Cuivre

Définition

Le cuivre est un métal stable et conducteur pouvant être présent sous diverses formes minérales dans l’environnement, telles que la cuprite, la malachite, les sels de chlorure ou de sulfate (OMS, 2004; ATSDR, 2004). Depuis longtemps, le cuivre métallique est utilisé dans la fabrication de matériaux d’armement, de monnaies, de fils électriques, et de tuyauterie (Cal EPA, 2008). De par leurs propriétés fongicides, algicides, herbicides et insecticides, les sels de cuivre (surtout le sulfate de cuivre et l’hydroxyde de cuivre) sont utilisés intensivement en agriculture comme pesticides (Cal EPA, 2008; ATSDR, 2004). Le sulfate de cuivre est aussi utilisé comme supplément alimentaire (ATSDR, 2004).

La présence de cuivre dissout dans la tuyauterie et autres composantes des systèmes domestiques d’alimentation en eau potable provoque l’apparition de taches bleues à vertes sur la lessive, la porcelaine et sur les accessoires de plomberie à des concentrations supérieures à 1 mg/l (OMS, 2004). Il donne également à l’eau un goût amer ou métallique désagréable à des concentrations variant entre 0,04 et > 5 mg/l (seuil de goût; moyenne entre 0,61 et 3,2 mg/l) (OMS, 2004; Omur-Ozbek et Dietrich, 2011). La consommation d’eau stagnante ou partiellement purgée à partir de système d’alimentation en eau potable dont la tuyauterie et ses raccords sont en cuivre peut accroître considérablement l’exposition quotidienne au cuivre (OMS, 2004).

Sources et niveaux environnementaux

Sources

Le cuivre est présent naturellement dans l’environnement, mais il est aussi abondamment utilisé dans les domaines industriels et domestiques. Il peut être détecté dans les eaux de surface, les eaux souterraines ou l’eau de mer. Sa présence fait suite à l’érosion du sol ou des rochers, de la dislocation du sol, ou encore à des activités anthropogéniques, telle que l’activité minière ou agricole, et les effluents provenant des usines de traitement des eaux usées (ATSDR, 2004; Cal EPA, 2008).

Au Canada, l’utilisation du cuivre dans les systèmes domestiques d’alimentation en eau potable est répandue. Le cuivre contenu dans la tuyauterie peut être relargué dans l’eau, à des teneurs variables, en fonction du temps de stagnation de l’eau dans les tuyaux, de la concentration d'oxygène dissous, du pH, de la dureté et de la température de l’eau, de même que de la disponibilité du cuivre dans le système de distribution (Cal EPA, 2008; Santé Canada, 1992; Santé Canada, 2009).

Concentrations dans l’eau potable

Au Québec, entre avril 2007 et mai 2012, un total de 13 793 échantillons d’eau potable provenant de 2 932 réseaux de distribution distincts (desservant plus de 20 personnes) ont été analysés dans le cadre de la surveillance réglementaire afin de mesurer les concentrations de cuivre. Ces prélèvements ont été réalisés selon la méthode recommandée par le ministère du Développement durable, de l'Environnement et des Parcs (MDDEP), soit après écoulement de 5 minutes. Parmi ces échantillons, 78,5 % présentaient des concentrations de cuivre supérieures à la limite de détection qui variait, selon les laboratoires et les méthodes d’analyse, entre 0,001 et 0,05 mg/l. Parmi les échantillons positifs, 61 (0,44 %), provenant de 34 réseaux de distribution distincts présentaient des concentrations de cuivre supérieures à la norme québécoise de 1,0 mg/l. La valeur maximale mesurée était de 6,3 mg/l, avec une valeur moyenne de 0,071 mg/l et une médiane de 0,023 mg/l (Bolduc, 2012). Ce mode d’échantillonnage (après 5 min) ne reflète pas nécessairement la concentration dans l’eau consommée par la population exposée, aussi, il est possible que les concentrations soient plus élevées après une période de stagnation.

Exposition de la population

L’alimentation est la principale source d’exposition au cuivre (ATSDR, 2004). Les aliments contiennent presque tous du cuivre, mais particulièrement les abats, les fruits de mer, les noix et les grains (IOM, 2001). Chez les nourrissons de 0 à 12 mois, nourris exclusivement au sein, l’apport quotidien total en cuivre varie entre 0,1 et 0,3 mg/jour; le lait maternel contenant environ 0,2 -0,3 mg/l de cuivre facilement absorbable (Cal EPA, 2008; Olivares et al., 1998). Pour ceux nourris avec des préparations commerciales pour nourrissons, l’apport total en cuivre varie entre 0,2 et 3,0 mg/jour, selon que les préparations soient reconstituées ou non avec de l’eau contenant du cuivre, ou selon la teneur en cuivre de la préparation pour nourrissons (Olivares et al., 1998). Chez l’adulte, l’apport quotidien total en cuivre varie entre 1 et 5 mg/jour (ATSDR, 2004; Cal EPA, 2008; OMS, 2004). La consommation de suppléments minéraux et vitaminiques contenant du cuivre peut contribuer à augmenter l’apport quotidien en cuivre jusqu’à 2 mg de plus par jour (OMS, 2004).

Quant à l’eau potable, elle contribue habituellement entre 23 et > 100 % de l’apport quotidien adéquat en cuivre (0,9 mg/jour) lorsque les concentrations dans l’eau varient entre 0,1 et 1,0 mg/l (ATSDR, 2004; Deveau, 2010). La consommation d’eau stagnante ou partiellement purgée à partir de systèmes d’alimentation en eau potable, dont la tuyauterie et ses raccords sont en cuivre, peut accroître considérablement l’exposition quotidienne au cuivre (OMS, 2004). L’air contribue également, mais faiblement, à l’exposition au cuivre, soit moins de 0,004 mg/jour chez la population en générale (Santé Canada, 1992).

Voies d'absorption

La principale voie d’absorption du cuivre chez l’humain est l’ingestion d’eau et d’aliments (ATSDR, 2004). Le contact cutané et l’inhalation sont des voies négligeables d’exposition au cuivre (ATSDR, 2004).

Pharmacocinétique et métabolisme

Le métabolisme et la cinétique du cuivre sont contrôlés par homéostasie (IOM, 2001). À la suite d’une exposition par voie orale, le cuivre est rapidement absorbé par l’estomac et l’intestin grêle sous forme de complexes cuivre-métallothionéine (ATSDR, 2004; Cal EPA, 2008). L’absorption et la distribution du cuivre sont influencées par le sexe, l’âge, la teneur et la nature du cuivre alimentaire, ainsi que par la charge corporelle (Santé Canada, 1992; Cal EPA, 2008). Le cuivre absorbé est transporté au foie puis, par la suite, est soit acheminé vers la circulation sanguine sous forme de complexe avec la céruloplasmine ou, dans une moindre mesure, l’albumine, ou encore est excrété par la bile (Cal EPA, 2008). Le cuivre sanguin est distribué vers divers organes, dont les reins et le cerveau, mais n’a pas tendance à s’accumuler dans l’organisme (Cal EPA, 2008). Les fèces (via la bile) constituent la voie majeure d’excrétion du cuivre (ATSDR, 2004). Les autres voies mineures d’excrétion du cuivre sont l’urine, la sueur, les cheveux et les menstruations (Cal EPA, 2008).

Données toxicologiques et épidémiologiques

Le cuivre est à la fois un élément essentiel au métabolisme humain et une substance toxique à des concentrations élevées (ATSDR, 2004). Bien que des déficiences en cuivre aient été associées à des problèmes cardiaques, osseux, immunitaires et du système nerveux central (NRC, 2000), la présente section portera sur les effets néfastes d’un excès en cuivre.

Effets bénéfiques à la santé et apports recommandés

Le cuivre est un élément essentiel à la vie et une carence en cuivre peut mener à divers problèmes de santé, dont l’anémie (NRC, 2000). L’apport nutritionnel adéquat en cuivre est estimé à 0,20-0,22 mg/jour pour les nourrissons de 0 à 12 mois et à 0,9 mg/jour pour les adultes (IOM, 2001). La limite supérieure de l’apport quotidien tolérable pour le cuivre est fixée entre 1 mg/jour pour les jeunes enfants (de 1 à 3 ans) et 10 mg/jour pour les adultes (IOM, 2001). L’Institute of medecine n’a pas déterminé de limite d’apport quotidien pour les nourrissons, compte tenu des données insuffisantes sur les effets sanitaires du cuivre pour cette tranche d’âge et des préoccupations sur leur capacité à supporter un apport excessif en cuivre (IOM, 2001). Pour ce groupe d’âge, l’Institute of medecine recommande que les seules sources d’apport en cuivre soient la nourriture et les préparations commerciales pour nourrissons (IOM, 2001).

Intoxication aiguë

L’exposition à des concentrations élevées de cuivre dans l’eau potable peut mener à divers effets néfastes sur la santé d’ordre irritatif ou systémique. L’intoxication au cuivre affecte principalement le système gastro-intestinal (ATSDR, 2004). Les effets aigus fréquemment rencontrés, notamment les nausées, les maux de tête, les étourdissements, les vomissements et, dans une moindre mesure, les douleurs abdominales et la diarrhée surviennent peu de temps (moins de 15 minutes) après l’ingestion d’eau contenant des teneurs en cuivre entre 4 et 6 mg/l (ATSDR, 2004; Araya et al., 2001; Olivares et al., 2001; Wylie, 1957). En revanche, aucun effet gastro-intestinal n’a été associé à une consommation d’eau contenant 2 mg/l de cuivre, même chez des nourrissons de moins de 12 mois consommant aussi des préparations commerciales pour nourrissons supplémentées en cuivre (Olivares et al., 1998; OMS, 2004).

D’autres effets sur la santé ont déjà été rapportés suite à l’ingestion de cuivre sous diverses formes et à diverses concentrations, dont de la tachycardie, des difficultés respiratoires, de l’anémie, des saignements gastro-intestinaux importants et de l’insuffisance hépatique ou rénale (Cal EPA, 2008). Des cas de mortalité ont aussi été rapportés à la suite de l’ingestion volontaire de 250 ml d’une eau contenant 100 g/l de sulfate de cuivre (Cal EPA, 2008).

Effets sur la reproduction et le développement

Le cuivre est connu pour ses propriétés anti embryogéniques, notamment utilisées dans les dispositifs intra-utérins pour empêcher l’implantation et le développement des blastocystes (NRC, 2000). Le cuivre ne semble pas tératogène chez l’homme (NRC, 2000). L’exposition postnatale au cuivre par l’eau potable (> 1 mg/l) n’a pas été associée à des effets néfastes sur le développement des nourrissons (Olivares et al., 1998).

Chez les animaux, certaines études suggèrent que le cuivre ingéré peut être tératogène à des concentrations supérieures à 588 mg/l (ou 82 mg/kg-j), causant aussi de l’inanition ou de la toxicité hépatique et rénale chez les mères (Cal EPA, 2008; NRC, 2000; OMS, 2004).

Potentiel cancérigène

Les données épidémiologiques et animales ne permettent pas de conclure sur la cancérogénicité du cuivre. L’U.S. EPA classe le cuivre dans le groupe D : non catégorisable quant à sa cancérogénicité chez l’humain (U.S.EPA, 1985b; U.S.EPA, 1985b). Le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC) n’a pas évalué la cancérogénicité du cuivre, ni des composés du cuivre.

Autres effets

L’organe cible de la toxicité chronique du cuivre ingéré (par l’eau ou par le biais de suppléments alimentaires) est le foie, malgré que cette toxicité est habituellement observée chez des individus plus vulnérables (hépatomégalie, cirrhose du foie; voir Groupes vulnérables) (NRC, 2000). Chez les individus en bonne santé, ces effets gastro-intestinaux d’une intoxication chronique ou sous-chronique au cuivre par l’eau potable ne sont pas observés qu’à des concentrations en deçà de 4 mg/l chez les adultes ou 2 mg/l chez les enfants (Cal EPA, 2008; OMS, 2004; Pizarro et al., 1999b; Pizarro et al., 1999a; Pizarro et al., 2001; Olivares et al., 1998).

Chez les animaux, des effets hépatiques et, dans une moindre mesure, des effets rénaux sont les plus régulièrement observés à la suite d’une exposition orale à des concentrations élevées de cuivre (dose sans effet nocif observé [DSENO] variant entre 16 et 1060 mg de cuivre/kg/j) (NRC, 2000). Ainsi, les données de toxicité chronique indiquent que les animaux sont peu sensibles au cuivre comparativement à l’humain.

Groupes vulnérables

Les enfants sont plus sensibles que les adultes à un apport tant faible qu’élevé en cuivre alimentaire (IOM, 2001). Quant aux nourrissons, ils sont particulièrement vulnérables à un excès d’apport en cuivre lié à l’exposition conjointe par l’eau potable et les préparations commerciales pour nourrissons (NRC, 2000; IOM, 2001).

Les individus atteints de la maladie de Wilson1 ou les hétérozygotes porteurs du gène de cette maladie et les enfants prédisposés génétiquement aux cirrhoses dues au cuivre, tel que la cirrhose infantile indienne2, la cirrhose infantile tyrolienne3 et l’intoxication idiopathique du cuivre4, peuvent présenter des effets hépatiques à la suite de l’ingestion de cuivre à des concentrations aussi faibles que 0,1 mg/l (NRC, 2000). Ces individus doivent généralement limiter leur apport en cuivre total, incluant une réduction de l’apport provenant de l’eau potable par la vidange de la robinetterie ou de la tuyauterie ou encore par l’installation d’un système de traitement (NRC, 2000; Roberts et Schilsky, 2008). La prévalence de la maladie de Wilson, dans la population générale (estimation mondiale), est d’environ 1/40 000, mais puisque cette prévalence est basée sur des données d’autopsie, la prévalence actuelle de la maladie pourrait être plus élevée par un facteur égal ou supérieur à 4 (NRC, 2000). La prévalence des hétérozygotes porteurs du gène de la maladie de Wilson pourrait, quant à elle, toucher jusqu’à 2 % de la population américaine (NRC, 2000).

Interactions avec d'autres substances

Les teneurs en zinc et en fer peuvent influencer l’absorption du cuivre puisqu’ils entrent en compétition pour la liaison avec la métallothionéine (Cal EPA, 2008; NRC, 2000). Une diète riche en zinc mène à une diminution de l’absorption du cuivre; ce traitement est d’ailleurs utilisé pour traiter la maladie de Wilson (ATSDR, 2004; Roberts et Schilsky, 2008). Certains autres éléments et minéraux peuvent aussi affecter, dans une moindre mesure, l’absorption et le métabolisme du cuivre, notamment le fer, l’étain, le calcium, le cadmium, le phosphore et le molybdène (NRC, 2000).

Dosage biologique et signes cliniques

Dosage biologique

Les concentrations sériques en cuivre sont un bon indicateur pour une déficience en cuivre, mais ne peuvent refléter une exposition excessive en cuivre puisque le cuivre sérique peut augmenter sous certaines conditions métaboliques et qu’il est contrôlé par homéostasie (IOM, 2001). Par contre, les concentrations sanguines de cuivre total semblent mieux refléter une exposition très récente à des doses élevées en cuivre (1 – 30 g) (ATSDR, 2004). Les niveaux de cuivre dans les cheveux et les ongles peuvent être des indicateurs biologiques de l’exposition sur une période plus longue. Ainsi, les deux premiers centimètres de cheveux près de la tête peuvent représenter l’apport en cuivre des deux derniers mois, tandis que les ongles d’orteils peuvent représenter l’apport des 12 à 18 derniers mois (ATSDR, 2004).

Signes cliniques

Les signes cliniques les plus notables d’une intoxication au cuivre par l’eau potable ou un autre breuvage sont des problèmes gastro-intestinaux. Les symptômes les plus fréquents sont les nausées, les maux de tête, les étourdissements, les vomissements et dans une moindre mesure, les douleurs abdominales et la diarrhée, qui surviennent peu de temps (moins de 15 minutes) après l’ingestion du breuvage contaminé (ATSDR, 2004; Araya et al., 2001; Olivares et al., 2001; Wylie, 1957)

Méthode analytique, limite de détection et seuil de quantification

Le Centre d’expertise en analyse environnementale du Québec (CEAEQ) utilise la méthode par spectrométrie de masse couplée à une source d’émission au plasma d’argon (ICP-MS) pour déterminer la concentration de cuivre dans l’eau (CEAEQ, 2011). La limite de détection de cette méthode est de 0,02 μg/l, tandis que le seuil pratique de quantification est de 0,06 μg/l (CEAEQ, 2011).

Mesures de contrôle disponibles

Mesures communautaires

La présence de cuivre dans l’eau potable résulte principalement d’un phénomène de corrosion dans la tuyauterie à base d’alliage de cuivre (OMS, 2004). La détermination de la présence conjointe de plomb dans l’eau permettra de cibler les mesures à mettre en place pour corriger la situation (Santé Canada, 2009). Une problématique de cuivre pourrait tout de même être présente sans présence de plomb si canalisation en cuivre ou cuivre dans robinetterie. La première méthode pouvant être utilisée pour réduire les teneurs en cuivre dans l’eau potable est le contrôle de la corrosion par l’ajustement de l’alcalinité et du pH de l’eau (Santé Canada, 1992; U.S.EPA, 1991; Santé Canada, 2009). Toutefois, l’ajustement de pH devra se faire de façon à maintenir l’efficacité de la désinfection par le chlore, tout en limitant, dans la mesure du possible, la formation de sous-produits liés à l’utilisation du chlore en présence de matières organiques (Churchill et al., 2000). La corrosion peut aussi être contrôlée par l’ajustement de la l’alcalinité ou l’addition d’inhibiteur de corrosion à base de silicate ou de phosphate (U.S.EPA, 1991; Santé Canada, 2009).

Lorsque la présence de cuivre est constatée dans la source d’eau servant à la production d’eau potable, des traitements peuvent être utilisés pour abaisser les niveaux de cuivre dans l’eau, tels que, la coagulation avec des sels d’aluminium ou ferriques, l’adoucissement à la chaux ou l’osmose inversée (Santé Canada, 2009).

Mesures individuelles

Lorsque le cuivre provient de la robinetterie ou de la tuyauterie de la maison, il est suggéré de laisser couler l’eau du robinet jusqu’à ce qu’elle devienne froide afin de permettre une vidange complète de la tuyauterie et ainsi réduire l’exposition au cuivre. La vidange de la tuyauterie peut prendre de quelques secondes à quelques minutes et devrait surtout être effectuée le matin ou lorsque l’eau a séjourné pendant une longue période dans la tuyauterie. L’eau chaude ayant tendance à dissoudre le cuivre plus rapidement, l’eau froide devrait toujours être utilisée pour la préparation de la nourriture et des breuvages (CDC, 2011).

Les appareils à osmose inversée, à distillation ou certains appareils de filtration au charbon actif sont réputés être efficaces pour enlever le cuivre de l’eau potable (Santé Canada, 1992; Santé Canada, 2009). L’installation de ces appareils au point d’utilisation de l’eau (robinet) permettra de réduire les risques à la santé liés au cuivre ainsi que le goût du cuivre dans l’eau potable (Santé Canada, 2009). Santé Canada recommande, aux consommateurs qui désirent se procurer de tels appareils, l’achat de dispositifs de traitement de l’eau certifiés conformes pour l’enlèvement du cuivre à une des normes de rendement en matière de santé NSF/ANSI (Santé Canada, 2008; Santé Canada, 2009). De plus, il est obligatoire au Québec, en vertu du Chapitre III – Plomberie du Code de construction, qu’un tel dispositif de traitement de l’eau installé dans un bâtiment soit certifié (Gouvernement du Québec, 2008). Ces dispositifs doivent être entretenus de façon adéquate, sinon leur efficacité est considérablement réduite.

Normes et recommandations

Norme québécoise

La concentration maximale de cuivre permise en vertu du Règlement sur la qualité de l’eau potable est de 1,0 mg/l après 5 minutes d’écoulement (annexe 1 du règlement) (Gouvernement du Québec, 2012). La norme de cuivre dans l’eau potable est basée sur l’évaluation du groupe scientifique sur l’eau potable de l’INSPQ (GSE, 2007). Pour les réseaux qui alimentent plus de 20 personnes, le règlement prévoit le prélèvement annuel d’au moins 1 échantillon des eaux distribuées, entre le 1er juillet et le 1er octobre ou, si le système de distribution n'est pas en service du 1er juillet au 1er octobre, à toute autre période où il est en service (art. 14) (Gouvernement du Québec, 2005). À compter du 8 mars 2013, le nombre de prélèvements annuels prévus augmentera à entre 2 et 50 échantillons des eaux distribuées, selon la taille du réseau (art. 14.1) (Gouvernement du Québec, 2012). Puisque le cuivre est fortement associé au phénomène de corrosion, les échantillons doivent être prélevés au robinet d'une résidence unifamiliale ou d'un bâtiment résidentiel de moins de 8 logements, dont la tuyauterie ou l'entrée d'eau est fabriquée en plomb ou susceptible de l'être (annexe 4, section III). De plus, les échantillons prélevés doivent l'être à des adresses civiques différentes d'une année à l'autre si leur nombre le permet.

Objectif santé du groupe scientifique sur l’eau de l’INSPQ

Le groupe scientifique sur l’eau potable de l’INSPQ recommande un objectif de santé publique de 1,0 mg/l de cuivre dans l’eau potable (GSE, 2007). Cette recommandation découle de la prise en compte de diverses études (Araya et al., 2001; Araya et al., 2003; Olivares et al., 2001; Olivares et al., 1998; Pizarro et al., 1999b; Pizarro et al., 2001; Zietz et al., 2003) où le niveau sans effet des symptômes gastro-intestinaux, notamment les nausées, se situe entre 2 et 4 mg/l. À la valeur de 2 mg/l, l’INSPQ a appliqué un facteur d’incertitude de 2 afin de prendre en considération la toxicité chronique chez les sous-groupes vulnérables tels que les enfants atteints de la maladie de Wilson et ceux prédisposés génétiquement aux syndromes de cirrhose dus au cuivre, qui pourraient être plus nombreux que ceux diagnostiqués.

Recommandation canadienne

Santé Canada (1992) a établi un objectif de qualité esthétique pour le cuivre présent dans l’eau potable à 1 mg/l. Selon l’organisme, cet objectif est généralement inférieur au seuil gustatif pour le cuivre dans l’eau et réduit au minimum l’apparition de taches sur la lessive ou les accessoires de plomberie, tout en assurant la protection de la santé et en contribuant à combler les besoins nutritionnels minimaux (Santé Canada, 1992).

Critère de l’OMS

L’Organisation mondiale de la santé a établi une valeur guide de 2 mg/l pour le cuivre présent dans l’eau potable (OMS, 2004). Cette valeur a été déterminée à partir de plusieurs études épidémiologiques où la présence de cuivre dans l’eau potable a mené ou non à des symptômes gastro-intestinaux (Araya et al., 2001; Araya et al., 2003; Olivares et al., 2001; Olivares et al., 1998; Pizarro et al., 1999b; Pizarro et al., 2001; Zietz et al., 2003). Cette valeur permet également une consommation quotidienne de 2 à 3 litres d’eau, la consommation de suppléments nutritifs et d’aliments contenant du cuivre sans excéder l’apport quotidien tolérable de 10 mg/j (IOM, 2001) ou présenter des effets gastro-intestinaux aigus (OMS, 2004). L’OMS n’a pas jugé nécessaire d’appliquer un facteur de sécurité sur cette valeur.

Norme américaine

Bien qu’aucune norme (maximum contaminant level; MCL) n’ait été fixée par l'United States Environmental Protection Agency (U.S. EPA) pour le cuivre dans l’eau potable, l’organisme a établi un objectif à atteindre (maximum contaminant level goal; MCLG) de 1,3 mg/l et un niveau d’action (action level) à 1,3 mg/l pour l’eau de premier jet, après 6 heures de stagnation (U.S.EPA, 1991).

Cette valeur de 1,3 mg/l est dérivée à partir d’une étude où des femmes (10/15) ont présenté des nausées, des vomissements et de la diarrhée moins d’une heure à la suite de l’ingestion d’une boisson préparée dans un contenant à base de cuivre (Wylie, 1957). Trois de ces femmes auraient ingéré 5,3 mg de cuivre. L’U.S. EPA considère la valeur de 5,3 mg comme étant la dose minimale avec effets nocifs observés (LOAEL, lowest observed adverse effect level), soit la plus faible dose provoquant un effet à la santé. À cette valeur, un facteur d’incertitude de 2 a été appliqué, ainsi qu’une consommation journalière de 2 litres d’eau potable par jour, menant à une concentration sécuritaire de 1,3 mg/l (U.S.EPA, 1985a). L’organisme a utilisé un facteur d’incertitude de 2 pour les raisons suivantes : effet gastro intestinal local et non permanent, LOAEL jugé conservateur, caractère essentiel et contrôle par homéostasie du cuivre et peu de tendances à l’accumulation dans le corps.

Public health goal de l’État de la Californie

L’agence de protection de l’environnement de la Californie propose un objectif de santé publique (Public health goal; PHG) pour le cuivre présent dans l’eau potable de 0,3 mg/l (Cal EPA, 2008). Cette valeur est basée sur l’absence d’effets gastro-intestinaux chez les nourrissons de 3 à 12 mois consommant une eau contenant 2 mg/l de cuivre (Olivares et al., 1998). Une dose minimale sans effet nocif observé (NOAEL, no observed adverse effect level) de 0,426 mg/kg-j a été calculée pour les nourrissons de 4 à 6 mois. Le PHG a été dérivé à partir de ce NOAEL, et ajusté pour une consommation d’eau de 0,221 l/kg-j (95e percentile supérieur pour les nourrissons de cet âge; U.S. EPA, 2004), d’une contribution de l’eau de 50 % (considérant l’apport quotidien en cuivre des nourrissons via le lait maternel ou les préparations pour nourrissons, dont 50 % de l’apport en cuivre proviendrait des préparations en poudre; soit 0,4 -0,8 mg cuivre/l) et d’un facteur d’incertitude de 3 (incertitude reliée aux faiblesses des données de l’étude critique, dont l’inférence de la dose la plus élevée à la NOAEL). Cependant, le niveau légal d’action californien (action level) est identique au niveau d’action américain, soit 1,3 mg/l (Cal EPA, 2008).

Tableau 1 - Résumé des normes et recommandations

Norme québécoise* Recommandation canadienne Norme américaine Critère de l’OMS Objectif santé INSPQ
2012 1992 1991 204 2007
1,0a mg/l ≤ 1,0b mg/l 1,3c mg/l 2a mg/l 1,0a mg/l

a Effet santé. b Objectif de qualité esthétique. c Effet santé pour l’eau de premier jet, après six heures de stagnation; niveau d’action.

  1. La maladie de Wilson est une maladie métabolique héréditaire rare à transmission autosomique récessive, caractérisée par une accumulation excessive de cuivre dans divers organes (NRC, 2000).
  2. La cirrhose infantile indienne est typiquement rencontrée chez les enfants âgés entre 6 mois et 5 ans habitant dans les milieux ruraux du sous-continent indien et nourris au lait conservé dans des contenants à base de cuivre ou de laiton (NRC, 2000).
  3. La cirrhose infantile tyrolienne est rencontrée chez les enfants résidants dans la région du Tyrol et nourris avec du lait pasteurisé dans des contenants à base de cuivre. (NRC, 2000).
  4. L’intoxication idiopathique du cuivre affecte généralement de très jeunes enfants (ATSDR, 2004; NRC, 2000).

Références

  1. Araya, M., Chen, B., Klevay, L. M., Strain, J. J., Johnson, L., Robson, P., Shi, W., Nielsen, F., Zhu, H., Olivares, M., Pizarro, F., Haber, L. T. (2003) Confirmation of an acute no-observed-adverse-effect and low-observed-adverse-effect level for copper in bottled drinking water in a multi-site international study, Regul. Toxicol. Pharmacol., Vol. 38, No. 3, pp. 389-399.
  2. Araya, M., McGoldrick, M. C., Klevay, L. M., Strain, J. J., Robson, P., Nielsen, F., Olivares, M., Pizarro, F., Johnson, L. A., Poirier, K. A. (2001) Determination of an acute no-observed-adverse-effect level (NOAEL) for copper in water, Regul. Toxicol. Pharmacol., Vol. 34, No. 2, pp. 137-145.
  3. ATSDR (2004) Toxicological profile for copper, Agency for Toxic Substances and Disease Registry, U.S. Department of Health and Human Services, Public Health Service, Atlanta, GA, 1-265. Accessible au : www.atsdr.cdc.gov/toxprofiles/tp.asp?id=206&tid=37. Consulté le 11 juin 2015. 
  4. Bolduc, A. (2012) Concentration en cuivre dans l'eau potable au Québec - avril 2007 à mai 2012., Ministère du Développement durable, de l'Environnement et des Parcs. Québec. Communication personnelle. 29 mai 2012..
  5. Cal EPA (2008) Public health goal for copper in drinking water, California Environmental Protection Agency, Office of Environmental Health Hazard Assessment; Pesticide and Environmental Toxicology branch, Oakland, California, 1, 70. Accessible au : oehha.ca.gov/water/phg/pdf/CopperPHG020808.pdf. Consulté le 11 juin 2015.
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Fiche rédigée par Céline Campagna, avec la collaboration de Louise Normandin, Denis Gauvin, Patrick Levallois et les membres du Groupe scientifique sur l’eau de l'Institut national de santé publique du Québec

Mise à jour : mars 2013