier intitulé «La paysannerie montagnarde au Cameroun septentrional est-elle non capturée?» est une contribution du socio-politiste ALAWADI ZELAO. A travers une radiographie commode des «erritoires paysans» dans les régions septentrionales du Cameroun, l auteur s essaie à valider empiriquement le modèle anthropo-économique et anthropo-sociale de Goran HY- DEN de la capture étatique et capitaliste des «sociétés paysannes», sociétés qui résistent au moyen d une organisation basée sur «l économie d affection». L auteur souligne alors comment une «technostructure» constituée autour d une «élite bureaucratico-administrative», de «l acteur lamidal» et de nombreux courtiers associés «aux développeurs» a travaillé à imposer une «perspective de développement rural» au «paysan montagnard» dès lors balancé entre «un passé mythique» et «un présent plein d incertitudes». Le troisième article du dossier intitulé «Revendications sociales ou revendications foncières dans le bassin sucrier Mbandjock-Nkoteng» est une contribution du géographe Joseph ZOA ZOA. Dans ce travail, l auteur examine de manière décisive la manière dont les économies de plantation a pesé dans le couloir Mbandjock-Nkoteng (centre du Cameroun) sur les «anciennes terres de cultures, de plantation et de parcours» et a eu un impact contraignant sur des «collectivités locales» et des «collectivités coutumières» dès lors portés à s investir dans des «contestations permanentes» vis-à-vis de l agro-industrie sosucam. L auteur montre en s appuyant sur des données socio-économiques et géo-économiques, le mouvement politisé de contestation associé aux «revendications des collectivités coutumières» en vue d une démarche favorisant plus que par le passé «la croissance des collectivités coutumières» et encourageant «une participation active à la vie de la sosucam pour compenser les pertes et l instabilité socioéconomique provoquée par la déprédation que subit le travail de la terre et les autres privations que la sosucam leur impose». Le quatrième article du dossier intitulé «Innovations paysannes en zone de contact forêt-savane. Le cas des pays Yambassa au Cameroun» est la contribution de l ethnologue-géographe Henri YAMBENE BOMONO. L auteur entreprend de mettre en perspective la dynamique socio-économique et géographico-économie du «pays Yambassa», entendant alors observer les mouvements «d une économie coutumière basée sur l exploitation de la savane». Il s agit alors de comprendre les phénomènes culturaux, techniques, fonciers et commerciaux liés à «la diversification des cultures de rente» et aux logiques paysannes de «développement d une dynamique d extension des cultures de plantation en savane», ainsi qu à l évolution d ensemble du «système productif agricole du pays Yambassa». Le cinquième article du dossier intitulé «Géopolitique des usages spatio-migratoires des réfugiés dans les campagnes du Gabon» est une contribution du politiste Patrice MOUNDOUNGA MOUITY qui s attache à étudier «la relation entre l afflux des réfugiés au Gabon et la dynamique ENJEUX N 39 Avril - Juin

8 OUVERTURE d installation territoriale dans les espaces de campagne en forme de «ville-bis» et de villagisation». L auteur s efforce de situer géopolitiquement le rôle de «la campagne» au Gabon comme un cadre-témoin des «lieux de transit et d asile des populations victimes des conflits et des guerres civiles», un «lieu d asile» pour réfugiés dans le Sud-Est du Gabon. Après avoir montré comment le «regroupement imposé en villages uniformes le long des routes» contribue à territorialiser les réfugiés et à modifier les relations villes-villages, l auteur examine «le contact des cultures entre «autochtones» et «allochtones» à travers une dynamique faite de «flux, circulations et contrôles», pour cerner «les usages migratoires de l espace de campagne» et comprendre le rôle des réfugiés dans la «dynamique dialogique ville-campagne». Le sixième article intitulé «De la civilisation des normes à la spoliation des droits de propriété : le stress foncier des campagnes camerounaise» est la contribution au dossier du doctorant-anthropologue ANTANG YAMO. L auteur s intéresse à l espace des tensions et des conflits entre «la coutume» et «le droit de l Etat» vus comme deux «registres juridiques» mobilisables en matière de «gestion foncière au Cameroun». L auteur s attache particulièrement à examiner les dynamiques de dramatisation et d accentuation de «la question foncière en milieu rural camerounais» avec l irruption significative de «l agro-industrie» ainsi que des normes environnementalistes conduisant à la mise en place d «aires protégées», aires qui mettent également en question les «droits coutumiers» ainsi que «les activités des populations locales». Les «communautés villageoises» s en trouvent fragilisées. Le géographe ruraliste Yawo GANGO GALLEY présente le septième et dernier article du dossier : «Les incohérences de l agriculture gabonaise : sous-peuplement rural, politique inadaptée et dynamisme limité». Dans cet article, l auteur souligne comment «le dépeuplement des campagnes», au Gabon y a compromis une dynamisation de «la production agricole» maintenant une «désorganisation du terroir» peu propice du dynamisme agraire paysan. L auteur souligne comment l atonie des campagnes gabonaises a conduit à une «agriculture extravertie et incohérente dans ses choix», une agriculture peu apte à faire assurer efficacement au «monde rural traditionnel», son rôle de «pourvoyeur de denrées alimentaires». Enfin, l auteur souligne le caractère récurrent du «manque de dynamisme et de compétitivité du paysan gabonais et de son incapacité à former de l épargne, à tirer des revenus de ses activités et à contribuer réellement au développement économique du pays [le Gabon]». Cette analyse permet alors de comprendre la dépendance du Gabon vis-à-vis de l étranger, surtout des pays de la CEMAC, pour ses approvisionnements alimentaires. Le présent dossier a ouvert des pistes de réflexion et d observation utiles et pertinentes à propos des conditions et configurations politiques, sociales, économiques ou culturelles d activité et d existence des paysans et des campagnes. Ce faisant, ce dossier a permis d esquisser des schémas et schèmes d analyse et de recherche pour une géographie politique plus large des campagnes et paysanneries au sein des sociétés et Etats d Afrique centrale pouvant intégrer l étude des expériences autres que celles du Cameroun et du Gabon, pour la Centrafrique, le Congo Brazzaville, la Guinée Equatoriale, la République démocratique du Congo, ou le Tchad. Le présent dossier, si il n est pas exhaustif, n en constitue pas moins une utile introduction au questionnement fort riche et divers de la géographie politique des campagnes en Afrique centrale. 8 ENJEUX N 39 Avril - Juin 2009

9 Emergence du mouvement paysan camerounais : dynamiques et ambiguïtés des organisations paysannes des hautes terres de l Ouest Par Chrétien NGOUANET, géographe, Université de Dschang, Département de Géographie (Cameroun) Le secteur agricole du Cameroun a connu une longue période de croissance soutenue, celle-ci résultant davantage des efforts et sacrifices des paysanneries que d une politique de développement rural conséquente. Comme la plupart des pays de l Afrique subsaharienne, ce pays est resté longtemps tributaire d un contexte politique peu favorable à l éclosion des initiatives paysannes. Depuis l époque coloniale, les sociétés rurales ont fait l objet d une vision stéréotypée surtout par les imaginaires occidentaux qui les taxaient de statiques, d incapables à se prendre en charge ellesmêmes. Au lendemain des indépendances, de légers changements ont été apportés à cette vision mais sans application d une politique efficace, le paysan subissant les effets des changements sans une réelle prise sur eux dans une atmosphère où l Etat prend encore en charge, de façon directe ou indirecte toutes les structures de production et d échange. La deuxième moitié de la décennie 80 a constitué un tournant décisif, marqué par la crise économique et surtout l application des mesures draconiennes du programme d ajustement structurel (PAS). Ceci va exiger de la part de l Etat un transfert de la plupart de ses tâches d encadrement à la société civile et aux opérateurs privés, d où l assouplissement à partir de 1990, du cadre juridique régissant les associations, marquant ainsi une volonté politique de changement de statut des paysans. Désormais, ces derniers disposent d un cadre organisationnel leur permettant d affirmer et de défendre leurs intérêts. L heure est au processus dit d autopromotion dans lequel «ce sont les acteurs de base qui définissent leurs objectifs et finalités, et déploient des stratégies propres intégrant les relations avec les autres acteurs» (Kwan Kai Hong, 1991 : 25 cité par Blundo in Jacob et al, 1994 : ). Plusieurs formes d organisation ont ainsi vu le jour. Mais voit-on pourtant par-là du simple fait du désengagement de l Etat une émergence d organisations paysannes (OP) capable de défendre les intérêts des ruraux et de ce fait d engager leurs économies sur la voie d un développement autocentré et durable dans un contexte de mondialisation? Répondre par l affirmative serait épouser les hypothèses peu étayées suivant lesquelles «un Etat fort étoufferait systématiquement toute forme d OP autonome en imposant ses propres structures ; d autre part toute organisation indépendante de l appareil d Etat serait de nature «communautaire» et exprimerait les intérêts de l ensemble de la population locale? (Guillermou, 1994 :201). La prolifération de nouvelles formes d OP soulève plusieurs questions. S agit-il pour l Etat de réaliser un peu d économie en transférant une partie de ses fonctions aux OP? Quelle est la signification sociale de ces mouvements? S agit-il des réponses à des pressions externes (de la part des ONG et autres bailleurs de fonds) ou bien une réelle volonté de changement interne (par exemple la contestation de l ordre ancien par les groupes défavorisés)? Ou bien s agit-il d une manifestation de la volonté de modernisation des campagnes par les nouveaux ruraux refoulés par la crise urbaine? De nos jours, ces questions revêtent un caractère crucial dans la mesure où le vide laissé par l Etat (du fait des politiques de désengagement) est en train d être occupé par diverses composantes de la société civile. Les hautes terres de l ouest offrent à cet égard un champ d investigation tout à fait intéressant du fait de l ampleur des transformations en cours. Une émergence dans un contexte de libéralisation Les campagnes du Cameroun ont subi de pleins fouets les effets de la crise multiforme combinant dépréciations des cours des produits exportés, incapacité de l Etat à soutenir les prix, échecs de certaines modalités de développement et abandon des tâches de service public par un pouvoir aux caisses vides. Bilan mitigé de l interventionnisme étatique Comme dans la plupart des Etats africains, les années d après l indépendance ont été marquées par l interventionnisme étatique dans presque tous les secteurs d activité. La zone rurale, considérée à juste titre comme fondement de l économie et base de la croissance, a bénéficié de diverses actions visant à sa promotion. La politique du gouvernement camerounais à ce sujet a connu une évolution constante, marquée par des changements aussi bien au niveau des orientations globales que des structures d encadrement et de financement 1. Ainsi, de façon directe ou indirecte, l emprise de l Etat sur le développement rural se résume par la prise en charge des structures d encadrement et d échange. Tous ces déploiements n ont pas produit les résultats escomptés. En effet, l Etat est accusé de nombreuses mal- ENJEUX N 39 Avril - Juin

10 versations. L administration publique dans son ensemble est très handicapée par les difficultés économiques, mais surtout par l indélicatesse de certains agents qui violent impunément les règles de la bonne gestion des biens publics 2. Ce ne sont pas seulement les services publics qui éprouvent les difficultés de gestion, car les sociétés agroindustrielles et les sociétés de développement pilotées par l Etat ne ramènent pas toujours les fruits escomptés (Tankou, 1984 : 55). Dans l ensemble des sociétés de développement gérées par l Etat, les manœuvres et les producteurs associés n ont pas toujours constaté l élévation de leur niveau de vie de la population bénéficiaire, et pourtant, «celui des dirigeants était parfois insolent sans que la modernisation réalisée soit à la hauteur suivant les critères internationaux» (Courade, 1994 : 19-20). C est le cas de l UCCAO 3 et de la SODERIM 4 pour la province de l Ouest. Entraves à l émergence d une OP dans un système contrôlé par l Etat : cas de l UCCAO L histoire du mouvement coopératif à l Ouest-Cameroun est étroitement liée à l introduction du café arabica vers les années Pendant la période de la réglementation stricte de la culture du café, chaque planteur élu devait devenir plus tard membre d une coopérative. Au lendemain de la libéralisation totale de cette culture en 1957, l UCCAO et ses coopératives annexes ont joué un rôle prépondérant dans l encadrement de la paysannerie. En effet, cette structure a répondu à de nombreux besoins pressants pour le développement rural, aussi bien sur le plan strictement individuel (approvisionnement des planteurs en intrants agricoles et autres facteurs de production à des prix subventionnés, le contrôle des normes de qualité, la collecte et la commercialisation de la production) que sur le plan communautaire (la mise sur pied des infrastructures socio-économiques et d animation). Mais à la fin de la décennie 80, il devient tout à fait difficile de réaffirmer ce rôle. On se demande si la coopérative, loin d être un instrument de défense des intérêts des planteurs n est pas responsable de leur désespoir! En effet, les tracasseries de la bureaucratie coopérative 5 constituaient déjà de véritables cauchemars pour le planteur qui débarque à la coopérative. En 1986, Ngougnou P. a recueilli l avis de certains planteurs de la Coopérative Agricole des Planteurs des Bamboutos (CAPLABAM) qui estiment que les agents chargés d effectuer les opérations bureaucratiques sont des «malhonnêtes et des corrompus», exigeant chaque fois «qu on leur tende la main fermée». Au contraire, le planteur pouvait passer de longs mois avant d encaisser le prix de leur production du café. Pour cette raison, certains moyens et pe- 10 ENJEUX N 39 Avril - Juin 2009

11 tits planteurs manifestaient déjà leur préférence à livrer tout ou une partie de leur production aux intermédiaires qui disposaient de gros moyens et qui maîtrisaient les méandres du système coopératif. Ces intermédiaires, par leur volume de café livré, devenaient les délégués des planteurs devant siéger à l assemblée générale, lieu de prise de décisions. Il s agissait en quelque sorte des «planteurs à col blanc», qui étaient acquis à la cause des administrateurs, enrôlés dans un «système coopératif» où le planteur est entièrement marginalisé. De façon générale, Cette structure fonctionnait au profit de ses dirigeants et des «grands planteurs». Dans le même sillage, nous pouvons ranger les opérations manquées comme le problème de ristournes non payées depuis 1986 et les multiples subventions promises et non honorées pour l opération arrachage et replantation à prime. Tous ces maux ont annihilé en bien des endroits les durs efforts déployés plusieurs années durant par l UCCAO pour assurer la prospérité paysanne. La principale faiblesse de cette organisation réside dans son manque de vision à long terme pour repenser le modèle économique colonial déjà inadapté et fragile, basé exclusivement sur la collecte et la commercialisation du café. Sa résistance devait être davantage consolidée si elle embrassait le développement régional dans son ensemble en diversifiant les spéculations agricoles. En 1978, au vu de son rayonnement régional, l UCCAO «s est laissé forcer la main» par l Etat qui a élargi sa sphère de productivité en lui confiant la gestion d un vaste projet de développement rural intégré, le Projet Hauts Plateaux de l Ouest (PHPO), lequel dans sa deuxième phase en 1984 Projet de développement Rural de la Province de l Ouest (PDRPO) 6. Selon certains auteurs (Courade, 1991 : 895), cette expérience aurait dû constituer une occasion exceptionnelle pour repenser le modèle de développement en vigueur, mais il n en fut rien. La situation de l UCCAO, loin d exposer la faillite d une organisation paysanne, ne témoigne que de l échec d une politique de «l Etat omniprésent» qui ne laisse aucune marge de liberté aux organismes mis en place pour fixer leurs propres règles de fonctionnement. Tout d abord, pour l Etat camerounais, la création des coopératives des planteurs répondait à une logique commerciale c est-à-dire assurer la collecte, le transport et le stockage de la production des planteurs dispersés géographiquement. Là où le système coopératif n a pas bien fonctionné comme c est le cas pour le Sud forestier et la zone cotonnière septentrionale, l Etat a mis en place des sociétés d encadrement. Mais toutes ces dernières sont tombées en faillite à cause des problèmes de gestion. C est le cas par exemple de la SODERIM 7, de la SEMRY 8, de la SODECOTON,..., qui vont toutes être victimes des déficits chroniques. A l Ouest-Cameroun où ce système semblait avoir bien fonctionné, il a rempli les fonctions d intermédiation financière, commerciale, technique et politique. Intervenant à plusieurs niveaux, l Etat a constitué une sérieuse entrave au fonctionnement de la coopérative comme véritable organisation paysanne (Courade et al, 1991 : 889). A titre d exemple, la fixation du prix du kilogramme de café arabica faisait l objet au niveau national d une âpre discussion, l un des objectifs étant la recherche de l équilibre entre l évolution des prix de ce produits et ceux des autres cultures d exportation comme le coton, le cacao, le riz paddy etc. (Engola Oyep in Courade et al, 1994 : 273). De plus, les dirigeants nommés par l Etat le sont sur des critères politiques (Courade et al, 1991 : 894). Depuis les indépendances, l histoire coopérative a été marquée en Afrique par des réformes amenant souvent au découragement des paysans. Même pour les coopératives ayant connu un passé glorieux sur le plan économique, le problème d une plus grande responsabilisation des paysans est préoccupant (Laffite, 1981 : 12). Les limites de la politique de «l Etat développeur» nous laissent penser que les producteurs ne peuvent être bien défendus que par eux-mêmes et non par une autre personne, si chevronnée et si bien intentionnée soit-elle. Les paysans ont accumulé suffisamment de griefs pour l abandon de leurs coopératives. Dans bien des secteurs de la zone rurale, l on ne ressent plus sa présence. Là où son emprise est encore affirmée, l organisation coopérative mène souvent une lutte inégale contre les coxeurs pour l achat de la production caféière. Une entrée «tardive» dans le cercle des «ajustés» Contrairement à d autres pays d Afrique subsaharienne entrés en phase d ajustement depuis le début des années 1980, le Cameroun a été pendant longtemps considéré comme un modèle de prospérité économique. Mais les campagnes et ont constitué de véritables tournants d effondrement économique avec des baisses respectives de 25% et 20% des termes de l échange (Roubaud in Courade et al, 1994 : 58). Dès septembre 1988, son incapacité à gérer les intérêts de la dette extérieure comme à honorer les créances internes de plus en plus élevées vont l obliger à solliciter des réformes et engagements draconiens du FMI dans le cadre ENJEUX N 39 Avril - Juin

12 des politiques de stabilisation et d ajustement structurel. Il s agit d un ensemble de mesures «visant à faire subir une cure d austérité à l Etat et aux diverses couches sociales du pays, tout en recherchant de nouvelles ressources pour rétablir les finances publiques et les comptes extérieurs» (Courade, 1994 : 11). Ces mesures visent à court terme le rétablissement des principaux équilibres et, à moyen et long terme le rétablissement de la croissance saine. Ceci impose la création d un cadre institutionnel adéquat exigeant désormais «moins d Etat», en accordant une place importante aux autres acteurs de développement. Dès lors, nous comprenons la nécessité d associer le secteur privé à la production, à la commercialisation des produits agricoles et des intrants. Les gouvernements aidés par les donateurs extérieurs ont échoué dans ces domaines où l on pense que le secteur privé peut intervenir plus efficacement comme on a pu le constater sur d autres continents (Kevin, 1993 : 6). Libéralisation, réforme et nouvelles politiques d encadrement rural L ajustement a réduit l Etat à ses fonctions de souveraineté. C est au moment où ce dernier se retire des sphères productives que le devenir des paysanneries se pose avec acuité. Dès lors, la question qui mérite d être posée est celle de savoir comment va se gérer la transition. Dans ce contexte où les anciennes structures ne répondent plus aux conditions actuelles de production, les nouvelles qui émergent auront-elles les ressources et les capacités nécessaires pour soutenir les populations rurales dans cette phase délicate où elles doivent s intégrer dans le processus de mondialisation en tant qu acteurs à part entière au lieu d en subir les effets? Depuis 1988, le gouvernement camerounais avec l appui des partenaires étrangers a engagé une réforme du secteur de l encadrement rural dans le cadre de sa politique de désengagement et de libéralisation. Le but de cette réforme était de créer un climat favorable à l émergence d un mouvement coopératif et associatif autonome, financièrement rentable et économiquement viable. Il a été surtout question de repenser la loi sur les coopératives de 1973, dans le but de la rendre plus libérale. En 1990, la loi sur la liberté d association (associations familiales, les comités de développement, les associations d utilité publique, les ONG, etc.) a vu le jour, mais sans grandes orientations économiques. Mais il a fallu attendre 1992 pour voir l Etat s engager irrésistiblement dans la voie de la libéralisation économique. C est dans ce contexte que furent élaborés les textes ayant trait à la réforme de l économie et de l encadrement rural : les lois sur les sociétés coopératives et groupes d initiatives communes (1992) et celle sur les groupements d intérêt économique (1993). La mise sur pied de ce cadre institutionnel marque ainsi la volonté de l Etat de «supprimer lui-même ses assises d accumulation» (Dubresson et Raison, 1998 : 27) et de transférer une partie de ses pouvoirs aux opérateurs privés. De nos jours, les associations de plusieurs types se sont mises en place. Toutes sont de création récente à l exception des coopératives comme l UCCAO qui reprennent la pleine mesure de leur souveraineté. En moins d une décennie, plus de organisations rurales se sont créées. S agit-il pour l Etat de réaliser un peu d économie dans la distribution des facteurs de production, la collecte et la commercialisation des produits agricoles en transférant cette fonction aux organisations paysannes? Ou bien, s agit-il d une réelle volonté de voir émerger de véritables organisations paysannes? Pour les paysans et leurs leaders, s agit-il d un moyen pour eux de s attirer les aides extérieures en cette période de récession économique ou une réelle volonté d autopromotion? De toutes les façons, ce n est ni le vocabulaire (groupement, coopérative, association,...), ce ne sont ni les lois, ni les intentions des uns et des autres qui importent ici. La zone rurale a, plus que par le passé besoin des contre-pouvoirs, des interlocuteurs représentatifs pour défendre les intérêts des diverses composantes de la paysannerie. Dans le contexte actuel de mondialisation, la prospérité paysanne est conditionnée par l existence de groupes de pression paysans en mesure de cogérer avec les opérateurs privés et avec les instances étatiques. Ceci ne peut se réaliser qu a condition que les paysans soient bien formés (non pas seulement dans le domaine agricole comme par le passé, mais aussi et surtout dans tous les autres secteurs) et bien informés pour défendre leurs intérêts. A notre sens, ce n est qu à ce prix que les campagnes peuvent retrouver la route de la prospérité. Bases sociales et économiques de l émergence des organisations paysannes (OP) L ingéniosité et le dynamisme des populations des hautes terres de l Ouest Cameroun ont suscité l admiration de la plupart des chercheurs. En effet, ce peuple a mis sur pied un système social tout à fait original, lui permettant d adapter son agriculture à l accumulation démographique, de jouer un rôle économique de premier plan à l échelle national, notamment en participant ac- 12 ENJEUX N 39 Avril - Juin 2009

13 DOSSIER tivement à l économie marchande tout en sauvegardant l équilibre alimentaire de ses populations. Mais la crise économique et le désengagement de l Etat ont remis en cause ce modèle et les mutations socio-économiques en cours augurent des bouleversements profonds affectant ces équilibres anciens. L heure est aux recompositions sociales, à l émergence de nouvelles activités et des nouveaux acteurs sociaux. Base sociales de l émergence des OP Une crise de solidarité de plus en plus manifeste L originalité de la structure sociale Bamiléké vient de sa complexité, faite à la fois d un «mélange curieux d individualisme et d esprit communautaire» (Lecoq, 1998 : 43). L individualisme se manifeste dans le paysage par la présence de haies vives entourant les parcelles de terre, offrant en vue aérienne l impression d un bocage presque parfait. Chaque famille s isole dans ses concessions et dispose de ses propres tabous qui rythment la vie quotidienne. Si ailleurs dans le continent les populations locales ont manifesté une réticence vis-à-vis des cultures de rente, ce fut le contraire en pays Bamiléké. Au moment de l introduction de la caféiculture, les «indigènes» ont manifesté un grand engouement pour cette culture si bien que l administration coloniale s est trouvée dans l obligation d intervenir pour tempérer leurs ardeurs, les discipliner afin d éviter que toutes les bonnes terres ne lui soient consacrées, mettant en danger sécurité alimentaire et population nombreuse. En effet, cette culture a respecté et renforcé l une des valeurs sociales fondamentales que sont l initiative et la promotion individuelle. Selon Serge Morin, après son introduction vers les années 1920, la caféiculture est vite devenue symbole d autonomie financière, dépassant le rôle strictement monétaire dévolu aux cultures de rente. Le café a de ce fait modifié le comportement des ruraux ainsi que les structures foncières et sociales, et il est devenu symbole d autonomie sociale (Morin, 1994). De nos jours, cet individualisme reste encore bien gravé dans les esprits et certains groupements paysans ont du mal à prendre leur essor à cause de ce facteur. A notre observation, il y a donc tout un sentiment de fierté qui anime les œuvres individuelles, les activités en groupe étant sujettes à une profonde démobilisation. L inadéquation entre entreprises individuelles et projets collectifs peut donc constituer un véritable frein à l émergence de véritables groupements paysans. Mais cette dilution du poids de certaines pratiques sociales telles que la solidarité, l entraide ne signifie pas disparition des réflexes existant pour la défense des intérêts collectifs. Un observateur non averti qui débarque en pays Bamiléké lors d une manifestation traditionnelle (deuil, funérailles, célébration des jumeaux,...) aura l impression d être dans une société fortement communautaire. Comme le constate J.-C. Devèze (1996), dans diverses paysanneries du continent africain, il y a toujours articulation entre stratégies individuelles et collectives, l ampleur des tensions résidant dans les objectifs visés par les groupements paysans: objectifs de solidarité sociale et service à la communauté d une part et les performances économiques individuelles de rentabilité reposant sur une bonne gestion financière d autre part. En effet, il s agit en réalité d une société à double facette, individualiste sur le plan économique et communautaire en ce qui concerne les activités socioculturelles. Les systèmes de valeur qui sous-tendent la solidarité sont en faillite et cette solidarité n est qu un tremplin pour la réalisation des ambitions individuelles. Même au sein de chaque famille, chaque individu apprend à se prendre en charge dès les bas âges. Du côté gouvernemental, les experts du ministère de l agriculture sont conscients du rôle que peuvent jouer les facteurs socioculturels dans l émergence d un mouvement associatif en zone rurale. Cette émergence «doit nécessairement s accompagner des transformations sociologiques et culturelles des 200 ethnies du Cameroun» (MINAGRI/CUROR, 1995 : 55). A ce niveau ils ont jugé bon de développer à travers le système éducatif des vertus morales et intellectuelles, dans le cadre du programme d appui aux organisations du monde rural. Mais ces mesures n ont pas encore été mises sur pied, et la cellule centrale de réforme du de l organisation du monde rural (CUROR) a été dissoute. Les femmes : de nouvelles actrices incontournables dans les nouvelles mutations rurales Dans la société rurale Bamiléké, la division des tâches rendait chaque sexe responsable et autonome mais c est à la femme qu incombait la plus grande partie du travail. L introduction des hautes terres de l Ouest dans l économie marchande à partir des années 1920 a alourdi leurs corvées quotidiennes car à leur fonction sociale vont s ajouter les multiples tâches des plantations caféières. Malgré ce rôle économique et social irremplaçable, elles font l objet d une grande marginalisation quant à la gestion des revenus familiaux. «Même si elles disposent d une certaine autonomie, notamment en matière de commercialisation de leurs produits, elles sont astreintes à diverses formes de surtravail» (Guillermou, 2000 : 95). Il s agit là d un sujet qui a intéressé plusieurs chercheurs qui à ce niveau ont des points de vue convergents com- ENJEUX N 39 Avril - Juin

14 DOSSIER me Dongmo J.-L. (1981) 9. Cette marginalité se ressent même au sein de la structure coopérative (UCCAO) au sein de laquelle elle est sous représentée. Pour Courade, cette situation émane d un problème de base, car selon eux, si l importance de la femme n est pas perçue au sein de l UCCAO, c est qu elles sont dans l agriculture «à titre anonyme» (Courade et al., 1991 : 891). La crise économique de la fin des années 1980 marque un tournant décisif, en ce qui concerne la place de la femme dans la société rurale. La baisse des revenus tirés de la caféiculture (dont les hommes tiraient l exclusivité des profits) et l essor du secteur vivrier et maraîcher ont profondément affecté les rapports hommes-femmes. Le phénomène est lié au développement fulgurant des centres urbains qui réclament plus que par le passé les vivres et l ouverture d un marché sous régional qui permet aux vivres produits sur les hautes terres d arriver en RCA, Congo, Gabon. Cette situation a un effet double, le renforcement des revenus des paysannes et leur poids social. Désormais, elles ne constituent plus seulement une main-d œuvre au service des hommes mais aussi elles sont devenues des partenaires économiques sur lesquels on peut compter pour la résolution des problèmes familiaux. Elles complètent les revenus des ménages et assurent les dépenses de plus en plus importantes (notamment la prise en charge du secteur de l éducation, de la santé). L organisation collective est devenue pour les femmes un moyen d affirmer leur rôle dans la production agricole et de garantir leur autonomie économique et sociale. Elles démontrent qu elles sont douées de grandes compétences, d une capacité d organisation et d innovation dans le cadre de nouveaux systèmes de production. Cette situation économique est entrain de modifier constamment son statut social. Au sein des différents groupes, leur participation est tout à fait remarquable. Certaines ONG comme le CIPCRE 10 placent la promotion des activités féminines au centre de leurs activités. Ceci se fait dans le cadre de ce qui est convenu d appeler l approche «gender» ou approche genre. Tenir donc compte du «gender» signifie qu on s appuie sur une analyse plus complète de la société dans la recherche de l efficacité et de l optimisation de la mise en œuvre de toutes les ressources humaines. Au sein de différents OP, la mixité est générale, et dans bien de cas, elles constituent elles sont majoritaires. Pour le moment, il est quand même difficile de dire si ce sont les groupements des femmes qui sont les mieux lotis pour propulser les économies rurales. Néanmoins, il est déjà reconnu qu elle constitue un potentiel important dans le mouvement associatif des hautes terres de l Ouest-Cameroun. Bases économiques des mutations des OP L émergence du mouvement associatif sur les hautes terres de l Ouest Cameroun coïncide avec la recrudescence de la pauvreté en zone rurale. Les paysans sont à la recherche d un nouveau départ dans un contexte de désengagement de l Etat et d émergence de nouveaux acteurs sur la scène de développement rural. Les organisations paysannes qui se sont formées sur les hautes terres disposent-elles de moyens devant leur permettre d améliorer à terme leurs conditions d existence quotidiennes? Quel est l impact des aides extérieures sur le fonctionnement quotidien des groupes paysans? D entrée de jeu, on peu dire que les OP des hautes terres de l Ouest Cameroun ont des moyens de production très limitées pour la pratique d une agriculture concurrentielle. Le principal facteur limitant semble être la question de manque de terres qui a longtemps trouver solution dans les migrations. La stratégie migratoire a pendant longtemps constitué une solution efficace au problème de manque de terre en pays Bamiléké. Mais loin de pouvoir résoudre le problème à longue durée, cette option n était qu une façon de transposer le problème dans le temps et dans l espace. Pour Morin S. (1993), ce processus résulte plus du refus des sociétés Bamiléké d accomplir la révolution agraire, que d une fatalité liée à la pression démographique. Il va falloir jouer sur les rendements agricoles qui doit se négocier avec l apport en fertilisants pour les sols cultivés pendant longtemps et sans jachère et l amélioration des techniques de culture. Depuis le désengagement de l Etat, le problème d acquisition des intrants agricoles se pose avec acuité. A titre d exemple, le prix du sac d engrais a doublé en moins de cinq ans, passant de 1700 FCFA en 1988 (l Etat subventionnant à 66%) à 3500 FCFA en 1993 après le retrait de l Etat de la filière. La dévaluation du FCFA est venue renchérir en portant les coûts du même produit entre 8 et FCFA. Ceci met ce principal facteur de production hors de portée de la plupart des paysans, face aux sols qui exigent plus que par le passé des apports en engrais. Ceci peut à lui seul aurait constitué une raison fondamentale pour la formation des mouvements paysans. Parallèlement à cette situation, se greffe la non maîtrise 14 ENJEUX N 39 Avril - Juin 2009

15 des techniques de production. En effet, le désengagement de l Etat s est opéré quand le «paquet technique» des différentes structures publiques d intervention en zone rurale étaient encore à mi-chemin par rapport aux objectifs visés. Planteurs et principaux responsables techniques étaient encore loin d avoir rajeuni leurs outils de production, d avoir intensifié leur agriculture ou d être devenu compétitifs malgré les efforts des techniciens, les agronomes et des sociétés d encadrement. Pour affronter l économie libérale, les paysans ne sont l expression des besoins des OP. Il se dégage des observations de terrain est que les différents volets de formation font partie d un programme général des organismes d appui qu ils veulent appliquer aux organisations paysannes. Les discours contradictoires font légion, chaque structure d appui proposant sa forme d appui, sans aucun cadre de coordination des actions. pas suffisamment outillés sur le plan technique. Ces derniers ont certes acquis un savoir-faire dans leurs anciennes activités (caféiculture) mais les nouvelles activités exigent tout un autre pacage technique pour la production des cultures vivrières et maraîchères, l élevage. Les organismes d appui aux organisations du monde rural proposent à cet effet des programmes de formation intenses intégrant les domaines divers : formation de leadership pour la gestion des groupes, formation en agroforesterie, en culture de pomme de terre, en élevage des porcs, à la culture et à la conservation du maïs, etc. Mais généralement la participation aux formations n est pas Les OP de l Ouest Cameroun ont des bases matérielles globalement faibles. Avec la hausse des coûts des différents intrants agricoles, la question d apport matériel s avère déterminante, surtout quand on doit mener une agriculture concurrentielle sur des espaces réduits. Le but des regroupements dans la plupart des cas est de trouver les moyens pour acquérir un minimum de facteurs de productions. Les expériences passées montrent que l aide extérieure est quelquefois nocive car elle fait perdre l autonomie des OP. Le constat est que les organisations qui à la base de leur regroupement ont d abord compté sur la mise en commun des moyens individuels offrent les expériences les plus pertinentes jusqu à l heure actuelle. Mais certaines premières expériences des ENJEUX N 39 Avril - Juin

16 OP de cette région n enchantent pas, car certaines ne sont formées que pour bénéficier de des appuis et disparaissent aussitôt le programme d appui achevé. Au lendemain du désengagement de l Etat des tâches régaliennes envers le monde rural, celui-ci a été envahi par une multitude de structures d encadrement qui proposent leur service et le soutient financier ou matériel aux paysans 11. Le constat est que de la crise d encadrement, on s achemine vers un encadrement de crise avec le foisonnement des OP, coopératives et ONG à intérêts et motivations diverses, voire divergents. Ces nouvelles structures ont du mal à proposer une solution durable au problème d encadrement paysan. Dynamiques internes et réseaux de relations Dans leur fonctionnement interne (entre les membres) comme externe (rapport avec les instances étatiques, avec les ONG, avec la majorité de la population rurale), au quotidien les OP font l objet de confrontation entre plusieurs acteurs, chacun d eux cherchant à tirer le meilleur parti du jeu. Les jeux de pouvoir Traiter cette question relative aux jeux de pouvoir revient à se pencher sur le mode de désignation des responsables. Et comme toutes les OP se réclament de la démocratie dans la mesure où leur statut fait référence (et surtout pour rester dans l air du temps), l exercice conduit inévitablement à examiner la pratique, sinon la prise en compte des principes démocratiques dans la gestion de leadership paysan. Dès lors, l on est en droit de se poser la question de savoir comment se conquiert le pouvoir? Comment se conserve-t-il? De quelle stratégie use-t-on dans chaque cas? Quels sont les mobiles d alternance? En effet, l application des principes démocratiques en campagne suppose qu on lève un certain nombre de blocages, surtout d ordre psychologique. Avant l émergence des OP, «il y avait beaucoup de concepts et de réalités qu il fallait intégrer aux modes de vie et de pensée : le mode de désignation des leaders, la pratique du vote, l acceptation du verdict des urnes, la prise en compte des phénomènes contradictoires, la notion d adversaire/ennemi au sens politique Tout cela était étranger aux uns et aux autres» (Njonga et al, 1996 : 3). Au sein des OP, les paysans ont trouvé une formule courante pour gérer leur pouvoir : «la démocratie à l africaine» c est-à-dire qu on se désigne et les membres applaudissent. Le pouvoir est encore entre les mains des influents, qui parfois cumulent plusieurs postes à la fois 12. Selon certains paysans, la relative stabilité des leaders n est pas toujours à condamner car les principes démocratiques ne sont pas toujours gages de bons résultats. «La popularité ne garantie pas la victoire ; elle n est même pas gage de compétence» 13. En effet, dans un système de rotation perpétuelle, il est peu probable que le groupement fonctionne de façon efficace. L application des principes démocratiques n est donc qu une illusion, une imitation du contexte national pour ce qui est de la gestion de la vie public. Si les OP continuent de se multiplier indéfiniment, c est juste dans le but du contrôle du pouvoir. Cette quête du pouvoir est à la base de nombreuses instabilités. Une fois qu un paysan en quête de pouvoir est mis hors jeu dans son OP (que ce soit par principe démocratique ou non), il s en va directement créer la sienne. Relation dans l exercice des activités La participation à parité des jeunes, des femmes et des aînés augure plusieurs types de conflits. Dans une structure sociale fortement hiérarchisée comme chez les Bamiléké, cette participation est susceptible d entraîner l affaiblissement du pouvoir des privilégiés. Comment est-ce que les OP mettent en exergue les contradictions entre hiérarchie et égalité? En effet, les OP constituent un bouillon permanent de conflits entre vieux, notables et autres privilégiés qui cherchent à conserver leur rang social et les jeunes et les femmes revendiquant les principes égalitaires. Ces conflits existent au sein d OP entre les acteurs sociaux traditionnellement antagonistes (hommes/femmes, aînés/cadets) notamment sur le foncier et le pouvoir. Le changement social peut apparaître si dans ce jeu de rapport les femmes et les jeunes arrivent à prendre le dessus. Mais si c est le contraire, les OP ne seront qu une transposition du contexte social externe. Au terme de ses études sur les campagnes africaines, J.C. Devèze (1996) conclut que ceux qui appartiennent aux élites villageoises selon le lignage, l ancienneté et le pouvoir cherchent à reproduire leur influence au travers des groupements, tandis que ceux qui réussissent économiquement se préoccupent de la rentabilité et de la gestion. Relations avec les instances étatiques Avec le désengagement de l Etat, la volonté d autonomie et le rôle que jouent les divers acteurs amènent à croire que les OP peuvent se substituer aux fonctions institu- 16 ENJEUX N 39 Avril - Juin 2009

17 tionnelles, notamment celles de l Etat. Les OP les plus performantes sont nées dans un contexte dans lequel il y a collaboration avec l Etat permettant à chaque partie de mieux assurer ses fonctions avec la collaboration de l autre. Depuis le désengagement, les seuls représentants de l Etat à la campagne restent les Chefs de poste agricole avec qui les OP sont censées collaborer. Mais il s agit dans la plupart des cas des groupes qui s ignorent complètement s ils ne sont en confit. A titre d exemple, nous avons rencontré le chef de division de développement communautaire du département des Bamboutos chargé de la supervision des OP de la région. Il nous parlé vaguement d une vingtaine d OP dans la région alors qu à la même période, le service provincial du registre de sociétés coopératives et groupes d initiative communes chargé de l enregistrement des OP disposait d une liste de 143. Un autre exemple d acteurs en conflit nous vient de Bangang où nous avons assisté à une dispute entre le Chef de poste agricole de Nzindong et le délégué du Groupe PROCA. Il est à noter qu au quotidien, ce délégué entretient des rapports très conflictuels avec les chefs de poste de la région qu ils taxent de paresseux, ayant un savoir théorique inadapté pour répondre aux besoins de la population rurale. La collaboration entre les OP et les instances étatiques n est pas formalisée. Dans les dispositions de la loi de 1992 sur les OP, à aucun moment les paysans ne sont censés se retrouver avec les agents de l Etat. Et pourtant, dans le contexte de désengagement, il appartient à cet Etat «de réguler les relations entre acteurs pour que les organisations émergeant ne soient pas soumises à la loi du plus fort» (Mercoiret, 1994 : 228-9). Pour l Etat camerounais, il semble que désengagement et abandon sont synonymes. Les fonctions de contrôle qui devaient être de son ressort sont abandonnées. Mais y a-t-il lieu de conclure qu un mouvement paysan véritable ne peut pas naître de cette situation dans laquelle on est passé brutalement de l interventionnisme étatique étouffant aux OP autonomes et indépendantes? Voilà une question préoccupante susceptible d animer les débats actuels sur le devenir des campagnes. Depuis une vingtaine d années, l Afrique subsaharienne a été déclarée sinistrée par les institutions et les bailleurs de fonds internationaux. De nos jours, les importantes transformations qui affectent les sociétés rurales laissent présager un nouveau visage des campagnes de demain. La masse paysanne a été pendant longtemps marginalisée, le contexte politique ne lui offrant aucun cadre organisationnel lui permettant d affirmer et de défendre ses intérêts. De ce fait, l organisation du monde rural qui constitue l une des composantes maîtresse des changements en cours a pour mission de renforcer les contre-pouvoirs qui doivent obliger l Etat à améliorer ses capacités de réponse s il veut être pris en considération par les ruraux. Les hautes terres de l Ouest-Cameroun connaissent un foisonnement d organisations paysannes. Tout mouvement social - et l émergence des organisations paysannes en est un - façonne sa politique à travers l expérience, ce qui veut dire que le mouvement paysan cette région n a pas encore dit son dernier mot. Les inadaptations actuelles peuvent n être que des faits passagers ou une vision de surface. En effet, les discours développementistes des organisations paysannes prêtent à des interprétations diverses pouvant entraîner des déformations importantes. Dans la majorité des cas, convergence entre dynamiques internes et impulsions externes d une part, et volonté de renforcement de la solidarité locale et le recours aux aident extérieures conduisent à des stratégies floues et incohérentes. Les expériences anciennes et récentes montrent bien que les petits et moyens paysans ont tout intérêt à se prendre en charge. Dans le contexte actuel, nous restons persuadés que l agriculture familiale a besoin d appuis sous diverses formes. Mais les champs rapidement balayés (innovations techniques, désengagement de l Etat, émergence d organisations paysannes) n épuisent pas la gamme des apports nécessaires. L expérience des deux dernières décennies en Afrique et ailleurs montre que les organisations paysannes disposant d une réelle assise sociale et de structures solides peuvent, dès lors qu elles répondent aux priorités de la majorité population, en comptant d abord sur leurs propres forces, déclencher une dynamique nouvelle et engager les sociétés rurales dans la voie de l autopromotion. Certes, il ne fait guère de doute que l agriculture familiale a besoins de divers soutiens financiers, à condition que ceux-ci viennent appuyer de réelles initiatives paysannes, au lieu de se substituer à elles. Enfin, l autonomie des organisations paysannes, loin d être synonyme d autarcie et de repli en soi, implique le renforcement de leur capacité de négociation avec les acteurs extérieurs et les instances étatiques. ENJEUX N 39 Avril - Juin

18 Indications bibliographiques Barbedette L., Le mouvement paysan camerounais : quelles évolutions? quels appuis? Yaoundé, SAILD, 97p. Courade G. (sous la direction de), Le désarroi camerounais : l épreuve de l économie-monde. Paris, Karthala, 243p. Courade G., Eloundou-Enyegue P., Grangeret I., «L Union Centrale des Coopératives agricoles de l Ouest (UCCAO) : de l entreprise commerciale à l organisation paysanne» in Revue Tiers monde, t.xxxii, n 128, oct.-déc., pp Courade, G. (Sous la direction de), Le village camerounais à l heure de l ajustement. Paris, Karthala, 410p. Devèze J.-C., Le réveil des campagnes africaines. Paris Karthala, 242p. Dongmo J.-L., Le Dynamisme Bamiléké, Vol. I. La maîtrise de l espace agraire. Yaoundé, CEPER, 425p. Dubresson, A., Raison J.-P., L Afrique subsaharienne. Une géographie du changement. Paris, Armand Colin, 1998, 248p. Feudjeu G. B., Emergence d une organisation paysanne (UGICAES) sur l ancien domaine rizicole de la SODERIM et diversification des activités agricoles. Mémoire de Maîtrise, Université de Dschang, 121p. Gentil D. et Mercoiret M.-R., «Y a-t-il un mouvement paysan en Afrique noire?» in Revue Tiers monde, t. XXXII, n 128, oct.-déc., pp Gentil D. et Mercoiret M.-R., «Le dispositifs d appui à l organisation paysanne» in L avenir des paysans : mutations de l agriculture familiale dans les pays du sud. Paris, PUF, pp Guillermou Y., 1994 : «Encadrement étatique et formes d organisation autonome en secteur paysan «marginalisé» : cas de l Algérie et du Congo» in Les associations paysannes en Afrique. Organisation et dynamique. Paris, Karthala, Guillermou Y., «Mutations agraires et organisations paysannes sur les hautes terres de l Ouest-Cameroun» in Déprise caféière et mutations socio-économiques sur les hautes terres de l Ouest-Cameroun. Geodoc n 51, Université de Toulouse-Le Mirail, pp Jacob J.-P., Lavigne-Delville Ph., Les associations paysannes en Afrique. Organisation et dynamique. Paris, Karthala, 311p. Janin P., «Tout change pour que tout reste pareil». Ruptures et continuités en économie de plantation Bamiléké et Beti (Cameroun) en période de crise» in Cahier des Sciences humaines, ORSTOM, Vol. 32, n 3, pp Laffite A., Repérer les initiatives et innovations. Pourquoi? Comment? inédit, 36p. Lecoq R., Les Bamiléké. Paris, Présence africaine, 213p. Mercoiret M.R., 1994 : L appui aux producteurs ruraux. Ministère de la coopération, Karthala. MINAGRI/CUROR, Programme d appui aux organisations rurales. Document de travail de l atelier de Limbé (28-29 juillet 1995). Yaoundé, 59p. Morin S., «colonisation agraire, dégradation des milieux et refus de l innovation dans les hautes terres de l Ouest-Cameroun» in Innovation et développement. 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Volume 1, Centre Universitaire de Dschang, pp Notes 1 Cette politique s est traduite au cours des années successives (notamment au niveau des différents plans quinquennaux de développement qui accordaient toujours une place importante au développement rural) et depuis le lancement de la révolution verte en 1973 par la mise en œuvre des mesures propres à son épanouissement. Parmi les mesures les plus significatives figurent l institution des comices agropastoraux, du concours de la plus belle plantation, l installation des jeunes agriculteurs dans leur village respectif et dans les zones de colonisation agricole (opération Yabassi-Bafang, projet route du Noun), le renforcement de la recherche agronomique et la multiplication des sociétés d encadrement agricole, des offices nationaux, entreprises publiques et projets de développement à connotation agricole à l échelle des régions. 2 Les tracasseries administratives, les trafics d influence, le monnayage des services publics, le détournement des fonds publics et toute sorte de gabegies (...) expliquent la défaillance de l Etat dans plusieurs secteurs de la vie économique. 3 Union Centrale des Coopératives Agricoles de l Ouest 4 Société de Développement de la Riziculture dans la plaine de Mbo 5 Les méandres du sondage et de l échantillonnage du café, le couloir sombre de la caisse 6 Ce projet avait un coût prévisionnel de 21,828 milliards de francs CFA. Ce projet visait à court et à moyen terme : un ralentissement de l exode rural par l augmentation de la productivité des exploitations paysannes et l amélioration des conditions de vie en campagne de façon générale, un accroissement de la production alimentaire nationale et des recettes d exportation, un renforcement et une décentralisation des institutions régionales de développement. 7 La SODERIM est une société d Etat crée en 1973 en vue de la promotion de la riziculture dans la plaine des Mbo, sur un domaine de près de ha. Elle est tombée en décadence à partir de 1987 suite à la crise économique. Elle a été liquidée en 1997 et c est dans son ancien domaine qu émerge l un des plus prospères groupements paysan de la région à savoir l UGICAES (Feudjeu, 1999). 8 La SEMRY, secteur expérimental et de modernisation de la riziculture de Yagoua, a été créé en 1954 pour devenir en 1971 société d expansion et de modernisation de la riziculture de Yagoua. C est une entreprise chargée de promouvoir la riziculture. Elle a failli à l une de ses principales missions, celle d assurer l autosuffisance nationale en riz. «Le laxisme de l appareil de l Etat à l égard de l importation du riz étranger pour protéger un riz national au coût de production élevé (...) explique cette situation» (Domo J., 1994 : 264). 9 quand les Européens ont introduit la caféiculture, les hommes ont reçu la responsabilité et vendent la production à leur profit, mais ce sont les femmes qui assurent l essentiel du travail de production : trouaison, sarclage, fumure, cueillette et préparation (dépulpage, lavage et séchage), tandis que l homme se contente le plus souvent de répartir et de surveiller les travaux (Dongmo, 1981 : 108) 10 Cercle International pour la promotion de la création (ONG environnementaliste) 11 L aide publique au développement octroyée pendant longtemps aux populations locales par les bailleurs de fond á travers les gouvernements ne les atteignait presque pas. A l heure de la prééminence de la politique de libéralisation, ces bailleurs avouent privilégier directement l échelle locale qui à leurs yeux est supposée premièrement faciliter une meilleure identification des besoins par les populations concernées, deuxièmement offrir les meilleures conditions d applicabilité des projets au plus proche des destinataires et en troisième lieu offrir un cadre pertinent de participation populaire aux actions de développement (Dubresson et Raison, 1998 : 34). 12 Il y a des membres qui sont à la fois Président du conseil d orientation, Président du comité épargne et crédit, Président de, Responsable de 13 Déclaration de Joseph Tamengouh, Président de l union des groupements et associations paysans pour l auto promotion de Bamboutos : UGAPAB cité par Njonga et al, 1996 : 5). 14 Producteurs et Consommateurs Associés. 18 ENJEUX N 39 Avril - Juin 2009

19 La paysannerie montagnarde au Cameroun septentrional est-elle non capturée? Par ALAWADI ZELAO, sociopolitiste, Université de Yaoundé I (Cameroun) Il est bien loin de l esprit de cette réflexion l idée de remonter au temps colonial pour rendre raison de la construction de la paysannerie en contexte africain aujourd hui. C est qu en effet depuis l accession de la plupart des pays africains à l indépendance dans les années , l Etat a toujours cherché à «encadrer» les sociétés paysannes par le bais de l économie moderne de type capitaliste adossée pour l essentiel sur l agro-industrie (Geschiere et Van der Klein, 1987). La pénétration de l Etat dans les brousses africaines a ainsi induit des changements inédits dans la vie des groupes sociaux longtemps ajustés à une production de type coutumier et domestique. telle que véhiculée par l Etat post-colonial s est-elle véritablement emparée de l imaginaire des paysans dans leur mode de production agricole? En prenant pour site d énonciation les paysans montagnards longtemps soumis aux stratégies de domestication de l Etat post-colonial en contexte camerounais, cette étude vise à mettre en exergue le degré d innovation et d extraversion des territoires paysans. La vie des paysans montagnards du Cameroun septentrional subit d importantes mutations depuis l intrusion de l idéologie étatique de la production de type capitaliste. Il va s agir dans le cadre de cette brève analyse de Qui plus est, l idéologie étatique des zones rurales opère une transgression des pratiques culturales chez les paysans. Le cadre traditionnel ne constitue plus, comme par le passé, l horizon des pratiques et des conduites agricoles. Pour autant est-il loisible de postuler d un passage radical d une «économie d affection» (Goran Hyden, 1985) à une «économie de production capitaliste» (Geschiere, 1984)? La greffe de l idéologie productiviste discuter dans un premier temps de la thèse développée par Goran Hyden et de sa pertinence en rapport avec les réalités paysannes au Nord-Cameroun. La deuxième articulation explore la dynamique étatique de pénétration et de construction d un ordre paysan. Le troisième volet de l argumentation interroge la technostructure du monde paysan à travers la pluralité d acteurs intervenants et des rationalités en procès. ENJEUX N 39 Avril - Juin

20 Peut-on actualiser Goran Hyden en territoire paysan montagnard? Le corrélat de base qui sous-tend la posture analytique de Goran Hyden au sujet des sociétés paysannes africaines révèle qu en dépit de l intrusion de l idéologie capitaliste dans les modes de production agricole, les sociétés africaines sont restées globalement imperméables aux assauts de la colonisation occidentale. Etayant une telle perspective d analyse l auteur écrit fort à propos : «Les économies africaines restent en fait largement dépendantes de l agriculture, d une paysannerie de plus en plus différenciée mais qui a recours à des formes rudimentaires de production et qui utilise fort peu de moyens produits par les autres secteurs économiques. Ces économies ne connaissent pas la variété productive propre aux économies plus avancées alors que les capacités internes des entreprises commerciales et manufacturières sont très faibles. La faible productivité de l agriculture paysanne trouve sa confirmation dans la discordance croissante entre les taux africains de production et les taux mondiaux» (Goran Hyden, 1984 : 95). De ce point de vue, la colonisation n a pas eu raison du système traditionnel de production. Les pratiques culturales des paysans sont restées stables voire statiques malgré l introduction de nouveaux modes de production portés par les puissances coloniales en direction de leurs possessions coloniales que sont désormais les sociétés africaines. Selon Goran et d autres auteurs comme Belonclé (1986), les milieux paysans africains sont restés foncièrement indociles face aux techniques de modernisation de l idéologie occidentale. Ainsi, plutôt que de rompre avec les modèles coutumiers de production agricole, les sociétés africaines seraient victimes d une vision misonéiste et statique de l histoire. La colonisation en matière d extraversion agricole serait alors un pur échec, la greffe n ayant pas pris. Les habitus des pratiques agricoles des paysans reposent fondamentalement sur ce que Goran appelle «l économie d affection», c est-à-dire un régime de production agricole coutumier et domestique prioritairement destiné à la consommation familiale, et qui utilise les outils élémentaires voire rudimentaires (houe, faucille, machette..). Une telle économie n est nullement axée sur la production à grande échelle. Elle vise d abord à satisfaire les besoins immédiats de la famille ou du clan. C est cette économie-là qui, selon Goran, caractérise encore la plupart des pays africains ayant accédé à l indépendance dès les années En contextualisant son étude au cas de la Tanzanie, pays du reste marqué par le «socialisme africain» (Ujaama i.e. famille), l auteur a voulu élaborer un cas d école devant servir d explicitation des expériences vécues par d autres pays africains. C est donc une tentative d approche qui distille des relents universalistes. La permanence de «l économie d affection» dans la conscience des paysans africains serait alors un signe de rejet du modèle occidental qu ils manifesteraient à souhait par leur «choix d évasion», de réclusion dans le périmètre d agriculture primaire. Une telle posture analytique rend-elle vraiment compte de la complexité d émergence de la paysannerie en Afrique à partir du contexte colonial? Autrement dit, le «fait colonial» n at-il produit aucune «dynamique» (Balandier, 1971) sur les sociétés traditionnelles africaines, fut-elle en terme de restructuration (innovation, ajustements) ou de déstructuration (rupture, crise structurelle). La résurgence ou plutôt la rémanence d une pratique ancienne ou antérieure suffit-elle à souligner l incapacité d une société à se renouveler, à se ré-ajuster dans le temps et dans l espace? Le changement social (quand bien même il adviendrait) est-il un phénomène de tabula rasa, c est-à-dire de nivellement des dispositions sociales antérieures? L expérience des paysans montagnards révèle que si le modèle colonial s est imposé à travers notamment la production cotonnière, il n en demeure pas moins que les pratiques culturales coutumières sont encore à l œuvre non sans avoir subi des mutations plus ou moins saisissables de prime abord. Avant que n intervienne la production cotonnière chez les paysans des montagnes au Nord-Cameroun, leur système de production agricole avait un but essentiellement domestique, c est-à-dire de subsistance. L économie de marché n existait pas et les échanges de type économique s opéraient par le biais de troc. L on pouvait ainsi échanger une chèvre contre le mil, un coq contre le haricot, le souchet contre le sésame, etc. Dans ce contexte également, les instruments de travail agricole étaient des plus rudimentaires sinon même rustiques : houe, faucille, hache, daba, etc.. En général, l espace d échanges ne dépassait pas la famille ou le clan. Pour utiliser le vocabulaire de Durkheim, ce fut l époque où prédominait la «solidarité mécanique» (1996) entre les individus dont les relations de consanguinité et de voisinage sont bien établies. L avènement de ce que Balandier appelle la «situation coloniale» (1982) va engendrer des déséquilibres dans cette vie sociale jadis ordonnancée par des valeurs traditionnelles transmises ici de génération en génération. L introduction de la production cotonnière est un événement 20 ENJEUX N 39 Avril - Juin 2009

21 «sismique» qui crée une «crise» dans les pratiques culturales et l imaginaire collectif des paysans (Ela,1999: ). Longtemps structuré autour du «mil» (valeur de subsistance et de religion), l imaginaire paysan des montagnards va progressivement, sous l influence des pouvoirs publics, s orienter vers la culture du coton pour des objectifs purement économiques. La culture cotonnière engendre la dépendance du paysan montagnard vis-à-vis de l Etat, de même que ce dernier n a aucune prise sur les prix de ce nouveau produit. Par le biais de cette culture, l Etat post-colonial s aliène la liberté des paysans qui sont désormais placés sous son giron. Est désormais en construction la problématique de «capture» de cette paysannerie qui fut confinée longtemps dans un système de production pré-moderne. Certes, l avènement du coton n amène pas le paysan à abandonner son mode de production vivrier, mais il ne peut plus assumer ses besoins à travers le mil ni le haricot. La modernité est elle-même source de nouveaux besoins (santé, éducation, voyage) et les échanges économiques, de plus en plus extrovertis, se monétarisent. L on passe ainsi d une économie de troc à une économie monétaire. L agriculture de subsistance cède peu à peu devant l agriculture à but économique. Les nouvelles pratiques agricoles surgissent à travers l attelage, l utilisation des intrants, les plantations aux piedmonts, utilisation des méthodes plus modernes, etc. En somme, la thèse développée par Goran Hyden, ne tient que par son côté «pittoresque» qui tendrait à montrer que les paysanneries en régions africaines sont superbement restées prisonnières d un temps lointain qu elles se remémoreraient à l envie. Comme pour dire qu elles sont viscéralement passives et statiques. Une telle perspective d analyse n est ni moins ni plus que européocentriques. Les paysans montagnards au Cameroun sont, depuis leur rencontre avec les «dynamiques du dehors» (colonisation occidentale notamment), dans une phase d ajustements permanents. Leurs pratiques agricoles actuelles constituent un balisage des modèles internes et des modèles venus de l extérieur. Difficile alors de dire que les paysans montagnards ont échappé à la «capture» de l idéologie capitaliste portée par l Etat post-colonial. Les technologies socio-étatiques de domestication et de dressage de la paysannerie montagnarde L histoire de la paysannerie en Afrique est indissociable de celle de l Etat advenu au lendemain des indépendances. Très vite, l Etat va mettre en œuvre une politique agricole qui s inscrit dans la perpétuation de l idéologie capitaliste telle que véhiculée par les anciennes puissances coloniales. En rapport avec la situation des paysans montagnards au Nord-Cameroun, la dynamique de domestication de l Etat post-colonial va se traduire par un certain nombre d actions qui visent à sortir le paysan de son cadre traditionnel de production pour l installer dans un espace idéologique codifié par les pouvoirs publics. Politique de migration Amorcée timidement vers la fin du temps colonial, la politique de migration des peuples des montagnes va mieux s élaborer sous l instigation des pouvoirs publics camerounais. Face à la résistance manifestée par les paysans, l administration locale va utiliser des méthodes des plus coercitives et répressives pour faire descendre les montagnards dans les plaines. «L année 1963 est celle de la descente forcée des montagnards en plaine. Les montagnards établis sur le moindre éperon rocheux doivent descendre du seul fait qu ils dominent la plaine de quelques mètres. Les habitations juchées sur les massifs doivent se déplacer près des pistes pour en faciliter la surveillance. Tous les chefs de canton des massifs reçoivent l ordre de faire descendre leurs gens» (Boutrais, 1973 : 70). En effet, contrairement aux régions des montagnes, les plaines sont démographiquement désertes et les peuples (Foulbé, Mandara ) qui s y trouvent n ont pas une tradition agricole de longue date. L objectif affiché par les autorités publiques est de décongestionner les montagnes qui restent fortement concentrées du point de vue démographique. De même, les montagnes sont considérées par l Etat du Cameroun comme une région où le développement socio-économique ne peut se concrétiser en raison de l environnement physique austère et très accidenté. Au-delà de l aspect purement agricole (et donc économique), la politique de migration a aussi visé à inscrire les montagnards dans la communauté nationale. Leur venue en plaine les rapproche de l administration, et ils acquièrent progressivement la conscience d appartenir à une entité plus grande qu est le Cameroun. La politique de migration est ainsi sous-tendue par des visées à la fois économiques et politiques. L Etat du Cameroun envisageait de promouvoir la culture cotonnière dans cette région de même qu il cherchait à intégrer une catégorie sociologique longtemps restée en marge de l idéologique étatique. ENJEUX N 39 Avril - Juin

22 Les «casiers de colonisation agricole» Afin de permettre l installation effective des paysans montagnards dans les plaines, il été créé des «casiers de colonisation» qui consistent en des zones d accueil et des espaces identifiés qui devraient servir des lieux d implantation aux différents contingents des paysans. Ces «casiers de colonisation» ont essentiellement porté sur la culture cotonnière. On peut ainsi évoquer les casiers de colonisation agricole dans des zones telles que Koza, Mokyo, Doulo, Kourgui, Gansé si on s en tient uniquement aux régions montagneuses de Mokolo et de Mora. A travers cette technique d encadrement des zones rurales s opère peu à peu la sortie du paysan de son espace traditionnel de production. La plaine apparaît ainsi comme un lieu d étrangeté où le paysan doit tout apprendre et s adapter désormais à un nouveau système de pratiques culturales. Si en montagnes, c est la «culture en terrasses» qui domine, en plaines les paysans doivent expérimenter la culture attelée. Ceux-ci doivent se consacrer pour l essentiel à la culture cotonnière dont ils n ont développé aucun système de représentation, contrairement au mil qui occupe une place de choix dans la cosmogonie des paysans montagnards. Les «casiers de colonisation» imposent de nouvelles manières de faire et d agir aux paysans montagnards désormais repositionnés en plaines. C est un indicateur de la modernisation des pratiques agricoles dans des zones où il est difficile de parler de grands fermiers avec un stock de connaissances modernes. L encadrement autoritaire des paysans montagnards Le contexte idéologique dans lequel s opère le passage du modèle de production agricole traditionnel au modèle de production agricole moderne chez le paysan montagnard au Nord-Cameroun est foncièrement marqué par une double figure de violence (Motaze Akam, 1990: 71-97). A la violence coloniale articulée par les autorités métropolitaines s est ajoutée la violence de l Etat post-colonial. L introduction de la culture cotonnière par l administration coloniale française s est faite de façon brutale et n a point pris en compte les systèmes de production agricole pré-existant. C est sur un tel paradigme de rupture que l Etat post-colonial va également ériger sa politique de domestication des zones rurales en général. Les paysans montagnards étaient contraints d intégrer la culture cotonnière dans leurs pratiques culturales. L effet est d autant plus traumatique que l environnement écologique dans lequel ils sont désormais amenés à pratiquer leurs activités agricoles est tout autre. L adhésion des paysans à cette culture n a été possible que grâce à un système d encadrement adossé au maillage des «casiers de colonisation», c est-à-dire aux zones d installation des paysans par l ensemble des autorités administratives et traditionnelles. Cultiver le coton rentrait dans l accomplissement d un devoir civique. Y résister est un acte de défiance vis-à-vis des autorités publiques. Le paysan ne pouvait ainsi négocier sa liberté qu à ce prix. La culture cotonnière symbolisait alors le retour de l Etat dans les zones rurales. Les autorités politiques veillaient à sa promotion car le développement socio-économique du pays en dépendait. Par cette culture autre se distille dans la conscience des paysans montagnards la violence symbolique de l Etat qui ne cesse de chanter les louanges aux «seigneurs de la terre» sur qui repose désormais l économie nationale. Peu à peu prend pied «l Etat planteur» (Ela, 1990 : 188), et dont l action stratégique est de monopoliser et de renforcer le contrôle sur les paysans à travers les complexes agro-industriels. La technostructure dans la dynamique d encapsulation des zones paysannes La présence de l Etat dans les milieux ruraux est matérialisée par l intervention d un certain nombre d acteurs dont les rationalités d action et de vision sont loin d être identiques et même convergentes. S ils peuvent être porteurs de l idéologie étatique, ils ne développent pas moins des stratégies plus ou moins autonomistes. Ces acteurs assurent à tout le moins la fonction idéologique de l Etat en matière d encadrement paysan. L élite bureaucratico-administrative Selon Ela (1990), la figure de l Etat dans les villages africains est symbolisée par l élite bureaucratique qui sert de courroie de transmission à l administration centrale à l échelle locale. En monopolisant et en orientant de façon unilatérale la définition de la politique agricole, l Etat post-colonial a fini par imposer sa tutelle aux catégories sociales paysannes qui sont désormais contraintes d arrimer leurs pratiques culturales à celles édictées par les pouvoirs publics. A travers ses démembrements au niveau local, l administration ayant en charge le secteur agricole veille sur l appropriation par les paysans de la politique agricole telle que conçue par l Etat. L objectif étant de sortir les paysans de leur cadre traditionnel de production pour les installer dans un système de production de type capitaliste. Dans ce sillage, le monitoring agricole est exclusivement le fait des représentants 22 ENJEUX N 39 Avril - Juin 2009

23 de l administration, qui passent des consignes chez les paysans en termes des nouvelles pratiques culturales à adopter, des techniques de labeur à faire et des cultures (coton, arachides) à privilégier. Sous l impulsion des moniteurs agricoles, le travail paysan s organise en raison de la vision techniciste et productiviste de la bureaucratie étatique. Les plantations réservées à la culture font l objet d un traitement particulier. L usage des cordes, de l attelage et des intrants agricoles marque l avènement des nouvelles pratiques chez les paysans. C est l ensemble de l espace paysan qui subit des mutations avec l entrée de l idéologie bureaucratique dans les zones rurales. En effet, le rapport de l élite bureaucratique au monde paysan repose sur des logiques de domestication et de reconversion. L imaginaire paysan devrait désormais intégrer et s arrimer au modèle de production édicté par les pouvoirs publics. A dire vrai, l élite bureaucratique évoluant en territoire paysan agit en véritable relais de l Etat. Pour passer un message pour la promotion d une nouvelle technique ou d une nouvelle méthode, pour tenir une réunion avec les contonculteurs ou autres planteurs, pour lancer une coopérative agro-pastorale, il est toujours fait allusion à l Etat posé ici comme le «grand employeur» des forces paysannes. Une telle allusion vise à susciter l adhésion spontanée des paysans aux idéaux véhiculés par les acteurs publics de l administration agricole. La prise en compte de cette symbolique dans le vécu des sociétés paysannes n est pas anodine si l on prend en compte le contexte politique d alors où le rapport existant entre le pouvoir et les paysans est de type asymétrique. Le rôle de l Etat dans le processus de modernisation des sociétés paysannes est donc important. L étatisation de l espace paysan consacre ici la prévalence et la prégnance des orientations publiques de la politique agricole dont se fait l écho l élite bureaucratique auprès des paysans. Au-delà de cette politique d encadrement paysan, il y a également la dimension idéologique qui se dégage. Si l élite bureaucratique sert de véhicule des intérêts de l Etat au sein des sociétés paysannes elle en symbolise aussi la figure dominante. Aujourd hui comme par le passé l image du chef de l Etat collée dans les habitations des populations paysannes en traduit la parfaite illustration. Une telle image émet des effets d assignation sur le répertoire des représentations du paysan. Ce dernier se sent désormais lié à une communauté plus grande comme la nation et dont le chef lui est proche à travers notamment l image. C est sur de tels affects que mise l élite bureaucratique dans la sensibilisation des paysans aux différents corrélats de la politique agricole de l Etat. Sous l effet conjugué d une telle séduction, le paysan de ENJEUX N 39 Avril - Juin

24 tel village ou de telle contrée sait désormais qu il est appelé à produire pour l Etat, pour l autorité publique et non pour sa communauté d origine. Dans la stratégie de pénétration de l Etat dans les communautés paysannes, la prise en compte de cette dimension purement affective est sans nul doute importante qu elle n y paraît. L autorité lamidale et le courtage en milieu paysan L acteur lamidal a joué un rôle stratégique dans la promotion de la catégorie paysanne au Nord-Cameroun. En raison de leur proximité sociale et de leur poids dans la vie des communautés, le lamido a toujours bénéficié d une attention toute particulière dans la promotion du développement rural dans cette région du Cameroun (Motaze Akam, 1990). Aux côtés de l administration publique, le lamido est un collaborateur privilégié dans l encadrement des paysans montagnards émigrés en plaines. La descente des paysans montagnards en plaines offre l opportunité aux chefs traditionnels musulmans de raffermir leur pouvoir sur cette catégorie sociale jadis recluse dans les montagnes. L organisation des «casiers de colonisation» agricole dans les plaines permet aux lamibe de mieux contrôler les paysans qui, du point de vue de commandement traditionnel doivent dépendre de l autorité lamidale. Parce que dans la législation foncière musulmane la terre appartient aux chefs traditionnels, tous ceux qui s y installent doivent se référer à son autorité. Bien qu émigrés dans ces régions sous la pression des pouvoirs publics, les paysans devront affronter la domination de type lamidal. La spéculation foncière et l utilisation de la main d œuvre agricole de ces paysans sont des stratégies par lesquelles les autorités traditionnelles musulmanes s adjugent le travail des montagnards. Les lamibe exploiteraient là leur position «d auxiliaire d administration» pour accroître leur suzeraineté sur ces paysans. C est dans ce contexte qu émerge un phénomène nouveau dans la dynamique de relation qui existe entre les lamibe et les paysans au Nord-Cameroun. Il s agit justement du phénomène de «courtage» qui souligne les stratégies développées par l ensemble de ces chefferies traditionnelles pour tirer profit à des fins personnelles du travail du paysan. Une telle conduite chez les lamibe montre le caractère patrimonial et lucratif de l interdépendance qui les lie aux paysans. «( ) les migrants [montagnards] vivent une réinterprétation de l histoire peul-kirdi qui a toujours reposé sur la domination et l exploitation du second par le premier» souligne Motaze Akam (1998 : 48). Dans cette perspective, les paysans apparaissent aux yeux des lamibe comme des serfs agricoles dont il faut extorquer le surplus de production. C est dire que le paysan devrait être à la fois au service des pouvoirs publics et des autorités traditionnelles. «L empire du coton» dont a parlé Ela (1998) rend compte de ce faisceau d intérêts qui se sont greffés autour de cette nouvelle culture qui sert d abord à codifier le système d inégalité articulé par les différents acteurs intervenants dans ce secteur agricole. Les développeurs et leur idéologie en milieu paysan montagnard Le développement rural a été porté au Nord-Cameroun par un certain nombre d acteurs et de structures dont l action visait à transformer le monde rural dans la perspective modernisatrice. Par «développeurs» il faut entendre l ensemble de structures et d organisations nationales ou internationales qui se sont investies dans le développement rural à travers l introduction de nouvelles techniques et méthodes dans le secteur agro-pastoral. Ces structures ont œuvré aux côtés des pouvoirs publics à la réorganisation de la paysannerie locale par le biais de lancement des projets innovants tels que les projets Nord Est de la Bénoué (Lagdo), Sud Est de la Bénoué (Touboro, Mbaimboum), Adamaoua Nord (Mbé), etc. Ces projets innovants ont concerné des secteurs agricoles divers : le coton, le mais, les tubercules, etc. Parmi les structures qui ont pris en charge la modernisation du secteur agricole au Nord-Cameroun l on peut citer entre autres : la Mission d Etude pour l Aménagement de la Vallée Supérieure de la Bénoué (MEAVSB), le Secteur Expérimental de Modernisation rurale du Nord (SEM- NORD). En raison leurs multiples objectifs, ces structures ont pris en charge la politique de viabilisation et de modernisation du secteur agro-pastoral dans les zones rurale. Gérées par des spécialistes en questions agricoles, elles ont contribué à l organisation de type moderne de la paysannerie dans la région. Des sociétés telles que la Société de Développement du Coton (SODECOTON), le Secteur d Expérimentation et de la Modernisation de la Riziculture de Yagoua (SEMRY) et la Société pour le Développement du Blé (SODEBLE) ont pris des secteurs spécifiques à leurs zones d intervention. Ces structures de développement rural ont toujours bénéficié des appuis financiers extérieurs notamment de la part du Fonds Européen pour le Développement (FED). C est sous la responsabilité de la MEAVSB qu ont été organisés la via- 24 ENJEUX N 39 Avril - Juin 2009

25 bilisation des espaces, l installation et l accueil des paysans montagnards émigrés. Elles s occupaient aussi de la dimension imprégnation et formation des paysans. A juste titre, ces structures peuvent être considérées comme des bras séculiers de l Etat dans l encadrement des milieux ruraux. Leur base idéologique est de type productiviste. La prise en charge des secteurs clés de l économie rurale par ces structures montre bien qu elles visaient à sortir l agriculture du secteur traditionnel pour en faire un pan important de l économie nationale. Par rapport à la politique de migration, ces «structures-développeurs» ont mené des actions rudes à l endroit des paysans qui devraient «libérer» leurs milieux d origine. La description faite des montagnards par les «développeurs» rend compte de ce que, à leurs yeux, la montagne n est pas ce milieu approprié pour toute problématique de développement. «Pour les développeurs, les montagnes ne représentent que des réservoirs de migrants potentiels» note Boutrais (1984 :125). Une telle image stigmatisante va désormais sous-tendre le décongestionnement des montagnes dans la perspective de développement rural. Difficile aujourd hui de cerner les paysans montagnards au Nord-Cameroun à travers leur passé. Confrontés aux dynamiques d extraversion modernisatrice portées par plusieurs acteurs et facteurs, ces paysans ne cessent de subir de ré-ajustements constants et permanents dans leurs modes de production agricole. Leurs pratiques culturales, leurs savoirs endogènes aussi bien que leurs systèmes de représentation en rapport avec l environnement ont connu d importantes transformations. La politique agricole de l Etat post-colonial largement adossée à l idéologie productiviste de type capitaliste a sorti les paysans de leur cadre primaire de production. Le paysan montagnard vogue depuis lors entre un passé mythique et un présent plein d incertitudes. Indications bibliographiques _ Babakar Sall, 1993, De la modernité paysanne en Afrique noire. Pour une sociologie de la norme et de la ruse, Paris, L Harmattan. _ Boutrais, Jean, 1973, La colonisation des plaines par les montagnards au nord du Cameroun (Monts Mandara, Paris, ORSTOM. _ Ela, Jean-Marc, 1999, «Le rôle du savoir dans le développement. Agriculteurs et éleveurs au Nord-Cameroun», Libset Holtedahl et al. (éds.), Le pouvoir du savoir. De l Arctique aux Tropiques, Paris, Karthala _1998, Innovations sociales et renaissance de l Afrique noire, Paris, L Harmattan. _1990, Quand l Etat pénètre en brousse les ripostes paysannes à la crise, Paris, Karthala. _ Geschiere, Peter, 1984, «La paysannerie africaine est-elle captive? Sur la thèse de Goran Hyden et pour une réponse plus nuancée», Politique africaine, n 14, pp _ Geschiere, Peter et Van der Klei, Jos, 1987, «La relation Etat-paysans et ses ambivalences : modes populaires d action politique chez les Maka et les Diola (Casamance)», Terray, Emmanuel, L Etat contemporain en Afrique, Paris, L Harmattan, pp _ Gubry, Patrick, 1991, «Rétention de la population et développement en milieu rural. A l écoute des paysans Mafa des Monts Mandara (Cameroun)», Jean Boutrais (éd.), Du politique à l économique. Etudes historiques dans le Bassin du Lac Tchad, Paris, ORSTOM, pp _ Motaze Akam, 1998, «Migrations et reproduction des rapports sociaux dans le système lamidal du Nord-Cameroun : esquisse sur les formes migratoires d incertitudes», Annales FALSH de l Université de Ngaoundéré, pp _1990, Le défi paysan. Le laamido et le paysan dans le nord du Cameroun, Paris, L Harmattan. _ Seignobos et al. (Éds.), Outils oratoires en Afrique. Innovations, normes et traces, Paris, Karthala, Notes 1 Certes, le moment colonial constitue un lieu d incubation et de gestation de la conscience paysanne dans les sociétés africaines. La paysannerie, en tant que phénomène de production agricole moderne, est largement comptable de ce temps historique (toutefois sans s y ramener complètement). Lire Babakar Sall, De la modernité paysanne en Afrique noire. Pour une sociologie de la norme et de la ruse, Paris, L Harmattan, Sur l outillage agricole des peuples des montagnes lire Christian Seignobos et al. (Éds.), Outils oratoires en Afrique. Innovations, normes et traces, Paris, Karthala, Ce qui a, à coup sûr, hypothéqué l installation d infrastructures devant soutenir le développement socio-économique dans ces régions. Cf. Patrick Gubry, «Rétention de la population et développement en milieu rural. A l écoute des paysans Mafa des Monts Mandara (Cameroun)», Jean Boutrais (éd.), Du politique à l économique. Etudes historiques dans le Bassin du Lac Tchad, Paris, ORSTOM, 1991, pp Du point de vue de l imaginaire collectif des montagnards, la dualité entre la «montagne» et la «plaine» ne relève pas de l ordre écologique ni environnemental ; elle porte davantage sur l ensemble des systèmes de représentation que chaque groupe social se fait de son milieu physique. ENJEUX N 39 Avril - Juin

26 Revendications sociales ou revendications foncières dans le bassin sucrier Mbandjock-Nkoteng Par Joseph Yves ZOA ZOA, géographe, CNE/MINRESI (Cameroun) L économie de plantation, marquée par le couple cacao/café, occupait une très grande place dans les campagnes du Cameroun à partir des années 1946, fin de la deuxième guerre mondiale, jusqu aux années 1960, date de l accession à l indépendance. Cette importance s explique par le fait que les puissances coloniales d hier achètent encore ces produits à haut prix et, garantissent aux producteurs des débouchés rémunérateurs. Les Mbandjock et Nkoteng, deux localités sur le cours moyen de la Sanaga développent dans cette optique, cette économie. Elle représente durant cette période, environ 80% des exportations du pays. La hausse progressive des prix incite à l augmentation des surfaces cultivées et aux performances de production agricole. Le succès de ces deux cultures spéculatives pratiquées sous couvert forestier a introduit des mutations dans le vécu quotidien et l économie des collectivités coutumières. Ces collectivités ne recherchent plus de nouvelles activités pour se forger une nouvelle identité professionnelle; pourtant, une opportunité leur était offerte dans ce sens avec l installation dans le coin de complexes industriels par l Etat du Cameroun. La diversification des sources de rentrée des devises Les pouvoirs publics, principal acteur de l économie moderne du pays veulent rompre avec la vocation agricole exclusive de l économie. Ils diversifient les sources de rentrées de devises et de collecte d impôts en créant les unités industrielles dans les campagnes. L implantation de ces agro-industries se fait dans les campagnes qui se signalent par leur faible occupation humaine et une mise en valeur réduite. Les industries et notamment l agro-industrie Sosucam, constituaient pour les autorités camerounaises des symboles et des catalyseurs de développement économique et social. Les taxes collectées auprès d elles, grâce à leur répartition et l utilisation 26 ENJEUX N 39 Avril - Juin 2009

27 des recettes, sont de puissants leviers qui orientent et dynamisent le développement local et national. Autour d elles, se créaient des pôles de développement grâce à la fabrication des «complémentarités multiples», par le biais desquelles les différents intervenants dans la chaîne voient leurs gains augmenter directement par les effets d approvisionnement ou indirectement par les effets de débouchés rémunérateurs. Elles participaient à créer des richesses dans la plupart des campagnes du pays où, la pauvreté était encore visible. Le concept de pauvreté qui reste difficile à circonscrire s appréhende cependant avec Dercon et al (2000), comme un manque d opportunités sociales et de libertés, une faible participation à la vie économique, un accès restreint à la nourriture, aux biens et aux services des populations du pays. En somme, elle exprime une instabilité des conditions de vie des populations. En s implantant dans la campagne d écotone savane de Mbandjock-Nkoteng, la Sosucam a pour mission de créer les conditions incitatives de stabilité sociale et économique permanente pour les populations environnantes en activant le fonctionnement des instruments économiques et sociaux précis. En contre partie, l Etat leur accordait des facilités douanières. A ce compte, elle était classée au «régime C» du code des investissements où, elle était détaxée sur certains produits utiles pour le fonctionnement de l industrie et la fabrication des produits finis, le sucre de canne. Un produit très utile pour les besoins des ménages nationaux et les industries associées. La première concession des terrains du domaine national Compte tenu des avantages que l Etat espéraient tirer de la Sosucam, des terrains domaniaux d environ dix milles hectare, situés dans les sites de savane de la zone de contact forêt/savane de Mbandjock-Nkoteng étaient cédés à la Sosucam par les baux emphytéotiques pour son installation en vertu de la loi n 656LF-7 du 22 mai 1965, qui approuve la convention d établissement conclue entre le Gouvernement de la République Fédérale du Cameroun et la Société sucrière du Cameroun. Pour rendre pérenniser les avantages, qui faisaient l objet de cette concession, un cahier des charges avait été signé pour la circonstance entre le Gouvernement de la république et la Sosucam, tout comme des indemnités avaient été allouées aux collectivités coutumières autochtones et aux populations immigrantes. L Etat, en favorisant l indemnisation des collectivités autochtones, reconnaissait tacitement que celles-ci avaient des droits d usage sur ces terres désormais concédées à la Sosucam. Les immigrants, dont les densités sont supérieures à celles des autochtones s étaient progressivement installées pour des raisons multiples, paraissent parfaitement intégrés dans cette campagne de contact forêt/savane et constituent des acteurs actifs des revendications. Leur présence dans la région a considérablement réduit les clivages ethniques qu on observe encore dans certaines régions du pays. Vivant en parfaite harmonie avec les collectivités coutumières, leur accès aux diverses ressources n est pas limité. Certains exploitent de grandes surfaces pour les cultures vivrières et même de rente. A ce compte, ils reçoivent dans leur nouvel espace de vie des redevances foncières versées aux collectivités coutumières autochtones et participent au même titre que les populations locales activement aux revendications sociales qui ont régulièrement cours dans la localité. Le versement des redevances foncières se faisait annuellement. Si la périodicité des versements était connue, la méthode de calcul des différents taux alloués aux collectivités bénéficiaires reste un mythe. Ce qui prouve que les populations riveraines ont été écartées des négociations relatives à la mise en concession des terres dont elles assuraient pourtant la pleine exploitation. La suite de leur existence a été gérée par des étrangers comme le partage de l Afrique qui s est sans les africains eux-mêmes. Ce versement se justifiait par le fait que, les terroirs qui accueillent la Sosucam, hébergeaient naturellement de multiples et minuscules groupes d autochtones et accueillent plus tard, des immigrants. Les deux groupes présentaient déjà des taux d alphabétisation relativement élevés, grâce à l existence de certaines écoles pilotes dans la région de Nanga-Eboko au nord et de Batchenga au sud. Les anciennes terres de cultures, de plantation et de parcours Des observations et des enquêtes de terrain révèlent que les collectivités coutumières y édifiaient leurs ouvrages sociaux et, prélevaient l ensemble des ressources utiles à leur existence quotidienne. Ce prélèvement parfois excessif, se faisait à travers des opérations transformant le milieu naturel notamment, l agriculture, la céréaliculture, l élevage, sylviculture, agrumiculture, arboriculture, ENJEUX N 39 Avril - Juin

28 etc. Les produits issus de ce travail de la terre alimentaient des échanges commerciaux assez important entre les centres urbains les plus proches et les villages les plus éloignés. Les hommes producteurs de cacao et parfois de café, écoulaient d importants volumes au cours périodiques; les femmes, spécialisées dans les produits vivriers, aujourd hui vivrier marchand tiraient des bénéfices appréciables lors des ventes. En marquant les campagnes par une exploitation régulière des parcelles bien circonscrites dans l espace et le temps, l ensemble des acteurs, autochtones et immigrants affirmaient leur droit de propriété ou d appropriation sur ces terroirs. D autres qui ne mettaient pas la terre en valeur de façon probante, se fondaient sur le droit du sol pour exprimer et clamer cette appropriation. Les manifestations du désintérêt de l industrie Les productions tirées de l exploitation des terres n étaient encore assez considérables surtout pour les produits vivriers mais les gains provenant des ventes des récoltes restaient importants à cause de la flambée des prix que les situations de soudure, imposent parfois au sein des communautés. A ce compte, les populations réussissaient à satisfaire aux différents besoins de base. En tirant alors avec succès un profit non négligeable du travail manuel de la terre, les populations environnantes s intéressaient très peu ou pas du tout aux opportunités d emplois que leur offrait entre 1965 et 1990 la présence des complexes agro-industriels. Les statistiques révèlent que moins de 4% des membres des collectivités coutumières étaient employés à la Sosucam. Deux seulement ont un contrat d employé permanent, soit, servant comme d agent d exécution à la direction des cultures et l autre occupait le poste de chef de service du personnel. Le reste avait un statut d employé saisonnier dans les champs de canne à sucre où les conditions de travail sont extrêmement rudes. La majorité de la population locale refusait de servir dans des conditions aussi dures voire inhumaines. Elle préférait l agriculture villageoise moins avilissante. Un nombre important d immigrants s auto-employaient dans le domaine agricole et se désintéressaient de ce fait de ces offres. Puisqu en venant en masse à la recherche constante de la fortune, la richesse et des agréments qui en découlaient comme le bonheur relativement limité dans les zones de départ à cause des contraintes sociales très difficiles, les immigrants étaient plutôt désappointés face aux traitements qui leur étaient réservés au sein de l industrie. Les deux groupes formulaient concomitamment l hypothèse que les conditions de travail dans les industries s assimilaient à de l esclavage et en comparant les revenus tirés des deux domaines, les écarts étaient très maigres. Les gains de l agriculture villageoise et les autres activités connexes étaient supérieurs à ceux provenant de la Sosucam, si l on tient compte de certains paramètres comme la durée de travail journalier, les exigences de rendements et les conditions de travail. Paraphrasant Jean-Noël Salomon (2005), on peut dire que les différentes civilisations qui se sont développées dans le cours moyen de la Sanaga, ont su tirer parti des atouts de la campagne en mettant en valeur les meilleurs sols et les différentes opportunités naturelles qui s offraient à elles. La Sosucam ne fut pas d une grande utilité à cette période contrairement à ce que les pouvoirs publics avaient souhaité lorsqu ils favorisaient son implantation. Notre présentons dans ce papier les contestations permanentes qui caractérisent les rapports entre les collectivités locales et l agro-industrie Sosucam depuis la crise économique de 1987 qui a apporté des changements importants dans le vécu quotidien des populations locales; les types de moyens utilisés par les diverses parties pour sortir de cet enfermement conflictuel et l utilisation de la terre du domaine national comme arme de lutte. Depuis son installation, cette entreprise a érigé des barrières spatiales, sociales, et économiques pour maintenir les populations environnantes à l écart de toute croissance véritable. Un cycle de violences et de conflits s installe dans une campagne où le développement était l élément recherché; Par ailleurs, les déchirements entre les deux parties exposent la campagne aux risques d instabilité exceptionnelle. Elle se détournait par l attitude d enfermement des collectivités coutumières du rôle que les pouvoirs publics lui avaient assigné au moment de son installation comme il ressort de l analyse des différentes conventions relatives à son établissement. La terre du domaine national qui avait été concédée à la Sosucam dans l optique de développer la campagne, mais où les populations tiraient une masse de ressources devient l arme de toutes les revendications des communautés qui se sentaient laissées. Les naufragés de l économie urbaine et les populations rurales employées en ville retournent à la campagne à cause des effets de la crise de Ils réclament désormais l implication dans la gestion des fonds produit sur leurs terres par la Sosucam. Des populations fixées par des économies de plantation La campagne forestière du cours moyen de la Sanaga 28 ENJEUX N 39 Avril - Juin 2009

29 est rentrée dans l histoire du Cameroun. Pendant qu elle participe au triomphe de l économie de plantation avec la production de milliers de tonnes de cacao et, dans une moindre mesure, de café et que les paysans accentuent la production des denrées alimentaires, elle accueille la principale unité industrielle de production du sucre de canne et devient, un laboratoire d intégration et de syncrétisme ethnique en recevant des masses de migrants. A la faveur de conditions climatiques extraordinaires, caractérisée par une bonne pluviométrie, elle devient aussi un espace privilégié de production agricole et de récoltes abondantes. Les collectivités autochtones ont saisi les opportunités qu offraient d abord les «boom» du cacao et du café, ensuite la présence de la Sosucam avec l augmentation démographique qu elle draine pour s activer pleinement à la production agricole. En profitant des demandes croissantes des industries de la métropole et des hausses des prix observés dans les échanges des produits de base, les pouvoirs publics encouragent les extensions des plantations de cacaoyers. En un temps très réduit, les productions et les exportations provenant de la localité de Mbandjock-Nkoteng ont décuplées, passant de 3600 tonnes en 1961 à tonnes pour le cacao et de 1604 tonnes à tonnes pour le café tonnes de cacao et tonnes de café furent commercialisés, ouvrant la région à l économie monétaire et entraînant des améliorations du niveau de vie chez les collectivités coutumières. Cette évolution des productions est occasionnée par certains facteurs clés, comme la révision des stratégies de production. En fait, les méthodes archaïques qui caractérisent les économies d autosuffisance limitées à la dimension villageoise, se sont perfectionnées. Les aides de l Etat se sont multipliées avec l octroi d une partie d outillage agricole, des sachets de polyéthylène, la distribution gracieuse des semences et l incitation des planteurs à se regrouper pour créer des plantations communes composées de cinq acteurs minimum. Des primes furent instaurées aux meilleurs producteurs sous forme de prime de biens de productions dans l optique de booster les rendements et les efforts des paysans. Des services d encadrement des paysans ont été mis en place. Les traitements des plantations étaient régulièrement organisés pour neutraliser les espèces nuisibles qui pénalisaient la production rendant les efforts des collectivités infructueux. A l actif de ces différentes améliorations, il ressort une évolution progressive des tonnages au fil du temps en fonction de la maturité des plantations. Ainsi, le rendement d une jeune plantation de un à cinq ans de vie, est 300 kg à l hectare. Ce rendement s élève à 650 kg à l hectare pour une plantation vieille de plus de cinq. Tableau 1. Evolution des tonnages de cacao dans le cours moyen de la Sanaga Année hectares tonnage Prix/ kg Valeur monétaire Frs Cfa 1975/ / / / / Total Enquête de terrain La lecture de ce tableau révèle l importance des cultures de rente dans la vie des paysans et leur impact sur la modification du paysage floristique de la campagne considérée. Incidences sociales de l économie de plantation Les gains tirés de la commercialisation du cacao et autre culture de rentes développées dans le cours moyen de la Sanaga étaient réinvestis dans les effets sociaux et partagés dans les charges fiscales. Avec l ouverture à l économie marchande et l accroissement des revenus et du pouvoir d achat, les collectivités coutumières désormais ouvertes à au monde extérieur, s offraient d énormes possibilités de changements sociaux. Ils s alimentaient bien et amélioraient leur habitat par la construction de nouvelles maisons selon les modèles occidentaux. Les charges d éducation et de santé des familles étaient facilement assurées lorsque la nécessité s imposait. Grâce aux facilités de communication qu offrait la présence des pistes rurales et cacaoyères, les échanges avec les villes et les campagnes voisines étaient paraissaient plus aisés. Comme à Thiès ou Kayes au Sénégal, pays de la culture arachidière qui permettait aux paysans de renforcer leurs revenus tout en fournissant de la matière première aux industries de la métropole, le cacao a permis aux collectivités coutumières concernées de supporter le poids de la fiscalité et de vivre en citoyen libre. Le ENJEUX N 39 Avril - Juin

30 bilan de la culture de rente est vite fait ici. Grâce à ce travail, le paysan payait aisément son impôt dont le montant était fixé pour les cercles en fonction de la capacité contributive estimée de chacun et des recensements de population. Lorsque la population recensée est très faible, le taux montait. Cet impôt était payable en argent pour tous les adultes et les enfants de plus de dix ans. Les individus concernés étaient obligés de se procurer du numéraire par la culture et la vente des cultures de rente. Les mêmes rétributions contribuaient au remboursement les dettes contractées au cours de l année. Par elles, le paysan acquérait certains produits d importation comme des vêtements, des provisions pour les fêtes de fin d année ou religieuse qui coïncident avec les récoltes et les ventes. Le système d épargne inconnu jusqu à cette date vit le jour. La masse monétaire disponible ne pouvait être aussi facilement dilapidée et même que les espaces de loisirs et autres orgies étaient assez limitées. Les acteurs agricoles des collectivités, en mettant en valeur de nouvelles terres ont su très tôt tirer parti de la présence de ces deux évènements. Si le cacao était vendu dans les villages environ de Mbandjock-Nkoteng mais transporté sur les rives nord de la méditerranée pour y être transformé en produit fini et consommable, les produits vivriers étaient vendus au marché local et consommés par les employés de la Sosucam et les populations des villes limitrophes. Les cultures vivrières: les facteurs d un réveil L installation de l agro-industrie et l érection quelques années plus tard de la localité en unité administrative renforcent la vitalité démographique dans une campagne restée très longtemps fermée à l extérieur; les seuls contacts se faisaient avec les «facteurs», les «traitants» ou les intermédiaires, qui affluaient pendant les récoltes cacaoyères dans cette campagne jusqu ici fermée et mandatés pour la plus part par les grandes maisons de commerce. Pourtant mouvements migratoires saisonniers d u autre type, d importants fonds d argent circulaient durant dans cette campagne pour l achat des marchandises singulièrement le cacao. En décidant d installer le complexe sucrier dans la campagne forestière du Cameroun central pour y exploiter les terres de savanes servant pour les cultures vivrières des collectivités coutumières, l Etat créé parallèlement un front pionnier et migratoire vers cet espace. L exportation de la force de travail absente ici devenait prioritaire. L ambitieux projet qui comptait déplacer des mil- 30 ENJEUX N 39 Avril - Juin 2009

31 liers de personnes dans l ensemble du pays pour faire faire pousser la canne à sucre et produire du sucre de canne fixa effectivement à Mbandjock-Nkoteng un vaste peuplement de migrants. De nombreux besoins naissent à cause de l impréparation liée à leur arrivée. On peut relever les l absence de marché fixe d échanges, on y notait seulement des marchés ou marchands ambulants; les difficultés de ravitaillement des individus en produits vivriers et autres aliments de base; les populations coutumières saisissent de nouveau cette opportunité commerciale pour développer les denrées alimentaires relayées à la petite échelle par la valorisation des cultures de rente et les gains qu on s en procure. A ce compte, les terres de savane, incultes ont été défrichées ; des techniques nouvelles empruntées de l extérieur par des supports hétérogènes ont diffusées, adoptées et même rapidement assimilées par les paysans. A l observation, des progrès certes lents mais très sensibles se sont imposés dans les campagnes où les paysans ont pris le goût du travail et compris sa nécessité. Concrètement, les paysans, étaient dans l obligation de cultiver afin de satisfaire progressivement les besoins sociaux par les gains tirés et s insérer dans le champ économique moderne. Les cultures vivrières étaient à ce compte dynamiser. La quasi-totalité des actifs travaillaient la terre. Les hommes représentaient environ 37% et environ 40% se consacraient à la terre. L homme est producteur de cacao, café, de bananes plantains. De façon plus générale, il ne s intéresse particulièrement qu à la culture sous la forêt. Celle qui concerne les cultures de rente introduites par les colonisateurs et utiles aux industries occidentales. Les femmes cultivent sur les savanes ce dont les familles peuvent consommer localement. Le surplus alimente le commerce extérieur. Dans cette campagne comme ailleurs dans le pays, les paysans tenaient une place très importante qui s accroissait. Cette importance s accentue davantage à cause de l intérêt que les hommes portaient désormais à la culture des produits vivriers qui sont devenus une source non négligeable de revenus monétaires grâce à des débouchés extérieurs sûrs et qui sont aussi la base alimentaire des populations locales. L acharnement des femmes et des hommes à travailler la terre et l usage des instruments plus adaptés à cette activité favorisent l obtention des rendements appréciables dont les ventes participent à la rentabilité économique et financière des collectivités autochtones concernées. L intensification de la production du vivrier se poursuit d année en année et ainsi que celle des cultures de rente, le cacao et le café. Les premiers résultats: La diversification des cultures Les parcelles portant le vivrier se caractérisaient par leur aspect traditionnel et les petites superficies. Elles ne dépassaient pas à l origine 2,5 hectares par actif. Quelques exceptions existaient tout de même au sein des paysans car on recensait quelques uns dont les superficies étaient supérieures à dix hectares. La superficie cultivée et celle en jachères sont de hectares environ selon les statistiques de la délégation d agriculture de l arrondissement, qui représentent une bonne masse de la superficie totale de la localité. Les acteurs de sexe féminin et masculin dont le nombre avoisine les quatre mille âmes se livraient à la production diversifiée. Une même exploitation englobait toutes les espèces de productions vivrières dont l écologie s adapte bien à la campagne. Tableau 2. Types de culture vivrière et commercialisation Enquête de terrain Cette politique de production qui définie les économies de subsistance dans les plaines forestières du grand sud, la dorsale montagneuse du grand ouest et les savanes du grand nord s est avérée finalement rentable ; même si elle a subi dans le temps des améliorations sensibles dont l objectif était de renforcer les rendements jusqu ici obtenus. Seuls les plantations de culture de rente, cacao et café portaient une seule culture; quelquefois, ces parcelles portaient quelques vivriers comme la banane plantain ou la banane douce. Les méthodes de travail restaient relativement traditionnelles. Certains actifs agricoles utilisaient déjà des systèmes de production assez évolués qui étaient issus des enseignements tirés des mélanges entre les techniques locales et celles empruntées aux populations migrantes. Dans l ensemble, la principale source d énergie restait ENJEUX N 39 Avril - Juin

32 en grande partie la force physique puisque Les équipements agricoles se résumaient à la machette et la houe. Mais la présence de la Sosucam a développé la vente de matériels assez sophistiqués à travers des transactions obscures entre certains personnels employés de la société et les actifs agricoles. Et dans cet élan de rentabilisation de la terre, par les petits paysans locaux, en soutien à leurs actions personnelles déjà encourageants mais limités, les services publics mettaient à leur disposition du matériel végétal amélioré et plus productif surtout pour les cultures de rentre. Ils recevaient en plus des enseignements sur l amélioration des méthodes culturales et des atouts d une concentration ou d un regroupement des producteurs dans des espaces de production les plus favorables. La capitalisation des enseignements reçus et les usages d un matériel de type nouveau permettant de meilleures conditions d exploitation, ont eu des conséquences positives pour les paysans. Ils ont connu une extension des superficies cultivées; les journées de travail ont été valorisées et le nombre de journée de travail pour les planteurs qui avaient des superficies faibles s était accru; les rendements ont augmenté; les revenus ont connu un accroissement par une commercialisation accrue. La circulation monétaire dans une région qui était encore fermée à l économie monétaire s est accélérée par l augmentation des revenus. Les jeunes planteurs s installaient très fascinés par les bénéfices que le travail de la terre pouvait offrir. Le savoir paysan et la mise en valeur probante des terres Même avec la survivance du savoir paysan face à la formation livresque, les populations environnantes ont su maîtriser la nature, le rythme des saisons, et obtenir des productions en quantité et qualité suffisante, localement consommables et échangées dans les circuits externes par le canal des marchés fixes et ambulants. Concrètement, ils ont réussi à bien régler les successions des diverses variétés de cultures sur les parcelles dans le temps et l espace. Les agricultures fournissent à la majeure partie des populations de la campagne, les revenus utiles à leur stabilité sociale et spatiale. Ces gains sont susceptibles de s accroître au cours du temps grâce à l implication des pouvoirs publics dans le processus d amélioration des conditions de travail et de production. A travers une organisation intégrée axée sur l éducation des paysans, la vulgarisation de la culture pure et le processus de commercialisation, ils ont enseigné aux populations à produire des produits exportables qui ont une forte valeur ajoutée mais qui constituent aussi des denrées consommables par les populations de l extérieur. Cet enseignement qui a le mérite de motiver les paysans, d augmenter de façon notable leur capacité de travail et par voie de conséquence leurs revenus pouvait poser des problèmes comme la disponibilité des terres dans l avenir même si la région reste modestement peuplée et la division du travail par type de culture entre les hommes et les femmes. Les terres disponibles faiblement exploitées La mise en place d un plan de développement visant d élever rapidement les peuples du Cameroun en général et ceux du cours moyen de la Sanaga à un niveau de vie meilleur, conduit à un fort accroissement des paysans dans la production agricole. L augmentation du nombre d actifs agricole s est davantage accentuée avec l inflation démographique créée par l arrivée des migrants venant surtout de la partie septentrionale pour offrir leur force de travail à l industrie. Elle n a malheureusement pas eu un impact sur les terres puisque la région était et reste encore faiblement peuplée. Les terres restent en conséquence disponibles. C est d ailleurs ce facteur qui a motivé les pouvoirs publics à installer l agro-industrie Sosucam dans ce bassin modestement mis en valeur. Les problèmes fonciers devaient être évités. Par ailleurs, les cultures vivrières qui sont très activement mis en culture occupent les périphéries des savanes et les cultures spéculatives sont cultivées en forêt. Deux zones incultes pour la culture des variétés de canne à sucre exportable et mises en culture par la Sosucam. La seconde concession des terrains du domaine national Cette disponibilité foncière est même confirmée avec la conclusion d un deuxième bail foncier entre l Etat du Cameroun et la Sosucam. Par un autre bail emphytéotique signé en date du 20 avril 2006 en vertu du décret du 11 mars 2006, huit autres dépendances du domaine national d une superficie globale de onze milles neuf cent quatre vingt hectares sis dans les arrondissements de Mbandjock et Nkoteng ont été cédés à la Sosucam par l Etat du Cameroun. Tout comme dans le premier bail, les nouvelles indemnités et redevances ont été allouées aux collectivités autochtones. Cette nouvelle concession foncière révèle la disponibilité dans cette campagne lorsqu elles ne sont pas mises en valeur même si ces terres appartiennent du fait de leur situation autour des villages et sur lesquelles, les indigènes recueillent ce qui est nécessaire à leur existence (Bigombé, et al, 2006). 32 ENJEUX N 39 Avril - Juin 2009

33 Dans le cadre de la stratégie nationale de développement, la réforme foncière de 1974, s est fixée parmi ses objectifs de libérer toutes les terres qui auraient pu être gérées coutumièrement pour en faire des instruments de production agricole (idem). C est dans cette logique que les terres de la région sur lesquelles l occupation des collectivités n avait pas d emprise évidente et une mise en valeur probante furent concédées à la Sosucam pour les besoins culture de canne à sucre et de production du sucre de canne. Les terres concédées ne faisaient pas l objet d une occupation effective par les collectivités locales. Un conflit foncier ne saurait donc se poser entre les deux parties. A l observation, les collectivités coutumières ont plutôt dynamisé leurs activités de production agricole avec l installation de la Sosucam et y tiraient le meilleur parti du travail de la terre. Elles manifestaient un désintérêt pour le travail dans l industrie. Puisqu elles s étaient familiarisées aux activités agricoles qui constituaient leur principale source de revenus. Très peu des membres s étaient engagés comme employés. Beaucoup de raisons expliquent comme des salaires bas et des conditions de travail très difficiles, l absence de liberté. La faille des revendications des collectivités coutumières Des circonstances économiques, politiques et sociales exceptionnelles de 1985, remettent en cause l embellie économique de ces entrepreneurs agricoles locaux. Parmi crises, on peut recenser: une année de sécheresse d une sévérité encore inégalée dans la région, des précipitations tardives et leurs mauvaises répartitions dans l espace et le temps. Tous ces phénomènes avaient pour conséquence la réduction des surfaces cultivées. A la même période, les prix des principaux produits vivriers et de rente baissaient. Le pouvoir d achat des principaux consommateurs et des acteurs impliqués dans les échanges périclitait. Les superficies exploitées diminuent de près de la moitié ainsi que les différents actifs agricoles. Les capacités de production des agriculteurs étaient désormais asphyxiées. Les décennies d euphorie des paysanneries sont subséquemment sapées (Brunel 2008). Les paysans s enlisent dans une paupérisation absolue à cause de la réduction drastique des rentrées financières liées à la diminution des productions et à leur mévente. Le chômage rural s accroît car la chute des prix des produits agricoles démotive les acteurs et entraîne la réduction du temps de travail. Il est renforcé par l arrivée massive des naufragés de l économie urbaine issus de la fermeture des emplois urbains et de la dégradation des conditions de vie en ville qui retournent à la campagne ENJEUX N 39 Avril - Juin

34 dans l espoir d obtenir un nouvel emploi à la Sosucam. Un optimisme que la majorité des naufragés fondent sur le droit du sol. L heure de la débrouille Eu égard à tout ce qui précède, les paysans de cette campagne sucrière autrefois très ingénieux pour vivre et tirer le meilleur parti des terres, basculent dans la débrouille et «le chacun pour soi» selon les expressions de Brunel (2008). L agro-industrie Sosucam, en restant le seul employeur viable et solvable dans cette campagne dont les performances se justifieraient par la présence des capitaux privés, est dès lors envahie par des flots de demandes d emplois et autres avantages sociaux émanant de l ensemble des populations cosmopolites environnantes. Des populations qui rejetaient encore du revers de la main les offres de cette industrie sollicitent désormais l application des clauses contenues dans le cahier des charges du décret n 65-DF-367 du 18 août Des clauses qui n avaient jamais été exécutées, mais qui accordent des avantages sociaux aux collectivités environnantes comme le recrutement des populations locales, les réalisations des infrastructures sociales et l appui à la croissance locale par le payement des taxes à la mairie. Il est cependant à relever pour le déplorer que si la Sosucam est aujourd hui confortablement installée dans les campagnes camerounaises, non seulement, elle n a ménagé aucun effort pour fouler aux pieds les clauses du cahier des charges sus visé ; mais, encore elle s est abstenue de régler les indemnisations accordées aux différentes populations autochtones et immigrantes environnantes. Les populations expatriées qui dirigent la société méprisent les populations locales alors que celles-ci sont souvent traitées de voleur de pain des européens lors de l émigration. La Sosucam s oppose violemment à ces réclamations. Elle brandit pour s en défendre, les exigences de la «bonne gouvernance». Elle considère cette optique de gestion comme la base de la rentabilité dans les économiques libérales. Elle se fonde ainsi sur les orientations des institutions financières internationales. Les collectivités environnantes perçoivent ce refus comme une politique d exclusion que prône la compagnie sucrière en refusant d embaucher le personnel autochtone et immigrant malgré leur qualification. Cette thèse est davantage crédibilisée par le fait que l apport de la compagnie sur le plan social est quasiment inexistant. Elle ne se prive même pas de bloquer à la moindre occasion les divers projets sociaux initiés par les autorités publiques à l instar de l électrification villageoise. Les querelles éclatent entre les différentes composantes socio-spatiales. Des requêtes multiformes sont exprimées portant concrètement sur les embauches des populations environnantes autochtones, l implication de l industrie dans les réalisations sociales, plus particulièrement, l appui à l éducation grâce à la construction des écoles ou des salles de classes, l appui à l accès à l eau potable et à l assainissement. Cette campagne qui est située dans une zone de transition forêt-savane présente d énormes difficultés d accès à l eau. Il devient urgent d installer des adductions d eau potable indispensable pour le bien-être des populations qui sont déjà victimes d autres injustices. Devant l opposition persistante de l agro-industrie de satisfaire aux requêtes des populations environnantes portant sur l application des décisions contenues dans le cahier des charges, les collectivités concernées, manifestent et affirment de façon indiscutable le droit du sol. Pour elles, la Sosucam doit apporter des solutions immédiates à leurs diverses requêtes puisqu elle exploite impunément et sans une véritable contre partie leurs «terres». Deux revendications légitimes En favorisant la création du pôle agro-industriel dans le cours moyen de la Sanaga à Mbandjock-Nkoteng, l Etat remplissait son rôle d acteur économique et de facilitateur de l installation des unités productrices de revenus et de développement local. Les différentes collectivités riveraines devaient être les premiers bénéficiaires par le bon droit, la raison, le bon sens et même le droit naturel, des opportunités de relance de la croissance qui étaient offertes. Une conduite assez logique dans une région qui baignait encore comme la majorité des localités situées à l intérieur du pays à l exception des grandes villes et des espaces côtiers ouverts sur la mer, dans une pauvreté extrême si l on tient compte de certains indicateurs comme l éducation, la santé et les communications. Une approche que d aucuns pourraient contester, percevant plutôt cette stratégie d insertion dans l économie monétaire comme, une appropriation par les populations locales d une industrie à vocation nationale. Mais, un rappel de l histoire des industries, montre que l industrie qui s installe dans une localité doit satisfaire à certaines besoins élémentaires des collectivités locales sans toutefois qu elle se soustraie à l Etat. La Sosucam n a pas satisfait aux besoins primaires des 34 ENJEUX N 39 Avril - Juin 2009

35 collectivités riveraines. Elle leur a offert des emplois non qualifiés et subalternes; ce qui justifie en partie le désintérêt de la grande majorité d entre elle vis-à-vis de l industrie. Elle n a presque pas réalisé des œuvres sociales qui participent à l aménagement global de l espace rural et à l amélioration des conditions d existence des intéressés. La campagne de Mbandjock-Nkoteng présente aujourd hui plus que hier, un aspect rétrograde. Le paysage physique et humain s est copieusement détérioré. D après les enquêtes de terrain, les collectivités coutumières vivent dans un état de dénuement extrême. Une indigence qui s est davantage accentuée avec le recul manifeste des cours des produits de rente, le cacao et le café. Deux cultures qui faisaient la fierté des populations riveraines lors de la création de la Sosucam. Au même moment, la Sosucam participe au développement des populations et des familles hors des frontières nationales. Les bénéfices tirés de la vente des cent vingt mille tonnes de sucre produites annuellement sont majoritairement expatriés hors des frontières nationales où elles servent à l aménagement du territoire et aux investissements sociaux. Avec une politique d embauche fondée sur le recrutement des expatriés, les fonds gagnés par ceux-ci ne sont pas investis dans la région, mais plutôt renvoyés dans leurs pays respectifs par des réseaux bien huilés pour des opérations de développement. Les collectivités coutumières riveraines dénoncent cette mise l écart dans l accès aux ressources monétaires créées par une industrie installées sur des terres qu elles exploitaient et, qui handicape toute croissance locale. Elles réclament la considération de leur droit du sol pour être intégrées dans l industrie. Le problème foncier ne se pose pas ouvertement entre les collectivités riveraines et la Sosucam. La région ne présente pas une carence foncière. Mais à l observation, la terre constitue plutôt l arme de revendication utilisée par les populations locales pour trouver des solutions aux problèmes sociaux. L évaluation du prix de la terre doit être faite et insérer comme capital des collectivités coutumières dans la Sosucam. Cette stratégie éradiquera les contestations incessantes qu on observe dans la campagne du cours moyen de la Sanaga à Mbandjock-Nkoteng. La Sosucam en s installant dans le cours moyen de la Sanaga a certes permis l aménagement de cet espace rural. Un centre urbain inexistant s est crée grâce à la convergence de populations d origines diverses. Des infrastructures ont été mises en place. Mais, à l opposée, elle a faiblement induit la croissance des collectivités coutumières qui ne se sont pas plutôt, intéressées aux différentes opportunités que la Sosucam offraient. Elles étaient plus préoccupées par les importants gains que leur procurait le travail de la terre. Elles revendiquent aujourd hui, une participation active à la vie de la Sosucam pour compenser les pertes et l instabilité socioéconomique provoquée par la dépréciation que subit le travail de la terre et les autres privations que la Sosucam leur impose. L ensemble des malentendus se politise. Indications bibliographiques - Abéga, S, C., Bigombé, P, 2006, La Marginalisation des pygmées d Afrique Centrale, Afrédit, France. - Bigombé, L, P., 2006, La création des chefferies de troisième dégrée pygmées au Cameroun: faisabilité politique et juridique et contraintes sociologiques, in La Marginalisation des pygmées d Afrique Centrale -Brunel, S., 2008, L Afrique. Un continent en réserve de développement, Bréal éditions - Dercon, S., Frederick, I, H., 2000, Assessing the Impact of Intervention on poverty, Principles and Case Study of a primary Health Care Intervention in Tanzania, Leuven, Centrum voor Economische Studiën, catholic University. -Salomon, J, N., 2005, La question de l eau et ses enjeux, in L Afrique Continent pluriel, sous la direction de François Bart, SEDES/CNED -Perroux, F., 1964, On political economy and econometrica, Essays in honour of Oskar Lange, Varsovia, Zoa Zoa J.Y., «De l implantation économique à l intégration nationale : Les Tupuri dans le bassin sucrier Mbandjock-Nkoteng». (ENJEUX, Bulletin d Analyses Géopolitique pour l Afrique Centrale, n 24, juilletseptembre 2005, pp : 27-33, FPAE, 2 Notes 1 Les paysages géophysiques et biogéographiques, L adaptation de l homme au milieu naturel et son action sur les paysages ENJEUX N 39 Avril - Juin

36 Innovations paysannes en zone de contact forêt-savane. Le cas du pays Yambassa au Cameroun. Par Henri YAMBENE BOMONO, Ethnologue-Géographe, Chercheur au CNE/MINRESI (CAMEROUN) La présente étude traite d innovations paysannes dans une contrée camerounaise du forêt-savane. Innovation paysanne «un processus social majoritairement endogène au centre duquel se trouvent les paysans. Les intervenants extérieurs et les nouveautés qu ils apportent ne constituent qu une ressource parmi d autres». Nous estimons pour notre part que l a priori selon lequel les agriculteurs africains auraient appris leur manière de cultiver «avec leurs parents» n est pas toujours vérifié. Cette image que nous donnons à l agriculture et aux agriculteurs africains est un aspect aujourd hui bien documenté qui témoigne des dynamiques des changements de l Afrique rurale. De même que la vision négative des performances des sociétés agraires africaines est un thème récurrent dans la littérature d expertise, on retrouve en parallèle, dans des études déjà anciennes, une interprétation compréhensive et non prescriptive de ces mêmes sociétés selon le vœu de Jean-Pierre Chauveau (2007). L approche doit consister à évaluer les performances non pas par rapport à un schéma d évolution linéaire et prédéterminé, mais par rapport aux opportunités et contraintes spécifiques, et donc contingentes, aux conditions des différentes contrées africaines. Il s agira en pays Yambassa, d analyser et de comprendre les réponses endogènes apportées à la saturation à la fin des années 70 des terres sous-bois, la crise des cours du cacao dans les années 80-90, le passage de l axe bitumé Yaoundé-Bafoussam qui ouvre le vivrier à la spéculation marchande. Contextualisation Le pays Yambassa (cf.carte) se situe dans 80 kilomètres au Nord-Ouest de la capitale Yaoundé. s étend sur quelques 1200 km2, à une altitude d environ 400 mètres, entre le cours du Mbam au Nord-Est, le fleuve Sanaga au Sud et les collines moyennes du pays Lemandé à l Ouest. C est une région de contact. Le paysage présente de molles ondulations, couvertes essentiellement d une végétation de savane mais parsemées de petits îlots forestiers de création anthropique et de «forêts galeries». C est dans les îlots forestiers que se répartit une population très peu dense et peu agglomérée, formant des villages-bosquets. 36, repartis au sein de cinq cantons et de deux arrondissements dont les chefs lieux sont : Bokito et Ombessa. Le pays Yambassa est situé dans le département du Mbam et Inoubou, dont chef-lieu Bafia, croît 36 ENJEUX N 39 Avril - Juin 2009

37 rapidement, stimulée par Yaoundé et l Ouest du pays. Le pays Yambassa se caractérise par une frappante abondance foncière qui va permettre en savane le déplacement incessant de la frontière agricole. Les yambassa ont toujours profit de la dualité du paysage qui les entoure. Leur subsistance fut longtemps basée sur la chasse, Elle commence toujours par un feu de brousse, à la fin de la saison sèche, qui met la savane à nu de repérer le gibier. Les (danses, mariages) du pays y réfèrent constamment et témoignent ainsi de ce passé de chasseurs. existe toujours, et se pratique comme à l époque avec l aide de chiens. Le gibier, pourtant, a été décimé, et il est rare de voir un chasseur ayant abattu autre chose qu un aulacode. Peuple cultivateur, les Yambassa pratiquent une agriculture semi-itinérante en savane. Ils cultivent principalement l igname le «concombre» (Cucumeropsis mannii plante de la famille des cucurbitacées, dont on consomme les pépins plutôt que la chair), le maïs et le mil. Pour accompagner ces bases alimentaires, une grande variété de sauces est préparée à partir de brèdes comme les feuilles de manioc ou le Vernonia amygdalina, souvent agrémentées d arachides pilées. Les hommes et les femmes travaillaient en savane. Depuis les années 50, dominance de la cacaoculture La culture du cacao introduite dans les années 30 en pays Yambassa par l administration coloniale française nécessite un couvert végétal et doit être installée en forêt. Cette culture ne va pas d emblée être adoptée par la population, la forêt étant considérée comme un lieu sacré, réservé à la chasse, et constituant une zone de repli stratégique en cas d attaque. En pays Yambassa il était alors strictement interdit de défricher la forêt pour y cultiver, sinon on était banni du village. La culture du cacao fut imposée à tous les agriculteurs en vue de leur permettre de payer l impôt. La transformation des bosquets du pays yambassa en cacaoyères s est faite progressivement. Le premier mouvement fut la conversion des terrains entourant les maisons où chaque chef de ménage était forcé par l administration d entretenir d abord vingt puis cent arbres. Ainsi, toutes les forêts abritant les. Le second mouvement eut lieu dans les années 50. De nombreux cacaoculteurs des autres contrées du pays avaient fait fortune et le cacao n était plus considéré comme la culture obligatoire, mais bien comme une culture rentable. Les yambassa investirent les forêts plus éloignées de leurs habitations, celles où leurs ancêtres avaient vécu autrefois. Les forêts commencèrent à être envahies de cacao et le pays Yambassa, pourtant toujours aussi vide, vit apparaître une forte pression foncière sur les terres forestières. Dans les années 80, de moins en moins d espace forestier pouvait être utilisé. Seules restaient encore libres les forêts «sacrées» dont l accès n était permis qu au cours de certaines chasses. Patrice Enoga Ombanga (1979) parlera d une «agriculture en crise» en référence à ce que le couvert végétal support de la culture de rente par excellence était saturé. La crise cacaoyère Producteur de cacao, le pays Yambassa est touché de plein fouet par les variations des cours mondiaux : ce fut le cas lors de la hausse des prix de 1985, ou de la baisse brutale du début des années 90. Ajouté à cela, la dévaluation à 50% du franc CFA en 1994 s est traduite pour les agriculteurs par une redéfinition brutale des prix relatifs. La culture d exportation qu est le cacao perd de son avantage par rapport à la vente sur le marché intérieur. Depuis lors, on note une évolution du système productif agricole et des changements dans l utilisation de l environnement naturel. A coté du cacao, les cultures vivrières, maraîchères et fruitières connaissent ainsi une forte expansion et une augmentation considérable de leur production destinée aux marchés citadins de Douala et Yaoundé. Trois nouvelles cultures de rente vont se développer massivement : les cultures des agrumes, du palmier sélectionné et de l ananas. Les nombreux vergers mis en place ces quinze dernières années, étant en pleine production, ces cultures s imposent progressivement comme des sources de revenus. La cacaoculture en savane Au cours de la décennie 70, une saturation des territoires forestiers amena les planteurs du pays Yambassa et ceux voisins du pays Bafia à entamer une dynamique de cacaoculture sur savane. La pratique restera longtemps méconnue, étant de temps à autre signalée dans les rapports monographiques des étudiants de l ex Centre Universitaire de Dschang des décennies 80-90, originaires de la région. Cela ne manquait pas d étonner leurs ensei- ENJEUX N 39 Avril - Juin

38 gnants qui répondaient en règle générale par des «vous êtes sûrs?» dubitatifs, portés sur les marges des pages signalant la pratique. La comparaison entre les besoins du cacaoyer et les caractéristiques climatiques du pays Yambassa (proche du régime tropical humide) ne pouvaient ajouter à leur scepticisme car on se retrouve en limite de zone favorable au développement du cacaoyer et où, «il ne peut être cultivé que sous ombrage assez dense» J. Champaud 1966). Bien plus, les recensements agricoles et les nombreuses études économiques réalisées sur la cacaoculture camerounaise ne signalaient pas l existence d une telle pratique culturale. Emettant l hypothèse que cacaoculture du Centre Cameroun est moins uniforme qu il n y paraît, l Institut de Recherche Agricole pour le Développement (IRAD) et le Centre de Coopération Internationale en Recherche Agronomique pour le Développement (CIRAD) ont conduit, de 2003 à 2005, une opération de recherche afin d analyser la diversité régionale des pratiques culturales en cacaoculture dans ce bassin de production. Quatre zones de production furent identifiées en fonction du type de cacaoculture dominant et du découpage administratif dont celle de Bokito (département du Mbam et Inoubou), dite «de développement de la cacaoculture caractérisée par l installation d une partie du verger sur savane» (Jagoret et al., 2008). Il s agit d une pratique culturale innovante reconnue aujourd hui par la communauté scientifique. Pour continuer à engranger les revenus du cacao dont l accroissement des prix est régulier jusqu au milieu des années 80, les yambassa sont sortis des savoirs inscrits dans les fiches techniques agronomiques dans lesquels, le cacaoyer, (Théobroma cacao L.) est un arbuste de sous bois. Les savanes du pays Yambassa ne présentant pas une densité d arbres ou arbustes suffisante pour permettre un bon développement du cacaoyer, les agriculteurs vont essayer de construire un environnement favorable au développement du cacaoyer, en implantant des arbres dont l un des rôles principaux sera celui de faire de l ombrage. Itinéraires techniques La cacaoculture en savane s est faite après de nombreux essais et tentatives. «L histoire des agriculteurs interrogés montre qu ils ont changé de pratique au fur et à mesure de leurs expérimentations ou de leurs erreurs» (Glatard, 2007 :82). Densité de la plantation, choix du matériel végétal, mode d implantation, association aux cultures annuelles, semi-pérennes ou pérennes, taille des arbustes entre autres ont été révisés plusieurs fois dans un réel souci d atteindre des rendements optimum. Au début de l innovation, la mise en place du cacaoyer en savane s est faite par prolongement de la plantation existante sous-bois. Le planteur partait des abords de sa plantation pour coloniser la savane attenante. Il sondait la parcelle à exploiter en y creusant des trous de 60 à 70 cm. Le but était de contrôler la texture du sol. Il recherchait un sol qui avait une proportion plus grande d argile ou d humus par rapport au sable. Lorsque la parcelle répondait à cette exigence, le planteur procédait à la trouaison en respectant une distance de 2, 5 m entre les trous. Ceux-ci étaient creusés en entonnoir pour faciliter une accumulation de l eau. Le planteur procédait par semis direct ; 2 à 3 fèves par trou. Ce, en vue de compenser le taux de mortalité. Les dates des semis étaient directement liées aux périodes de récolte. Les rejets de bananiers plantains étaient introduits avec une densité proche de celle du cacaoyer. La pratique visait principalement à apporter un ombrage de court terme au cacaoyer. Les bananiers servaient également de jalon. Au moment de la défriche, un pied de bananier indiquait la présence d un plant de cacao; l opérateur prenait alors soin de ne pas le couper. Le manguier et le palmier étaient associés pour assurer l ombrage à long terme aux cacaoyers. La phase actuelle consiste à voir le cacaoyer accompagné en savane les cultures annuelles, semi-pérennes et pérennes. Etablir ces cultures sus-citées est le premier objectif du planteur quand il crée un nouveau champ. La démarche présente l intérêt majeur de procurer un revenu aux agriculteurs en attendant que le cacaoyer entre en production. De manière générale, le planteur profite du travail initié par sa femme. C est elle qui ouvre le nouveau champ, le nettoie et le laboure à la houe. Pendant au moins un an, elle va y effectuer les deux cycles de culture tributaires des deux saisons de pluies. Taro, igname, maïs et Pistache blanc sont préférentiellement cultivés la première année. Dans l optique de la création d un ombrage à long terme pour le cacaoyer, des plants d arbre à croissance rapide sont repartis de manière homogène sur la parcelle, le plus souvent, dès la fin du premier cycle cultural. Oranger, palmier, tali, safoutier, avocatier et colatier sont aujourd hui préférés au manguier qui «sucerait trop d eau, ferait trop d ombrage et serait un foyer de capside, sans toutefois apporter les mêmes espoirs que les agrumes en terme de revenus» dixit un des enquêtés de Glatard (2007). Par la suite, le cacaoyer et le bananier plantain seront introduits dans des densités proches, comme lors des 38 ENJEUX N 39 Avril - Juin 2009

39 prémices de l innovation. Le reste de l espace accueille de manière rotative arachide, pistache jaune, gombo, oseille de guinée et maïs pendant 3 à 4 ans. Les jeunes plants de cacaoyers bénéficieront alors de l entretien qui est porté à ces vivriers, que ce soit pour la lutte contre les adventices ou les traitements phytosanitaires. Au terme de la quatrième année, le système racinaire du cacaoyer pouvant être endommagé par les opérations culturales (labour, sarclage, binage, buttage) le vivrier ne sera plus cultivé. Performances du système de culture L étude de Florent Glatard (2007) initiée dans le cadre de l Action Thématique Programmée Caractérisation et Evaluation des performances agro-écologiques de systèmes de culture plurispécifiques en zone tropicale humide (ATP CARESYS) créée par le CIRAD, a comparé les performances du système de culture du cacao en savane avec celui sous forêt dans les villages Kédia et Assala. L étude par une approche synchronique a permis d évaluer le fonctionnement biophysique (performances agronomiques et environnementales) de 65 parcelles de 14 cacaoyères. Soit 10 en savane et 4 en forêt. La plupart des conclusions de l étude confirment les constats des paysans. Les indicateurs utilisés pour mesurer la diversité agrobiologique, donnent des résultats qui indiquent une compétitivité des cacaoyères en savane par rapport aux cacaoyères en forêt. Les cacaoyères en savane ne déprécieraient pas la teneur en matière organique des sols pouvant même l augmenter. On ne serait donc plus dans l hypothèse de l utilisation d une rente forestière et on pourrait envisager le système comme durable. Ecologiquement reproductible le système de culture en savane est aussi économiquement viable. Les cacaoyères en savane entreraient en production plus tôt que les cacaoyères en forêt. Au-delà de cette précocité, une densité par arbre supérieure dans les cacaoyères implantées en savane par rapport à celles introduites en forêt, permet d expliquer un plus fort rendement potentiel en savane qu en forêt. La cacaoculture sur savane paraît sans doute être une dynamique qu il faut encourager dans les années à venir. Il s agit d un système de culture performant, relativement à ce qui a été observé en forêt. Il peut s avérer être une alternative intéressante à la culture sur abatis brûlis, qui dans un contexte d augmentation de la pression foncière pourrait rapidement s avérer problématique. La diversification des cultures de rente La crise a conduit les agriculteurs yambassa à une diversification de leurs sources de revenus. Cette stratégie reste présente malgré la revalorisation récente des prix du cacao et le boom de création des cacaoyères en savane. Le passage de la Route Nationale N 4 Bafoussam- Yaoundé et le marché grandissant de cette dernière localité vont les y aider. L augmentation de la demande de consommation pour les fruits et les légumes des habitants de Yaoundé va devenir un débouché fiable pour les agrumes et les ananas du pays Yambassa. La RN4 est un atout déterminant de la diversification des sources des revenus des paysans yambassa. Elle a rendu accessible les marchés vivriers du pays Yambassa mais surtout permis aux consommateurs de la ville de Yaoundé de découvrir le goût particulier des produits de ce terroir. Arachides, ignames, macabos, kolas, safous, tomates, oranges, maïs et surtout ananas de Balamba, Yambassa, Ombessa, Bokito entre autres vont se distinguer sur les marchés de Yaoundé par leur grosseur et leur goût exquis. Les clients en redemandent et les Bayam selam (acheteuses-revendeuses) âpres au gain flairent le bon filon. Désormais, elles n attendront plus les jours de marché pour constituer leurs stocks de denrées venues de «Bafia» selon leur dire. Les pistes et sentiers du pays Yambassa sont parcourus à longueur de semaine à la recherche des denrées vivrières. Des champs d ignames sont négociés avant maturation et des sont vendus sur pied. Augmentation des surfaces cultivées Cette dynamique conduit à une colonisation interne accélérée du terroir. On observe une prolifération des installations en savane et une augmentation sensible de la taille des espaces cultivés. Les jardins de case les plus anciens et les cacaoyères font rarement plus d un hectare tandis que les nouvelles installations atteignent souvent 3 ou 4 hectares, parfois jusqu à 10. C est que depuis 1994, les déçus de la cacaoculture, les migrants de retour et les élites prennent d assaut les espaces pour la pratique des cultures vivrières. Les taux de progression des surfaces occupées par les agrumes, les cultures vivrières et fruitières sont exponentiels. Pour exemple, dans l arrondissement de Bokito, selon des chiffres de la Délégation d agriculture, la surface cultivée en ananas, est passée de 60 ha en 2004 à 310 ha en 2008 soit un taux de progression de 416,66% en 4 ans. La même progression est tout aussi valable pour le ENJEUX N 39 Avril - Juin

40 maïs, la tomate, le plantain ou les ignames. Au plan de la production la même croissance est observée. De 350 tonnes en 2004, la production d ananas a atteint les tonnes en Dans la même fourchette de temps celle de banane plantain est passée de 2125 tonnes à 5595, et celle de tomate de 150 tonnes à 220 tonnes. Pour répondre aux besoins des consommateurs de Yaoundé, les paysans yambassa ont opté pour une production tous azimuts des denrées de leur terroir. «C est le Bafia?» La question «C est le Bafia?» ou «çà vient de Bafia?», est entendue à longueur de journée, dans les nombreux marchés de la ville de Yaoundé et au-delà. C est que les produits agricoles issus des départements du Mbam-et- Inoubou (duquel relève le pays Yambassa) et du Mbamet-Kim sont labellisés. Ce label, c est le déterminant «Bafia» du nom du chef lieu du département unique d alors : le Mbam. C est le label attribué pour distinguer arachides, ignames, prunes/safous, ananas et kolas produits dans la zone du Mbam. Il est un signe de qualité utilisé à la fois par les commerçants pour vanter leurs marchandises et aussi par les consommateurs pour se rassurer quant à l origine de ce qu ils vont consommer. C est grâce à ce label que vont essaimer le long de la RN4 entre le pont d Ebebda et la ville d Ombessa des points de vente de denrées alimentaires. Les voyageurs de passage ne loupent pour rien l occasion de se ravitailler à la source. Plus que tout autre produit, c est l ananas produit en pays Yambassa qui a le plus tiré profit du label «Bafia». Introduit par les missionnaires catholiques dans les années 40, l ananas en pays Yambassa était cultivé jusqu à l orée des années 90 pour l autoconsommation du producteur. L attrait qu exercera ce produit sur le marché va décider de nombreux cultivateurs des environs d Ombessa à investir dans sa culture. L ananas y est cultivé en monoculture. C est l innovation la plus marquante dans le paysage agricole. Aujourd hui encore malgré la constitution de nouveaux bassins de production autour de Mfou, Awae ou Mbankomo, Ombessa dans l opinion est connu pour être la ville de l ananas. Du reste, deux panneaux à l entrée et à la sortie de la ville le rappellent au voyageur. Appropriation foncière par l investissement La plupart des installations récentes en savane n ont pas encore atteint leur taille finale. En effet, la délimitation du terrain n est pratiquée que lorsqu elle est rendue nécessaire par la proximité d un voisin. Jusqu à ce que ce problème émerge, la surface que l on prévoit d occuper n est pas délimitée. Lorsqu un agriculteur s installe en savane, il commence par construire sa maison, et, en général, planter des palmiers sur une grande surface, qui évoluent bien en savane d altitude. Les agrumes, en revanche, nécessitent d être mis en terre dans un terrain labouré, et l on profite en général pour cela du travail de sa femme. En effet, une femme installée en savane ne manquera pas de défricher, chaque année, une dizaine de parterres derrière la maison (environ deux à trois cent mètres carrés de terrain). Son mari profitera alors de ce travail pour planter, 40 ENJEUX N 39 Avril - Juin 2009

41 Ainsi, le mode d expansion classique des villages s est accéléré de façon drastique, avec un nouveau type d agriculture : la plantation en savane. Si elle peut être motivée par le désir de prospérer dans l agriculture, elle peut aussi être une simple manière de réserver du terrain par un «marquage à l arbre». Certaines femmes se mettent par exemple à planter des arbres dans leurs parterres de cultures vivrières, «pour réserver le terrain» pour leurs enfants. Cette tendance, à laquelle participent les villageois autant que leur frères installés en ville, augmente considérablement le rythme d avancée des zones cultivées sur la savane. Cette appropriation à grande vitesse est permise par l existence d institutions en décalage avec les nouvelles tendances de l agriculture. En effet, la possibilité d une appropriation par l arbre est une institution adaptée de tout temps à la sortie en savane des yambassa. Elle n a pas été développée en prévision d une culture commerciale à grande échelle. Du reste certaines exploitations portent des arbres à peine entretenus et dont seulement certains produisent, les moins bien entretenus ayant pour utilité première de marquer ce terrain comme approprié. Cette inadéquation institutionnelle permet aujourd hui un accaparement de la terre à une vitesse sans précédent. C est un phénomène bien documenté dans d autres contextes africains, ou les élites profitent de leurs moyens pour s approprier se procurer des titres de propriété sur des grandes portions de terrain, ce qui produit de très grandes inégalités dans l accès à la terre. Dans notre cas, on peut dire que la situation est socialement plus «juste», puisque contrairement à une initiative de titularisation des terres qui n est accessible qu aux riches, l appropriation par l arbre permet à chacun de se procurer sa part de terrain par son travail, sans exclure les plus démunis. entre les ignames et les taros, des agrumes variés accompagnés de quelques autres fruitiers. De ce fait, la majorité des exploitations en pays Yambassa sont encore en voie d extension, et l augmentation de leur surface se fait au rythme des cultures vivrières itinérantes. Les parterres qui se trouvent à proximité des maisons ne sont plus, de ce fait, abandonnés après deux ans : ils deviennent progressivement des vergers. Le titre foncier par l arbre Il apparaît que le système productif agricole du pays Yambassa est en pleine mutation de par le développement d une dynamique d extension des cultures de plantation en savane. Le contraste d aptitudes culturales entre forêt et savane a quasiment disparu et le travail en savane n est plus un pis aller. Un déficit de terre en zone forestière associé à la crise économique, la dévaluation du CFA, le retrait de l Etat de la filière cacao ont conduit les agriculteurs à cette innovation. La sécurisation du foncier et la possibilité d associer des cultures annuelles ou pluriannuelles qui font désormais partie des ressources monétaires des ruraux ont converti la majorité des planteurs à cette pratique. Les déterminants institutionnels qui permettent la rapide sortie en savane et l évolution du système productif témoignent des dynamiques croisées entre pratiques foncières et pratiques agricoles. ENJEUX N 39 Avril - Juin

42 Indications bibliographiques ANAKAYAN M. C. (2009) «Dynamique des systèmes productifs agricoles et problèmes fonciers dans l arrondissement de Bokito», mémoire de DIPES II en géographie, ENS/Université de Yaoundé I, 107p. BOLOMIK M. (2009) «Diversification des activités agricoles et dynamique spatiale et socio-économique dans l arrondissement de Bokito», mémoire de DIPES II en géographie, ENS/Université de Yaoundé I, 85p. CHAUVEAU J-P. (2007) Sociétés agraires, urbanisation et question foncière. Une exception africaine? Cahiers Agricultures vol. 16, n 5, septembre-octobre, pp ENOGA OMBANGA P. (1979) «Une agriculture en crise : l exemple du pays Yambassa», mémoire de maîtrise en géographie, Université de Yaoundé, 62p. FILIPSKI, M., COLIN, J.-Ph., SEIGNOBOS, Ch., (2007). Émergence et évolution des droits de propriété dans un contexte d abondance foncière. Le cas du pays Yambassa (Cameroun), Cahiers Agricultures vol. 16, n 5, septembre-octobre, pp FILIPSKI M. (2005) «Dynamique des institutions agraires dans un contexte d abondance foncière. Emergence et évolution des droits de propriété en pays Yambassa- Cameroun», mémoire Master Recherche 2 Economie et gestion du développement agricole, agro-alimentaire et rural, Université Montpellier I, 92p. GLATARD F. (2007) «Analyse de la conduite technique de cacaoyères au Centre Cameroun (Village de Kédia) : liens avec le milieu (forêt/savane) et les caractéristiques de fertilité des sols», mémoire de spécialisation en agriculture tropicale du CNEARC, Montpellier, 83p. Patrick JAGORET, Emmanuel BOUAMBI, Tonka ME- NIMO, Irénée DOMKAM et Francis BATOMEN, «Analyse de la diversité des systèmes de pratiques en cacaoculture. Cas du Centre Cameroun», Biotechnol. Agron. Soc. Environ., volume 12 (2008) numéro 4 : SIBELET N. (1995) «L innovation en milieu paysan ou la capacité des acteurs locaux à innover en présence d intervenants extérieurs nouvelles pratiques de fertilisation et mise en bocage dans le Niumakélé (Anjouan, Comores)», thèse de doctorat en sociologie rurale, INA PG, 295 p. + biblio + annexes. YAMBENE BOMONO H. (2004). Programme de recherche de l UR 095 et le contexte des dynamiques foncières en pays Yambassa. Note de positionnement, UR O95 de l IRD, 15p. YAMBENE BOMONO H. (2008). Pluralisme institutionnel, tensions intrafamiliales et conflits intercommunautaires autour du foncier au Cameroun. Le Cas du pays Yambassa.», Colloque international sur «L Afrique à l épreuve des mutations.» Yaoundé, 23, 24 et 25 janvier 2008, 23p. Notes 1 F. Glatard (2007) signale l existence d une plantation en savane créée en 1974 dans le village Assala. Dans le même ordre un de nos informateurs parle de 1976 comme début de la pratique à Botombo. 2 Le Centre Universitaire de Dschang (CUDS) ancêtre de l Université de la même ville abritait l Ecole Nationale Supérieure Agronomique (ENSA) et l Institut des Techniques Agricoles (ITA). Les étudiants de ces deux institutions étaient tenus au cours de leur formation de rédiger des monographies de leurs villages respectifs. 3 Nous avons lu les exemplaires desdites monographies lors d une recherche documentaire à la bibliothèque de l Université de Dschang. Cf. entre autres Iroumé (1981) Lablé; Ekorong à Moute (1981) Gouifé;) 4 Plus récemment, lors des événements ayant secoué la Côte d Ivoire, le prix au producteur de cacao s est envolé, atteignant parfois plus de 1000 francs CFA. 5 L ex département du Mbam avait été divisé à l occasion d une reforme administrative et territoriale de Interrogés, les yambassa dans tous leurs villages commencent l histoire de leurs origines en contant qu avant l arrivée de leurs ancêtres, le pays n était que savane. Tout indique que c est la forêt qui a suivi l homme quand il s est installé en savane et qu il a commencé à planter des arbres dans les alentours de sa case, créant ainsi un environnement dans lequel la compétition entre herbacées et ligneuses se trouvait déséquilibrée. 42 ENJEUX N 39 Avril - Juin 2009

43 Géopolitique des usages spatio-migratoires de territorialité des réfugiés dans les campagnes du Gabon Par Patrice MOUNDOUNGA MOUITY, géopolitiste, Bordeaux (France) Situé dans une zone de forte tension, le Gabon, Etat de la sous-région d Afrique centrale est aujourd hui l un des rares pays de cette sous-région exempt des guerres civiles qui suscitent l attention de la communauté internationale. Le phénomène des réfugiés, mettant au centre la personne humaine, qui découle de celle-ci est préoccupant. Il a mis à rude épreuve la solidarité africaine et mérite donc qu une étude lui soit consacrée. Partant de la région des Grands-Lacs où se trouve son épicentre, ce phénomène des réfugiés a gagné, par vagues successives, le territoire gabonais. Pour le Gabon, une adaptation à cette nouvelle donne fut nécessaire. D où la nécessité pour nous d y apporter un éclairage scientifique. C est dans ce contexte que l intitulé de ce papier «Géopolitique des usages migratoires de territorialité des réfugiés dans les espaces de campagne au Gabon» trouve sa raison d être. Il s agit, en effet, à travers celui-ci d établir la relation entre l afflux des réfugiés au Gabon et la dynamique d installation territoriale dans les espaces de campagnes en forme de «ville-bis» et de villagisation. Cette analyse produit d une recherche empirique menée au Gabon offre, à partir d une utilisation originale de la monographie locale, une analyse sur la transformation des rapports entre autochtones et réfugiés aussi bien en ville qu en campagne. En géographie humaine, la campagne caractérise souvent un type de paysage rural formé de champs ouverts (openfield), sans clôtures ni haies. Ce terme s oppose parfois à bocage. En France, pour l Insee, elle désigne le «rural», ou «rural profond». Le mot «campagne» n a pas le même sens pour les anglais, pour lesquels il englobe plus largement tout l environnement non-urbain. La campagne c est d abord un milieu de vie. Les habitants des campagnes vivent dans des fermes, dans des bourgs, dans des villages et dans hameaux ou lieu dit. L activité agricole y occupe une place essentielle mais plus seulement. Le thème qui fait l objet de notre réflexion peut être traité par différents spécialistes, mais la différence doit se situer au niveau de l objet, mieux, du champ de l étude. A cet effet, pour faire ressortir le caractère géopolitique de notre sujet, il faut donc l adapter à un modèle théorique relatif à la géographie politique. Le concept de réfugié mobilise les notions de mobilité spatiale et de frontière, fondatrices de la géographie politique et relèvent d ailleurs d une dimension géographique par leur définition. La géographie politique étant retenu, nous donnons une connotation politique aux concepts pour que notre sujet puisse avoir une portée géopolitique. C est cela le travail de la recherche qui, finalement, doit pouvoir éclairer la compréhension de ce phénomène dans les campagnes, ici comme ailleurs. Notons que l interaction entre réfugiés et ville/ campagne met en relief un phénomène de mouvement. La circulation est selon le fonctionnalisme «hartshornien» en géographie politique, un système de mouvement ou d instabilité qui engendre incontestablement le changement. Aujourd hui, dans les pays d Afrique centrale, la campagne à tendance à fortement se dépeupler suite aux effets des disparités régionales et de la désertion rurale. La campagne ou le «milieu rural» désigne l ensemble des espaces cultivés, par opposition aux espaces urbanisés (villes, agglomération, zones industrielles...). Ces habitants sont les campagnards ou ruraux. On parle aussi de rurbains et de rurbanisation à propos des citadins travaillant en ville, mais venant habiter dans les campagnes. Dans les faits, il est possible de traduire l objet de ce texte de deux manières. D une part, il peut être aisé d adopter une posture de géopolitique du «rural» puisqu il s agit en réalité d une étude sur la géopolitique de la campagne, et donc de la territorialité rurale dans son rapport au phénomène de morcellement et d extension anarchique de l habitat, des conflits d usages agricoles entre deux catégories de populations. Ceci traduit manifestement une certaine archéologie du pouvoir, si l on en juge par l exercice d un pouvoir agricole d emprise autochtone sur le terroir de la campagne. Le deuxième ordre de travestissement de l objet peut s autoriser d un certain appareillage conceptuel utile à la compréhension de l investissement de l espace campagnard par les réfugiés pour le besoin d y vivre. Du reste, en empruntant volontiers les apocalypses freudofoucaldiennes, cette analyse de géopolitique interne des campagnes s attarde à élucider les stratégies nébuleuses dont usent des groupes en conflictualité pour le contrôle du territoire campagnard et l imposition autochtone d une définition de l usage du sol. Ce sont ces raisons fondamentales qui justifient l intérêt majeur que nous attachons à ce thème dont le problème central de l étude est, en effet, celui d un changement des usages sociaux du territoire. Cet article renseigne sur ENJEUX N 39 Avril - Juin

44 la «campagnardisation» des réfugiés au Gabon, offrant ainsi à partir des notions de ville-bis et villagisation une lecture sur une pratique anarchique d implantation des populations. Cette territorialité atypique permet en réalité de dévoiler l immobilisme de tout un pays qui n a pas su faire preuve de prose rationalisatrice dans l aménagement territorial de l espace, l inanité et la vanité du discours de «l Etat-aménageur» gabonais, est un indicateur à l appui, dont le sociologue et géographe urbains se font largement écho à travers le discours illusoire de la propagande officielle sur la nécessaire urbanisation de la campagne, du phénomène des résidences secondaires. Paradoxalement, face à cette sclérose, on assiste à une instrumentalisation de l autochtonie par le politique, incapable en réalité d assumer ses fonctions régaliennes les plus élémentaires, notamment en matière de satisfaction des communautés villageoises, voyant les réfugiés comme une menace supplémentaires à leur désir d autosuffisance alimentaire. Une réalité particulièrement importante pour l étude de la transformation des communautés paysannes puisque la maîtrise du sol, moyen de production et/ou de consommation est décisive pour la survie et la reproduction des peuples campagnards. Si bien qu une construction et une analyse géopolitique interne des campagnes gabonaises deviennent possibles. Ce à quoi l on tente d informer le lecteur au cours de cette réflexion qui, de la description des problèmes importants des réfugiés dans la société gabonaise à leurs modalités concrètes des rapports entre paysans, leurs communautés et l environnement rural, permet à celui-ci de comprendre les mécanismes qui pérennisent une gouvernance locale délétère. Cet article soulève également les voiles illusoires, les arguments fallacieux, les stratégies nébuleuses dont usent les autochtones encouragés par les politiques pour le contrôle du sol et des conflits entre groupes divers pour la détention du pouvoir de décision et d organisation en matière des espaces de campagne. La question des réfugiés n est pas en soi un thème nouveau. Cependant, il n existe quasiment pas d études spécifiques sur celle-ci dans le cas du Gabon. Pourtant, de 1968, date d arrivée des premiers réfugiés au Gabon à nos jours, la République gabonaise a connu plusieurs vagues de réfugiés. Nos premières motivations sont aussi purement humanitaires au regard de l importance que nous accordons à la personne humaine dans ce qu elle a de plus chère : la vie, la dignité Tout individu a «droit à la vie, à la liberté et à la sûreté de sa personne 1». La géographie politique des campagnes (et son interaction avec le phénomène des réfugiés au Gabon 2 ) pose la question d ensemble du pouvoir se situant en-deçà et au-delà de l appropriation simple, le doit de propriété est consubstantiel au droit d usage. L intérêt d une étude sur les réfugiés dans l espace campagnard gabonais met également en évidence l ampleur que peut prendre ce phénomène au Gabon. En effet, l arrivée et l installation des réfugiés au Gabon, en augmentant le poids démographique de certaines parties du pays, notamment les communautés campagnardes peut changer la représentativité politique. Car, la question du nombre de Gabonais est un critère sensible sur le plan de la géopolitique interne à cause de la référence à celui-ci dans la répartition des postes politiques (sur la base du nombre ethnique). L afflux des réfugiés a pour conséquence l augmentation des chiffres de la population dans les provinces du sud et du sud-est concernées par ce phénomène. Cette situation pourrait remettre en cause la «géopolitique gabonaise». Il y a donc là des risques majeurs d affecter l identité nationale et le rapport ethno-démographique pouvant passer du simple au double, voire triple, pourrait ainsi modifier les habitus dans l univers social des villages, notamment dans les transformations du territoire et de la société villageoise induites par l installation des réfugiés comme nouveaux résidents et leur rapport à la représentativité au gouvernement et aux postes de responsabilité de certaines ethnies (Punu, Téké, Nzebi). L avenir des campagnes est aussi en discussion ici, tel qu il s inscrit dans les plans gabonais d occupation des sols, et de réflexion sur la dynamique nouvelle des rapports ville/campagne qui se dessine dans les décisions institutionnelles d aménagement du territoire. Par ailleurs, notre travail met en évidence les mutations géopolitiques actuelles au Gabon. On dénombre aujourd hui près de réfugiés 3 dont seulement sont recensés par le H.C.R pour une population estimée à un peu plus d un million d habitants 4. Avec ces phénomènes d invasion démographique, le Gabon risque donc une catastrophe humanitaire sans précédent pour sa taille et sa population autochtone, vu que cette dernière, dans les provinces où l afflux des réfugiés est important, éprouve un certain nombre de difficultés pour s auto-satisfaire en ressources alimentaires. C est cette situation inquiétante dans la quasi-totalité du territoire gabonais qui a également attiré notre attention. La spécificité de ce sujet tient à la relation que nous voulons établir entre le concept de réfugié et celui de géopolitique des campagnes au Gabon. Cette contribution peut constituer une contribution appréciable à la production des connaissances nouvelles dans le champ des représen- 44 ENJEUX N 39 Avril - Juin 2009

45 tations géopolitiques des usages sociaux des espaces de campagne. S intéresser aux réfugiés en tant que réalité géopolitique des campagnes en Afrique centrale, notamment au Gabon revient à réfléchir sur les contenus, les significations et les considérations politiques et géopolitiques des campagnes comme entités spatiales et unités territoriales dans la construction géographique de l espace social et politique au sein duquel se structurent d une part les possibilités d installation définitive des migrants et, d autre part, l accessibilité au marché urbain du travail. L enjeu ici, est de mettre en exergue la relation dialectique entre villes et campagnes. C est ainsi dire que nous exposons sommairement les tensions foncières entre réfugiés et autochtones dans les campagnes de l arrière-pays ainsi les logiques d inclusionexclusion induites dans les faits, par ces modes de production sociogéographiques et politico-géographiques, faisant des campagnes gabonaises des milieux formés et informés par des pratiques d organisation et de mobilisation de l espace en fonction d une perspective rapportant ces sites à des conduites fonctionnelles ou statutaires liés à des terroirs ou à des territoires. A partir de l exemple des Congolais dits réfugiés «prima facie» dans les sociétés villageoises du Sud et du Sud-Est du Gabon depuis 2001 et même bien avant, nous proposons d illustrer comment l introduction du statut de «réfugié» et l intervention du HCR ont contribué à redéfinir les rapports de territorialité complexes entre les populations des deux pays qui sont de proches par leurs unités ethnolinguistiques. Le conflit larvé entre autochtones et allochtones, permet d aborder la question de la vie humaine des réfugiés en zone rurale à travers la négociation de l accès à de nouvelles ressources foncières au nom de leur statut. A ce jeu, les autochtones de la campagne -qui peinent à vivre- ont répondu parfois par des logiques d exclusion, en redéfinissant les normes coutumières de gestion des champs lignagers autour du critère de la «nationalité», et en manipulant les réfugiés pour obtenir des financements du HCR en vue d aménager leurs propres terres. On s intéressera ici à la question d ensemble de géopolitique interne des campagnes à la lumière de l histoire et de la situation des réfugiés au Gabon et à l aide des concepts de «ville-bis» et «villagisation». On s interrogera aussi et nécessairement sur le rapport pouvant exister entre, d une part, ce qui est généralement entendu comme réfugiés et l introduction du droit international humanitaire et, d autre part, ce qui est réellement produit au cours de la redéfinition des espaces ruraux et des rapports entre acteurs autour de l accès aux ressources foncières. Toutefois, afin de circonscrire un cadre analytique et ENJEUX N 39 Avril - Juin

46 donner du contenu à l objet étudié, sans chercher à aller plus avant dans une sorte d élaboration conceptuelle, il est possible de dire aussi que le but de cette analyse géopolitique des usages migratoires des campagnes met en évidence plusieurs concepts, tout en permettant une lecture actuelle et contemporaine de la sociologie des communautés villageoises. La problématique de cet article repose sur une disharmonie entre deux ordres de comportements. Le premier se rapporte à un registre performatif qui institue l inclusion comme un moyen de solidarité des populations en détresse. Le second relevant du constatif discute de la pratique observable dans les faits grâce aux actes posés par les autochtones, la xénophobie étant une pratique rattachée au sentiment d exclusion. Cela étant dit, comprendre la géopolitique des campagnes et les usages migratoires de territorialité suppose, en amont, une présentation de la communauté réfugiée, en aval, une sociobiologie de ce nouveau groupe des utilisateurs du terroir villageois, notamment tout le spectre de ces relations socio-géographiques et géo-économiques ambiguës, situées aux limites de l urbain et du rural, et intéressant pour la compréhension des nouvelles relations entre la ville et la campagne : réfugiés dé-paysannés et urbanisés et réfugiés urbains ré-ruralisés, avec dans chacune des catégories un large continuum de fluctuations, et d où finalement, tout l intérêt porté à l analyse géopolitique. Les campagnes, entre lieux d asile et contrôle de territorialité : essai de définitions, espaces et politiques Ces deux notions renvoient souvent à des espaces de confinement, leur gestion comme espaces de refuge par l action humanitaire ou militaire, leur transformation vers de nouvelles formes d urbanité, de dynamiques culturelles et politiques, de structures sociales et identitaires doit relever d abord du domaine de l action publique, d un vrai travail de l Etat par-delà les politiques de contrôle, d assistance et de mise à l écart mises en œuvre par les institutions internationales, les ONG et les acteurs étatiques. En Afrique centrale, les campagnes sont devenues des lieux de transit et d asile des populations victimes des conflits et guerres civiles. De prime abord, le phénomène des réfugiés permet de constater qu il s agit avant tout d une réalité multiséculaire. En effet, «depuis qu il y a des guerres, des persécutions, depuis que règnent la discrimination et l intolérance, il y a des réfugiés» 5. La thématique des réfugiés qui fait l objet de notre travail s est d abord posée en Europe après les deux guerres mondiales 6. De nos jours, la majorité des réfugiés est africaine soit environ Ils sont de toutes les races, de toutes les religions, et on les trouve dans toutes les parties du monde. Il est donc utile de faire remarquer que la question des réfugiés n est pas un thème nouveau, même au Gabon. Mais bien qu il s agisse d une réalité historique très ancienne, la communauté internationale s y est intéressée à partir du début du XXème siècle, à la faveur de la première guerre mondiale, et dans la foulée de la création de la société des Nations (SDN). Succédant à celle-ci au lendemain de la seconde guerre mondiale, l Organisation des Nations Unies (ONU) créa le Haut Commissariat pour les Réfugiés dont la mission première était celle de donner un statut et une protection aux réfugiés. Avec la résurgence des conflits civils, le nombre de réfugiés a augmenté, ils étaient estimés à travers le monde à 22,3 millions en janvier Ramené à l échelle du Gabon, cela fait sensiblement 22 fois la population de ce pays. Ainsi, pour mieux appréhender cette réalité, nous avons convenu d une étude fondée sur ce pays, qui constitue notre cadre géographie d étude. Ce d autant plus qu aujourd hui, en Afrique, le phénomène des réfugiés ne fait que s accentuer à en juger par le nombre de réfugiés qui ont afflué au Gabon lors de la guerre civile de Brazzaville. «Devant la persécution, toute personne a le droit de chercher asile et de bénéficier de l asile en d autres pays» 9. C est pourquoi le Gabon, qui jusqu à un passé récent n avait pas connu un phénomène de réfugiés d une telle envergure, à dû y faire face. Un essai de définition peut être essentiel ici pour éviter de la part du lecteur une interprétation désabusée rejetant sur l exotisme des mœurs de l Afrique centrale la perversité (mythe de la perversion sociale) d un phénomène qui en réalité traduit parfois l absurdité des acteurs (mythe de l invasion démographique) et place l observateur face à un récit ambivalent, un véritable boulevard d ambiguïtés. Le réfugié est tout homme qui franchit une frontière ou une limite internationale, en raison d une crainte fondée de répressions du fait de sa race, sa religion, sa nationalité, ses opinions politiques ou de son appartenance à un groupe social déterminé. Il est donc considéré comme «tout individu qui se trouve en dehors du pays dont il est ressortissant et qui par suite d événements survenus dans son pays d origine ne peut ou ne veut se réclamer de la protection de son gouvernement» 10. Le concept nouveau 46 ENJEUX N 39 Avril - Juin 2009

47 de ville-bis désigne une forme d aménagement qui se traduit par des redistributions territoriales des milliers de réfugiés non comptabilisés et non reconnus par le HCR 11 dans des camps qui ne figurent pas sur les cartes et les répertoires officiels. Selon Michel Agier 12, les villes-bis doivent être considérées comme des villes-fantômes, c est à dire assimilées à tous ces camps de réfugiés qui n existent nulle part dans les documents officiels. Celles-ci sont réservées à des «réfugiés clandestins» qui ne sont pas reconnus par la communauté internationale et par le HCR. On peut donc les considérer comme des fantômes vivant dans les camps en déshérence implantés dans les campagnes. La villagisation désigne un regroupement imposé en villages uniformes le long des routes des groupes d individus ou de réfugiés. Ce programme obligatoire de «villagisation» mise en place depuis quelques années a été appliqué pour la première fois en Ethiopie. L intention du gouvernement éthiopien était celui de regrouper la population rurale de chaque région dans des villages uniformes. C est ainsi que des milliers de personnes sont «villagisées» dans les campagnes. Cette territorialisation géographique s inscrit dans les plans institutionnels d aménagement territorial qui reconfigurent aujourd hui la forme nouvelle des relations entre la ville et la campagne. A travers ces définitions, ce thème ouvre la voie à une réflexion transversale et interdisciplinaire sur les conditions de réalisation des enquêtes sur des terrains sensibles et sur la position du chercheur dans un tel contexte. Michel Agier, rappelle la diversité des échelles des déplacements sous contrainte issus des pays du Sud et leur perception par les pays du Nord, la généralisation de la politique des mises à l écart dans des lieux de confinement apparaît désormais comme un véritable processus d encampment marqué par une production permanente de catégories qui nomment, classent et enferment ces populations. Il y a donc là une forme de typification ou de monstration du réfugié dans des camps ou lieux d habitat de l espace campagnard. Ainsi face aux mutations des politiques d asile, on assiste à une transformation remarquable des représentations sur le phénomène migratoire, ses perceptions ainsi que les changements des figures de l étranger au centre des débats contemporains sur les droits humains. Sur le plan politique, en matière de législation nationale, c est dans le contexte démocratique des années 1990 que le respect et la promotion des droits de l homme trouvent leur épanouissement. Les mutations intervenues avec l avènement de la démocratie dans les Etats africains, vont inciter le gouvernement gabonais à revoir sa politique de gestion en matière de réfugiés. C est ainsi que dans une lettre adressée au premier Ministre, le président de la République va exprimer sa volonté de détacher de la présidence de la République la gestion du dossier «Réfugiés». Aussi, «Compte tenu du nouveau contexte juridique né de l adoption de la constitution du 26 mars », le dossier réfugié à été transféré au Ministère des Affaires Etrangères de la Coopération et de la Francophonie. L apport du mouvement démocratique résidera dans l institution d une loi portant statut juridique des réfugiés. En effet, le statut des réfugiés en République gabonaise pris en application des dispositions de la convention des Nations Unies du 28 juillet 1951, complétée par le protocole du 31 janvier 1967 et de la convention de l O.U.A du 10 septembre 1969, est régi par la loi n 5/98 du 5 mars Ainsi, trois décrets d application ont été déjà promulgués : le premier portant attribution, organisation et fonctionnement de la commission nationale pour les réfugiés (CNR), est relatif au décret n 648/PR/MAECF du 19 juillet Celle-ci a pour mission d assister par ses recommandations, le gouvernement en matière d accueil et de gestion des réfugiés, portant attribution, organisation et fonctionnement de la commission nationale pour les réfugiés (CNR), est relatif au décret n 648/PR/MAECF du 19 juillet Celle-ci a pour mission d assister par ses recommandations, le gouvernement en matière d accueil et de gestion des réfugiés, d assurer la protection juridique et administrative des personnes 15, d appliquer les dispositions contenues dans les instruments juridiques conventionnels ratifiés par le Gabon. En ce qui concerne les moyens prévus, la CNR est également chargée «de recueillir des aides et appuis divers destinés à l accueil 16» et susceptibles de permettre l intégration des réfugiés lors de leur séjour sur le territoire national. Elle est également chargée d éclairer le Gouvernement sur les problèmes posés, par la présence des réfugiés au Gabon et leur implication dans la vie politique nationale et internationale. Cette commission est placée sous la tutelle du Ministère chargé des Affaires Etrangères et de la Coopération et comprend les organes suivants : le Secrétariat permanent, la sous-commission d éligibilité et le bureau de recours. Pour ce qui est des modalités de fonctionnement, la commission se réunit à huit clos sur convocation de son président 17». Les crédits nécessaires à l installation et au fonctionnement de la commission nationale pour les réfugiés sont inscrits sur une ligne spéciale du budget du Ministre des Affaires Etrangères de la Coopération et de la Francophonie 18. Le deuxième est le Décret n 647/PR/ MAECF du 19 juillet ENJEUX N 39 Avril - Juin

48 2000 qui porte attributions, organisation et fonctionnement du bureau de recours de la commission nationale pour les réfugiés. Ce bureau est chargé d examiner en recours les dossiers rejetés par la sous-commission d éligibilité en matière de demande d admissibilité au statut de réfugié. Celui- ci comprend : un président nommé par décret, sur proposition conjointe du ministre des Affaires Etrangères et du ministre chargé de la Justice parmi les fonctionnaires de la catégorie A, hiérarchie A1 ; six membres représentatifs de la communauté nationale. Le troisième relatif au Décret n 646/ PR/ MAECF du 19 juillet 2000 porte attributions, organisation et fonctionnement de la sous-commission d éligibilité. Elle est chargée «de se prononcer sur l éligibilité au statut de réfugié tel que défini à l article premier du protocole du 31 janvier 1967 complétant la convention des Nations Unies du 28 juillet 1951 relative aux réfugiés et à l article premier de l O. U.A du 10 septembre 1969 régissant les aspects propres aux problèmes des réfugiés en Afrique 19». Celle-ci comprend: un représentant du ministre des Affaires Etrangères au poste de président et comprend parmi ses onze membres, le ministre de la Justice, le ministre chargé de l Education Nationale, un représentant du ministre chargé de la Défense, un représentant du ministre chargé du Travail, un représentant du ministre chargé l Enseignement Supérieur, un représentant du ministre chargé de l Intérieur, un représentant du ministre chargé de la Santé Publique, le Secrétaire permanent, un représentant des organisations non gouvernementales reconnues en matière des Droits de l Homme. En effet, c est au titre de la solidarité internationale que le Gabon a mis en place une commission nationale chargée de traiter exclusivement de la question des réfugiés sur le territoire national, de définir la politique gouvernementale en matière d accueil des personnes en quête d asile. Cet organe aux termes de l article 20 du décret instituant la commission nationale aux réfugiés «instruit et décide sur toutes les demandes concernant l asile politique, l autorisation de transit, la délivrance des cartes d identité et titre de voyage, les cas litigieux» 20. Afin d aider la commission nationale pour les réfugiés, «la sous-commission d éligibilité et le bureau de recours disposent d une autonomie quant à la gestion des réfugiés au Gabon» 21. Le contact des cultures entre «autochtones» et «allochtones» : les facteurs explicatifs des flux, circulations et contrôles D un point de vue historique, le Gabon demeure un pays de vieille tradition d accueil bien établie. «La migration ne fut que la première réponse des populations aux contraintes spatiales 22», de nombreuses raisons historiques peuvent expliquer la présence des réfugiés au Gabon. En effet, pour les saisir, il suffit de se rappeler que le Gabon a connu une vague des réfugiés de l Afrique anglophone et lusophone. L arrivée pour la première fois au Gabon des réfugiés date de la guerre civile nigéro-biafraise, les premiers réfugiés sont les enfants biafrais qui étaient sous la charge de l Etat gabonais et les organisations non gouvernementales. Ils sont arrivés au Gabon le 14 septembre Le choix du Gabon s explique par le fait que le gouvernement de ce pays fut le deuxième à reconnaître l Etat autoproclamé du Biafra le 8 mai C est ainsi, 48 ENJEUX N 39 Avril - Juin 2009

49 pour des raisons diplomatiques, que le gouvernement gabonais accepta de recevoir sur son territoire des enfants biafrais. Suite à cela, le gouvernement nigérian accusa et menaça l Etat gabonais comme étant le pays qui servait de transit aux armes en partance pour le Biafra 25. Le rôle joué par le chef de l Etat El Hadj Omar Bongo à peine Par ailleurs, quelques années plus tard, le Gabon assista à une nouvelle vague de réfugiés issus de la tragédie de la Guinée-Equatoriale liée à la dictature de Macias Nguema. Le Gabon devient à nouveau une terre d asile. Les causes lointaines de la fuite des réfugiés équato-guinéens de leur pays d origine, sont à rechercher dans la prise et l exercice de pouvoir par Macias Nguema. Aussi, les guerres civiles sierra-léonnaise et libérienne dues aux complicités occidentales à cause «de l attrait des richesses 26»dans ces deux pays, ont eu pour conséquence l arrivée des réfugiés sur le territoire gabonais. Dans le cas des réfugiés de l Afrique francophone, l exemple du cas tchadien en est l illustration parfaite. En effet, la guerre civile qui embrassa la République du Tchad en 1979, avait finalement débouché sur l exode massif des populations et l arrivée des réfugiés tchadiens à Libreville. En outre, la poudrière de l Afrique des Grands-Lacs a précipité des milliers d individus sur la route de l exil. Etablis dans l ex-zaïre, les réfugiés de l Afrique francophone (Rwandais et Burundais) ont servi de support à l action déstabilisatrice qui causa le départ de l ex-dictateur Mobutu du pouvoir, et certains de ces réfugiés se sont installés au Gabon. La guerre civile au Congo-Brazzaville a eu pour conséquence la production massive d une nouvelle vague des réfugiés à l origine ethnique surtout rattachée au Nibolek et, qui se sont implantés actuellement au Gabon. D abord près de la mer dans la zone des Punu autour des campagnes de Moulengui-Binza dans la province de la Nyanga dès Juillet 1999, puis vers celles de l Est à Bakoumba et Lékoko, à la limite orientale de la zone des Nzebi, ainsi qu à Boumango en terre téké dans la province du Haut-Ogooué. à la magistrature suprême (02 décembre 1967), s inscrivait d une part, dans un souci d affirmer et d imposer sa personnalité sur la scène africaine et internationale, et d autre part, une volonté pour le nouveau président de bâtir une nouvelle diplomatie pour le Gabon, et partant, s affranchir de l héritage de l ex-président Léon MBA. De l explication économique, il ressort que la pauvreté est un motif d ordre économique qui contraint les populations à rechercher asile dans divers pays tiers où ceux-ci peuvent trouver des conditions de vie meilleures ou acceptables, c est-à-dire, identiques ou supérieures à celles qu elles vivaient avant d être contraint à s exiler dans les pays tiers et économiquement stables. Les mouvements de réfugiés vers le Gabon, peuvent aussi s expliquer par l attrait économique de ce pays sur les populations originaires des Etats voisins. Le Gabon en tant que terre d accueil, se trouve aujourd hui la destination des réfugiés dans la sous-région d Afrique Centrale. Cette situation attractive est due aux énormes potentialités (minières, pétrolières et forestières) dont regorge ce pays. En effet, en considérant les richesses gabonaises comme étant à l origine de l impulsion du phénomène des réfugiés ou de celui de l immigration clandestine, ENJEUX N 39 Avril - Juin

50 nous pouvons remonter à la période du début des années 70 au milieu des années 80 (entre 1973 et 1985). En effet, on a tari d éloges sur la situation économique du Gabon : le pays des «douze glorieuses» 27, le «miracle gabonais» 28, un «émirat équatorial» 29. Ce pays a connu durant cette période une croissance sans précédent grâce au «boom pétrolier des années 70 qui a fait converger d importants flux d immigrants en quête de petro-cfa 30». Cette période fut marquée par l importation de la maind œuvre étrangère comme moyen de compensation à l insuffisance de la population gabonaise, et ce pour la réalisation des grands travaux. C est ainsi, que cette réalisation des infrastructures de base a ouvert la voie à l immigration clandestine qui ne s est plus jamais arrêtée. De ce fait, «le fameux vrai faux mythe de l eldorado équatorial a fait converger d importants flux d immigrants au Gabon» 31. L attrait économique a de ce fait, favorisé ou contribué à l immigration clandestine dans la mesure où «c est l amorce de l exploitation des matières premières depuis les années 1950, qui avait poussé les autorités coloniales à importer des étrangers pour les chantiers forestiers et le commerce» 32. Par ailleurs, ce n est que suite à une prolifération de crise dans certains Etats, notamment l effroyable guerre du Biafra, mais aussi et surtout, la sanguine dictature de Macias Nguema, que la question des réfugiés s est superposée à celle de l immigration clandestine. De ce point de vue, la rente pétrolière en incarnant l abondance des ressources gabonaises, a produit au niveau de la sous-région et même du continent, des effets attractifs déterminants. Aussi, il convient radicalement de distinguer parmi les réfugiés congolais «une catégorie de réfugiés qui proviennent de Brazzaville et une autre de la vallée du Niari 33». En effet, les premiers sont des citadins qui ont des capacités limitées d adaptation à un mode de vie d existence précaire et restent très souvent marqués par des activités professionnelles ou économiques liées à des conditions de vie meilleures. Ces réfugiés sont pour la majorité dans les localités du Haut-Ogooué avec la volonté d y mener une existence aussi proche que celle qui était la leur avant les combats les ayant chassés de leurs foyers de Brazzaville. Les chiffes posent souvent quelques difficultés pour asseoir des analyses, car «dans une grande partie du tiers-monde, le peu de valeur des statistiques qui pèchent toutes par défaut ne permet pas de mesurer avec précision le phénomène d explosion démographique chaque progrès de la rigueur statistique le fait découvrir important qu on ne le pensait auparavant 34». Les flux des réfugiés ont connu des niveaux considérables ces dernières années. C est pourquoi le Ministre d Etat gabonais de l intérieur a, demandé aux ex-militaires congolais au Gabon, pour des questions de sécurité nationale et de gravité du phénomène, de regagner le Congo-Brazzaville ou d autres pays d accueil 35. En effet, certains réfugiés qui ont trouvé des conditions de vie favorables ne veulent plus y retourner même si les problèmes ayant été à l origine de leur départ ont trouvé quelque peu des solutions. Et c est d ailleurs la raison pour laquelle au début de 1999, des résidents de Bacongo ont préféré ne pas prendre le risque pour leur vie d emprunter le couloir humanitaire vers les quartiers Nord de Brazzaville et de s installer très inconfortablement en brousse, généralement en pleine forêt, ou de passer en RDC dans la région des Kongo. De tels réfugiés cherchaient à s installer ou à demeurer dans un pays nanti de ressources et où un avenir meilleur leur était garantit en terme économique. La stabilité économique est donc à considérer comme un facteur explicatif de l impulsion du phénomène des immigrants et/ou des réfugiés au Gabon. En outre, l explication politique tient à la stabilité politique et justifie en partie de la présence actuelle ou récente des réfugiés sur l espace urbain ou rural gabonais. L Afrique Centrale de manière générale connaît une instabilité considérable qui se manifeste et se caractérise par des conflits intra et inter-étatiques à l exemple de la République Démocratique du Congo, du Congo-Brazzaville, du Rwanda et du Burundi. Les flux de réfugiés résultent de l instabilité politique dans ces différents Etats. Le réfugié est un individu qui cherche asile là où il y a d abord la stabilité (aussi bien économique que politique). Le Gabon apparaît aujourd hui comme l un des rares pays stables dans une région d instabilité majeure. Ce pays continue en effet, «de jouir du privilège, d être l unique pays de la sous-région où le climat politique, bien que connaissant des mutations comme partout ailleurs a préservé une tranquillité qui étonne» 36. Nous pouvons de ce fait dire que c est grâce à la stabilité politique du Gabon que les vagues de réfugiés affluent massivement vers ce pays. Le Gabon est un pays stable, en paix, donc les réfugiés qui craignent pour leur vie sont en situation de sécurité dans ce pays. A cet effet, Monsieur Pierre Atomo Ndong 37 déclare que «la pléthore des réfugiés est la marque que le Gabon est un pays stable». Aussi, la proximité des régimes politiques gabonais et congolais expliquerait dans une moindre mesure, la présence massive des réfugiés congolais au Gabon. Celle-ci n est pas dû simplement à l étroite imbrication des deux Etats (Gabon et Congo-Brazzaville), elle tient aussi aux liens étroits au sommet de l Etat. En effet, le Chef de l Etat gabonais est de 50 ENJEUX N 39 Avril - Juin 2009

51 très loin celui de toute la région qui s est le plus impliqué dans les tentatives renouvelées de règlement de problèmes intérieurs du Congo-Brazzaville. Cela est dû en partie «à des facteurs hautement personnels 38». Les présidents Omar Bongo et Denis Sassou Nguesso entretiennent des relations amicales vieilles de longues années. De ce point de vue, nous pouvons dire que l entente entre les deux régimes politiques au pouvoir justifie toute l attention et l intérêt que les autorités gabonaises accordent à l endroit des réfugiés congolais. C est ce qui fait penser «que la situation actuelle des réfugiés au Gabon est voulue par Bongo et Sassou 39». Jamais auparavant, lors des diverses guerres au Congo-Brazzaville, «depuis Fulbert Youlou, jusqu à Massamba-Débat ; depuis Ngouabi jusqu à Lissouba en passant par Yombi-Opangault, les Congolais ne s étaient réfugiés si massivement au Gabon 40». C est donc dire que la proximité des régimes politiques actuels peut expliquer la gravité ou l ampleur du phénomène des réfugiés sur le territoire gabonais. L explication géographique et géopolitique reposent sur les déplacements des populations vers le Gabon qui s expliquer également par un certain nombre d éléments d homogénéité sur le plan géographique : le climat, la topographie et la population (Bantu). Ces différents éléments de configuration géographique rendent l accès plus facile aux demandeurs d asile. Il est plus aisé aux populations victimes des conflits armés dans les pays voisins et qui cherchent refuge de s adapter et de s installer sans trop de difficultés sur le territoire gabonais. C est le cas des réfugiés congolais en provenance de la région du Niari (vivant généralement dans la forêt) et qui se sont établis au Gabon. Ils sont présents dans la province de la Nyanga qui leur est plus proche géographiquement et socialement. Ces populations frontalières congolaises dont l identité ethnique est la même que celle du milieu local, se sont facilement installées. Elles ont trouvé des terres à cultiver, et pour certaines d entre elles des familles. Celles-ci se trouvent dans un environnement de sécurité étant donné qu elles n ont pas entamé le sens de l humanisme qui caractérise les populations de ladite localité. Par ailleurs sur le plan du peuplement, la diversité des peuples en Afrique Centrale est extrême. Cette sous-région est à majorité bantu. Lorsqu on s en tient au cas des réfugiés congolais au Gabon, cet exemple constitue un dilemme. Entre le Gabon et le Congo voisin, les affinités ethno-démographiques existent. Dans les deux Etats, de part et d autre de leurs frontières communes, sont implantées des populations parlant les mêmes langues, ce sont des groupes ethniques transfrontaliers. C est le cas de la mosaïque des peuples issus des groupes ethniques punu-shira, nzébi et téké qui semblent assez étroitement apparentés d un point de vue sociologique au sein du sous-ensemble western-bantu. Les frontières n existent pas dans leur esprit. Les réfugiés et déplacés congolais se sont rendus par priorité dans les localités gabonaises, du fait que, le Gabon constituait une zone où le soubassement ethnique leur garantissait une adaptation facile. A en juger dans la province de la Nyanga où les populations du Congo voisin ont la même identité ethnique que celle du milieu local. Ils auraient pu être considérés comme des étrangers dans d autres pays de la sous-région tels qu en Guinée-équatoriale ou au Cameroun. En effet, le tracé des frontières coloniales, n a fait que séparer des populations qui vivaient autrefois ensembles, des familles. La proximité géographique peut être une explication à la présence ou l impulsion de la question des réfugiés au Gabon. Le fait que le Congo-Brazzaville soit frontalier au Gabon implique inéluctablement un inévitable afflux des réfugiés dans les deux pays en cas de conflits armés ou guerres civiles. L existence des liens sociologiques séculaires entre les deux pays a favorisé l arrivée des réfugiés congolais au Gabon. Les réfugiés congolais d ethnie Nzebi se sentent chez eux au Gabon. C est aussi le cas des Punu et Téké qui sont des peuples apparentés liés par un phénomène ethnique et historique. ENJEUX N 39 Avril - Juin

52 C est pourquoi les réfugiés se fondent facilement à l intérieur du territoire gabonais. A titre illustratif, le Gabon comptait environ réfugiés en , avec la ruée congolaise, ils sont à l heure actuelle à plus de et de nationalités diverses. C est donc dire que la proximité géographique a favorisé et facilité l entrée des réfugiés sur le sol gabonais. Sur le plan géopolitique, la porosité des frontières gabonaises est l une des causes lointaines de la présence des réfugiés et immigrés clandestins. Les frontières rendent le phénomène menaçant compte tenu de la stabilité territoriale et des diverses richesses dont ce pays regorge. Celles-ci en tant que facteur favorable aux flux migratoires des populations peuvent s expliquer par deux raisons majeures. Premièrement, il se pose un problème de moyens matériels chez les autorités en charge de la protection de l enveloppe territoriale. Deuxièmement, il n y a pas suffisamment d agents pour assurer pleinement la sécurité au niveau des frontières et ceux-ci ne disposent pas du matériel adéquat et indispensable pour mener à bien la mission qui est la leur, les agents sont aussi confrontés aux conditions de vie et de travail difficiles. C est pourquoi, certains immigrés, contrebandiers et réfugiés réussissent à traverser illicitement les frontières gabonaises. Par ailleurs, il est difficile pour la police des frontières de faire la distinction entre les populations voisines au Gabon à cause de l existence des groupes ethniques apparentés de part et d autre des frontières. Dans toute la zone frontalière, les individus se définissent toujours d abord par leur identité ethnique liée à une langue particulière, que par leur nationalité. On constate donc en définitive que malgré le fait que l OUA proclame dans sa charte, le principe de l intangibilité des frontières héritées de la colonisation 43 comme étant le fondement des rapports inter-étatiques, les Africains appartenant à la même ethnie n ont jamais considéré dans leur quotidien qu une frontière dont ils ne voyaient l utilité, pouvait constituer un obstacle aux contacts entre les cousins d un Etat avec les cousins résidents dans l autre Etat 44. Les réfugiés pour arriver au Gabon, parcourt des milliers de kilomètres par voie terrestre. La violation des frontières au niveau terrestre est aussi orchestrée par les voisins de proximité qui détournent l attention des forces de l ordre. Nombreux sont, en effet, les groupes ethniques que l on retrouve à la fois au Gabon et au Congo le long de la frontière. La confusion est d autant plus grande chez les agents de sécurité à cause de ce maillage socio-culturel pré-colonial. La gravité du phénomène des réfugiés réside donc dans la porosité des frontières, la question des réfugiés n étant pas un fait du hasard. C est ainsi qu on observe dans certains cas des situations où «les réfugiés sont dans un pays d accueil et n hésitent pas à franchir allègrement la frontière pour se rendre dans leur pays d origine avant de revenir tout aussi naturellement quelques jours ou même quelques heures après dans le pays d accueil 45». Cette situation est observée au sud du Gabon où les populations congolaises (à la frontière Gabon-Congo par le Haut-Ogooué) réfugiées franchissent la frontière du côté de Boumango avant de regagner cette même ville le jour même. Les réfugiés comme vecteur de la dynamique dialogique ville/campagne : quelques données statistiques et cartographiques A travers cette analyse qui a trait aux données statistiques sur les réfugiés, et pour lesquelles nous portons un intérêt particulier cette réflexion, nous procédons dans la d abord à une étude comparative entre les réfugiés originaires du Congo-Brazzaville, ceux des Grands-Lacs et d ailleurs. Par la suite, nous élaborons une cartographie des zones et camps de réfugiés afin de faire ressortir les campagnes comme principales zones de concentration des réfugiés sur le territoire gabonais. Aussi, l absence d un outillage cartographique chez les autorités en charge de la protection des individus en quête d asile, participe de ce besoin d imprégner l analyse géopolitique des campagnes à la problématique éminemment géopolitique des réfugiés. L analyse s intéresse ici aux caractéristiques démographiques des réfugiés au Gabon. En effet, La population totale des réfugiés recensés par le Haut Commissariat des Nations Unies pour les Réfugiés (H.C.R) estimée depuis près d une décennie malgré quelques variations marginales à sur «près de cinquante mille réfugiés 47» que ce pays abrite sur son sol. Dans les zones urbaines suivantes: Libreville, Franceville, Tchibanga, Mouila, Koulamoutou, Moanda et Boumango, cette population s élève à chez les femmes contre chez les hommes, soit environ un total de réfugiés. Tandis que dans les 23 zones rurales, les femmes représentent environ réfugiés contre hommes soit un total réfugiés. La population des dispersés et autres est comprise dans celle des réfugiés ruraux. De manière générale, sur près de trente sites répartis sur le territoire national, on enregistre femmes et hommes. La population réfugiée au Gabon a donc fortement évoluée depuis En effet, estimée en en 1999, celle-ci a augmenté à dans les années 2000 pour redescendre à depuis 2001 et de manière crescendo. On peut donc 52 ENJEUX N 39 Avril - Juin 2009

53 constater que les données relatives aux réfugiés dans les zones urbaines présentent un caractère évolutif d une année à l autre. Ce nombre a augmenté passant de en 2000 à en 2001.Tandis que dans les zones rurales, la situation est inverse, de réfugiés en 2000, ce nombre a décru à en A travers l examen du tableau ci-dessous (Cf. tab.1), nous pouvons rendre compte des caractéristiques démographiques des réfugiés enregistrés par le Haut Commissariat pour les Réfugiés (H.C.R) au Gabon. Tableau n 1 : Effectifs des réfugiés par site d implantation (ville/campagne) au Gabon depuis 2001 regroupés à Libreville. Le HCR a donc convenu avec les autorités gouvernementales de se rendre dans les zones non encore couvertes pour procéder à l identification et à des enregistrements de tous les dispersés. La ventilation par tranches d âge, des réfugiés recensés ce présente comme suit: la population réfugiée chez les femmes se présente comme suit selon les tranches d âge : 924 femmes ont entre 0 à 4 ans, de 5 à 17ans, de 18 à 59 ans et 185 à plus de 60ans. Chez les hommes, suivant les mêmes tranches d âge, les effectifs s élèvent à 873, 2.896,6.746 et à 336. Les hommes avec un effectif de représentent donc environ près de 56,46% de la population réfugiée au Gabon, contre 43,53% des femmes dont l effectif s élève à Par ailleurs, la situation des réfugiés se caractérise par d énormes disparités entre zones rurales et zones urbaines (cf. tab.2). En effet, depuis plus de deux ans, il y a une forte concentration des réfugiés dans les villes, soit à l exception de la ville de Boumango contre 4.347, un peu plus de deux fois que dans les zones rurales où se retrouvent la majorité des sites. Cette disproportion spatiale des réfugiés entre les villes et la périphérie peut s expliquer par le nécessaire recours à une bonne intégration et réintégration. Les villes offrant plus de possibilités, les réfugiés pensent trouver des conditions de vie acceptables ou favorables. C est en partie pourquoi cette répartition est inégale et pourtant les camps de réfugiés sont plus concentrés dans les zones rurales. Tableau n 2 : Répartition des réfugiés par sexes et groupes d âge au Gabon : comparaison zones rurales et zones urbaines Source : Délégation HCR pour le Gabon, Libreville. Source : Délégation HCR pour le Gabon, Libreville. Source : Délégation HCR pour le Gabon, Libreville. A cette répartition indistincte regroupant des réfugiés légaux sous la charge du HCR, il faut souligner que la dispersion géographique des réfugiés reconnus sur la base d une détermination individuelle et des demandeurs d asile est encore mal maîtrisé. En effet, ceux qui ont eu accès au HCR et à la CNR ont été, par convenance Les disparités observées à travers ce tableau, posent alors le problème des facteurs explicatifs de la répartition spatiale des réfugiés, la diversité des situations laissant ainsi présager de la complexité des causes et des dynamiques en présence. Aussi, les réfugiés sont répartis en plusieurs nationalités, on retrouve majoritairement les réfugiés du Congo-Brazzaville, ensuite ceux des Grands-Lacs, et etc (Cf. tab.3). ENJEUX N 39 Avril - Juin

54 L analyse du tableau ci-après, nous permettra de procéder à une comparaison à partir des chiffres liés aux réfugiés dénombrés par le H.C.R depuis 2000 au Gabon, et ce en fonction de leurs nationalités. Tableau n 3 : Population réfugiée au Gabon par origine géographique Source: Délégation HCR pour le Gabon, Libreville. de nationalités diverses, ils sont environ sur près de réfugiés enregistrés dans la province de l Estuaire par le HCR. La présence massive des réfugiés congolais au Gabon tient au fait que la dernière vague de réfugiés congolais que le gouvernement de la République gabonaise et les populations autochtones ont accueilli, était plus importante que les vagues antérieures des réfugiés anglophones et lusophones (Nigérians, Sierra-léonais, Equato-guinéens, Libériens ). Et cette importance du phénomène des réfugiés congolais au Gabon peut se justifier par la proximité géographique des deux Etats et de leurs rapports de coopération bilatéraux. C est aussi en partie à cause de cet afflux important des réfugiés congolais (prima facie ou de première vue) qui sont liés du point de vue ethnolinguistique à certaines populations gabonaises, que l institution d une législation nationale en matière des réfugiés s est imposée, pour contrôler et gérer les flux migratoires susceptibles de constituer une menace à l ordre public interne. Les réfugiés de la région des Grands-Lacs et ceux d ailleurs sont donc incomparablement moins nombreux que les populations congolaises réfugiées au Gabon. Ils ne représentent que soit 21,94% sur les réfugiés recensés. La quasi-totalité des réfugiés établis sur le territoire gabonais est originaire du Congo-Brazzaville. On dénombre au total réfugiés congolais soit 78,06% sur les réfugiés recensés par le H.C.R au Gabon. En effet, sur réfugiés dans la province de la Nyanga, sont originaires du Congo Brazzaville. Dans la province de la Ngounié, on enregistre réfugiés dont Congolais. Le même constat peut être fait dans la seule province du Haut-Ogooué qui a accueilli plus de réfugiés dont pour la plupart sont issus du Congo voisin. Dans les trois provinces précitées, les réfugiés de l Afrique des Grands-Lacs qui représentent 7,83% sont de la République Démocratique du Congo soit 58 dans la Ngounié. On retrouve également 21 Rwandais dans la province du Haut-Ogooué, plus précisément à Franceville, mais pas de réfugiés burundais. Quant aux autres nationalités regroupant des réfugiés, il existe au total 26 : Angola, Cameroun, Centrafrique, Tchad, Comores, Guinée-Equatoriale, Ethiopie, Ghana, Libéria, Mauritanie, Mali, Niger, Nigeria, Sénégal, Sierra Leone, Somalie, Viêt-Nam, Sao Tomé et Principe, Soudan, Togo, Erythrée, Bénin, Ouganda, Guinée Bissau, Côte d Ivoire et Maroc. Parmi cellesci, ce n est que dans la Nyanga et le Haut-Ogooué où on dénombre respectivement 4 et réfugiés. C est à Libreville principalement que sont disséminés ces réfugiés Figure n 4 : Récapitulatif des données comparatives Source : Délégation H.C.R à Libreville/ Antenne H.C.R à Tchibanga 54 ENJEUX N 39 Avril - Juin 2009

55 des réfugiés par nationalité au Gabon De la circulation au contrôle : pour une géopolitique des usages migratoires de l espace de campagne au Gabon Les recherches en géographie en Afrique centrale sur les sont encore peu nombreuses et récentes, puisqu elles n apparaissent que dans les années Elles se développent dans les années 1990 et 2000, mais de façon disparate, se concentrant sur des études de cas à forte charge descriptive, sur des catégorisations des migrations forcées et sur des techniques de cartographie des camps de réfugiés au service des organisations internationales. Alors même que dans les autres parties du monde, notamment dans les aires anglophones, les travaux sont denses, plus importants et structurés autour de domaines variés, à l instar de la relation réfugié/environnement, des modalités d implantation des réfugiés, de la perception du pays d origine et enfin, des mouvements transnationaux (introduction des rapports à l Etat et au retour). Aujourd hui, le géographe s inscrit pleinement dans le grand champ d étude de la géopolitique (rapport entre géopolitique et réfugiés) et mène une réflexion générale sur les actions humanitaires, les espaces de la migration et de l asile, espaces à partir desquels se créent de nouvelles dynamiques sociales. En abordant la question des réfugiés africains au Gabon, nous posons le débat très actuel ailleurs sur les contrôles des immigrés et des réfugiés dans les pays d accueil devenus une véritable affaire d Etat, les logiques politiques contemporaines de l asile se sont complexifiées, à la fois entre incertitude et ambiguïté (asile incertain et asile ambigu). L expulsion devient la logique qui guide la gestion des demandes d asile dans d espaces divers, à l image des campagnes, nouveaux lieux d enfermement des étrangers en Afrique centrale. Les campagnes comme espaces de refuge, culturels, ruraux des réfugiés se sont enracinées, devenant des «villes-bis», pleinement ancrés dans divers réseaux, organisés et structurés de manière pratique et fonctionnelle de façon à répondre aux nécessités du fonctionnement du dispositif humanitaire, et le temps mesuré et rythmé par les distributions ou les aléas politiques, sont ensuite récupérés par les populations qui fabriquent un espace-temps ancré dans un présent perpétuel. L espace de campagne devient également un lieu d une recréation de la communauté réfugiée sur le plan symbolique, politique et social. Tel est le cas des Congolais qui ont développé dans un exil toujours imaginé comme temporaire une forte conscience identitaire et des réseaux économiques structurés qui permettent un temps soit peu de recréer un élément de stabilité dans l instabilité (organisation en coopératives villageoises), voire même politiques (les réfugiés comme enjeu électoral). C est dire qu aujourd hui, la géopolitique des usages migratoires des campagnes doit imprégner les multiples significations de l habiter et de l habitat. Par opposition aux campements informels qui se sont créés dans les campagnes, un camp doit pouvoir être «un lieu où on se sent chez soi, lieu politique, lieu de vie, d itinéraires personnels où s ancrent l existence, les souvenirs, l enfance» parce que l exclusion est ressentie avant tout comme une double souffrance, celle de la perte d un espace social. Le camp peut devenir une ville demeure, un espace de civilité où l habiter se situe au croisement de plusieurs temporalités, le passé avec la nostalgie de la demeure perdue (production de souvenirs), le présent qui offre un ancrage sur place mais qui est un présent en suspens, qui associe l avenir en se vivant dans des structures provisoires qui durent. En effet, vivre dans un camp peut signifier : «s enraciner dans un lieu qui superpose différentes dimensions, notamment celle de succédané d un territoire national en voie de constitution et qui demeure inaccessible, celle d un cadre de la vie quotidienne et celle d un lieu de ressource symbolique et matériel». Pour une cartographie des principaux camps et zones de refuge dans l espace campagnard La République gabonaise a connu pendant l année 1999 une importante vague des réfugiés qui a été l occasion des interventions humanitaires par la mobilisation de plusieurs pays et des organisations internationales dont le Haut Commissariat pour les réfugiés (HCR) et le programme alimentaire mondial (PAM) venus à son aide. Le Gabon ne pouvait, en effet, seul assurer la charge d assister tous ces milliers de réfugiés. La cartographie des camps et zones de refuge est essentielle de nos jours. Elle est souhaitable et possible en ce qu elle doit permettre non seulement de comprendre les dynamiques spatiales des réfugiés sur le territoire national, mais aussi, elle permettra d évaluer la population réfugiée et de prendre en compte avec la problématique actuelle du développement durable, les problèmes sociaux, tels ceux liés à l environnement. Début 1999, le HCR assistait réfugiés, ce chiffre à baissé à en fin d année. Depuis la fin de l an 2000, la population réfugiée est remontée à , sauf à noter le rapatriement volontaire et organisé d un premier contingent de réfugiés estimés à près de 117 personnes par un vol spécial de la compagnie aérienne TRANS ENJEUX N 39 Avril - Juin

56 AIR CONGO (TAC) le jeudi 02 août Le chiffre total des milliers de réfugiés venus du Congo et qui se sont établis avec armes et bagages, se stabilise donc autour de personnes depuis Depuis 1999 à aujourd hui, plusieurs camps de réfugiés sont parsemés dans les provinces frontalières du Sud et de l Est, en particulier dans la Nyanga, la Ngounié, le Haut-Ogooué, considérés toutes comme des zones de refuge. On enregistre environ près de 25 camps (sites) de réfugiés dans ces zones situées à proximité des frontières, et où sont rassemblés des milliers de réfugiés dans les campagnes. En effet, le retour à la paix au Congo-Brazzaville et l apaisement des conflits entre les différentes factions rivales, ont conduit les autorités gabonaises pour un nécessaire recours à la stabilité territoriale, à procéder par vagues successives au rapatriement des groupes de réfugiés. Et ceci pour permettre à moyen ou à long terme au HCR de démanteler ces camps situés à la frontière avec le Congo, afin de mieux contrôler et gérer les flux de populations. La présence de tous ces camps de réfugiés dans certaines régions du pays où le nombre des réfugiés est supérieur, voire trois fois plus que celui de la population autochtone (cas de la ville de Boumango qui avec 500 habitants comptait près de réfugiés déclarés en décembre 1999, et en l an 2000 et 892 en 2001), doit conduire les autorités et les organisations humanitaires à l usage des cartes ou aux diverses méthodes de représentation cartographique. La cartographie est un outil indispensable à la prise des décisions. La représentation cartographique des camps et zones de refuge dans le cas du Gabon paraît importante même si le HCR et la CNR dans leurs missions premières liées à l alimentation, la santé, la logistique des réfugiés, n y accorde pas une attention particulière. De nos jours, dans le cadre d une analyse prospective, l utilisation de la cartographie comme un moyen permettant de comprendre les situations d ordre géographiques, s avère être fort utile partant du choix du site des réfugiés, à l organisation des camps jusqu à l origine géographique des réfugiés. Dans le cadre de l aménagement du territoire ou plus précisément de l organisation spatiale des camps de réfugiés, la cartographie ne peut pas paraître dénuée d importance pour les autorités gabonaises. Du fait que de part et d autre des frontières, les mêmes populations aient été matériellement démantelées ou séparées, provoque chez les réfugiés ce sentiment de «détérritorialité» ou d homogénéisation de l espace territorial car étant liés avec les populations gabonaises par un phénomène ethnique et par la même histoire. C est dans ce sens que la géopolitique peut s avérer nécessaire pour la compréhension et l analyse des problèmes liés à la territorialité et des comportements sociaux sous-jacents. Par ailleurs, en matière d analyse spatiale, la carte en tant qu outil d information et support du géo-politiste, n est pas seulement réalisée pour montrer des situations géopolitiques, mais elle sert également «à mieux comprendre les dispositifs géopolitiques». Les cartes des camps de réfugiés peuvent servir ou constituer des éléments de complémentarité chez les organisations en charge de la protection et de l assistance des réfugiés. Les cartes recèlent en effet plusieurs atouts : la capacité de concentration des données et de synthèse des informations. En géopolitique, «la carte est d abord un instrument d étude des situations géopolitiques, ensuite, un révélateur des intentions géopolitiques». L analyse géopolitique peut ainsi dans le cas du Gabon non seulement constituer un véritable terreau dans la maîtrise du phénomène des réfugiés, mais aussi répondre aux préoccupations de la commission nationale pour les réfugiés dans le cadre de l aménagement et de la planification de nouveaux espaces d accueil, dans le cadre de l évaluation du nombre total des réfugiés (en se référant aux cartes sur les camps de réfugiés) et enfin, dans la prise en compte des problèmes environnementaux tel que la dégradation de la végétation, en élaborant par exemple des cartes sur les espaces déboisés par les réfugiés, ainsi que l occupation anarchique de l espace campagne en ville-bis. Aussi, en considérant la carte comme «un symptôme qui renvoie à toutes les logiques d expansion territoriale ou de défense territoriale», les autorités concernées par les réfugiés doivent travailler sur la localisation des réfugiés à l échelle nationale puisqu ils s identifient le plus souvent 56 ENJEUX N 39 Avril - Juin 2009

57 par rapport à l appartenance à un groupe de réfugié: cas des réfugiés «prima facie» pour désigner les populations congolaises réfugiées au Gabon. Cette localisation dont le but est de contrôler et gérer les réfugiés au Gabon, doit se faire en fonction d une bonne villagisation des camps dans différents sites : exemple, camp des réfugiés congolais, des réfugiés des Grands-Lacs, etc. Les phénomènes sociaux et démographiques provoqués par les réfugiés ne pourront être contrôlés que par une bonne organisation spatiale des camps en fonction des origines géographiques des réfugiés, car la mosaïque des peuples à l intérieur d un même camp peut perturber l ordre public interne (rivalités claniques, clivages ethniques, micro-nationalismes ), et cette géopolitique des réfugiés au Gabon doit obéir à une logique de saisie et de compréhension du phénomène à l échelle nationale. Finalement, que les données statistiques et cartographiques permettent de découvrir à la fois l ampleur et l importance du phénomène des réfugiés sur le territoire national, en ville et en campagne. Par ailleurs, l analyse géopolitique des campagnes dans son rapport aux usages territoriaux de l asile au Gabon, peut servir sert à la compréhension des problèmes de territorialité et des comportements sociaux, démographiques ou culturels pouvant émaner de cette catégorie de population, généralement susceptible de perturbation géopolitique. Indications bibliographiques 1- Agier (M), Au bord du monde: les réfugiés, Paris, Flammarion, Chauprade (A), Introduction à l analyse géopolitique, Paris, ellipses, 1999, 283 p. 3- Devey (M), l héritage, Marchés tropicaux et méditerranéens, hors-série, novembre 1996, p Kombila (J-C), La fin de l exil des nombreuses familles congolaises, L Union, n 7672, du 3 août 2001, P.2 5- Lacoste (Y), Géographie du sous-développement, Paris, PUF, 1982, P Limbaya kihongosi (B), A la lumière de la crise Rwandaise : les groupes ethniques transfrontaliers comme enjeu du pouvoir au Zaïre, Revue Juridique et Politique : Indépendance et Coopération, n 2, septembre 1997, p Makanga Bala (M-P), La problématique d une géopolitique des frontières au Gabon et en Afrique Centrale, Mémoire de maîtrise, UOB, Libreville, P Moreau Defarges (Ph), Les relations internationales dans le monde d aujourd hui : conflits et interdépendances, Paris, S.T.M, 3è éd, 1987, p Moukoko, (Ph), Dictionnaire général du Congo-Brazzaville, (en ligne), disponible sur dp. 10- Nguema (A), (15/05/09), La situation des réfugiés au Gabon, (en ligne), disponible sur http: // 11- Quantin (P), Omar Bongo, médiateur des conflits africains, (en ligne), consultable sur Paper_PQuantin.pdf. 12- Thireau, Les nouvelles dynamiques spatiales : à la redécouverte du territoire, Paris, L Harmattan, 1993, P. 73. Journaux et revues : gabonais et international Afrique contemporaine Jeune Afrique La Lettre du Continent L Union Missamu Ressources électroniques Notes 1 Déclaration universelle des droits de l homme, Article III, 10 décembre Ce travail d emprise non-conformisme est enraciné dans un contexte particulier, touchant à des préoccupations très importantes et éminemment heuristiques : dé-paysannisation, transformation de la campagne, consommation étrangère et/ou urbaine de l espace rural, histoire de la société campagnarde et sociologie de la communauté paysanne et villageoise). Aussi, avons-nous porté le choix sur ce thème, présenté à grands renforts médiatiques comme majeur pour les droits de l Homme, quitte à sacrifier des pans entiers de l analyse au point de réduire le particularisme apparent de cette argumentation par des références marginales à quelques auteurs. Nous remercions pour ses remarques M. Marc-Loius Ropivia qui a été l un des auditeurs patients d une partie des éléments en discussion ici. ENJEUX N 39 Avril - Juin

58 3 Information officielle livrée par J.F. Ntoutoume Emane, Premier ministre Chef du gouvernement au Corps diplomatique, point de presse, 8/10/1999, L Union n 7127, p J-F. Ntoutoume Emane, idem. 5 HCR service de la communication 1999, P HCR, Les réfugiés, in convergences/développement et droit de l homme, 1998P HCR actions, (10/05/09), Réfugiés d Afrique, (en ligne), disponible sur HCR appel global stratégie et programme 2000, P Article XIV de la déclaration universelle des droits de l homme. 10 Article 1A (2) de la convention de Genève de M. Agier, Au bord du monde: les réfugiés, Paris, Flammarion, Directeur du Centre d études africaines. 13 Extrait de la lettre n PR/D 13/C. du 27 décembre 1991 du Président de la République, Chef de l Etat à Monsieur le Premier Ministre Chef du gouvernement, relative au transfert de la tutelle des réfugiés. 14 Anonyme, La loi n 5/98 portant statut des réfugiés en République gabonaise, Hebdo informations, n 375 du 7 mars 1998, p Art. 2 A (2) du décret 648 de la Commission nationale pour les réfugiés. 16 Art. 2 A (4) de décret relatif à l organisation et au fonctionnement de la commission nationale pour les réfugiés. 17 Art. 10 de la Commission nationale pour les réfugiés. 18 Art. 13 de la Commission nationale pour les réfugiés. 19 HCR actions, Réfugiés d Afrique, Op.cit. 20 Art. 2 du décret relatif à l organisation et au fonctionnement de la commission nationale pour les réfugiés. 21 Art. 3 du décret précité. 22 V. Thireau, Les nouvelles dynamiques spatiales : à la redécouverte du territoire, Paris, L Harmattan, 1993, P Gabon Matin, n 393, 14 septembre 1968, PP Gabon Matin, n 610, 9 mai 1969, P Gabon matin, n 395, 17 septembre 1968, P P. Moreau Defarges, Les relations internationales dans le monde d aujourd hui : conflits et interdépendances, Paris, S.T.M, 3è éd, 1987, p M. Devey, l héritage, Marchés tropicaux et méditerranéens, hors-série, novembre 1996, P M. Devey, idem. 29 P. Decraene, L Afrique Centrale, Paris, CHEAM, 1989, P C. Mounguengui, Quelle immigration pour le Gabon?, L Union, du 14 et 15 janvier 1995, P C. Mounguengui, idem. 32 C. Mounguengui, Op cit 33 P. Moukoko, (30/04/09), Dictionnaire général du Congo-Brazzaville, (en ligne), disponible sur zon.fr/dictionnaire-général-congo-brazzaville-philippe- Moukoko/dp. 34 Y. Lacoste, Géographie du sous-développement, Paris, PUF, 1982, P Monsieur Antoine Mboumbou Miyakou, point de presse du 14/03/01, Libreville. 36 M-P. Makanga Bala, La problématique d une géopolitique des frontières au Gabon et en Afrique Centrale, Mémoire de maîtrise, UOB, Libreville, P Président de la commission nationale pour l éligibilité des réfugiés, entretien du 21/06/2001 au journal Gabon matin dans le cadre de la journée mondiale des réfugiés. 38 P. Quantin, Omar Bongo, médiateur des conflits africains, (en ligne), consultable sur Paper_PQuantin.pdf. 39 A. Nguema, (15/05/09), La situation des réfugiés au Gabon, (en ligne), http: // 40 Anonyme, (15/05/09), La question des réfugiés, (en ligne), forum/international/ 42shtml. 41 HCR, Appel global, stratégies et programmes 2000, Op. cit., P HCR, idem. 43 M-P. Makanga Bala, Op. cit, p Bernard Limbaya kihongosi, A la lumière de la crise Rwandaise : les groupes ethniques transfrontaliers comme enjeu du pouvoir au Zaïre, Revue Juridique et Politique : Indépendance et Coopération, n 2, septembre 1997, p Bernard Limbaya kihongosi, idem. 46 Délégation HCR, Libreville Gabon, rapport annuel Information livrée de façon officielle par le premier Ministre Jean François Ntoutoume Emane au corps diplomatique accrédité en République gabonaise lors d un point de presse le vendredi 08 octobre Le Ministre d Etat aux Affaires Etrangères Jean Ping et le Ministre Ali Bongo de la Défense Nationale prenaient part à cette table ronde, L union, n 7127, du 09 et 10 octobre 1999, P Délégation H.C.R au Gabon, Libreville, Op. cit. 49 J-C. Kombila. La fin de l exil des nombreuses familles congolaises, L Union, n 7672, du 3 août 2001, P A. Chauprade, Introduction à l analyse géopolitique, Paris, ellipses, 1999, 283 p. 51 A. Chauprade, Op. Cit. 52 A. Chauprade, idem. 58 ENJEUX N 39 Avril - Juin 2009

59 De la civilisation des normes à la spoliation des droits de propriété :le stress foncier des campagnes camerounaises Par ANTANG YAMO, GRAPS/ FLASH, Université de Yaoundé I (Cameroun) Depuis la période coloniale, la question foncière est pratiquement omniprésente dans toutes les formes d activités renvoyant au milieu naturel, parmi les quelles les régimes de la tenure foncière et les droits d usage. Près d un siècle après l introduction de la procédure de l immatriculation foncière au Cameroun, la propriété privée de la terre y reste l exception. La terre qui fut l un des domaines privilégié d application du principe colonial et qui accordait à l Etat les terres vacantes et sans maîtres (Le Roy et al., 1996), continue d éclairer les politiques publiques post-indépendances que même la loi foncière de 1974 n a pu modifier ni l esprit de la loi, ni celui des décrets d application. Si l absence de sécurité foncière a bien été diagnostiquée comme une des causes du mal- développement, on a de plus en plus des raisons de douter que la généralisation de la propriété privée soit un remède approprié. Les modalités d accès au sol et aux ressources, la reconnaissance des droits individuels ou collectifs et la gestion de la transmission des valeurs foncières, sont compromises. Les modes de gestion coutumières des ressources forestières sont fragilisées par l intervention de l Etat et les évolutions récentes (code foncier de 1974 et loi forestière de 1994), qui éclairent ainsi une facette de la diversité des termes dans lesquels se pose le problème du foncier rural (Teyssier, 2003). Tout en étant en partie fonctionnelle, cette situation accroît l insécurité foncière et favorise les conflits, parfois violents, qui se multiplient en milieu rural, dominés par un conflit de sens et de puissance quant à ce qui concerne les droits de propriété entre divers groupes d usagers constitués de l Etat, les agences de conservation, les populations locales. Les régimes de propriété au Cameroun La gestion foncière au Cameroun est fondée sur deux registres juridiques : la coutume et le droit de l Etat. Les systèmes coutumiers sont fondés sur les traditions des communautés villageoises et régissent l appropriation et la gestion locale du foncier forestier. Ils sont définis en fonction des écorégions et des communautés villageoises qui y vivent. Les régimes relevant du droit étatique quant à eux, sont issus d un ensemble de textes législatif et réglementaire, notamment la loi n 74/1 du 06 juillet 1974 fixant le régime foncier et domanial et la loi n 94/01 du 20 janvier 1994 portant régime des forets, de la faune et de la pêche (Bigombe Logo, 2007). Depuis l avènement des reformes et en civilisant les régimes fonciers le législateur Camerounais a fondu le patrimoine collectif national dans un grand moule qui forme aujourd hui un vaste domaine appelé domaine national (MINEF1995). Les intérêts multiples mêlent désormais d une part les traditions, les lois et les réformes ; et d autre part, les autochtones et les allochtones, les minorités et les majorités, la puissance de l Etat et le pouvoir coutumier, les conservateurs et les populations locales. L histoire de la question foncière dans les campagnes camerounaises, peut donc se lire dans la trajectoire de ces quelques composantes. La question foncière en milieu rural camerounais La question foncière en milieu rural ne concerne pas uniquement les paysans et leurs familles, mais également une cohorte d acteurs qui interviennent, avec leur ensemble de règles consacrées par l usage en matière de gestion des terres, et d accès aux ressources entre différents usagers qui veulent se procurés la terre, la destinée à la mise en culture, à la création des plantations ou des aires protégées. L agro-industrie et la logique de l expropriation Dans le champ foncier rural camerounais si polarisé par l arboriculture, l arbre est source de droit foncier, la plantation ressort plus que jamais comme signe et justification de l emprise sur le sol. Dans les régions du Sud-Ouest, du Littoral et du Nord- Ouest, la Cameroon Development Corporation (CDC), société d État en cours de privatisation, dispose de plantations d hévéa, de palmier à huile, de bananier et de thé. Les surfaces exploitées, couvrent une superficie totale de ha, et ha de ces terres ont fait l objet d un bail emphytéotique en 1966 (MINFOF, 2008). Les plantations ont cependant fait l objet d une privatisation partielle. En effet, de jeunes promoteurs camerounais, partenaires de la Cameroun Tea Estate (CTÉ), ont racheté 850 ha de plantations de thé. Cette privatisation partielle a exacerbé les revendications foncières des communautés Bakwéri qui, depuis de nombreuses années, réclament leurs terres. Ces revendications foncières viennent également de ce que, la pression démographique aidant, les populations et les services publics n ont plus assez de terres pour leurs activités. La Compagnie Forestière Sangha Oubangui (CFSO) a acquis des terres dans les arrondissements d Abong-Mbang et Atok dans le Département du Haut-Nyong, Région de ENJEUX N 39 Avril - Juin

60 en milieu rural Camerounais, étant donné que cet agroindustrie détient sa légitimité sur le sol des instruments juridiques légaux octroyés par l Etat. Or, l histoire du peuplement de la localité, révèle que les populations Bagyéli ont précédé la SOCAPALM dans la région. Elles constituent les premiers occupants dans cette zone forestière comme cela s est passé dans les autres régions forestières d Afrique centrale (Bigombe Logo, 2007). L implantation des populations autochtones au coeur des palmerais, bien que bénéficiant d une antériorité l Est- Cameroun à l époque coloniale. Ces terres achetées et mise en valeur par la création des plantations caféières ont été titrées à cette époque. Les propriétaires ne se sont plus intéressés à ces plantations après la chute des cours du café sur le marché mondiale vers la fin des années Ils ont finalement abandonné les plantations laissant les nombreux ouvriers sans ressources. Face au désengagement de la CFSO, les employés se sont livrés à la culture maraîchère sur les espaces abandonnés. Cette occupation a réveillé les revendications foncières coutumières des populations locales de Madouma, d Atok et de Ntimout, sous prétexte que la terre leur avait été arrachée (MINEF, 2008). Pour échapper aux revendications, les dirigeants de la CFSO ont revendu les plantations à de nouveaux acquéreurs. Au-delà de ces stratégies de détournement dans les pratiques foncières orchestrées par les dirigeants de la CFSO, ceux-ci connaissent les mêmes contestations foncières que les adjudicataires de la CDC. Dans la région du Sud, le différend foncier entre la Société Camerounaise des Palmerais (SOCAPALM) et les Pygmées Bagyéli dans la zone de Kribi, traduit en réalité une autre expression de la spoliation des droits d usage sur le site est méconnu parce que le hameau Bagande n est pas formellement reconnu et juridiquement établi, ni par l entreprise, ni par l Etat du Cameroun. L affectation d un important espace de ha à l agro-industrie (Dkamela, 2007), réduit considérablement les terres dont peut faire usage la communauté Bagyéli. L ordonnance n 74-3 du 6 juillet 1974, relative à la procédure d expropriation pour cause d utilité publique, remet en cause le droit d antériorité sur le sol et entraîne immédiatement le transfert de propriété, et permet de muter les titres d autochtonie par la législation formelle. Les autochtones sont désormais sans terre (Socpa, 2006). Les Bagyéli assistent impuissamment au déploiement du 60 ENJEUX N 39 Avril - Juin 2009

61 rouleau compresseur de la SOCAPALM qui, au fil des ans, réduit leurs aires de parcours pour étendre ses plantations. Les ambiguïtés et les non-dits dans cette transaction foncière entraînent bien sûr des comportements opportunistes et manipulateurs, des malentendus et des litiges (Zongo, 1997) ; qui suscitent des grognes de la part des peuples autochtones dans l optique de disposer de plus d accès au sol. Les aires protégées, une nouvelle forme de civilisation de l espace en milieu rural Dans le Sud-Est Cameroun, l étroitesse des liens entre l homme et la nature a aboutie, à travers des siècles, à des itinéraires de maîtrise spatiale, de production économique et de reproduction sociale. Les communautés Baka et Bantou, tirent l essentiel de leur subsistance de la diversité biologique. Certains de leurs hauts lieux sacrés se trouvent aussi dans l espace forestier qu ils occupent. Depuis 2005, le gouvernement Camerounais a créé au sein du massif forestier du Sud-Est, deux gigantesques parcs nationaux dans les zones de Boumba Bek et Nki. Ces espaces couvrent respectivement ha et ha et comprennent des zones de chasse communautaire et sportive, des concessions forestières, des unités forestières d aménagement, etc. (WWF, 2009), gérées par l Etat, les agences de conservation, les safaris et les exploitants forestiers. Dès lors, on assiste à des chevauchements entre les activités des populations locales et les aires de conservation qui n ont pas tenu compte des aires de parcours et des droits d usage des communautés Baka et Bantou. Ces derniers sont en effet victimes au quotidien de violentes répressions de la part des organismes et services de conservation, du fait de l exercice de leurs droits coutumiers dans les espaces déclarés unilatéralement parcs nationaux. Les populations locales et autochtones vivent l érection de leur milieu naturel en aires protégées comme une catastrophe (Bahuchet, 1993). En effet, jusque là libres sur un territoire qu ils ont parcouru des générations durant et qui fournissait leurs moyens d existence, ils se trouvent privés de ceux-ci, dépouillés de leur terre, voire déplacés sur des terres inconnues. Les passages précédents, tout en présentant les transformations qu ont subi les régimes de propriété anciens au Cameroun et les conflits fonciers que ces dynamiques engendrent, laissent entrevoir un paysage institutionnel de gestion foncière baroque. Les relations sociales et foncières ne sont donc plus telles que J. Gallais (1995) les décrivait dans le cadre du Delta du Niger : «Le sentiment géographique de l homme du Delta qui lie une ethnie à un milieu et permet aux hommes de divers groupes de coexister sur une même aire sans forcement être réunis par un commun intérêt ou par une commune organisation». Cela voudrait concrètement dire que le problème du foncier, en l occurrence celui du rapport de l homme à la terre en milieu rural est éminemment culturel. L Etat, les agences de conservation ou les exploitants forestiers qui interviennent dans les campagnes, se doivent d intégrer les normes traditionnelles d organisations et de gestion de l espace dans l élaboration des politiques d intervention en zones rurales afin de dispenser les populations locales et autochtones de ce que Akwa Neba et al. (2007), appellent le stress foncier. Indications bibliographiques Bahuchet, S., 1993, Dans la Forêt d Afrique Centrale, les Pygmées Alun et Baka (Histoire d une civilisation forestière 1). Société d Études Linguistiques et Anthropologiques de France (SELAF), Paris. Bigombe Logo, P., 2007, Les Régimes des forêts et la lutte contre la pauvreté au Cameroun, Document de travail, FAO Cameroun, Yaoundé, Février 2007, 28p. Dkamela, G. P., 2007, le Complexe Pauvreté Ressources Naturelles dans l U70 Campo Ma an, Document de travail, WWF. Cameroun, décembre 2007, 54p. Gallois, J., 1967, Le Delta intérieur du Niger, étude de géographie régionale, Vol. 1, p 141. Lavigne Delville, ph (dir. ), 1998, Quelles politiques foncières pour l Afrique rurale? Réconcilier pratiques, légitimité et légalité, Paris, Karthala, 744p Le Roy, E. et al., 1996, La Sécurisation foncière en Afrique : Pour une gestion des ressources renouvelables, Paris, Karthala, 376p MINEF, 1995, Analyse des conflits et du cadre juridique et institutionnel de l environnement au Cameroun, Document de travail, octobre 1995, 277p. MINFOF, 2008, Statut foncier des plantations forestières privées et communautaires, Document de travail, MINFOF, février 2008, 66 p. Socpa, A, 2006, Bailleurs Autochtones et locataires Allogènes : Enjeu Foncier et Participation Politique au Cameroun, Afrilan Studies Reviro, volume 49, Number 2, september, 2006, pp Teyssier, A., 2003, La Régulation foncière au Cameroun, entre régimes communautaires et aspirations citoyennes, in Dugué, P., Jouve, Ph. (eds.), Organisation spatiale et gestion des ressources et des territoires ruraux, Actes du colloque international, février 2003, Montpellier, Prasle, Umr sagert, Marc, 98. WWF, 2009, Gestion des aires protégées, in Bulletin WWF Jengui, n 14, mai Zongo, M., 1997, Développement rural et dynamique villageoise au Burkina Faso. L exemple de Daboura, Province de la Kossi, Université de Nice Sophia Antipolio, Thèse de doctorat Notes 1 C est un bail à long terme, différent du bail ordinaire en ce qu il confère un droit d hypothèque cessible et saisissable. 2 Oronnance n 74-3 du 6 juillet 1974 relative à la procédure d expropriation pour cause d utilité publique. Ce décret entraîne immédiatement transfert de propriété et permet de muter les titres existants. ENJEUX N 39 Avril - Juin

62 Les incohérences de l agriculture gabonaise : sous-peuplement rural, politique inadaptée et dynamisme limité Par Yawo Ganyo GALLEY, géographe, Université Omar Bongo, Libreville (Gabon) Le Gabon est sans doute un des rares pays de l Afrique au Sud du Sahara où l agriculture, l élevage et la pêche réunis représentent moins de 6% du P.I.B. La prépondérance des activités pétrolières (pendant longtemps plus de 45% du produit intérieur brut) et minières crée un profond déséquilibre entre les diverses branches de l économie. Plusieurs tentatives ont été menées en vue de corriger cette disparité, avec peu de réussite. Les causes profondes de cette situation ont été essentiellement recherchées dans le déséquilibre structurel du tissu économique national, sans jamais accorder une attention particulière aux principaux facteurs de production de ce secteur en grande difficulté. Et pourtant, les faits sont là, tenaces. Cet article vise particulièrement à jeter un regard attentif à la dimension humaine de l activité économique du secteur agricole, et mesurer au mieux le tout premier rôle que joue ce facteur dans la constitution des équilibres régionaux, sociaux, mais aussi dans la formation du P.I.B. du pays. Tout en reconnaissant l existence d autres facteurs déstabilisants tels que la politique agricole ellemême, ce travail cherche avant tout à placer l homme au cœur de l activité économique, d autant plus qu ici, il s accorde mal avec l ensemble du mécanisme mis en jeu en vue de la production. En fait, il existe une distorsion notoire entre la politique agricole du Gabon et les moyens humains au service de ce choix. Le rapport de sympathie entre ces deux données essentielles de la production économique traduit bien l incohérence de la politique mise en œuvre par les pouvoirs publics, en même temps qu il explique mieux le caractère récurrent des échecs enregistrés le long de ces dernières décennies. La chronique d un sous-peuplement rural Hormis les résultats du recensement de 1960, toutes les autres estimations prêtent à beaucoup de confusions ; aussi, faire une analyse cohérente et fiable de la population gabonaise comporte-t-il d énormes difficultés, à cause d une part de la rareté des données et d autre part du peu de fiabilité des statistiques, lorsqu elles existent. Un recensement a été effectué dans le pays en 1969/70 et a révélé une nette progression de la population nationale ; et à partir de cette base, les services des statistiques du ministère du plan entretiennent une base de données sur la population. Ainsi, en 1978 la population du pays fut officiellement évaluée à habitants. Entre temps, en 1975, une enquête agricole fut réalisée par le service des statistiques agricoles dans le cadre d un projet FAO. Les résultats de cette enquête furent censurés par les autorités et interdits de publication, bien que plus proches des prévisions faites en 1960 par l INSEE (Ministère de la coopération de la république française ; en tenant compte du rythme d accroissement de la population, à l époque), mais également bien plus réalistes que ceux publiés officiellement en Les prémices du dépeuplement des campagnes Depuis des temps immémoriaux, la production agricole est avant tout destinée à la consommation des populations, et à ce titre, elle constitue pour la paysannerie une activité sacro-sainte. Il faut reconnaitre que si jadis cet axiome se vérifiait également dans les campagnes gabonaises, depuis bientôt un siècle, de profondes mutations sont intervenues et sont toujours en cours. Il n est pas tout à fait exact de voir dans le boum pétrolier des années 1970 le premier facteur de la désarticulation du secteur agricole. L effet paralysant de l exode rural déclenché par l économie nouvelle sur les campagnes, s est sans doute traduit par la désorganisation du terroir jadis structuré par un ensemble de stratégies : celle de l occupation des sols ; celle, sociale, de la division par sexe du travail ; celle, économique, de l accumulation des richesses et de la consommation, sans souci particulier de l épargne et du réinvestissement en vue du développement des campagnes. Il faut remonter à la période de la création au Gabon des premiers chantiers forestiers, vers la fin du 19ème siècle, et déjà noter l engouement des Gabonais pour le salariat. Comme le signalait Gilles Sautter, hormis la 1ère guerre mondiale, la non participation des hommes à la production agricole sera, par ailleurs, une conséquence aggravante dans la famine des années Mais depuis la grande famine des années les autorités administratives du pays ont tout mis en œuvre pour amener l homme à participer plus activement à la production agricole, afin de prévenir définitivement les risques de pénuries alimentaires catastrophiques. Si l administration coloniale y visait par-dessus tout un meilleur contrôle des indigènes, le regroupement forcé des populations opéré dès le début des années 1930 avait aussi pour but de rassembler les forces humaines pour plus d efficacité en termes de maîtrise de l espace et d activité économique. L exode rural L extraordinaire croissance urbaine enregistrée au cours du 20ème siècle partout dans le monde, et plus particulièrement dans les pays en développement, ainsi que 62 ENJEUX N 39 Avril - Juin 2009

63 l explosion démographique qui s est ensuivie, ont fini par vider les campagnes de leurs habitants. L opposition ville-campagne s est accentuée non seulement au plan démographique (les villes gabonaises regroupent actuellement près de 85% de la population du pays, avec plus de 50% pour la capitale seule!), mais aussi et surtout du point de vue économique où les campagnes n arrivent plus à jouer le rôle traditionnel qui leur est assigné. Il est même de notoriété publique que, rester aujourd hui dans la campagne, c est s exclure volontairement du progrès en cours dans le pays. Par ailleurs, dans plusieurs régions du pays, les 2/3 des chefs d exploitation sont des femmes dont 35% vivent seules. Les trois tranches d âge des ans, ans et plus de 55 ans comptent respectivement 2,2 %, 19,3 % et 78,5 % des actifs agricoles. On note donc que les campagnes traditionnelles ne sont plus porteuses d espoir, sont de plus en plus dépeuplées, parfois au profit d autres campagnes à activités agricoles nouvelles et plus valorisantes. Par conséquent, même le renouvellement des populations, par la procréation, ne peut être assuré par les vieillards restés sur place. Et pourtant, les choix agricoles opérés depuis l époque coloniale jusqu à ce jour sont orientés vers des activités exigeantes en main d œuvre. Une politique agricole jusqu alors inadaptée C est bien pour maintenir les hommes dans les campagnes et accroître leur participation à la production agricole que l administration coloniale a introduit, dès les années 1920, les plantes industrielles (cacao et café) et a encouragé leur développement à la fin de la grande famine, au cours des années 30. Plus tard, début les années 1980, l hévéa fit son apparition dans les campagnes gabonaises. Une agriculture extravertie et incohérente dans ses choix Il est incontestable que pendant plusieurs décennies, les cultures spéculatives ont permis le maintien dans les campagnes des hommes jadis enclins à migrer vers les zones à forte croissance économique. Cependant, les us et coutumes des populations n ont pas permis aux hommes de contribuer plus qu avant à la culture vivrière, tandis que l introduction des plantes nouvelles ont abouti à un surcroît de travail pour les femmes obligées d intervenir dans les nouvelles plantations. Il faut reconnaître aussi que les tâches culturales inhérentes à la culture de ces plantes (nettoyage des parcelles, entretiens phytosanitaires, cueillettes, diverses phases de la préparation des produits à la vente) requièrent une main d œuvre assez nombreuse dont ne disposent pas toujours les campagnes gabonaises. Si la population autochtone, au moment de l introduction de ces cultures, peut être estimée à un niveau raisonnable, les données ont radica- ENJEUX N 39 Avril - Juin

64 lement changé depuis les saignées opérées sur les campagnes aussi bien par les unités agro-industrielles utilisatrices de main d œuvre salariée que par les effets de l attrait qu exerce la capitale du pays sur les ruraux. L introduction de l hévéa, avec des conditions encore plus contraignantes est de nature à mettre plus en relief encore les insuffisances chroniques de la main d œuvre agricole. En fait, les exigences agronomiques et techniques des plantations, à savoir les travaux d entretien divers (sarclage et désherbage chimique, apport éventuel d engrais, ébourgeonnage, la lutte phytosanitaire, les campagnes indispensables contre les maladies des racines dues aux champignons, (Fomès : Rigidoporus lignosus et l armillaire) ainsi que les maladies des feuilles telles que colletotrichum gloeosporioides et oïdium responsables de la chute des jeunes feuilles) sont largement au dessus des compétences des planteurs pour la plupart analphabètes, et affaiblis par le poids de l âge. Pour garantir un certain succès à l entreprise, assurer aux paysans un niveau de vie convenable et les maintenir dans les campagnes, les pouvoirs publics sont contraints à des subventions multiformes au point que le planteur, loin de devenir un entrepreneur, reste un éternel assisté ; et la moindre défaillance de l Etat se traduit par la faillite du projet. C est naturellement ce qui finit par arriver à l hévéaculture au début de ce siècle avec la privatisation de la société HEVEGAB rachetée par SIAT GABON, un opérateur belge. Il faut reconnaître qu au cours de ces dernières décennies, l Etat gabonais a fortement misé sur le développement agro-industriel du pays, avec au total très peu de réussite, au regard de tous les efforts d investissement déployés. L option agro-industrielle a jusqu alors laissé dans l oubli et la déconfiture presque totale le monde rural traditionnel, pourvoyeur de denrées alimentaires indispensables à la survie des populations gabonaises. Au moment où une crise alimentaire de grande ampleur frappe le monde entier et particulièrement les pays en développement, c est naturellement vers le secteur de la production vivrière que tous les regards se tournent. Les tendances au développement des cultures nourricières au Gabon Si la production vivrière a été depuis toujours à la base des activités de la paysannerie dans la majorité des pays d Afrique au sud du Sahara, il n en est pas ainsi au Gabon où la culture des produits vivriers est confiée exclusivement aux bons soins des femmes et où l essentiel des activités du secteur agricole, depuis les années 1930, est consacré aux plantes industrielles. Cette situation conduit le Gabon à importer de l extérieur (et particulièrement du Cameroun voisin) les denrées alimentaires, à hauteur de 200 milliards de francs cfa l an. Aujourd hui cependant, un intérêt particulier est porté par les paysans à la culture de la banane plantain et à l aménagement de ceintures maraîchères autour des principaux centres urbains du pays. Est-ce là un début de réponse au grave problème de la sécurité alimentaire actuel? La banane plantain, un produit de rapport La transformation est née de l intérêt monétaire que suscite aujourd hui la culture de la banane plantain, grâce au passage de l agriculture d autoconsommation à l économie marchande. Ce phénomène est lui-même consécutif à la forte concentration des populations dans les centres urbains du pays (cf. exode rural) ; ce qui en outre va décider de la mise en œuvre de la force d appoint que représentait la population agricole masculine. L Opération Zonale Intégrée (OZI) du Fernan-Vaz a constitué le premier véritable champ d application de la culture bananière au Gabon, hormis la plantation expérimentale de Ntoum organisée par le CIAM et les essais de Boumango, dans le Haut Ogooué. Là aussi, le rassemblement d une main d œuvre agricole dynamique s est avéré indispensable, en appui à la logistique apportée par l Etat. Sans donner des résultats spectaculaires, cette action a montré qu avec des moyens financiers relativement modestes, on peut créer des pôles de développement viables pour peu que la spéculation adoptée s avère lucrative. L expérience de Ndougou (GALLEY, 1986) démontre clairement que l activité agricole vivrière peut se révéler plus rentable que les emplois subalternes que les villes n arrivent même plus à procurer aux immigrés. A l heure actuelle, on note deux grandes filières de la banane en direction de Libreville, la capitale gabonaise: - celle du sud Gabon s organise autour des zones de production de Mouila et Tchibanga. Ici, l insuffisance de la main d œuvre agricole est quelque peu compensée par des refugiés congolais présents dans la région depuis plusieurs années. Comme le dit Chaléard à propos de l Afrique tropicale, «l agriculture en économie de plantation est essentiellement manuelle. L élément du travail réside dans la mobilisation de la main d œuvre «; et Raemaekers de renchérir «le bananier plantain est considéré comme la ressource vivrière la moins chère que l on puisse produire». Les îlots de cultures vivrières et marchandes de la Douya Onoye (Ngounié) constituent les meilleures preuves des mutations en cours ; - celle du nord Gabon approvisionne également Libre- 64 ENJEUX N 39 Avril - Juin 2009

65 ville. Mais il s agit en réalité d un flux commercial de denrées alimentaires produites au Sud Cameroun et essentiellement écoulées vers Libreville à partir des marchés frontaliers de Kyè Ossi et d Abang Minko o. Ce dernier dont le rayonnement est régional, fut dénommé Marché Mondial. C est bien la production bananière camerounaise (plus de 80 % de la filière nord des bananes) qui transite par le Woleu Ntem, à destination de la capitale gabonaise. Tout compte fait, il est aujourd hui plus rentable pour les habitants du nord Gabon d acheter la banane de l autre côté de la frontière que d en produire ; c est d ailleurs pourquoi la superficie moyenne cultivée par planteur (1,70 ha) est moins élevée par rapport à la moyenne nationale (1,90 ha), contre une moyenne globale de 0,32 ha pour le manioc, la principale denrée alimentaire des populations autochtones. On constate en outre que les zones n ayant pas développé les plantes industrielles (Ngounié, Nyanga, Ogooué-Lolo) sont aujourd hui très actives dans la production des denrées nourricières, avec une moyenne par exploitant supérieure à 2 hectares pour la Ngounié et l Ogooué-Lolo. Les ceintures maraîchères périurbaines Contrairement aux cas dans certaines villes de l Afrique de l Ouest comme Cotonou au Bénin ou Lomé au Togo où les cultures périurbaines sont celles largement cultivées par les paysans autochtones, au Gabon, on note le développement des cultures d introduction relativement récente et particulièrement celui des légumes: aubergine, carotte, céleri, chou, persil, poireau, salade, auxquels il faut ajouter une liste de produits locaux : amarante, ciboule, courge, gombo, oseille de guinée, piments, etc. Si des autochtones de la région de Libreville (Sékiani, Benga et Fangs) s adonnent à des cultures de base telles que le manioc et la banane, cette production est fort secondaire. La concentration de la population gabonaise à Libreville (+ de hts dont 25 % d étrangers) fait de la capitale un marché à la fois important et varié. Le brassage des peuples s est également accompagné d une modification des habitudes alimentaires qui ne se fait pas toujours en faveur des produits locaux, au demeurant peu consommés. Par ailleurs cette agriculture périurbaine, qui échappe pour une grande part aux acteurs autochtones (- de 10%), est tenue par des Burkinabè, Ghanéens, Sao-Toméens, Maliens, Camerounais, pour l essentiel. L agriculture gabonaise souffre d un manque chronique de bras valides. Cette situation est due à la fois au sous peuplement et à l exode rural consécutif au boum pétrolier. Par ailleurs les choix agricoles n ont pas toujours été en rapport cohérent avec les moyens humains dont dispose le pays. Il s est ensuivi la déconfiture du secteur agricole, malgré tous les efforts des pouvoirs publics. Tout compte fait, le manque de dynamisme et de compétitivité du paysan gabonais, son incapacité à former de l épargne, à tirer des revenus de ses activités et à contribuer réellement au développement économique du pays font que, pour ses besoins alimentaires, et pour longtemps encore, le Gabon restera dépendant de l étranger et dans une large mesure, de ses voisins de la CEMAC. Indications bibliographiques - CHALEARD J-L., 1996, Temps des villes temps des vivres : l essor du vivrier marchand en Côte d Ivoire, Karthala, 661 p. - GALLEY (Y.G), 2006, Géographie de la politique alimentaire urbaine, in Villes du Nord Villes du Sud, Géopolitique urbaine, acteurs et enjeux, sous la direction de François Hulbert, Paris, L HARMATTAN, pp GALLEY (Y.G), 1980, Une agriculture forestière de subsistance face aux cultures commerciales : cas du Woleu-Ntem, Université de Bordeaux III, CEGET, Tomes 1 et 2, 448 pages. - MIANZENZA A.D Gabon : l agriculture dans une économie de rente, Paris, L Harmattan, 199 p. - MAGNAGNA NGUEMA (V.), 2005, L agriculture du Gabon entre décolonisation et ajustements structurels ( ), Paris, Karthala, 304 pages. Notes 1 Roland POURTIER, 1979, in Espace Géographique, n 2, pp , estimait la population gabonaise à plus de habitants. 2 Organisation des Nations Unies pour l Alimentation ; projet élaboré sous la référence INSEE, 1963, Economie et nutrition, essai à partir d une enquête alimentaire sur deux régions du Gabon, Paris. 4 Des enquêtes menées en mai 2008 auprès d une centaine de paysans de la Nyanga révèlent que sur l ensemble des enfants nés dans sept localités de la région, plus de 70%, en moyenne, ont émigré. Cette proportion atteint parfois 96%. 5 Recensement du verger gabonais, caisse de péréquation et de stabilisation, direction générale de la statistique et des études économiques (mars 2001) 6 Afin de relancer la culture du cacao au Gabon, les responsables de l agriculture ont récemment proposé aux planteurs la prise en charge, par l Etat, du nettoyage de l ensemble des cacaoyères du pays. 7 Chaléard J-L., 1996, Temps des villes temps des vivres : l essor du vivrier marchand en Côte d Ivoire, p Raemaekers R.H., 2001, Agriculture en Afrique tropicale, p Les enquêtes que nous avons menées en juin 2008 auprès de 35 commerçants montrent que 86,66 % du flux de banane plantain venue du nord est d origine camerounaise. ENJEUX N 39 Avril - Juin

66 TENDANCES Transition politique au Gabon : Vers un nouveau paradoxe gabonais? Par Rose NDO O, historienne, FPAE (Cameroun) Le 30 août dernier s est tenu au Gabon la première élection présidentielle post Omar Bongo Ondimba. Celle-ci s est soldée par la victoire du candidat du parti démocratique gabonais (PDG) Ali Bongo qui n est autre que le fils de l illustre disparu. Depuis lors, on est passé de supputations en interrogations, de l expectative à la crainte du futur! Toutefois persiste une certitude: le Gabon est entrain de naviguer vers une transition politique à l issue complexe et peut être pleine de surprises. Comment en est on arrivé là? De quelle manière peut on comprendre le processus d évolution de cette transition politique dans un climat de mélange d émotions contradictoires? Voilà autant de questions qui vont constituer la toile de fond de notre analyse. L historique d une transition d émancipation à une transition de succession Découvert par les portugais en 1472, l embouchure du Komo surnommée Gabao et qui plus tard a donné le nom au Gabon moderne est situé en Afrique centrale et notamment dans la région du golfe de Guinée. Avec une population évaluée à environ 2millions d habitants, le Gabon est le pays le moins peuplé de l Afrique centrale. Il partage ses frontières avec le Cameroun, la Guinée équatoriale, et la République du Congo. De l installation des français à la suite du traité du 9 février 1837 entre le roi Rapontchombo encore appelé le roi Denis et le lieutenant de vaisseau Bouët-Willaumez, au référendum constitutionnel de septembre 1958, le Gabon a paisiblement évolué vers son indépendance le 17 août C est ainsi que va s opérer dans un climat de continuité, la première transition qui est juste une transmission de pouvoir entre le pouvoir colonial français et Léon Mba qu on surnomme affectueusement le père de l indépendance. La seconde transition politique se passe aussi sans heurts à la suite de la mort du président Léon Mba le 28 novembre 1967 à Paris de suite d un cancer. Conformément à la constitution, cette transition voit tout naturellement arriver au pouvoir le vice président de la République, le jeune Albert Bernard Bongo dont l ascension au gouvernement a été sans obstacle depuis son entrée aux Affaires étrangères le 27 octobre Quarante ans d une relative stabilité sur fond de pétrodollars Longtemps considéré comme «la cendrillon» de l Afrique centrale du fait d être resté longtemps la possession française la plus défavorisée de l AEF, et aussi de son sous peuplement structurel, le Gabon connaît une montée en puissance pendant le long règne du président Bongo. Cette montée en puissance en Afrique centrale repose sur d énormes ressources économiques naturelles; et aussi sur des méthodes de gestion politique reposant sur de subtils dosages ethniques, à quoi il faut ajouter la personnalité complexe du président Bongo. Autant d éléments qui ont propulsé le Gabon sur une scène internationale africaine dont il était devenu incontournable compte tenu de ses nombreuses interventions et médiations dans les conflits. Un véritable paradoxe pour un pays qui avait risqué disparaître pendant la période coloniale au profit de l actuelle République du Congo; et donc la peur de disparaître était devenue depuis des décennies, l expression d une vive sensibilité «aux leçons de l histoire» aussi bien des acteurs de la société civile que des responsables politiques. S appuyant certainement sur les leçons de l histoire, le Gabon est resté l un des pays de la sous région dont la stabilité politique n a pas été ébranlé même si l on note quelques incidents de parcours comme l arrestation pour haute trahison et l inculpation suivi de la mise à mort du capitaine Mandja en mai Même l instauration du multipartisme en 1991 n a pas apporté de bouleversement majeur. Bien plus, au niveau de la sous- région, les relations entre le Gabon et ses voisins sont restées empreintes d une relative stabilité si l on met de côté l épineuse question de l île de Mbanié qui empoisonne ses relations avec la Guinée Equatoriale depuis Pendant 40 ans, le Gabon est donc resté un havre de paix dont le mérite revenait à un homme, Omar Bongo Ondimba qui a mis sur pied d après Elikia M bokolo «un style de gouvernement à même de répondre aux demandes sociales multiples et passablement confuses qui ont trouvé leur place dans le système du parti unique des années 1960 aux années 1980 et qui se sont rabattues, depuis les années 90 sur la problématique générale de la démocratisation». Aussi lorsque la nouvelle de sa mort se répand le 06 juin 09, comme en 1967, les institutions se mettent en marche pour une nouvelle transition, la troisième dans l histoire de ce pays. La mort d Omar Bongo Ondimba et l expérience d une nouvelle transition La mort du président Bongo a propulsé le Gabon sur les feux de l actualité non plus comme l incontournable médiateur des conflits qu il était devenu depuis plusieurs années, mais comme un pays en péril ; le danger venant des appétits que cette disparition allait suscités, ce d autant plus qu il existe depuis un certain temps de nombreux clivages sociaux et politiques au sein de la société gabonaise. Ces clivages sont causés dans une certaine mesure, par la mauvaise répartition des richesses du pays et une longue gestion focalisé vers l exploitation des matières premières sans diversification de l économie ; De plus le pays n a pas été épargné par la crise qui frappe de plein fouet l économie mondiale ; A cela il faut ajouter la multiplication des mouvements de grève dans la fonction publique ces dernières années qui ont fait croire à un risque d implosion sociale. Mais, contre toute attente, le Gabon a montré qu il était un pays de paradoxe en respectant comme en 1967 la 66 ENJEUX N 39 Avril - Juin 2009

67 TENDANCES constitution dans son article 13 relative à la vacance du pouvoir. Le processus de mise en place d une nouvelle transition politique a été ainsi enclenché avec la présidente du Sénat Rose Françine Rogombé comme chef d Etat intérimaire, suivi de l organisation et de la tenue des élections présidentielles le 30 août dernier. Un véritable exploit pour un pays situé dans un environnement africain habitué aux coups de force de l armée comme mode d accession au pouvoir. Cependant, si la réussite de cette marche vers la transition politique au Gabon est à mettre à l actif de la maturité de la classe politique gabonaise toute obédience confondue, il n en demeure pas moins vrai que des enjeux de nature diverses et diversifiés aussi bien à l intérieur qu à l extérieur ont joué un rôle important. De plus, le consensus général adopté autour de la réussite de la marche vers la transition, amène à penser que le Gabon a voulu maintenir une visibilité internationale acquise au prix des médiations internationales et de la stabilité politique intérieure qui était devenue le slogan du pouvoir de Libreville. Toutefois, l avalanche des candidats à la succession d Omar Bongo Ondimba, l éclatement de la majorité présidentielle et les défections au sein même du parti démocratique gabonais au pouvoir depuis sa création en 1968 montrent que sous la relative stabilité du Gabon couvait depuis des décennies un îlot de frustrations et de mécontentements. Les événements survenus à Libreville et à Port-Gentil à la suite de la proclamation des résultats du scrutin du 30 août, le recours en annulation déposé par l opposition, constituent un appoint assez considérable pour soutenir cette thèse. Du coup, planent inquiétudes et incertitudes! La succession d Omar Bongo s achemine t-elle vers un nouveau paradoxe? Notes Mylène Rémy, Le Gabon aujourd hui, les éditions Jaguar, Paris, 2008, p73. Philippi Decraene, L Afrique centrale, centre des Hautes Etudes sur l Afrique et l Asie Modernes, Paris, 1989, p84. Mylène Rémy, Le Gabon aujourd hui, p84. Le Gabon est considéré comme un eldorado minier: il est le quatrième producteur africain de pétrole, premier exportateur mondial de manganèse, quatrième producteur africain d uranium etc Philippe Decreane, l Afrique centrale, centre des hautes études sur l Afrique et l Asie moderne, Paris, 1989, p89. Le Gabon a participé activement dans la médiation de plusieurs conflit: au Congo Brazzaville en 1993, 1997 et 1999 ; au Congo Zaïre, en Centrafrique et autres en Côte d Ivoire. Elikia M bokolo, Médiations africaines, Omar Bongo et les défis diplomatiques d un continent, L Archipel, Paris, 2009, p21. En février 1964 le Gabon a connu une tentative de coup d Etat visant à renverser le président Léon Mba. L intervention militaire de la France a mis fin aux prétentions des putschistes. Elikia M bokolo, Médiations africaines, p349. Ibid, p368. On a dénombré près d une vingtaine de candidats environ, des candidats indépendants à l instar de André Mba Obame, Jean Eyeghe Ndong, etc ; le candidat du PDG, Ali Ben Bongo ; des candidats de l opposition : Zacharie Myboto ( président de l union gabonaise pour la démocratie et le développement), Pierre Mamboudou ( président de l union du peuple gabonais), Paul Mba Abessole (président du rassemblement national des bucherons) etc. ENJEUX N 39 Avril - Juin

68 BIBLIOGRAPHIE Comprendre les dysfonctionnements sanitaires au Cameroun Par Joseph OWONA NTSAMA, Historien, FPAE (Cameroun) Eclairages anthropologiques Le texte de l anthropologue Bernard Hours qui s intitule L Etat sorcier. Santé publique et société au Cameroun paru en 1985 dans la collection «Connaissance des hommes» chez L Harmattan, (165 p), se veut comme un regard critique sur le corps social médical au Cameroun [«corps des malades» et «société» dans laquelle ceux-ci s objectivent]. L hypothèse de ce travail qui se présente comme un carnet de terrain est construite sur la valeur et la perception que les différents protagonistes, en l occurrence les soignés, les soignants et l Etat, ont des paradigmes de «la maladie» et de «la santé». Les paramètres de cette hypothèse sont les éléments observés en action entre 1981 et 1983, notamment le personnel soignant, les patients et les structures sanitaires à Douala, Tiko et Buéa. L entrelacs complexe des différents types de rapports qui les lient et qui permettent de s interroger sur la posture de l Etat constitue le fil d Ariane de ce texte. Carnet de route La première étape effectuée sur une période de six mois instruit le lecteur sur le circuit du parcours du combattant du patient et lieu de «honte» et de «brimade» (p.60) pour les infirmiers dans une structure sanitaire publique de moindre importance -un dispensaire- dans la ville de Douala (pp.19-60). L auteur nous fera observer que le vécu du patient qui consulte est mieux perçu par celui ou celle qui le traite quand le dialogue s effectue dans le parler du patient. La conclusion ici que le dispensaire n est rien autre que le lieu par excellence de la cristallisation des frustrations de l infirmier et du patient. La seconde partie (pp.63-89) concerne les sentiments de fatalisme et l amertume qui habitent désormais les médecins de l Hôpital Laquintinie de Douala, la situation d inconfort des paramédicaux et les «vendeurs d élixirs de jouvence» (p.75), authentiques charlatans des temps modernes que sont les visiteurs médicaux dont le discours flattent pourtant l ego des infirmiers... Cet état de choses est fortement favorisé par le milieu sanitaire essentiellement précaire qui induit un réajustement stratégique des pratiques apprises durant de longues années en faculté de médecine. Ce qui fait de l hôpital davantage une mystification fantasmatique qu un lieu d épanouissement où un «bon ordre des choses» (p.67) permettrait une pratique efficiente de la médecine. La troisième partie montre globalement la posture stoïque et épicurienne du personnel paramédical anglo-saxon vis-à-vis des conditions de travail pourtant extrêmement difficiles, autant qu elle met l accent sur cette figure symbolique de l Etat qui influence très peu l attitude des individus (pp ). La quatrième partie (pp ) -qui précède la cinquième et justifie le titre de l ouvrage -(le procès de l Etat sur ses incapacités systémiques)- étudie les mêmes rapports dans un centre de santé à côté de Buéa. L Etat peut-il y remédier? L actualité de la gestion des structures sanitaires et des personnels médico-sanitaires est confirmée par ce petit texte, malheureusement plusieurs années après sa parution : on en veut pour preuve la vague des interpellations et des incarcérations des responsables en charge des questions de santé notamment en Certains hauts responsables seront même sommés par l Etat de rembourser des fortes sommes d argent dilapidées dans une gestion à la traçabilité plus que soupçonneuse Ce qui rend encore plus que poignant l urgence à trouver au plus vite des réponses stratégiques, pérennes, pragmatiques et surtout immédiates pour sauver le patient (comme en France), et réarmer éthiquement et moralement un corps de métier qui, au fil des temps, a perdu son prestige social (toujours comme en France). 68 ENJEUX N 39 Avril - Juin 2009

69 BIBLIOGRAPHIE Crise et réajustement du champ social rural au Cameroun Par Joseph OWONA NTSAMA, Historien, FPAE (Cameroun) Prétexte Le village camerounais à l heure de l ajustement (Karthala, 1994) met en équation les conséquences des stratégies d ajustement du monde rural camerounais confronté frontalement aux effets démultiplicateurs négatifs de la crise économique de la deuxième moitié de la décennie 80, et leurs actions sectorielles définitivement plombées par la dévaluation du franc CFA de janvier Si le contexte agroéconomique qui légitima l avènement de ce livre date déjà, il n en demeure pas moins que le récent prêt, en juillet dernier, du Fmi (Fonds Monétaire International) pour le Cameroun, réactualise informellement les fameux ajustements structurels qui auront causé tant de tort aux Camerounais. Ce qui explique donc aujourd hui toute l importance de ce travail collectif de l ancien projet en partenariat OCISCA (Observatoire du Changement et de l Innovation Sociale au Cameroun) créé en 1990 par le géographe Georges Courade aujourd hui à la retraite. Au demeurant, le collectif dirigé par G. Courade repense toute la problématique du développement rural à la lumière d une conjoncture internationale qui aura eu une forte prégnance sur l évolution du Cameroun. Une prégnance qui s est malheureusement accrue lorsqu on analyse les rapports notamment des pays ACP (Afrique-Caraïbe-Pacifique) et le reste de la communauté internationale, en l occurrence les pays à fort pouvoir d achat, ou tout simplement leurs rapports avec l OMC (Organisation Mondiale du Commerce) lors de ces dernières années. Argumentaire Trois parties classiques permettent de suivre le fil conducteur de la réflexion d ensemble de l ouvrage. La première (Crise et ajustement au Cameroun : diagnostics et analyses) (pp ), ellemême subdivisée en 3 sous-parties, porte un regard critique sur la nature et les spécificités de la crise camerounaise par rapport à son modèle de développement, le tout sous le prisme des activités agricoles (café, cacao, mais aussi polyculture) soumises aux caprices des saisons, mais surtout en proie à des difficultés conjoncturelles et structurelles que l Etat peine à résoudre à cause d un ajustement structurel particulièrement déstructurant. La seconde (Effets de la crise et de l ajustement sur le milieu rural) (pp ) qui est subdivisée en 2 sous-parties porte sur le milieu rural en tant qu espace d objectivation par excellence de la crise économique et de l ajustement structurel. Ici, l accent est mis respectivement sur ce qui fait la spécificité socioanthropologique de ses réactions face à la crise, et la pertinence structurelle des initiatives locales dans l ancienne province de l Extrême-Nord, depuis le désengagement de l Etat en l occurrence avec la disparition de la SEMRY (Société d Expansion et de Modernisation de la Riziculture de Yagoua) créée en La dernière partie (Perspectives de sortie de crise) (pp ) pose, elle, et en 3 sous-parties également, la problématique au demeurant fort intéressante, des stratégies de substitution (pêche, culture du raphia et vannerie ; pisciculture, cultures maraîchères, petit élevage, etc.) couplée à celles de l accès au microcrédit et de la croissance démographique en milieu rural. Leçons La conclusion de ce travail est que le monde rural a très vite su s adapter à la nouvelle donne agroéconomique imposée par la réalité de la crise économique et de l ajustement, faisant ainsi preuve ingénieusement d une capacité de renouvellement hors du commun. Ce qui lui aura permis de demeurer autosuffisant, mais aussi de préserver les équilibres nécessaires au maintien des familles et des ménages : les femmes sont devenues les pilliers de leurs familles grâce à la vente des cultures vivrières, les cultures de rente, celles des hommes, n ayant plus de réelle valeur ajoutée. Si on observe une timide revalorisation des produits de rente sur le plan international, force est de constater que la réalité décrite dans ce texte est restée identique en plusieurs points : le délabrement progressif du tissu social avec son pendant, la vie chère, en est la conséquence directe. Les émeutes de février 2008 qualifiées fort opportunément d émeutes de la faim en seront malheureusement l expression directe. D où l importance à revisiter ce texte afin d en tirer toutes les leçons du passé pour mieux s engager dans l avenir. Les décideurs politiques, les experts en développement rural et les économistes de développement trouveront, à n en point douter, à la relecture minutieuse de ce livre, des arguments utiles à un débat qui est encore loin d être clos. 1 Sous la dir. de Georges Courade. Le village camerounais à l heure de l ajustement, 1994, Paris, Karthala, 410 p. 2 En effet, le 2 juillet 2009 le Fmi a effectivement approuvé le décaissement de près de 67 milliards de Fcfa suite à la demande de l ancien premier ministre Inoni Ephraïm sollicitant pour la compte du Cameroun un emprunt de près de 72 milliards de Fcfa. Ce qui a suscité de vifs échanges entre des spécialistes des questions économiques et financières à travers la presse camerounaise privée. ENJEUX N 39 Avril - Juin

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