Tahar Djaout

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Tahar Djaout
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Tahar Djaout en 1980.
Nom de naissance Tahar Djaout
Naissance
Oulkhou
Décès (à 40 ans)
Alger
Nationalité Modèle:Kb kabylie
Activité principale
Distinctions
Auteur
Langue d’écriture Français

Œuvres principales

Signature de Tahar Djaout

Tahar Djaout (arabe : طاهر جاوت, en kabyle: Ṭaher Ǧaɛut, en tifinagh: ⵟⴰⵀⴻⵔ ⴵⴰⵄⵓⵜ), né le à Oulkhou daïra d'Azeffoun, wilaya de Tizi Ouzou, en kabylie, est un écrivain, poète, romancier et journaliste kabyle d'expression française. Grièvement blessé dans un attentat le , il meurt le à Alger. Il est l'un des premiers intellectuels victime de la « décennie du terrorisme » en Algérie.

Biographie[modifier | modifier le code]

Tahar Djaout, Messaour Boulanouar et M'hamed Aoune dans une exposition de littérature, 1980

Tahar Djaout naît à Oulkhou près d'Azeffoun en Kabylie, dont il fréquente l'école jusqu'en 1964. Sa famille s'installe ensuite à Alger.

En 1970, sa nouvelle Les Insoumis reçoit une mention au concours littéraire Zone des tempêtes. Il achève ses études l'année suivante au lycée Okba d'Alger et obtient en 1974 une licence de mathématiques[1] à l'université d'Alger, où il s’est lié avec le poète Hamid Tibouchi.

Tahar Djaout écrit ses premières critiques pour le quotidien El Moudjahid, collabore régulièrement en 1976 et 1977 au supplément El Moudjahid Culturel[1] puis, libéré en 1979 de ses obligations militaires, reprend ses chroniques dans El Moudjahid et se marie.

Responsable de 1980 à 1984 de la rubrique culturelle de l’hebdomadaire Algérie-Actualité[1], il y publie de nombreux articles sur les peintres et sculpteurs (Baya, Mohammed Khadda, Denis Martinez, Hamid Tibouchi, Mohamed Demagh) comme sur les écrivains algériens de langue française dont les noms et les œuvres se trouvent alors occultés, notamment Jean Amrouche, Mouloud Feraoun, Mouloud Mammeri, Mohammed Dib, Rachid Bey, Jean Sénac, Bachir Hadj Ali, Hamid Tibouchi, Messaour Boulanouar, Youcef Sebti, Kamel Bencheikh, Abdelhamid Laghouati, Malek Alloula, Nabile Farès

En 1985, Tahar Djaout reçoit une bourse pour poursuivre à Paris des études en sciences de l’information[1] et s'installe avec sa femme et ses filles dans deux petites pièces aux Lilas[2]. De retour à Alger en 1987, il reprend sa collaboration avec Algérie-Actualité. Alors qu'il continue de travailler à mieux faire connaître les artistes algériens ou d'origine algérienne (par exemple Mohamed Aksouh, Choukri Mesli, Mokhtar Djaafer, Abderrahmane Ould Mohand ou Rachid Khimoune), les événements nationaux et internationaux le font bifurquer sur la voie des chroniques politiques.

Très critique à l'égard des organisations islamistes, il écrit en 1992 : « Comment une jeunesse qui avait pour emblèmes Che Guevara, Angela Davis, Kateb Yacine, Frantz Fanon, les peuples luttant pour leur liberté et pour un surcroît de beauté et de lumière, a-t-elle pu avoir pour héritière une jeunesse prenant pour idoles des prêcheurs illuminés éructant la vindicte et la haine, des idéologues de l’exclusion et de la mort ? »[3].

Il quitte en 1992 Algérie-Actualité pour fonder avec quelques-uns de ses anciens compagnons, notamment Arezki Metref et Abdelkrim Djaad, son propre hebdomadaire : le premier numéro de Ruptures[1], dont il est le directeur, paraît le .

Victime le , devant son domicile à Baïnem, dans la banlieue ouest d'Alger, d'un attentat (deux balles dans la tête, tirées à bout portant), attribué dans des circonstances contestées au Front islamique du salut (FIS) dont le procès a révélé les incohérences de l'accusation officielle[réf. nécessaire], alors que vient de paraître le no 20 de son hebdomadaire et qu’il finalise le no 22, Tahar Djaout meurt le et est enterré dans son village natal d'Oulkhou. Un bulletin du FIS dénonça « son communisme et sa haine viscérale de l’islam »[3]. « Si tu parles, tu meurs, si tu te tais, tu meurs, alors parle et meurs. » : souvent attribués à Tahar Djaout dans les hommages qui lui sont alors rendus, ces mots semblent cependant ne figurer dans aucun de ses ouvrages[4].

À la suite de son assassinat, le Carrefour des littératures (Strasbourg, France) lance un appel en faveur de la création d'une structure de protection des écrivains. Cet appel réunit rapidement plus de 300 signatures, et est à l'origine de la création du Parlement international des écrivains[5].

Publications[modifier | modifier le code]

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Poèmes[modifier | modifier le code]

Romans[modifier | modifier le code]

Nouvelles[modifier | modifier le code]

  • Les Rets de l'oiseleur (nouvelles, 1973-1981), couverture et dessins de Slama, Entreprise Nationale du Livre, Alger, 1984; réédition, ENAG, Alger, 2002.

Essais[modifier | modifier le code]

  • Les Mots migrateurs, Une anthologie poétique algérienne, présentée par Tahar Djaout, (Youcef Sebti, Rabah Belamri, Habib Tengour, Abdelmadjid Kaouah, Hamid Tibouchi, Mohamed Sehaba, Hamid Nacer-Khodja, Tahar Djaout, Amine Khan, Daouia Choualhi), Office des Publications Universitaires (OPU), Alger, 1984.
  • Mouloud Mammeri, entretien avec Tahar Djaout, suivi de "La Cité du soleil", Éditions Laphomic, Alger, 1987.
  • Tahar Djaout, Ruptures et fidélités (articles de Tahar Djaout publiés dans « Ruptures » et témoignages), Comité International de Soutien aux Intellectuels Algériens (CISIA), Cahiers, no 1, Paris, 1993. Document utilisé pour la rédaction de l’article
  • Ali Marok et Tahar Djaout, La Kabylie, avec le concours de Farida Aït Ferroukh, préface de Mohammed Dib, éditions Paris Méditerranée, Paris et EDIF 2000, Alger, 1997. (ISBN 2842720334) (ISBN 978-2842720339)
  • Fragments d'itinéraire journalistique, Actualité de l'émigration, - , Éditions Dar El Gharb, Oran, 2004 [une quarantaine d'articles de Tahar Djaout publiés à Paris entre et mars 1987 dans Actualité de l'émigration].
  • Youcef Merahi, Tahar Djaout, premiers pas journalistiques, éditions Alpha, 2010, 137 p. [articles de Tahar Djaout publiés à Alger entre 1976 et 1979 dans le quotidien El-Moudjahid et l’hebdomadaire Algérie Actualité].
  • Une mémoire mise en signes, Écrits sur l'art, textes réunis par Michel-Georges Bernard, Préface de Hamid Nacer-Khodja, El Kalima Éditions, Alger, 2013, 287 p. [ensemble des textes, articles et préfaces d'expositions, de Tahar Djaout, entre 1976 et 1991, sur les peintres et sculpteurs algériens ou d'origine algérienne] (ISBN 978-9931-441-10-6)

Dans les anthologies[modifier | modifier le code]

  • Des Chèvres noires dans un champ de neige ? 30 poètes et 4 peintres algériens, Bacchanales no 32, Saint-Martin-d'Hères, Maison de la poésie Rhône-Alpes - Paris, Marsa éditions, 2003 ; Des chèvres noires dans un champ de neige ? (Anthologie de la poésie algérienne contemporaine) , édition enrichie, Bacchanales, no 52, Saint-Martin-d'Hères, Maison de la poésie Rhône-Alpes, 2014
  • Ali El Hadj Tahar, Encyclopédie de la poésie algérienne de langue française, 1930-2008 (en deux tomes), Alger, Éditions Dalimen, 2009, 956 pages (ISBN 978-9961-759-79-0)
  • Abdelmadjid Kaouah, Quand la nuit se brise (Poésie algérienne francophone contemporaine), éditions du Seuil, Paris, 2012

Adaptation cinématographique[modifier | modifier le code]

  • Les Suspects, scénario de Kamal Dehane et Mahmoud Ben Mahmoud d'après Les Vigiles, 105 min, production Saga Film, Flash-Media, RTBF, ENTV avec l'aide du Ministère algérien de la Communication et de la Culture, du Centre du Cinéma et de l'Audiovisuel de la Communauté française de Belgique et des télédistributeurs wallons, 2004.

Analyse de son œuvre[modifier | modifier le code]

« Djaout s'insurge sans doute d'abord contre tous les opiums – et il le fait avec une précision féroce. Mais son impatience de l'amour fait surtout éclater les murs, bouscule les tergiversations et les formules convenues. Lui aussi veut vivre en joie et en gloire. […] La poésie de Djaout est enfin très enracinée dans le terroir africain. Ses racines et ses adhérences viennent à bout du macadam de la Ville ; elles plongent dans l'humus ancestral du grand continent et dans ses rythmes. »

— Jean Déjeux, Jeunes Poètes algériens, Paris, Éditions Saint-Germain-des-Prés, 1981

« C'était, au sens philosophique du terme, un libertin. Cheveux de jais, regard malicieux derrière ses lunettes, il aimait à lisser ses moustaches. Il avait le sens de la repartie, celle qui désarçonne les bonimenteurs. Son humour agira, dans son œuvre, tel un claquement de fouet. En ce sens, il était fondu dans le même moule que le Marocain Driss Chraïbi. Djaout, donc ? Il commence par la poésie. »

— Mohamed Balhi, conférence à Tizi Ouzou, 22 mai 2008

Hommages[modifier | modifier le code]

Après sa disparition la BBC réalise sur lui un documentaire intitulé Shooting the Writer, avec la participation notamment de sa femme , sa mère, Rachid Mimouni et Omar Belhouchet, [6].

En hommage, Matoub Lounès, lui-même assassiné en , compose en 1994 une chanson dont le titre est le prénom de l'une de ses filles, Kenza. Le chanteur Aksel lui rend également hommage avec "loukane" extraite de son premier album.

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. a b c d et e Malika Kebbas, « « Tahar Djaout, romancier du verbe libre » », Recherches & Travaux [En ligne], 76,‎ 2010, mis en ligne le 30 janvier 2012, consulté le 26 décembre 2016. (lire en ligne)
  2. Spécial Tahar Djaout, l'écrivain martyr, « L'ivreEscQ » no 25, , Alger, p. 35.
  3. a et b « Tahar Djaout « Oiseau, mon messager » », sur L'Humanité,
  4. Selon son confrère et ami Mohamed Balhi, dans El Watan du 29 mai 2008 et dans Présence de Tahar Djaout, poète, 2013 (p. 42), ils sont du Palestinien Mou'in Bsissou.
  5. Source : « International Network of Cities of Asylum », article de Yvonne van der Heijden sur le site de la Nieman Foundation for Journalism d'Harvard (automne 2004, page consultée le 29 mars 2010).
  6. Documentaire accessible en 6 parties sur YouTube (consulté le 5 janvier 2011).

Annexes[modifier | modifier le code]

Bibliographie sur Tahar Djaout[modifier | modifier le code]

Document utilisé pour la rédaction de l’article : document utilisé comme source pour la rédaction de cet article.

Entretiens[modifier | modifier le code]

  • Écriture et mémoire, Interview de Tahar Djaout par Salima Aït Mohamed, dans Écrits d'Algérie, Les Écrits des Forges, Québec, et Autres Temps, Marseille, 1996 (ISBN 2908805928). Document utilisé pour la rédaction de l’article
  • De vive voix, paroles de Tahar Djaout transcrites par Michel-Georges Bernard, dans "Algérie Littérature/Action" no 73-74, septembre-, Paris, 2003 (ISBN 2913868487). Document utilisé pour la rédaction de l’article

Ouvrages sur Tahar Djaout[modifier | modifier le code]

  • Vols du guêpier, Hommage à Tahar Djaout, Volume no 1, (textes de Afifa Berehi, Nora Kazi-Tani, Malika Hadj Naceur, F. B. et S. A., F. A.), Équipe de recherche ADISEM, Université d’Alger, Alger, 1994. Document utilisé pour la rédaction de l’article
  • Kaléidoscope critique, Hommage à Tahar Djaout, Volume no 2, (textes de Jean Pélégri, Youcef Merahi, Rabah Belamri, Moncef Ghacem, Leila Sebbar, Marc Gontard, Isaac-Célestin Tcheho, Jeannine Fève-Caraguel, Afifa Bererhi, A. Z., Malika Hadj Naceur, Juliana Toso Rodinis, Nora-Alexandra Kazi-Tani, F. A., Saléha Amokrane, Farida Boualit et Michel-Georges Bernard), Équipe de recherches ADISEM, Université d’Alger, Alger, 1995. Document utilisé pour la rédaction de l’article
  • Ali Chibani, Tahar Djaout et Lounis Aït Menguellet. Temps clos et ruptures spatiales, Paris, L'Harmattan, 2012 et Alger, Koukou Éditions, 2014.
  • Présence de Tahar Djaout, poète, textes et dessins réunis par Amin Khan, Éditions Barzakh, Alger, 2013 (ISBN 978-9931-325-49-9).
  • Djoher Amhis-Ouksel, Tahar Djaout, ce tisseur de lumière, Casbah-Éditions, collection Empreintes, Alger, 2014 (248 p.)

Articles[modifier | modifier le code]

Ouvrages généraux[modifier | modifier le code]

  • Jean Déjeux, Bibliographie méthodique et critique de la littérature algérienne de langue française 1945-1977, SNED, Alger, 1979. Document utilisé pour la rédaction de l’article
  • Jeunes poètes algériens, choix de Jean Déjeux, Éditions Saint-Germain-des-Prés, Paris, 1981. Document utilisé pour la rédaction de l’article
  • Jean Déjeux, Dictionnaire des auteurs maghrébins de langue française, Paris, Éditions Karthala, 1984 (ISBN 2-86537-085-2). Document utilisé pour la rédaction de l’article
  • Anthologie de la littérature algérienne (1950-1987), introduction, choix, notices et commentaires de Charles Bonn, Le Livre de poche, Paris, 1990 (ISBN 2-253-05309-0) Document utilisé pour la rédaction de l’article
  • Poètes algériens d’aujourd’hui, présentés par Christiane Achour, Poésie 91, no 37, Paris, 1991. Document utilisé pour la rédaction de l’article
  • Jeune Poésie algérienne, no 60 de la revue Traces (Le Pallet), anthologie de poètes algériens, introduction et choix de Kamel Bencheikh. .
  • Mohamed Balhi, Tahar Djaout: l'enfant d'Oulkhou dans Chroniques infernales : Algérie 1990-1995, Éditions Marinoor, Alger, 1997. (ISBN 2913868487). Document utilisé pour la rédaction de l’article
  • Tahar Djaout, introduction d’Emmanuel Hiriart, choix de poèmes et documents, "Poésie/première" no 26, Éditions Editinter, Soisy-sur-Seine, 2003. Document utilisé pour la rédaction de l’article
  • Assia Djebar, Le blanc de l'Algérie, A. Michel, 1995 (pages 201-206 de l'édition de poche (ISBN 2226084576) et 9782226084576) Document utilisé pour la rédaction de l’article

Documentaire[modifier | modifier le code]

  • Tahar Djaout, un poète peut-il mourir ?, version langue française (titre original : Tahar Djaout, Amedyaz ur yettmattat), réalisation Abderrazak Larbi-Cherif, 52 minutes, Production Ralyan Vidéo, 2012.

Articles connexes[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]

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