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EAN : 9782811219574
288 pages
Milady (20/01/2017)
3.6/5   312 notes
Résumé :
En pleine nuit, une femme attend face au Panthéon, seule, un petit sac dans ses bras frêles qu'elle serre comme un étau. Cette femme, c'est Anna-Marie Caravelle, l'abominable, l'Affreuse Rouquine, la marginale.
Lorsque, vingt-quatre ans plus tôt, Monique Bonneuil décide de prendre en charge, en secret, à l'insu du reste du monde, l'éducation de la petite Anna-Marie, fille d'un suicidé et d'une folle à lier, elle n''imagine pas encore le monstre qu'elle abrite... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (145) Voir plus Ajouter une critique
3,6

sur 312 notes
Non de non, ce livre n'était pas pour moi. Je me suis laissée tenter car de temps en temps, j'aime me distraire avec un bon thriller. Déjà ici, en est-ce bien un ? Difficile d'étiqueter ce roman. Roman noir? Horreur ? Voici le mot qui a hanté toute ma lecture : glauque. Ce roman est glauque à souhait. Sans intérêt selon moi car il n'apporte rien. J'ai traîné la patte pour tourner les pages, j'avais pas envie de savoir le fin fond de l'histoire et je me suis bien ennuyée.

Anna-Marie est une pauvre fille délaissée par tous, abandonnée, que tout le monde trouve laide et pas assez bien pour lui donner une once d'amour. Dans cette enfance meurtrie et ratée, Anna-Marie va nourrir sa haine et devenir une tueuse.
(Un peu facile ce portrait de tueuse alors qu'avec un peu de psychologie, le personnage aurait pu avoir bien plus d'intérêt je trouve). J'ai manqué de refermer ce livre si noir mais un peu de lumière est enfin arrivée quand Anna-Marie rencontre Camille, l'Ange blond. L'auteure a une très jolie plume quand elle se penche dans la douceur et la poésie. Les descriptions sur Paris sont très jolies. Mais bien insuffisantes pour combler toute ce tableau noir. Si l'auteure s'est consacrée un jour à un roman plus tendre, je serai curieuse de le lire...
En attendant, âmes sensibles vous voilà prévenues. Si vous voulez lire des animaux torturés, et nager dans la folie borderline, ce roman plaira. C'était pas mon trip aujourd'hui. Ni un jour d'ailleurs.
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Samedi - 11h20, deux heures que je ne tiens plus en place...
Deux heures que je jongle entre ma tablette et chacune des pièces de ma maison pour m'occuper les mains et l'esprit...
Deux heures que je viens de pleurer toutes les larmes de mon corps en découvrant les derniers mots du chapitre 29...
Je suis anéantie.
J'ai besoin d'en parler.
Mais à qui ???
Tout le monde autour de moi a l'air occupé.
Ahhhhhh ! Je vais exploser !
Je vais dans ma chambre.
J'y trouve mon onzans, qui comme son habitude, squatte mon lit pour jouer avec sa console de jeux vidéos...
Il sait qu'il ne devrait pas être là.
Il me regarde l'air fautif.
Et si j'en profitais...
- Mon chaaaaaaaapinnnnn !!!
(C'est son petit nom...Un mélange de chaton et de lapin)
- ?!
- ohhhh... mon chapin... Il faut AB-SO-LU-MENT que je te montre quelque chose !
Regarde bien ce livre...
Tu vois, là ?
C'est mon marque-pages !
Il est presque à la fin...
Il reste quoi ?! 2 tout minuscules chapitres de rien du tout et l'épilogue !
- ?!!!?
- Mais non... C'est trop dur ! Je veux pas savoir...
- !???!
- Enfin... Si... En fait, je sais, mais je veux pas savoir...
- Tu sais, mais tu veux pas savoir ?!
(avec l'air de dire, t'es complètement grave ma pauv' môman...)
- (les larmes me montent aux yeux...) Oui... Je sais, mais je ne veux pas...
Il faut que je me trompe... Dis moi que je me trompe ?
- Pffff... Tu lis, pis tu en achètes un autre et voilà ! C'est fini.
- ...........
Qu'est-ce que tu fais dans ma chambre d'abord ? File de là !
Pfff...Les enfants, ils comprennent vraiment rien du tout, c'est pô possible autrement. Bon, ça m'a quand même fait du bien de pouvoir évacuer un peu tout ça.

Donc, ce bouquin est d'une noirceur absolument terrifiante !
Comme Solène Bakowski est cruelle... Mais, ouah ! qu'est ce que c'est bon !
Parce que malgré le fait que tout soit si sombre, je n'ai pas pu m'empêcher de rechercher la moindre petite étincelle de lumière et d'y croire... D'y croire fort ! Même si les mots disaient tout le contraire...
J'ai tout aimé.
Le style, la narration.
Anna-Marie Caravelle nous raconte son histoire.
De ce qui l'a amenée sur cette terre, jusqu'au moment où elle se retrouve en face du Panthéon. Avec un sac. Ce fameux sac...

Alors, oui... J'ai enfin eu le courage d'affronter les dernières pages qu'il me restait.
Et non, je ne vous dirais pas si je me trompais...

Enorme coup de coeur !
Une bonne intention devrait se retrouver dans mes mains dans pas trop longtemps, je pense.
Ce qui est certain, c'est que je suivrai l'actualité de l'auteure avec assiduité.

Incontournable pour tous les coeurs avertis...
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J'ai toujours eu une certaine méfiance pour les livres auto-édités.
Ils pullulent sur des sites comme Amazon, et dans la majorité des cas, le roman va être encensé par de nombreux commentaires élogieux. A croire que les éditeurs passent leur temps à refuser des manuscrits de chefs d'oeuvre...
Souvent usurpées, ces appréciations n'ont parfois pour seul but que de pousser à la consommation. Et on se retrouve ainsi facilement à télécharger un texte qui pullule de fautes, et au talent inversement proportionnel.

Ma récente découverte d'Amélie Antoine, notamment au travers de ses romans Fidèle au poste ( prix Amazon de l'auto-édition en 2015 ) ou Au nom de quoi m'ont cependant poussé à tenter la découverte d'autres auteurs reconnus dans ce milieu.
Mon avant-propos ne doit donc surtout pas être généralisé.
Solène Bakowski m'est venue naturellement. Il semblerait qu'elle partage une certaine amitié, un certain respect avec Amélie Antoine et également, elle aussi a finalement attiré un éditeur.
Ainsi, Michel Lafont a distribué en librairie Fidèle au poste en lui insufflant une seconde vie ... Et c'est Milady qui fait davantage connaître ce second roman de Solène Bakowski : Un sac. Qui a quant à lui obtenu le prix spécial du jury Amazon en 2015.
Peut-être que finalement, ce sont les auteurs qui doivent désormais faire leurs preuves par eux-mêmes avant qu'un éditeur ne daigne s'intéresser à eux.
Ces deux livres étant déjà de gros succès avant leur parution "papier", le risque pris était quasiment nul.

Qualifié le plus souvent de roman très noir, voire horrifique, j'ai davantage perçu Un sac comme un conte moderne, cruel, aux accents macabres.
"-Miroir, miroir, dis-moi qui est la plus belle.
- Pas toi Anna-Marie Caravelle. Pas toi."
Marie-Anna Caravelle, dont l'histoire nous est ici narrée, n'est effectivement pas d'une beauté à couper le souffle. Notamment en raison de la tâche lie-de-vin qui orne son visage, et qui semble s'agrandir à chacune de ses fautes. A la façon de la piqûre dans le roman éponyme de Marie-Christine Horn.
"Est-il besoin de préciser que ma tâche, à cette époque, grossit beaucoup, au point qu'elle envahissait plus de la moitié de mon visage et me donnait, ajoutée à la misère nouvelle de mon corps, un air de trépassée ?"

Cette anti-héroïne nous décrira les vingt-quatre premières années de sa tragique histoire. Elle l'écrira à la main, le temps de quelques heures, installée sur les marches du Panthéon, rue Soufflot à Paris ( du nom de son architecte ).
Paris qui sera d'ailleurs presque un personnage à part entière, puisque le roman se passe tout d'abord dans le onzième arrondissement, rue de Chanzy, et nous fera ensuite visiter les quais de Seine ( le fleuve sera comparé au sang de Paris ), les jardins du Luxembourg ou encore Notre-Dame.
Sans oublier ses multiples passants.
"La couleur humaine, c'est le gris, comme Paris, comme les rats, comme la pollution, comme la fiente des pigeons."
A ses côtés, un sac à dos vert au mystérieux contenu, qu'on pourra commencer à anticiper aux deux tiers du livre environ.
Qui constitue en quelque sorte la chute attendue de ce morceau de biographie, et sur lequel Solène Bakowski reviendra le temps de courts chapitres pour ne pas nous faire oublier son existence, comme un leitmotiv s'insérant entre les confidences de son personnage principal.

L'histoire d'Anna-Marie est présentée d'emblée comme ambiguë.
"Je vais vous paraître effrayante. Pourtant je ne suis pas monstrueuse."
"Mon histoire ne plaide ni en ma faveur, ni en ma défaveur."
Elle commence avant même sa naissance, et le moins qu'on puisse dire c'est qu' Anna-Marie n'est pas née avec tous les atouts en main. Son père se suicide alors que sa mère, Elise, est enceinte.
C'est Elise, la future maman, qui découvrira le corps, ce qui va provoquer une brusque catatonie dont elle ne sortira jamais.
"Elle ne lisait pas. Ne mangeait pas. Ne riait pas. Ne pleurait pas."
C'est un bien macabre spectacle que découvrira Monique Bonneuil, leur voisine âgée et solitaire. Qui va prendre les choses en main. Elle va prendre soin d'Elise, ravie de se sentir enfin utile. Et ne préviendra personne.
Elle qui aidera la mère, toujours amorphe, à accoucher. Et s'occupera en cachette de la petite Anna-Marie après avoir confié sa mère à un établissement psychiatrique.
Lui ôtant d'emblée toute existence légale.
"C'était son secret. A elle. Son enfant. le protéger. Envers et contre tout. Qu'on ne lui prenne jamais."
Pendant dix ans, Anna-Marie vivra totalement recluse dans un appartement, sans la moindre connaissance du monde extérieur. Avec pour seule compagnie cette mère de substitution, le yorkshire Poupoune et les chansons d'Edith Piaf.
"Telle la grenouille au fond de son puits, son monde se terminait aux murs du maigre appartement."
"Le monde autour n'existait pas : ni ciel, ni étoile, ni vue, ni maison, ni personne."
Pour sa première découverte du monde extérieur, Anna-Marie rendra visite à sa mère biologique, toujours internée. Une confrontation après laquelle plus rien ne sera comme avant. Comme si elle incarnait désormais le mal.
"Je ne marchais plus, je rampais dans la vie comme un serpent maléfique."
Quelle horreurs se sont alors produites ? Qu'est-ce qui va déclencher le départ de la désormais adolescente ?
Je n'en dirai pas davantage.
Simplement que la jeune femme qui va bientôt errer dans les rues de la capitale n'incarne plus la moindre forme d'innocence.
Mais que malgré sa cruauté, il est impossible de la juger étant donné les circonstances dans lesquelles elle est née puis a grandi.
Comment ne pas garder quelques séquelles ?

L'étrange initiation d'Anna-Marie ne fera alors que commencer.
Elle rencontrera d'autres personnes tout aussi étranges qu'elle.
"On est bizarres toi et moi on n'a rien en commun avec ceux qui nous entourent."
Cette seconde partie du parcours chaotique d'Anna-Marie lui fera découvrir ses premiers émois amoureux, le besoin de travailler pour pouvoir survivre ... mais en aucun cas sa vie ne retrouvera l'équilibre qui lui a toujours manqué depuis sa gestation.
Son sens moral, ses facultés relationnelles ... Elle n'en n'est pas dépourvue mais sa vision est totalement déformée. La pauvre n'a jamais eu de repères et encore moins de mode d'emploi. Elle apprend par elle-même ce qui est bien ou mal, mais elle a grandi dans des circonstances tellement décalées par  rapport à la norme sociale que ses réactions ne sont jamais adaptées.
Solène Bakowski aime, je la cite, "créer des personnage alambiqués animés d'une "folie douce" à la limite de la normalité".
"Tes pulsions, tes démons, tes problèmes, y en a marre. Fais-toi soigner, merde !"
Même si définir la normalité serait beaucoup trop risqué, la frontière vers cette folie douce a largement été franchie par la narratrice, et l'intégration d'Anna-Marie au monde parisien, même le plus obscur, ne pouvait de toute façon se faire sans souffrances.
Qu'elles soient causées ou subies.
Comment exister ? Quelle place, quelle présence occuper dans un monde dont on ne maîtrise pas les codes ou les règles les plus élémentaires ?
"Il m'avait abolie. Il m'avait effacée. Il m'avait niée."

Amateur de récits dérangeants ou amoraux, j'ai été ici copieusement servi. Même si je n'ai jamais pu croire tout à fait à cette histoire ( et c'est la raison pour laquelle j'ai choisi de l'aborder davantage comme une fable tant le postulat de départ était improbable ), cet étrange apprentissage de la vie comme façonné au travers d'un miroir déformant m'a glacé à plus d'une reprise, jusqu'à la conclusion tellement inhumaine, poignante et après tout logique de ce long parcours fait de monstruosités et de rédemption.
Et que ressentir pour Anna-Marie ? de l'empathie pour sa malchance ou de la colère quand elle réitère des actes impardonnables ? Mes sentiments pour ce personnage ambiguë à souhait ont changé régulièrement. Comment ne pas s'apitoyer sur un sort aussi profondément injuste, quand les auspices sont aussi funestes depuis sa conception ? Comment ne pas comprendre qu'elle fasse de grosses bêtises quand toutes ses chances d'équilibre lui ont été ôtées ? Et pourtant, à l'heure d'apprendre enfin par elle-même, elle n'en sera plus capable et ses actes inspireront donc tour à tour chagrin et dégoût.
En tout cas difficile de rester insensible à cette jeune femme en perdition.

J'ai également aimé l'écriture. Le style est très personnel, présente de belles tournures de phrases, et demeure toutefois accessible.
Concernant le rythme, je lui ai trouvé quelques faiblesses. J'ai aimé toute la partie consacrée à l'enfance et à la naissance des troubles chez la fillette. Je suis en outre entré dans l'histoire dès les premières lignes, happé par la plume et par les débuts de ce conte si éprouvant, à l'ambiance dérangeante et inhabituelle.
En revanche, quand Anna-Marie accède à la liberté et aux rues de la capitale, j'ai parfois moins adhéré. Le roman perd un peu en intensité ( même s'il réserve encore quelques moments horribles ou avilissants ) et a moins réussi à me passionner.
J'ai ressenti quelques longueurs dans un schéma redondant, trouvant que l'auteure restait parfois trop en surface, et certains revirements de situation arrivent à l'inverse trop rapidement pour que j'y adhère totalement.
Enfin, j'ai trouvé le roman un peu trop linéaire, peut-être par son déroulé trop chronologique ou pas l'existence d'un seul point de vue : Celui de l'unique narratrice que j'ai parfois eu du mal à croire sur parole.

Malgré mes quelques réserves, Un sac me laissera un bon souvenir. Surprenant, original, il aurait pu à peu de choses près correspondre parfaitement à mes attentes. Et s'il peut paraître parfois faire dans la démesure, tout ce qui s'y passe jusqu'à la magistrale conclusion relève d'une imparable et torturée logique, qui demande parfois à reprendre son souffle.
Quant à moi, je vais devoir commencer à réviser mon avis trop tranché sur le monde de l'auto-édition, dans lequel se cachent probablement quelques perles qui n'ont rien de formatées, tout en présentant toutes les qualités requises d'un bon roman.
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Élise Caravelle perd la raison et rentre dans un état catatonique à la suite du suicide de son mari qui a choisi la fuite face à ses futures responsabilités paternelles. Elle délaisse alors totalement sa fille Anna-Marie, développant même une profonde aversion pour elle qui la ramène sans arrêt au suicide de son mari.

Heureusement, Une voisine prend pitié de cette mère incapable de gérer la situation et de prendre en charge la logistique du bébé. Elle s'occupera de la mère jusqu'à son internement en hôpital psychiatrique et recueille la petite à l'insu de tous. On verra plus tard que Monique Bonneuil est loin d'être le « bon samaritain » qu'on s'imagine. Sa démarche est au fond très égoïste et non pas altruiste comme on aurait pu le croire au départ.

Celle-ci va donc élever seule et pour elle seule la petite Anna-Marie, dans le huis-clos de son habitation. Tout l'univers d'Anna se cantonnera à cet appartement. Ainsi, jusqu'à ses 11 ans, Anna-Marie va ignorer qu'il existe un « ailleurs » en dehors des quatre murs aux fenêtres calfeutrées de son quotidien. A cet âge, Monique décide de la confronter à la réalité et de lui présenter sa mère afin que le choc subît par la petite fille l'attache définitivement à elle, Monique. Qu'Anna préfère le cocon rassurant qu'elle lui offre.

Mais, le choc avec le monde extérieur, d'abord (la rue, les voitures, les gens, les bruits, les odeurs inconnues d'elle jusqu'alors) et le traumatisme qu'elle ressent à la vue de cet être censée être sa mère, n'aura pas du tout les effets escomptés par Monique. Lors de la seconde visite à Élise, celle-ci va se comporter de façon démente et traumatiser Anna-Marie pour de bon, qui y voit son propre reflet dans les yeux fous de sa mère. Elle en repartira marquée pour le restant de ses jours et pour le pire !

En effet, franchement… qui ne « pèterait » pas les plombs (et pas qu'un seul mais le tableau tout entier !) face à une telle situation, d'autant qu'il s'agit d'une enfant. Qui résisterait à tant de traumatismes d'un coup ? Pas Anna-Marie en tout cas, elle qui évoluait dans un monde sinon « aseptisé » mais au moins "protégé" et dans une ignorance totale jusqu'alors.

Ébranlée et torturée par l'image de sa génitrice et de son rire démoniaque, elle va se mettre à se comporter de façon étrange, agressive et totalement imprévisible. Elle va se livrer à un acte aussi insensé que barbare. Monique découvre horrifiée qu'elle a élevé un « monstre ». Monstre qu'elle a pourtant fabriqué elle-même. Monique va alors l'enfermer à nouveau dans l'appartement et la traiter pire qu'un paria, niant même son existence. Anna vit alors comme une « bête ».

Un jour, sans aucun repère et dans sa folie, elle commettra l'irréparable à 13 ans et s'enfuira avec SDF rencontré au hasard de sa fuite. S'ensuivra une histoire compliquée, tortueuse et destructrice.

Détestée avant de naitre, l'enfant, marquée par une tâche de vin sur son visage, n'avait aucunes chances ! Condamnée qu'elle était avant d'arriver ! Un lourd passif à son « actif » avant même de pointer le bout de son nez façonnera dès le départ un destin tragique de bout en bout.

Tout au début, on se demande ce que peut bien contenir ce fameux sac. Mais après tout, ce que contient ce sac n'est finalement pas le centre du problème. Il ne représente juste que l'aboutissement de toute la vie d'Anna…

Même si le roman est écrit à la première personne, j'ai néanmoins réussi à garder de la distance par rapport au personnage ce qui m'a permis de ne pas sombrer dans la détestation lorsque Anna perpètre ces atrocités. Même si cela m'horrifiait, j'arrivais quand même à comprendre le mécanisme qui l'animait (sans toutefois l'excuser tout de même).

Cette enfant, élevée en claustration totale, en recluse, par une vieille « sauvage » qui s'en est gardé l'usage exclusif, ne va pas comprendre, exprimer et savoir contenir la violence qui va l'animer suite à la découverte du monde extérieur, sa révolte par rapport à la vie en découvrant sa génitrice qui l'a rejetée et maudite. Cette vie qui lui tombe dessus alors qu'elle n'est encore qu'une enfant, qu'elle ne comprend pas. Elle agira avec violence, commettra des actes que l'on peut juger de « monstrueux » par carence de connaissances, d'elle-même et de la vie. Elle n'a jamais appris à gérer ses émotions. Elle réagit comme le ferait un animal : l'attaque en cas de peur de l'inconnu.

S'il fallait trouver un défaut à ce livre, j'ai trouvé que l'auteure a un peu bâclé les choses lorsque Anna se retrouve dehors, confrontée au monde extérieur dont elle n'avait même pas idée. Après un tel confinement (pour reprendre un mot « tendance » en ce moment !!) forcé, elle ne semble pas si effrayée et perdue que ça. Ce qui logiquement devrait être une secousse sismique de magnitude 10 au moins dans sa vie, elle s'adapte au contraire très vite au taxi et aux voitures, par exemple. Elle aurait dû être « agressée » par les bruits, le foisonnement des couleurs, la circulation, l'explosion de la vie quoi ! Je trouve que l'auteure ne met pas assez l'accent sur ce coup de tonnerre dans la vie de la gamine. On ne sent pas l'impact violent que cela a dû aussi avoir.

Alors, évidemment en comparaison de la rencontre avec sa mère dans un hôpital psychiatrique, la découverte du "monde" à côté c'est de la gnognotte allez-vous dire !!

Oui, mais non. Je trouve que les émotions de la petite sont minimisés ; cette confrontation à la réalité n'était pas anodine quand même ! C'était comme une seconde naissance en quelque sorte. Ça ajoute au trauma. Tout son monde « connu » s'écroule, tout ce en quoi elle croyait, tous ses repères : une déflagration à rendre fou et parachevée par la collision avec sa vision maternelle !

Pour l'histoire globale, c'est le récit d'une vie misérable, condamnée au désespoir. C'est un roman sombre et sans lueur d'espoir qui n'a d'égal que la noirceur des personnages plus affreux les uns que les autres. L'histoire de la misère humaine, à la Zola, celle d'Hugo dans « les Misérables » avec même ses Thénardier !

Cette misère qui existe encore maintenant à tous les coins de rue (sans aller jusqu'au meurtre – quoique ça existe aussi…). Des monstres qui ne sont que le produit de la société (Monique Bonneuil en l'occurrence dans ce livre), car Anna, même si sa venue est marquée du sceau de la souffrance, n'est pas née meurtrière ; on ne naît pas la rage au ventre ; elle s'apprend d'après ce que l'on vit ; puis elle se cultive au fur et à mesure des expériences que l'on cumule, elle s'affermit (ou pas) selon l'éducation qu'on reçoit. Elle le devient en réaction à des traumatismes subit tout au long de sa vie ; Pour Anna, sa violence se révèle à 11 ans en réponse à la violence du choc subit.

Plus généralement on peut se demander si la « Société » est responsable de la « fabrication » de ces monstres ? Pour ma part je pense que oui (oui et non selon la personnalité et son degré de résistance au malheurs). Pas dans sa globalité évidemment, mais à échelle individuelle sans aucun doute.

Maintenant l'esprit humain est tortueux et chacun a une sensibilité différente. Certains seront « détruits » ou « détraqués » avec ce qui semble être peu pour d'autres. Chacun a sa propre résistance au mal mais il arrive que la raison vacille, que l'ampoule grille, que l'ordinateur central (comprenez le cerveau) soit à la masse, temporairement ou définitivement. le déclencheur peut même passer inaperçu parfois.

Ici, nous avons un concentré de misère, une véritable bombe à retardement. Mais la mèche est allumée, le détonateur enclenché à la naissance, la corde se consume lentement, c'est juste une question de temps... C'est un compte à rebours sans réversion possible. Noir c'est noir…

La fin ? Je dirai que ce n'est pas le but du livre. Ce que contient le sac, est important oui, mais peut importe ce qu'il y a en définitive. J'ai mon interprétation : certes, c'est triste à mourir mais c'est comme si la boucle était bouclée et que quelqu'un quelque part décide d'arrêter d'enclencher des détonateurs.



Certains n'aimeront pas (ou n'ont pas aimé) ce côté totalement désespéré du livre, cette absence de lumière au bout du tunnel, d'espoir. Mais cette histoire n'est pas une romance, la vie souvent n'est pas qu'une romance. Certes ce roman est noir, glauque, désespéré ; la misère et la malchance n'a pas de limite. Aucune rémission possible.

J'ai aimé l'écriture de l'auteure, qui décrit l'indicible sans tomber dans le pathos. Toute cette misère m'a touchée, émue au plus profond de moi car je sais que de telles situations existent. Elles étaient plus que monnaies courantes au siècle dernier, mais elles restent malheureusement tragiquement d'actualité de nos jours. Certes il y a des prises en charge sociales mais des drames sociaux persistent malgré tout.

Moi, je dis un grand bravo à l'auteure qui a su me captiver et maintenir mon attention jusqu'à la dernière ligne. Qui a si bien décrit les tréfonds de l'âme humaine. Qui dit qu'on n'est pas seul maitre de son destin et pas seul artiste de son malheur. Et qui dit, non et malheureusement, on ne naît pas tous égaux, ça n'est pas vrai.
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Ce n'est pas à la naissance d'Anna-Marie que les mauvaises fées sont arrivées en masse, c'est beaucoup plus tôt ! Le cafouillage a dû commencer dès Cupidon.
Elise aimait son mari, ce n'était pas réciproque, et comme il n'était pas plus attaché à la vie qu'à sa jeune épouse, il a tiré sa révérence quelques mois avant la naissance de leur premier bébé. Un aller simple vers l'armoire à pharmacie trop bien garnie, et bim, Fred est devenu le bel au bois dormant, sans résurrection le 3e jour ni 100 ans plus tard...
Cet abandon a anéanti Elise, et c'est une sorte de sorcière qui a pris la petite Anna-Marie en charge. Douze ans plus tard, 'Gretel' a rencontré son 'Hansel', et ils ont erré ensemble dans la vie, dans Paris...

Ce roman m'a fait penser à plusieurs contes, et c'est bon signe. Il réveille des peurs ancestrales, des angoisses d'enfant (abandon, folie, séquestration, prédation, rivalité et jalousie, meurtre...).
J'y ai trouvé aussi un petit côté 'Ensemble c'est tout' (Anna Gavalda), qui rassure de temps en temps : le bonheur, c'est simple comme un bon copain et un gros toutou fidèle. L'auteur a la bonté et l'habileté de nous ménager quelques pauses de douceur... pour repartir à fond de train dans le sordide et nous remettre mal à l'aise de plus belle. J'aime beaucoup la douche écossaise dans ce genre de thriller psychologique.

Cet ouvrage, aussi subtil que cruel et dérangeant, est la preuve qu'il existe des pépites dans l'auto-édition. Merci aux lecteurs qui l'ont plébiscité, permettant ainsi une publication plus visible !
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Citations et extraits (58) Voir plus Ajouter une citation
Certaines filles avaient choisi le métier. D'autres s'y pliaient par nécessité. Certaines le faisaient avec désinvolture, d'autres avec un zèle à rendre jaloux un contrôleur des impôts. Certaines le vivaient très mal, d'autres très bien. C'était un boulot comme un autre. Je l'exerçais correctement, honnêtement, avec une placidité de marbre. Je faisais mes horaires et ce pour quoi j'étais payée - rien de plus, rien de moins. Certaines collègues y allaient de leur petite touche personnelle, parfums, huiles, aphrodisiaques. Elles prétendaient donner du rêve. Moi, j'étais payée pour faire ce que l'épouse refusait, pour résoudre les conflits identitaires par l'acte, pour rigoler entre copains, pour essayer une nouvelle monture. [...] Je ne me détestais pas dans cette vie, je ne m'adorais pas non plus, n'en déplaise à certains psychologues de comptoir. Les clients glissaient sur moi comme autant de petites brises et je n'en sortais ni défaite ni grandie, un peu courbaturée parfois et pressée toujours de terminer ma journée pour retrouver le calme et la solitude [...].
(p. 239-240)
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Celui qui n’a jamais vu le soleil se lever à Paris a assurément raté quelque chose. Il y a, dans ces heures, du beau et du mystère. Il y a des espoirs, des histoires, des trésors et des diamants dans cette ville quand le soleil lui fait l’honneur de sa présence. Paris, tu es un être à part, doté de toutes les grâces. Tu n’appartiens à personne, mais tu tiens le monde entier dans ta main.
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Elle avait gardé de son enfance des souvenirs épars qui ressurgissaient de temps à autre, au gré de ses rêves ou de ses envies. De là où, toute jeune, Monique se tenait habituellement, elle ne voyait rien d'autre que les cheveux des femmes allongées sur la table de la cuisine, cuisses grandes ouvertes. Sa mère ['faiseuse d'anges' (sic)] lui interdisait de regarder lorsqu'elle travaillait et la houspillait lorsqu'elle la surprenait à jeter un oeil au travers d'une porte mal fermée. Mais la petite Monique, curieuse, voulait voir et comprendre pourquoi on chuchotait sur son passage et pour quelle raison étrange sa mère était considérée comme une pestiférée alors que toutes les dames du village défilaient à la maison. Alors elle regardait, jour après jour, intriguée, sentant comme de la magie là-dessous, se demandant même si sa maman n'était pas un peu sorcière.
(p. 29-30)
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Etre parisien, c'est aller vite.Or, moi, à ce moment précis, je n'allais pas vite; j'étais debout, immobile, ce qui me valut coups et rebuffades. Est-il besoin de préciser que, parmi tous ceux qui m'avaient heurtée, pas un ne se retourna pour en savoir un peu plus ? aux yeux de ceux qui passaient à côté, je n'étais qu'un obstacle à contourner, une perte de temps à éviter.
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Le malheur a une temporalité qui lui est propre et la souffrance dure toujours une éternité. Mon éternité à moi, c'était ce vide qui s'était installé dans ce deux-pièces, cette angoisse qui transpirait par tous les pores de ma peau et cette affreuse bonne femme qui m'avait élevée, que j'aimais encore et qui, pourtant, n'était plus capable d'amour envers moi. Le genre de boule qui vous tue si vous ne la tuez pas avant.
(p. 73)
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Vidéo de Solène Bakowski
Une femme se rend aux obsèques de celui qu'elle aimait. Un homme disparu de sa vie depuis un an, dont elle découvre la famille et une mystérieuse compagne bien plus âgée qu'elle. Finalement, on ne connaît jamais vraiment un être, même s'il partage notre vie…
Sur le thème de la destinée, de l'enfance, des secrets et des vies cachées, Solène Bakowski tricote un joli texte à l'intrigue bien menée, aux personnages forts et à la psychologie complexe. Un roman profondément humain et sensible que l'on a du mal à lâcher.
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