Nancy : peur et incompréhension après le meurtre de Khaled Arbouze abattu en pleine rue

Amis et connaissances du trentenaire abattu en pleine rue à Nancy, ne comprennent pas ce qui s’est passé. Les enquêteurs n’excluent aucune hypothèse.
Christophe GOBIN - 03 mai 2016 à 05:04 | mis à jour le 05 mai 2016 à 08:58 - Temps de lecture :

Une vingtaine de gros bouquets de roses attachés à un arbre attire le regard des passants. C’est là, sur la place de la Croix-de- Bourgogne à Nancy que Khaled Arbouze, un Nancéien de 34 ans, a été abattu. En pleine rue et en plein jour, samedi matin. Le trentenaire a été exécuté par deux hommes encagoulés sous le regard de riverains et de passants.

Trois jours après, l’onde de choc, provoqué par ce crime, reste énorme. « Je ne pensais pas qu’il y avait une telle violence dans une petite ville comme Nancy », commente une quadragénaire qui fait une halte, ce lundi, devant les fleurs déposées en hommage à la victime. Un peu plus loin, une jeune femme se recueille, en larmes : « Je passais à côté, rue Jeanne-d’Arc, au moment où c’est arrivé. J’ai vu la victime tomber et mourir. Je ne la connaissais pas mais c’est vraiment moche de finir comme ça ».

Les proches de Khaled Arbouze ont accompagné leurs roses de quelques mots griffonnés sur de petits morceaux de papier. « Nous te gardons dans notre cœur », disent la plupart. « Nous te vengerons », est-il, encore, écrit sur l’un des messages. Mais c’est une exception. C’est plutôt l’émotion qui domine. Et l’incompréhension.

Car ceux qui ont pu côtoyer le trentenaire ces derniers temps décrivent un père de famille rangé qui faisait des affaires dans l’immobilier. « C’était quelqu’un d’hyper sympa, d’intelligent, de pétillant et d’attachant », résume une personnalité de la vie publique locale. Mais sous couvert d’anonymat. De peur des raccourcis et des amalgames.

Car le trentenaire tué avait aussi un passé judiciaire et, peut-être, une facette plus sombre. Il avait en effet été condamné en 2005 par la cour d’assises spéciale dans une affaire de stup d’envergure. Cela faisait suite à la saisie, trois ans plus tôt, de 277 kg de cannabis dans un véhicule qui venait d’Espagne et remontait à toute allure sur Nancy. Un « go fast », en jargon.

Omertà à Laxou

« C’était la première fois que j’entendais cette expression. C’était aussi la première fois, à l’époque, que nous avions une enquête basée sur la géolocalisation des téléphones portables des suspects. C’était aussi la première fois que la justice s’intéressait de près au flux de circulation de l’argent sale provenant de la drogue. C’était un très gros dossier », se rappelle parfaitement Me Frédéric Berna qui avait défendu le trafiquant présenté comme la tête de réseau et qui avait été condamné à 12 ans de réclusion.

Six autres accusés avaient été jugés aux côtés de son client. Parmi eux, il y avait Khaled Arbouze. Me Berna n’en a gardé aucun souvenir. Sans doute parce qu’il était le moins impliqué dans l’affaire. C’est d’ailleurs lui qui a pris le moins : 3 ans de prison. Ce qui a couvert sa détention provisoire. Après le verdict, il a donc quitté la cour d’assises en homme libre.

Et depuis cette date, il a disparu des radars judiciaires. « Il avait changé de parcours », assure un de ses anciens amis d’école, dans le quartier des Provinces à Laxou. C’est le seul à accepter de parler. Sinon c’est l’omertà. Dans le centre commercial de l’avenue de l’Europe, au cœur de la cité, certains refusent de décrocher le moindre mot et d’autres confessent avoir « peur » d’éventuelles représailles. La mort violente de l’ex-enfant du quartier a visiblement fait l’effet d’un électrochoc.

« Khaled avait quitté les Provinces. Mais, ici, on sait toujours qui fait quoi et, a priori, il ne trempait plus dans les stupéfiants. Il était beau et il avait réussi. Je pense que cette affaire est liée à de la jalousie », estime son copain d’école.

Selon la formule rituelle, les policiers du SRPJ de Nancy, eux, «n’excluent aucune hypothèse »et observent la plus extrême discrétion sur leurs investigations.