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Portrait

Patrick Julien, de l'histoire à la santé

Cet historien devenu directeur d'hôpital vient de prendre les rênes de la puissante association médico-sociale Lozérienne du Clos du Nid.

Patrick Julien.
Patrick Julien. (DR)

Par Hubert Vialatte

Publié le 22 mars 2019 à 07:25Mis à jour le 22 mars 2019 à 12:07

Le profil est peu commun : Patrick Julien n'a rejoint l'Ecole nationale de santé publique qu'en 2006. Auparavant, le nouveau directeur général de la puissante association médico-sociale du Clos du Nid, en Lozère, a d'abord… enseigné l'histoire pendant douze ans. Agrégé, spécialiste de l'histoire religieuse du XVIIe siècle, ce Lozérien regrettait seulement de ne pas « diriger, construire, organiser ». « L'action publique m'a toujours intéressé », confie-t-il.

Sa carrière de directeur d'hôpital, embrassée à la quarantaine, s'est avérée « très riche. C'est un métier où l'on jongle entre finances, ressources humaines, technique, construction, sciences… ». Son parcours est lié à un monde rural en souffrance. En 2007, Patrick Julien débute comme directeur des affaires financières et des systèmes d'information de l'hôpital d'Aurillac, au coeur du Cantal. Avec, déjà, « une grande difficulté à recruter des médecins » loin des villes. En 2015, la France abritait 34.465 médecins de moins de 40 ans pour remplacer 52.444 médecins de plus de 60 ans à l'aube de leur retraite, d'après le conseil national de l'Ordre des médecins.

Patrick Julien grimpe, passant directeur des affaires médicales du CHU de Nîmes, qui compte alors 4.500 salariés, dont 1.000 médecins. « J'étais un peu le DRH des médecins, sourit-il. J'ai travaillé avec les chefs de service et de pôle pour créer des activités nouvelles, et les porter en interne face au contrôle de gestion en démontrant la création de valeur. » Exemple ? Ce centre hospitalier d'Arles, qui s'est retrouvé du jour au lendemain sans radiologue. Patrick Julien a échafaudé une solution de téléradiologie, entre les établissements de Nîmes et Arles : « Je débarquais d'Aurillac, c'était le bizutage intégral ! Cette initiative a sauvé l'hôpital d'Arles », dit-il.

Ce père de deux enfants, passionné de musique classique et de jazz, convaincu que « la culture, les voyages et les lectures nourrissent », rentre en Occitanie fin 2014, pour diriger le nouvel hôpital Lozère, issu de la fusion de la clinique de Marvejols et de l'hôpital de Mende. Premier poste de direction générale. Premier baptême du feu. A la tête de 900 personnes pour une soixantaine de médecins. « C'était un job très dur, avec une équipe de direction trop restreinte, des difficultés financières lourdes et, comme à Aurillac, cette problématique de faire venir des médecins », glisse-t-il. Et d'enchaîner : « La tarification à l'activité est une pure folie pour les hôpitaux périphériques. Ils devraient être exclus de ce système. »

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La littérature, jamais très loin

La littérature, jamais très loin, sert son action au quotidien. « Les autobiographies et les classiques aident à parfaire la connaissance des caractères. Lire Balzac donne de l'avance ! » s'exclame-t-il.

Jugeant que l'hôpital public « vit une dérive », Patrick Julien répond favorablement à la proposition de Jacques Blanc, ex-président de l'ancien Languedoc-Roussillon et président du Clos du Nid. Et se retrouve, à 52 ans, à la tête d'une véritable institution. Créée en 1955, l'association prend en charge plus de 1.000 personnes en situation de handicap à travers 21 établissements (maisons d'accueil spécialisées, travail dans les Esat, foyers de vie…). Dotée d'un budget annuel de 59 millions d'euros, abondé principalement par l'Etat et le département de la Lozère, elle emploie 950 salariés.

Si, d'après lui, le regard porté sur le handicap s'est amélioré, la vigilance reste de mise.« Le monde d'aujourd'hui est très dur. Sans avoir l'air d'y toucher, la société glisse vers des tendances uniformisatrices, voire eugéniques », estime celui qui tient à nuancer le virage inclusif, impulsé depuis cinq ans par les pouvoirs publics, et consistant à vouloir intégrer, sur fond de coupes budgétaires, le plus possible les personnes handicapées dans la vie ordinaire. A ses yeux, « le balancier va trop loin. Selon la lourdeur du handicap, l'inclusion ne doit pas être traitée de la même façon ».

Cet amoureux de la Renaissance italienne, qui s'offre une fois par an un voyage à Florence, n'aime guère rester les bras croisés. Et n'hésite pas à interpeller la secrétaire d'Etat chargée des personnes handicapées, Sophie Cluzel : « Il manque 6.000 places pour l'autisme en France, dit-il. Et il y a des listes d'attente pour toutes les pathologies. » Un message qu'il martèle au cours de ses nombreux déplacements. A Marvejols, sa ville natale, le Clos du Nid vient d'être référencé auprès du CHU de Montpellier pour la prise en charge de l'autisme, et lance, ce printemps, la construction d'un nouvel institut médico-éducatif local destiné aux moins de 20 ans, pour un investissement de 5 millions d'euros.

Hubert Vialatte  (Correspondant à Montpellier)

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