Extrait de l’édition du 30 août 1869. Crédit Photo : null

Décidément créer un lieu de plaisir n’est pas une sinécure. C’est du moins ce que l’on comprend à la lecture du Figaro qui suit dans les années 1868/1869 la délicate naissance des Folies Bergère, mythique salle de spectacle parisienne. Les ennuis commencent dès le début 1868. Évoquant le projet de «salle de spectacle-concert, derrière les Colonnes d’Hercule, rue Richer», Le Figaro du 24 janvier souligne: «Nous apprenons à ce sujet un détail assez plaisant: le duc de Trévise s’oppose à ce que ce nouvel établissement prenne le nom de Folies Trévise. Déjà, le propriétaire prend ses précautions et songe à intituler son théâtre Folies Bergère.»

Une fois les travaux lancés, on peut lire le 8 mars 1868, que suite à un différend entre le directeur de la salle et la commission impériale, les travaux commencent à prendre du retard. Le 22 juin 1868, les choses se précisent. «Cinquante ouvriers travaillent tous les jours à la salle des Folies-Bergère, qui doit être livrée, sous dédit, le 1er septembre prochain, peut-on lire. Nos confrères ont eu tort de prétendre que la chansonnette serait exilée de ce temple où fumera l’encens des havanes et des grogs, on fera là du café-concert, panaché d’intermèdes et de théâtre. Mais la chanson sera la folle muse du lieu. Les pièces ne seront jouées que dans la seconde partie du spectacle, par de vrais artistes dramatiques spécialement engagés.»

Un programme des années 1890. Crédit Photo : Rue des Archives/© Mary Evans/Rue des Archives

Retards et procédures

Mais les retards et les procédures juridiques se multiplient, alors on brode. Le 22 décembre 1868, on apprend que «la plus grande originalité des Folies-Bergère, c’est que l’on pourra fumer à toutes les places», information démentie par la suite. Le 2 janvier 1869, le quotidien souligne que «la salle, à peu près terminée, sera livrée à la direction le 30 de ce mois (...) Quant au genre de spectacle, on veut imiter aux Folies-Bergère certains établissements publics de Londres et de New York, où tous les genres - hors le genre ennuyeux - sont admis et mêlés ensemble.»

Et le feuilleton à rebondissement se poursuit, puisque le 17 avril 1869, Le Figaro s’amuse d’avoir gagné son pari: l’ouverture des Folies-Bergère est encore retardée. L’inauguration aura finalement lieu le 2 mai ce qui n’empêche pas les ennuis de se poursuivre si l’on en croit l’édition du 23 juillet. «Mauvaise période pour les cafés-concerts, dit un nouvel article. Sur l’instance judiciaire de plusieurs créanciers altérés, le mobilier des Folies-Bergère allait être vendu aux enchères, lorsque de nouveaux créanciers sont intervenus et ont introduit un référé à l’effet d’obtenir que le matériel et le droit au bail fussent vendus en même temps, se fondant sur ce qu’une vente scindée aurait pour effet de déprécier l’établissement et de nuire, par conséquent, aux intérêts des créanciers.»

Les choses finiront cependant par rentrer dans l’ordre et dans les mois qui suivent, Le Figaro peut s’intéresser aux spectacles donnés sur place même si dès le début 1870 une fuite de gaz oblige à annuler les spectacles. Des débuts chaotiques qui n’empêcheront pas la salle de maintenir son activité depuis près d’un siècle et demi.

Une vue de l’intérieur à la fin du 19e siècle. Crédit Photo : Rue des Archives/Rue des Archives/Tallandier
Un bar aux Folies Bergères, peint par Manet au début des années 1880. Crédit Photo : SuperStock/Superstock/Rue des Archives